Les Poèmes d'Humilis - Ligaran - E-Book

Les Poèmes d'Humilis E-Book

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Extrait : "INVOCATION - O mon Seigneur Jésus, enfance vénérable, Je vous aime et vous crains petit et misérable, Car vous êtes le fils de l'amour adorable. O mon Seigneur Jésus, adolescent fêté, Mon âme vous contemple avec humilité, Car vous êtes la Grâce en étant la Beauté."

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Seitenzahl: 102

Veröffentlichungsjahr: 2015

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EAN : 9782335049763

©Ligaran 2015

Allocution de M. Maurice Saint-Chamarand chez Madame la duchesse de Rohan à la première audition des poèmes d’Humilis

Le jeudi 25 juin 1908

Mesdames, Messieurs,

Au cours de l’année 1904, M. Léonce de Larmandie, seul possesseur, depuis plus de vingt ans, de poèmes manuscrits dont le véritable auteur (désignons-le par ses initiales : G.-N.), se refusait à reconnaître la paternité, – M. de Larmandie fit paraître, dans une brochure incomplète, adressée à quelques privilégiés, quelques-uns des plus beaux poèmes du dit G.-N., sous l’égide de la Société des Poètes Français, et dans l’espoir de faire sortir enfin ces poèmes de leur obscurité ! – Mais soit que l’opinion se montrât peu favorable aux vers de l’humble poète, soit que la Société des Poètes Français eût alors d’autres préoccupations, ces poèmes sans paternité et privés en quelque sorte d’état civil, eurent à subir le sort de ces enfants trouvés que l’on confine dans quelques hospices obscurs, comme des laissés pour compte de la société.

Deux années plus tard, je rencontrai M. de Larmandie, qui m’ayant lu quelques-uns des poèmes, puis, à ma demande, tous les poèmes de G.-N., me proposa de consacrer les pages de La Poétique, à la glorification et à la publication complète du chef-d’œuvre du poète sans nom, aujourd’hui Humilis.

Glorification ! chef-d’œuvre ! voilà de bien grands mots ; et, si le premier peut encore s’entendre en parlant d’un bienheureux de la poésie mystique, le second peut paraître excessif à ceux qui, pour calmer les susceptibilités de leurs contemporains, s’indignent d’admirations trop hâtives, et prétendent ne jamais s’en rapporter qu’aux jugements de la postérité.

Mais d’abord, où commence et où finit la postérité ? et la postérité est-elle, elle-même, si infaillible dans ses jugements ?

Vous avez l’exemple de Ronsard, immortalisé de son vivant ; jouet d’un trait de plume qui le fait tout à coup descendre des hauteurs du Parnasse ; ignoré de plusieurs générations successives, pour reparaître trois siècles plus tard, encore applaudi, et comme étonné de se retrouver parmi nous.

Si donc la postérité a ses faiblesses, vous nous pardonnerez aussi d’avoir les nôtres, et d’exalter aujourd’hui devant vous, selon notre optimisme et nos sympathies, l’œuvre d’un poète obscur dont la raison a fait naufrage dans les spiritualités sans bornes et les félicités immanentes, à la glorification desquelles il avait voué son humble chef-d’œuvre.

Son nom : nous ne retiendrons que celui qu’il s’était donné à lui-même, un jour où, pressé par M. de Larmandie de faire éditer son œuvre, il s’écriait : si jamais je publie mes vers, ils paraîtront sous le nom d’Humilis.

Son histoire : c’est celle d’un pèlerin au Moyen Âge, d’un vagabond au XXe siècle. Il erre en quelque sorte d’une cité à l’autre, et visite de préférence les cités mystiques. Il vit en pauvre, en humble, selon l’Écriture, et s’est choisi pour patron Benoît Labre, bien que je ne sache pas, qu’à l’exemple de son pieux ancêtre, il se soit jamais mortifié dans une pourriture désagréable. Heureux de cette vie contemplative qu’il a célébrée dans un de ses poèmes les plus extatiques, il passe comme « l’hirondelle des grands chemins » qui attend tout de la main de Dieu, et il mange plus souvent le pain des anges que le pain des hommes.

Son œuvre, comme son nom, comme son histoire, a aujourd’hui une légende. Il a composé ses poèmes, il y a plus d’un quart de siècle « pour les saints et les anges » s’écriait-il avec dévotion, et, toujours avec dévotion, il a voulu les détruire. Il en désavoue d’abord, avons-nous dit, la paternité. Comme il célèbre, dans un de ses poèmes, l’anonymat des cathédrales, peut-être veut-il imiter l’abnégation glorieuse de leurs divins édificateurs. Il envisage la renommée comme un obstacle à son salut. Le premier article de sa foi est l’humilité. Et voici qu’au poète qui refuse sa gloire, la gloire vient cependant ; elle ne vient pas à lui, mais à l’œuvre même de son humilité.

