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Beschreibung

Les Éditions Anthemis vous proposent un outil complet pour comprendre le fonctionnement des provisions comptables et fiscales

La provision est un prélèvement opéré sur le résultat de l’exercice en vue de couvrir les pertes ou les charges nettement circonscrites quant à leur nature, mais qui, à la date de clôture de l’exercice, sont probables ou certaines mais indéterminées quant à leur montant.

Très usitée dans la vie des affaires, la provision est une figure aux multiples facettes soulevant de nombreuses questions, tant en ce qui concerne sa nature juridique qu’au point de vue de ses implications fiscales ou comptables.

Forts de leur expérience de terrain et à l’aide de cas pratiques, les auteurs de cet ouvrage apportent des réponses à ces questions, en analysant plus précisément les thèmes suivants :
• la définition et les aspects techniques des provisions comptables d’une part, fiscales, d’autre part,
• la notion de « provision » dans le droit comptable belge, dans les directives européennes mais également selon les normes comptables internationales,
• les provisions techniques des entreprises d’assurances,
• les provisions et contrats à long terme (notamment les provisions pour intervention en garantie),
• le sort des provisions en cas de restructuration d’entreprises.

Cet ouvrage – le premier consacré intégralement à l’étude des provisions comptables et fiscales – s’adresse aux réviseurs, experts-comptables, comptables, avocats, juristes d’entreprise, notaires, conseillers fiscaux et autres professionnels du chiffre mais également aux dirigeants de sociétés, qui, en tant que conseillers ou titulaires de comptes, sont confrontés au fonctionnement des provisions.

Un ouvrage écrit par des professionnels, pour des professionnels

A PROPOS DES ÉDITIONS ANTHEMIS

Anthemis est une maison d’édition spécialisée dans l’édition professionnelle, soucieuse de mettre à la disposition du plus grand nombre de praticiens des ouvrages de qualité. Elle s’adresse à tous les professionnels qui ont besoin d’une information fiable en droit, en économie ou en médecine.

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Seitenzahl: 284

Veröffentlichungsjahr: 2016

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La collection Tax Institute de l’ULg

Ouvrage paru :

M. Bourgeois et X. Pace (dir.), Le compte courant dans la vie des affaires. Aspects juridiques, fiscaux et comptables, 2013.

Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Communications s.p.r.l. (Limal) pour le © Anthemis s.a.

La version en ligne de cet ouvrage est disponible sur la bibliothèque digitale ­Jurisquare à l’adresse www.jurisquare.be.

Réalisé avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

© 2015, Anthemis s.a.

 

Place Albert I, 9 B-1300 Limal

Tél. 32 (0)10 42 02 90 – [email protected] – www.anthemis.be

 

ISBN : 978-2-87455-876-4

 

Toutes reproductions ou adaptations totales ou partielles de ce livre, par quelque procédé que ce soit et notamment par photocopie, réservées pour tous pays.

 

Mise en page: Communications s.p.r.l.

Couverture: ARTifice

Sommaire

Introduction – Les différentes significations du mot «provision»

Marc Bourgeois

Les provisions comptables : définition et aspects techniques

Giuseppina Capodici et Wilfried Niessen

Les provisions fiscales : définition et aspects techniques

Luc Herve

Prudence, réalisation et matching : les provisions dans le contexte belge, européen et international

Laurence Pinte

Les provisions techniques des entreprises d’assurances en droit fiscal, au regard des normes comptables liées

Pol Glineur

Provisions et contrats à long terme (garanties techniques, service après-vente, entretien et maintenance)

Fabrice Fogli

Provision et restructuration d’entreprises

Jean-Michel Degée

Introduction

Les différentes significations du mot « provision »

La notion de « provision » trouve son origine dans le verbe latin « providere » qui signifiait, à l’époque, « pourvoir ». De manière générale, « provision » désigne l’action de pourvoir qui, nécessairement, s’accompagne d’une démarche de prévoyance. Prévoir et pourvoir sont les deux traits caractéristiques majeurs du concept en question.

En latin médiéval, la provision désigne « l’approvisionnement » et « l’attribution d’un bénéfice ». Comme l’indique Laure Agron dans sa thèse de doctorat, « le premier sens de provision en français a été ‘attribution d’un salaire’. Surtout utilisé en droit canonique, il signifiait en 1350 ‘la mise en possession d’un bénéfice ou d’un office ecclésiastique’ »1.

