Les Flèches d'or - Ligaran - E-Book

Les Flèches d'or E-Book

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Extrait: À Théophile Gautier - Malgré les vieux clichés des rêveurs poitrinaires, Qui crachent leurs poumons au fond des grands journaux, Et content aux bourgeois, leurs lecteurs ordinaires, Que la Muse n'est plus, et que vents et tonnerres, Ont fait un peu de cendre avec ses nobles os, Pleins de joie et d'orgueil, nous marchons, et la plaine, Ondule sous le vent de nos belles chansons; Le rossignol écoute et retient son haleine..."

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Seitenzahl: 98

Veröffentlichungsjahr: 2015

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EAN : 9782335076905

©Ligaran 2015

À mon cher et illustre maître

LECONTE DE L’ISLE

CE LIVRE EST DÉDIÉ.

À. G.

À Théophile Gautier
Malgré les vieux clichés des rêveurs poitrinaires
Qui crachent leurs poumons au fond des grands journaux
Et content aux bourgeois, leurs lecteurs ordinaires,
Que la Muse n’est plus, et que vents et tonnerres
Ont fait un peu de cendre avec ses nobles os,
Pleins de joie et d’orgueil, nous marchons, et la plaine
Ondule sous le vent de nos belles chansons ;
Le rossignol écoute et retient son haleine,
Ô mon maître ! et toujours le fantôme d’Hélène,
Radieux, nous conduit vers de clairs horizons.
Les fleurs que nous cueillons ne sont pas éphémères ;
Comme les aloès elles durent cent ans,
Et nous trouvons du miel dans les coupes amères,
Car nous savons donner un corps à nos Chimères
Et sculpter nos héros dans les blocs résistants.
Nous passons, méprisant les niaises atteintes
Des envieux braquant sur nous leurs gros yeux ronds.
Nos pas, dans les rochers, ont creusé leurs empreintes,
C’est bien du sang des dieux que nos veines sont teintes
Et le laurier sacre fait un nimbe à nos fronts.
Ses cheveux ruisselant sur son épaule fière,
La Muse auguste est là, folle d’amour, ouvrant
Ses bras nus arrosés de vie et de lumière,
Avec l’air martial d’une jeune guerrière
Aspirant les accords du clairon enivrant.
Le soleil amoureux éclaire sa poitrine
Blanche sous les ardeurs des rayons embrasés,
Pendant qu’une lueur charmante et purpurine
Caresse tendrement l’aile de sa narine
Et sa lèvre hautaine aux terribles baisers.
Nous seuls avons le droit de toucher sa ceinture
Et les voiles flottants sur son beau corps épars ;
Les autres, écrasés par sa haute stature,
Tremblent, sachant qu’elle est pour eux cruelle et dure,
Et qu’elle peut lutter avec les léopards !
Comme elle est jeune et forte, elle veut, quand on l’aime,
La force et la jeunesse au cœur de ses amants,
Et crache son mépris à la figure blême
De celui qui n’a pas, jusqu’au fond du ciel même,
Volé d’abord le feu sur les autels fumants.
Par les âpres déserts que la flamme calcine,
Par les noies forêts où les fauves ont peur,
Où dort dans les poisons la vipère assassine,
Par les pôles perdus où la glace dessine
Ses aiguilles sans fin sur un fond de vapeur,
Elle veut que l’on aille au-devant des épreuves,
Et baise sur le front le vainqueur obstiné
Qui, cherchant à frayer, au loin, des routes neuves,
S’est livré, confiant, au hasard des grands fleuves
Et revient glorieux d’un monde nouveau-né !
Comme vous, autrefois, vers les rives lointaines,
Ô maître ! nous partons, jaloux d’entendre aussi
La foudre se mêler aux chansons des fontaines,
Et de fouler avec nos semelles hautaines
Les flots de l’Océan sous nos pas adouci.
Nous sommes bien vos fils, ô lutteurs athlétiques,
Qui couriez sans faillir aux combats renaissants,
Amants libres et forts des vierges romantiques,
Qui saviez émouvoir les roches granitiques
Par l’accord mâle et fier de vos nobles accents !
CELUI que les lions ont nourri de leurs moelles
Se rappelle pour nous le chant d’Éviradnus ;
Véronique apparaît, blanche dans ses grandes voiles,
Atta-Troll lourdement danse sous les étoiles,
Et la mer apaisée enfante encore Vénus !
Et lorsque nous aurons fait nos moissons complètes,
Poètes de vingt ans, frères qui sommes nés
Dans un temps glorieux pour la Muse, et de fêtes,
Nous nous inclinerons devant les grands poètes
Qui marchent devant nous, et qui sont nos aînés,
Nous souvenant toujours d’avoir bien en mémoire
Que l’admiration est le fait des grands cœurs,
Et que nous sommes vus par le Maître de gloire
Qui, du fond de l’exil, domine notre histoire
Et protège nos fronts, de son laurier vainqueur !
Nocturne