M. de Larmandie a raconté dans les pages de La Poétique à quels soins, à quels subterfuges il dut avoir recours pour garder une copie des précieux poèmes.

Entre temps, il était venu au poète des scrupules religieux. Pour ne point découvrir d’abord ses véritables sentiments, il mit, nouveau Virgile, sur le compte de son œuvre selon lui, imparfaite, l’obstination qu’il montrait à vouloir faire disparaître ses poèmes. Puriste intensif, il allait jusqu’à prétendre que notre langue française moderne, surchargée d’articles et de relatifs, était impropre à se représenter sous une forme assez simple les idées mystiques. Son œuvre a cependant prouvé le contraire.

J’attribue, pour ma part, à des raisons théologales et confessionnelles cette opiniâtreté destructive du poète saturnien à dévorer ses propres enfants, et j’ai de bonnes raisons de croire qu’il a été pris d’une sainte terreur tardive pour certaines pages de son évangile où il exaltait l’humanité future de ses rêves, en strophes d’une ferveur quasi païenne, moins conformes sans doute à la rigoureuse orthodoxie qu’à certaines théories subversives de la vierge-mère et autres dévotions philosophiques d’Auguste Comte, le fondateur du positivisme.

Qu’il ait eu, ou non, à redouter les foudres du pouvoir séculier aujourd’hui bien platoniques, Humilis, je le tiens de lui-même, a craint, pour son âme, le fagot ; et la torche toujours vivante à ses yeux de l’autodafé, a fort malheureusement altéré sa conscience et sa raison.

Visionnaire, il a pu suivre une route de vertige ; poète il trouva toujours une sagesse ou une vérité à chanter. Ayant de la peine à séparer son esprit des songes du positivisme, s’efforçant de mettre d’accord sa philosophie d’hier avec sa ferveur d’aujourd’hui, il oppose, en son rêve chrétien, à la déchéance de l’homme et au paradis perdu de la Genèse, l’avènement supérieur d’une humanité assagie, dans le paradis retrouvé de son orthodoxie. Ce n’est pas d’ailleurs pour un vain songe ou pour une douteuse harmonie, qu’il loue les plus humbles fleurs de la sagesse humaine : la charité, la chasteté, la pauvreté, l’humilité ; qu’il célèbre les humbles mains qui, dit-il, ont révélé la lyre aux temps anciens, qu’il adore la bleue sérénité de Jésus enfant et de la Vierge, qu’il taille et sculpte ses merveilleuses périodes dans la pierre vive des cathédrales et la pensée chrétienne du Moyen Âge ; qu’il chante la joie de la lumière sur toutes les tombes, ou cherche sous la terre le mot ténébreux de l’énigme et de la résurrection. Il voit, il annonce, en des temps que le nombre n’a point arrêtés, cette humanité soumise, heureuse, assagie, pliée à l’esprit du Maître, aux préceptes de l’Époux, et sans doute délivrée de la tare originelle qui pèse sur elle. L’homme a renversé toute sa science et tout son orgueil, et brisé ses dieux, tous ses Baal et tous ses Moloch. Il a accompli enfin son rêve anarchique, mais paisible.

Naïve et éloquente peinture que le poète fait alors de cette terre rajeunie par la foi et toute peuplée d’élus et de prédestinés ! Ce sont des laboureurs, des bergers, des poètes, de bons astrologues, « de divins ouvriers dont le ciel est content », ou plutôt ce sont tous des enfants, ces enfants que le Maître appelait à lui, et qu’il offrait en exemple aux pharisiens et aux théologiens discoureurs et subtils, leur disant : « Le ciel est à ceux qui leur ressemblent. »

Voilà, ce me semble, les suprêmes pensées d’Humilis et les secrètes confidences de sa philosophie ; et à défaut d’une interprétation plus complète de son œuvre, nous avons la joie de comprendre la somme d’idéal, d’amour et de poésie que renferment ses poèmes. Poète, il ne s’est point attardé dans les chemins de traverse des écoles, des disputes et des systèmes ; mais son œuvre nous offre un champ inappréciable d’idées neuves et de sensations fertiles.

Mesdames et Messieurs, je ne songe pas à commander à votre admiration – l’œuvre la plus parfaite a ses tares – ni à vous demander de nous sacrifier la moindre parcelle de vos doutes ou de vos sentiments confessionnels ; mais j’hésite à croire que vous ne vous laissiez pas gagner, captiver, entraîner par cette voix que vous verrez s’élever comme les harpes des cantiques, aussi belle, aussi vive, aussi précieuse qu’elles.