La signification la plus courante attestée par les dictionnaires date de 1336 :« réunion de choses utiles ou nécessaires à la subsistance, à l’entretien ou à la défense »2. Ainsi évoque-t-on, dans cette acception, les provisions de bois, de cartouches, de charbon ou d’eau ; ou encore le fait d’emporter une provision de livres pour les vacances. Par extension, l’expression « faire provision de quelque chose » désigne le fait de se pourvoir de la chose en abondance.

Un autre sens courant du mot « provisions », employé au pluriel, s’est progressivement imposé depuis la moitié du XVIe siècle. Ainsi vise-t-on tant l’action d’achat de choses nécessaires à la vie, autrement dit les emplettes, que les choses faisant l’objet de ces achats (nourriture, produits d’entretien, etc.). Non sans une vision quelque peu sexiste de l’humanité, la « ménagère » est censée « faire ses provisions ». Au fil du temps toutefois, cet usage tend à s’amenuiser.

Le droit appréhende et manipule la notion de « provision » depuis la seconde moitié du XVe siècle3.

Le premier sens juridique du mot « provision », attesté en français à partir de 14664, est judiciaire. Un jugement « par provision » est initialement un jugement préalable à la sentence définitive. Une nature provisoire le caractérise. Il n’est pas définitif et peut donc être rapporté ou modifié. L’exécution forcée provisoire d’un jugement permet au gagnant d’en poursuivre la concrétisation dans les faits en dépit de la trêve qu’impose l’effet suspensif du délai et de l’exercice des voies de recours ordinaires. C’est peu dire que cette signification a perduré au fil du temps, non sans connaître une évolution certaine. Ainsi va-t-on qualifier de « provision »la somme allouée par le juge à un créancier dans l’attente du jugement définitif. Le Vocabulaire juridique Cornu définit ainsi la provision comme la « somme allouée par le juge à titre provisionnel pour parer aux besoins urgents d’un créancier réclamant une somme plus importante en attendant la fixation de cette dernière par justice »5. L’existence de l’obligation ne doit pas être sérieusement contestable, bien qu’il soit impossible, à ce stade, d’en déterminer le montant exact. En outre, l’expression de « provision ad litem » couvre la somme allouée à un plaideur pour lui permettre de faire face aux frais du procès.

Plus communément, et dans le prolongement du sens précité, la provision désignera la somme versée à titre d’acompte à un avocat, notaire, homme d’affaires ou autres. Peu nombreux sont les titulaires de professions libérales qui acceptent encore d’agir au profit de leur client sans être préalablement provisionné par lui6.

La première définition mentionnée dans le Vocabulaire juridique Cornu du vocable « provision » rattache la notion au droit commercial. Il y a là une « espèce de garantie liée à la technique cambiaire »7. Tout d’abord, en droit français, la provision équivaut à la créance de somme d’argent que possède le tireur contre le tiré d’un effet de commerce, qui justifie la création de ce dernier et qui est transmise en même temps que le titre. Ensuite, on va désigner sous ce terme la « somme d’argent déposée par un émetteur de titres entre les mains du banquier chargé du service financier des titres, destinée à assurer le paiement des coupons ou des titres amortis »8. Dans le langage courant, un banquier reprochera à son client un défaut de provision sur son compte, ce qui peut engendrer le phénomène des chèques sans provision (c’est-à-dire tirés sur un compte insuffisamment approvisionné).

Comme le souligne Laure Agron, l’utilisation fiscale et comptable du mot « provision » est assez récente9. Selon le dictionnaire Petit Robert, il s’agit, pour faire bref, d’une somme affectée par une entreprise à la couverture d’une charge ou d’une perte éventuelle. Éric Causin, pour sa part, évoque une « somme d’argent fixée provisoirement dans le but de couvrir une dette dont le principe est certain mais dont le montant ne peut encore être déterminé ». Dans ce dernier sens, les applications de la notion de « provision » s’avèrent nombreuses et diversifiées10.

La provision fiscalo-comptable se rattache, selon Gérard Cornu, aux réserves liées à la politique financière et à la technique comptable. Il s’agit en droit français – mais ceci est transposable au droit belge – d’une « déduction opérée sur le bénéfice imposable d’une entreprise en franchise d’impôt pour faire face à des dépenses probables et individualisées qui, si elles étaient effectives, seraient des charges déductibles »11. Ainsi met-on, comptablement et fiscalement, une partie de son bénéfice de côté par prudence, de manière à pouvoir affronter une sortie de ressources qui surviendra, certainement ou avec un haut degré de probabilité (ce qui n’est donc pas purement hypothétique), plus tard. Dans ce sens, la provision pour charges, qui se rapporte à des dépenses non encore réalisées, mais que les évènements en cours rendent probables, doit s’inscrire à un poste de passif du bilan.