À ÉMILE DESCHAMPS

Vous reviendrez, belles ombres galantes,
Dans ces bosquets par vous charmés encor ;
Laissant traîner vos robes opulentes,
Vous reviendrez dans ce rare décor.
Elle courra la folle mascarade
Des grands seigneurs tout enfiévrés d’amour,
Et nous aurons des vers de Benserade
Pour vos beaux yeux qui sont couleur de jour.
Vos grâces, là ; se trouveront chez elles.
Les verts gazons vous seront un tapis,
Et vous ferez encor battre des ailes
Aux Cupidons sur les sphinx accroupis.
Les éventails dans vos mains tant baisées,
Rafraîchiront l’air enflammé du soir,
Et les Sylvains dans les branches croisées
Se glisseront afin de vous mieux voir.
Vous reviendrez, ô nobles Dorimènes !
Et les marquis, en vous pressant la main,
Vous nommeront tendrement inhumaines,
Vous leur direz en riant : « À demain ! »
Loin des bassins où le cygne se mire,
Dans les recoins du bois abandonnés,
Les preux, jaloux des faveurs des Thémire,
Se couperont la gorge en gens bien nés.
Vous reviendrez par un beau clair de lune,
Quand auront fui du parc majestueux,
Humiliés par leur troupe importune,
Tous ces bourgeois fous et tumultueux ;
À l’heure auguste où le rossignol chante,
Où passe Hécate en un char de vapeur,
Où, s’appuyant sur son urne penchante,
La Nymphe songe au beau Faune trompeur ;
À l’heure où court la chasse fantastique
D’Hérodiade au fond du noir ravin,
Quand Faust éveille, avec le monde antique,
La grande Hélène au visage divin.
Et les amants de la douce féerie,
Qui vous suivront aux taillis toujours frais,
Dans leur chanson mollement attendrie
Raconteront ce Walpurgis français.

(Versailles.)