Plusieurs d’entre vous ont bien voulu prêter à notre œuvre, l’assistance de leur autorité morale ou littéraire, et vous comprendrez comme nous-même, – après avoir entendu d’artistiques et éloquentes voix, vous dire quelques-uns des plus beaux vers du poète, – qu’une édition complète et définitive de l’œuvre de l’auteur des Cathédrales, devait naturellement s’imposer.

À ce vœu, j’ose en joindre un autre, c’est que la souscription ouverte par nous, pour faire face aux frais d’édition de l’œuvre d’Humilis, nous permette de venir en aide au poète Humilis lui-même, dans les limites où le lui autorisent ses principes qui sont ceux d’une pauvreté étroite, rigoureuse et absolue. Mais enfin il a besoin de la pâture des petits oiseaux.

Une belle âme, une âme élevée d’artiste et de poète, cette Muse très tutélaire qui nous abrite aujourd’hui – je n’ai pas besoin de vous la nommer, car vous l’avez tous nommée, – a bien voulu spontanément tendre la main à notre œuvre, et je me fais une joie de penser que c’est dans ces mêmes salons, si riches en nobles émulations et en espérances artistiques de toutes sortes, que vont vibrer, pour la première fois, en une audition unique, les admirables vers du poète sans nom, que la postérité, si la postérité comme je le pense, lui accorde ses faveurs, continuera à appeler de l’humble et d’autant plus magnifique nom d’Humilis.

MAURICE SAINT-CHAMARAND

Première partie
Poèmes d’Humilis
INVOCATION
CANTIQUE À LA REINE
IMMENSITÉ
DIEU
L’HOMME
AUX FEMMES
LES MAINS
LE CORPS ET L’ÂME
VOLUPTÉ
HYMNE
LES MUSÉES
LES CATHÉDRALES
MORS ET VITA
FRATERNITÉ
CHARITÉ
PAUVRETÉ
HUMILITÉ
CHASTETÉ
IDYLLE
COUPLES PRÉDESTINÉS
DANS LES TEMPS QUE JE VOIS
L’AMOUR DE L’AMOUR
ÉPIGRAPHES
Invocation
Ô Mon Seigneur Jésus, enfance vénérable,
Je vous aime et vous crains petit et misérable,
Car vous êtes le fils de l’amour adorable.
Ô mon Seigneur Jésus, adolescent fêté,
Mon âme vous contemple avec humilité,
Car vous êtes la Grâce en étant la Beauté.
Ô mon Seigneur Jésus qu’un vêtement décore,
Couleur de la mer calme et couleur de l’aurore,
Que le rouge et le bleu vous fleurissent encore !
Ô mon Seigneur Jésus, chaste et doux travailleur,
Enseignez-moi la paix du travail le meilleur,
Celui du charpentier ou celui du tailleur.
Ô mon Seigneur Jésus, semeur de paraboles
Qui contiennent l’or clair et vivant des symboles,
Prenez mes vers de cuivre ainsi que des oboles.
Ô mon Seigneur Jésus, ô convive divin,
Qui versez votre sang comme on verse le vin,
Que ma faim et ma soif n’appellent pas en vain.
Ô mon Seigneur Jésus, vous qu’en brûlant on nomme,
Mort d’amour, dont la mort sans cesse se consomme,
Que votre vérité s’allume au cœur de l’homme.

INVOCATION

Cantique à la reine
I
Douce Vierge Marie, humble mère de Dieu
Que tout le ciel contemple,
Vous qui fûtes un lys debout dans l’encens bleu
Sur les marches du temple ;
Épouse agenouillée à qui l’ange parla ;
Ô divine accouchée,
Que virent des bergers, qu’une voix appela
Sous la roche penchée,
Qui regardiez dormir, l’abreuvant d’un doux lait,
L’adorant la première,
Un enfant frêle et nu, mais qui, la nuit, semblait
Être fait de lumière ;
Ô morte, qu’enleva dans les plis des rideaux
À la nuit de la tombe,
L’essaim des chérubins qui portent à leur dos
Des ailes de colombe ;
Pour vous placer au bruit de leurs psaltérions
Dont tressaillent les cordes,
Au Ciel où vous régnez, les doigts pleins de rayons
Et de miséricordes ;
Vous qu’un peuple sur qui votre bleu manteau pend
Doucement importune,
Vous qui foulez avec la tête du serpent
Le croissant de la lune ;
Vous à qui Dieu donna les grands voiles d’azur,
Le cortège des Vierges,
La cathédrale immense au maître-autel obscur
Étoilé par les cierges ;
La couronne, le sceptre, et les souliers bouffants,
Les cantiques en flammes,
Les baisers envoyés par la main des enfants,
Et les larmes des femmes ;
Vous dont l’image, aux jours gros d’orage et d’erreur,
Luisait sous mes paupières,