L’arrêté royal du 30 janvier 2001 portant exécution du Code des sociétés (en abrégé, A.R./C. soc.) traduit juridiquement cette idée : « [l]es provisions pour risques et charges ont pour objet de couvrir des pertes ou charges nettement circonscrites quant à leur nature, mais qui, à la date de clôture de l’exercice, sont probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant »12. Le texte ajoute que « [l]es provisions pour risques et charges ne peuvent avoir pour objet de corriger la valeur d’éléments portés à l’actif »13.

En droit fiscal, la « provision » est en principe un revenu taxable au titre de « bénéfices » (article 25, 5°, C.I.R. 92). Les articles 48 du C.I.R. 92 et 22 à 27 de l’A.R./C.I.R. 92 prévoient néanmoins, sous certaines conditions (dont certaines sont communes au droit comptable, d’autres proprement fiscales), un régime d’immunisation. On note, à cet égard, que l’article 48 en question est repris sous l’intitulé « Réductions de valeur et provisions exonérées », ceci impliquant une similitude de régime fiscal entre les deux concepts comptables. La question peut se poser de savoir s’il convient vraiment de traiter de la même manière la probabilité de perte de valeur d’un élément d’actif et la probabilité d’exposition à une charge, c’est-à-dire à une dépense (litige en cours, risque de redressement fiscal, etc.).

De manière plus générale, en ce qui concerne les ajustements de valeur, il demeure délicat de faire le partage entre le certain, le probable et l’hypothétique. Les tentatives d’objectivation se heurtent souvent à l’approche subjective des acteurs du monde comptable et fiscal. La question se pose aussi pour les amortissements, les réductions de valeur et les réévaluations. La jurisprudence doit alors trancher, sans que les doutes soient toujours totalement dissipés. Or, c’est le principe d’annualité comptable et surtout fiscale qui est ici en jeu. Ne pas permettre d’anticiper de la sorte, c’est tronquer l’image fidèle de l’entreprise et peut-être surestimer, à un moment donné, sa capacité contributive globalement appréhendée en fonction des charges et risques futurs. D’un autre côté, laisser trop de marge aux contribuables quant à la répartition dans le temps de leurs charges déductibles serait de nature à priver de toute contrainte juridique le principe fiscal d’annualité, au détriment du budget de l’État. La recherche du point d’équilibre optimal est, comme dans toute situation, l’objectif central. La provision ne peut être un instrument d’évasion fiscale, mais une certaine souplesse (qui se concrétise par l’utilisation de notions ouvertes à interprétation, telles celle de « probabilité ») est nécessaire de manière à pouvoir appréhender au mieux la diversité des situations.

Le Tax Institute de l’ULg poursuit ici, après l’ouvrage consacré au compte courant dans la vie des affaires, sa mission combinée d’exploration scientifique et de support à la pratique dans une perspective horizontale et interdisciplinaire. Le présent ouvrage, fruit d’un colloque organisé à Liège le 20 novembre 201414, se donne pour objectif d’examiner un concept comptable et fiscal certes familier pour l’ensemble des acteurs du monde de l’entreprise, mais en réalité méconnu quant à son essence et ses réelles potentialités. L’approche se veut résolument pratique (tous les auteurs sont eux-mêmes des praticiens).

Dans un premier temps, Wilfried Niessen, Giuseppina Capodici et Luc Herve examinent la définition et les aspects techniques, respectivement comptables et fiscaux, de la notion de « provision ». Laurence Pinte s’efforce ensuite de remonter aux sources internationales et européennes de cette notion, de manière à pouvoir confronter ces dernières avec l’état du droit belge et, qui sait, à prédire utilement l’avenir. La suite du propos a trait à des cas d’application concrets. Pol Glineur traite d’un sujet d’une complexité toute singulière, à savoir les provisions techniques des entreprises d’assurances. Un régime fiscal spécifique est prévu à cet égard. Fabrice Fogli décortique plus amplement des catégories données de provisions (notamment les provisions pour intervention en garantie et services après-vente) et Jean-Michel Degée examine le sort comptable et fiscal des provisions en cas de restructuration d’entreprises.