Roman comique
I
Ô comédienne ! Molière,
Le grand vagabond du bel art,
Eût fait de vous son écolière
Sur les chemins pleins de hasard.
Il vous eût donné le sourire,
Le charme et la grâce des pleurs,
L’âme tendre qui se déchire
Par l’amour et par les douleurs.
Il vous eût donne cette fièvre
Qui suit les courageux travaux.
Ne voit-on pas, sur votre lèvre,
Causer Shakspeare et Marivaux ?
Mais à quoi bon ces dons ? Les fées,
Dès votre berceau triomphant,
D’avoine folle et d’or coiffées,
Vous avaient prise pour enfant.
Et, quand vous souleviez vos langes,
En agitant vos petits bras,
Vous entendiez déjà les anges
De l’amour vous parler tout bas !
II
Aujourd’hui les comédiennes
N’égarent plus leurs fins souliers
Au travers des routes anciennes
Où croissent les lys oubliés.
Leur génie est dans la tenture
Que le tapissier déploya ;
Il leur faut la littérature
Honnête de monsieur Laya.
Il leur faut ces calmes prodiges
Implantés par un art nouveau,
La passion et ses vertiges
Changés en rhume de cerveau.
III
Mais vous ! vous recherchez encore
Les tristesses et les sanglots,
Les cris dont la Lyre sonore
Épanche largement les flots.
Ô baladine enamourée !
Votre désir est que les vents
Soulèvent la masse adorée
De vos souples cheveux mouvants.
Les héroïques charmeresses
Qui dérobent avec douceur
Leurs seins sous la peau des tigresses,
Vous appellent leur jeune sœur.
Et, ravis au pays féerique
Que défendent les dieux jaloux,
Les fous, les poètes lyriques
Pleurent de joie à vos genoux.
Car la Muse en feu, de son aile,
Touche votre front, et vos doigts
Sur la grande Lyre éternelle
Retrouvent la chanson des bois,
La divine chanson chantée
Jadis dans le repos du soir,
Avant que ne fût inventée
La comédie en habit noir.
À Miss Mary
Le Destin a voulu que vous fussiez charmante,
Et vous Vêtes. Riez, miss Mary, regardez :
Vous charmez toute chose et tout vous complimente ;
Les cœurs courent à vous, par vos beaux yeux guidés.
Et vos cheveux sont d’or, l’air de mai les tourmente,
Votre frais rire éclate en grelots saccadés ;
On vous aime de tout, même d’être inclémente,
Et l’amour avec vous en vain pipe les dés.
Il semble qu’on pourrait, tant vous êtes petite,
Vous cacher sur son cœur, comme on fait d’un portrait
Qu’on regarde souvent, de peur qu’il ne vous quitte.
Voulez-vous qu’on vous cache ainsi ? Non, ce serait
Imprudent. Près du cœur garder ces yeux de flamme !
Puis, comment pourrait-on être à vos pieds, madame ?
Marivaudage
Pareille à la chasseresse
Du bois par ! l’ombre habité,
Vous vous dressez dans l’ivresse
De votre fière beauté.
Grande, blonde, étincelante,
Vous pourriez dicter des lois,
Et votre lèvre sanglante
A des rires clairs et froids.
Vous dérobez, ô Marie !
Sous le corsage bouffant,
L’innocente barbarie
De la chatte et de l’enfant.
Créature inconsciente,
Habile au mal, savez-vous
De quelle ardeur effrayante
Sont emplis vos yeux si doux ?
Ô charme, ô grâce perverse,
Qu’on aime et qui met en deuil !
Les pleurs qu’à vos pieds on verse
Vous sont des causes d’orgueil.
Vous trônez sur la misère
Dont le lamentable cri
Échappe au cœur qui s’ulcère,
Par le triste Amour meurtri.
Ô vaniteuse ! on vous aime,
Cependant, pour vos défauts,
Pour votre cruauté même,
Pour votre cœur tendre et faux,
Car cet appétit étrange
Pour les plaisirs non permis
Vous vient d’Ève qui se venge
Du péché qu’elle a commis !
À Ernest d’Hervilly
Pas de vers aujourd’hui, Muse ! puisque j’attends
Cette fille de Flandre aux regards éclatants,
Qui m’a promis, hier, de m’apporter sa joie.
Sa gorge fait craquer le corsage de soie,
Et le buste éblouit des yeux par sa rondeur,
Pendant que ses cheveux, massés avec lourdeur,
À son front bas et pur forment une couronne.
L’insolente santé de son corps l’environne
Comme un nimbe palpable, et, dans cet air léger,
Joyeuse et colossale, elle semble nager.
Et je ferais des vers ! quand cette créature,
Toute grâce enfantine en sa haute stature,
Va venir ! mais sa lèvre à l’arc délicieux,
Avec ses longs baisers, ne vaut-elle pas mieux
Que les méchants sonnets qu’un poète peut faire ?
Rimer une chanson d’amour, la belle affaire !
Quand mes doigts enfiévrés vont errer librement
Sur la sainte blancheur de ce buste charmant,
Et que, des flots épars du velours, fière et nue,
Elle va m’apparaître, ainsi que sous la nue
Les déesses de marbre au sourire éternel,
Et chanter, pour mes yeux, son poème charnel !
Oui pourtant, je ferai des vers ! eh ! que m’importe
Que la fille, après tout, frappe ou non à ma porte ?
Pour une de perdue, on en retrouve cent.
Mais le vers amoureux, informe, vagissant,
Qui demande sa rime et qui n’a pas encore
Su trouver son chemin dans le rythme sonore,
Le vers que l’on n’a pas dompté reviendra-t-il ?
Dites, saisirez-vous ce papillon subtil
Quand vous l’aurez laissé s’échapper dans la plaine ?
Que deviendra ce sylphe ailé fait d’une haleine
Qui, prenant dans les airs radieux son vol sûr,
Se sera brusquement dissipé dans l’azur ?
Tous nos amours s’en vont, et toutes nos chimères
Nous quittent, vain jouet des brises éphémères ?
L’amoureuse qui vient, demain repartira,
Mais le vers glorieux et calme restera
Témoin de nos amours passés. Ô Muse ! ô mère ?
Je sais qu’il est des gens trouvant ta coupe amère,
Qu’ont rebutés le fiel et l’absinthe du bord ;
Mais d’autres, raidissant leur cœur dans un effort
Sûr et victorieux, ont trouvé l’ambroisie
Qui parfume le fond de la coupe choisie.
Or, je suis de ceux-là. J’ai saisi, tout enfant,
La lyre que sa gloire immortelle défend
Des profanes regards, et qui devient de flammé
Pour qui la veut tenir sans que, soudain, son âme
Tressaille d’épouvante et d’angoisse ; et les dieux
Ont laissé leur splendeur visible pour mes yeux.
Donc, ô rythmes ! chantez et déroulez vos ondes,
Ô Muses ! dénouez vos chevelures blondes,
Et toi, crois, ô grand arbre éternellement vert,
Laurier victorieux ! et, dans le ciel ouvert,
Allonge tes rameaux démesurés et plane
Sur nos fronts lumineux dans l’éther diaphane !
Galanterie