Marc Bourgeois

Professeur à l’ULgDirecteur du master complémentaire en droit fiscal de l’ULgCoprésident du Tax Institute de l’ULg

1L. Agron, Histoire du vocabulaire fiscal, Paris, L.G.D.J., 2000, p. 192.

2Le Petit Robert, éd. 2012, « Provision », p. 2058.

3L. Agron, op. cit., p. 192.

4L. Agron, op. cit., p. 192.

5G. Cornu, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2011, p. 818.

6En matière de droits d’enregistrement, on note tout particulièrement que l’obligation de faire enregistrer les actes et de payer les droits, ainsi qu’éventuellement les amendes, incombe aux notaires et aux huissiers de justice pour les actes relevant de leur ministère (article 35, alinéa 1er, 1°, C. enr.). Par application de l’article 35 du Code, le notaire est rendu « débiteur direct et personnel de l’impôt » (Cass., 27 mars 1884, R.G.E.N., 1884, no 10.128). Il ne peut se soustraire à cette obligation en invoquant que les parties ne l’ont pas provisionné (ce qui ne l’empêche pas néanmoins de solliciter pareille provision). Par dérogation toutefois, le notaire est déchargé de toute obligation lorsque l’acte à enregistrer est un testament ou un acte assimilé, la révocation d’un testament ou d’un acte assimilé, une attestation relative aux testaments à forme internationale ou un acte constatant le dépôt d’un testament du vivant du testateur. Cette exception peut être uniquement invoquée par le notaire lorsque les personnes intéressées (héritiers, légataires,…) n’ont pas consigné en mains du notaire le montant du droit dû et, le cas échéant, des amendes, et ce, au plus tard la veille de l’expiration du délai prescrit pour l’enregistrement (article 36, C. enr.).

7G. Cornu, op. cit.

8G. Cornu, Ibid. Ce sens est attesté dès 1643 (L. Agron, op. cit., p. 192). Voy. aussi, H. Capitant, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 1936, p. 394.

9L’auteur note néanmoins que « si nos provisions comptables sont d’usage récent, provision et ses dérivés sont depuis le XVIe s. attachés au vocabulaire juridique et financier (L. Agron, op. cit., p. 192).

10Voy. E. Causin, Droit comptable des entreprises, Bruxelles, Larcier, 2002, p. 848, no 1296 : « [p]ar exemple, la consommation d’énergie pendant une période est anticipativement couverte par le paiement d’une provision, dans l’attente d’un décompte définitif à établir en fin de période sur base de la consommation effective. Les honoraires qui seront dus à un prestataire travaillant en régie sont précédés par le paiement d’une provision, dans l’attente d’un décompte définitif à établir en fin de contrat en fonction des devoirs effectivement accomplis. La victime d’un dommage avéré et grave se voit avancer le paiement d’une provision dans l’attente de la consolidation et de l’expertise de son dommage effectif. Le créancier d’un capital futur progressivement constitué par des versements périodiques prélève une provision à valoir sur ce capital dont le montant effectif dépendra du nombre de versements et du régime de leur capitalisation, etc. ».

11G. Cornu, op. cit.

12Article 50.

13En France, le mot « provision » est aussi utilisé pour enregistrer la perte de valeur de certains éléments d’actif. Les provisions apparaissent alors à l’actif du bilan sous la valeur d’acquisition du bien correspondant dont elles sont déduites et sont qualifiées de « provisions pour dépréciation ». L’arrêté d’exécution belge, indiquant que les provisions pour risques et charges ne peuvent avoir pour objet de corriger la valeur d’éléments portés à l’actif, ne qualifie pas de « provision » ce type d’opération comptable.

14Les auteurs souhaitent remercier chaleureusement Mesdames Hélène Caprasse et Catherine Fett, ainsi que la maison d’édition Anthemis, pour leur très efficace travail de coordination du présent ouvrage et du colloque qui l’a précédé.

Les provisions comptables: définition et aspects techniques

Giuseppina Capodici

Maître-assistante en finance à HEC-ULg

Wilfried Niessen

Comptable-fiscalisteProfesseur associé et directeur académique à HEC-ULg

Introduction

Le dictionnaire définit la provision comme étant une réserve, un stock, un dépôt sur un compte en banque. Mais cette définition est-elle valable dans le cas des provisions comptables? Les provisions sont-elles vraiment des réserves?

Chapitre 1

Définition légale

«Les provisions pour risques et charges ont pour objet de couvrir des pertes ou charges nettement circonscrites quant à leur nature, mais qui, à la date de clôture de l’exercice, sont probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant. Les provisions pour risques et charges ne peuvent avoir pour objet de corriger la valeur d’éléments portés à l’actif.»1

Les provisions se trouvent au passif du bilan. Elles se situent à la dernière rubrique des fonds propres juste devant les dettes. Leur place au bilan n’est pas due au hasard. En fait, si le risque «provisionné» se réalise, la provision deviendra une dette. Par contre, si le risque ne se produit pas, cela se traduira par une augmentation des fonds propres, et ce, via le compte de résultats.

Avant d’analyser les différents aspects des provisions, il convient de préciser certains termes employés dans la définition. Tout d’abord, les provisions pour risques et charges doivent être constituées pour couvrir des pertes et des charges nettement circonscrites quant à leur nature. Cela signifie qu’elles ne peuvent être constituées pour couvrir un risque vague et général2. Par exemple, une provision pour couvrir tous les risques liés à l’exploitation de l’activité.

Ensuite, les provisions doivent concerner des pertes ou les charges qui, à la date de clôture3, sont probables ou certaines. Le terme probable implique qu’il existe des éléments d’incertitude quant à la survenance. Sont notamment visées les provisions pour litiges en cours ou pour des garanties octroyées à la clientèle. Quant aux pertes ou charges certaines, celles-ci ne sont pas liquides, c’est-à-dire que leur montant n’est pas encore déterminé et seules des estimations peuvent être faites. Il s’agit des provisions pour grosses réparations ou des provisions pour pensions et prépensions.

Enfin, les provisions ne peuvent avoir pour objet de corriger des valeurs d’éléments portés à l’actif. La correction des valeurs des actifs ne peut se faire que par les amortissements et les réductions de valeur. Par extension, cette interdiction vaut également pour l’acquisition de biens d’investissement4.

À ce stade-ci de l’étude, il est important d’attirer l’attention sur le fait que la notion de provision est différente de celle de la trésorerie, même si ces deux notions sont indirectement liées. Tout d’abord, au moment de la constitution de la provision, il n’y a pas de flux de trésorerie (sortie d’argent) car la provision constitue une charge et non une dépense. Cependant, cette charge est fiscalement déductible. Dès lors, l’impôt à payer est moindre et la trésorerie en ressort donc indirectement améliorée.

Ensuite, si le risque ne se réalise pas, l’entreprise devra acter une reprise de provision qui sera taxable et qui, donc, aura un effet négatif sur la trésorerie. Dans tous les cas, qu’il y ait réalisation ou non du risque, le fait d’avoir constitué une provision ne signifie pas que l’entreprise disposera de la trésorerie nécessaire pour faire face aux paiements car le «surplus» de trésorerie obtenu grâce à la constitution de provision n’est pas affecté spécialement à la provision en question.

Chapitre 2

Modalités d’application

L’arrêté royal du 30 janvier 2001 portant exécution du Code des sociétés a défini un certain nombre de dispositions que les provisions pour risques et charges doivent respecter afin qu’elles puissent être comptablement acceptées.

Section 1

Individualisation des provisions

Les provisions pour risques et charges sont individualisées en fonction des risques et charges de même nature qu’elles sont appelées à couvrir (article 52, A.R./C. soc.). Par risques et charges de même nature, il faut entendre les catégories de risques et charges mentionnées à titre exemplatif à l’article 54.

L’article 54 de l’A.R./C. soc. prévoit que des provisions peuvent être constituées pour couvrir notamment:

a) les engagements incombant à la société en matière de pension de retraite et de survie, de prépensions et d’autres pensions ou rentes similaires;

b) les charges de grosses réparations et de gros entretien;

c) les risques de pertes ou de charges découlant pour la société de sûretés personnelles ou réelles constituées en garanties de dettes ou d’engagements de tiers, d’engagements relatifs à l’acquisition ou à la cession d’immobilisations, de l’exécution de commandes passées ou reçues, de positions et marchés à terme en devises ou de positions et marchés à terme en marchandises, de garanties techniques attachées aux ventes et prestations déjà effectuées par la société, de litiges en cours.

L’individualisation des risques requiert un suivi extra-comptable de chacune des provisions. Pour chaque provision, un document interne indiquera, par exemple, la nature du risque provisionné et l’évaluation chiffrée.

Exemple

Un travailleur licencié pour faute grave est en litige avec l’entreprise. Il lui réclame le paiement du préavis ainsi que le paiement de dommages et intérêts. L’entreprise devra constituer un dossier pour ce litige en question avec les différentes pièces en sa possession (requête, avis de l’avocat, calcul du montant du préavis…).

Section 2

Respect des principes lors des constitutions de provisions

Les provisions doivent répondre aux critères de prudence, de sincérité et de bonne foi (article 51). En outre, elles doivent être constituées systématiquement sur la base des méthodes arrêtées par la société et ne peuvent dépendre du résultat de l’exercice (article 53).

Section 3

Fait générateur des provisions

L’article 33 de l’A.R./C. soc. indique qu’il doit être tenu compte de tous les risques prévisibles, des pertes éventuelles et des dépréciations qui ont pris naissance au cours de l’exercice auquel les comptes annuels se rapportent ou au cours d’exercices antérieurs, même si ces risques, pertes ou dépréciations ne sont connus qu’entre la date de clôture des comptes annuels et la date à laquelle ils sont arrêtés par l’organe d’administration de l’entreprise. Ainsi, il n’est pas autorisé de constituer des provisions pour couvrir des charges ou des pertes dont le fait générateur surviendrait dans le courant de l’exercice suivant.

En outre, l’article 33 prévoit que «dans le cas où, à défaut de critères objectifs d’appréciation, l’estimation des risques prévisibles, des pertes éventuelles et des dépréciations est inévitablement aléatoire, il en est fait mention dans l’annexe si les montants en cause sont importants au regard de l’objectif visé à l’article 24, alinéa 1er». Sont visés ici les risques dont l’estimation est inévitablement aléatoire. À ce sujet, un avis5 de la C.N.C. a été émis. Par «estimation inévitablement aléatoire», il y a lieu d’entendre l’importance d’un risque ou d’une perte nettement circonscrit et prévisible qui n’est pas seulement incertain mais aussi totalement «indéterminable» à défaut de critères objectifs d’appréciation. Pour toutes ces raisons, la C.N.C. estime que l’entreprise est dispensée de constituer une provision et n’est tenue que de faire mention du risque dans l’annexe.

Section 4

Reprise des provisions excédentaires

Les provisions pour risques et charges ne peuvent être maintenues dans la mesure où elles excèdent en fin d’exercice une appréciation actuelle des charges et des risques en considération desquels elles ont été constituées (article 55, A.R./C. soc.). Ainsi, une reprise de provisions doit être actée soit lorsque la cause (économique ou juridique) qui l’a fait naître a disparu, soit lorsque le montant provisionné est excédentaire par rapport à une évaluation récente du risque ou de la charge. Il est à noter que ces reprises de provisions sont taxables.

Chapitre 3

Modes de constitution

La constitution des provisions peut se faire selon un des trois schémas ci-dessous.

Section 1

Constitution unique et utilisation progressive de la provision

Dans ce cas de figure, la provision est constituée en une seule fois et sera utilisée au fur et à mesure de la survenance du risque. Exemple: provision pour prépensions ou garanties.

Schématiquement:

Section 2

Constitution unique et utilisation unique de la provision

La provision est constituée en une seule fois pour faire face à un risque dont la survenance entraînerait une intervention unique de l’entreprise. Exemple: provision pour litige en cours.

Schématiquement:

Section 3

Constitution progressive et utilisation unique de la provision

La constitution de la provision est étalée dans le temps, alors que l’utilisation se fait en une seule fois. Exemple: provision pour réparations.

Schématiquement:

Chapitre 4

Types de provisions

Différentes catégories de provisions sont prévues à l’article 54 de l’A.R./C. soc. Cette liste n’est pas exhaustive.

Section 1

Provisions pour pensions et obligations similaires

Il s’agit des provisions constituées par la société pour couvrir les pensions de retraite et de survie, les prépensions et autres pensions et rentes dont le paiement lui incombe en vertu d’engagements stipulés en faveur des membres ou anciens membres du personnel ou en faveur de ses dirigeants ou anciens dirigeants (article 95, paragraphe 2, A.R./C. soc.).

A.Les provisions pour pensions et obligations similaires

Toute entreprise peut souscrire en faveur des membres ou anciens membres de son personnel, et/ou en faveur de ses dirigeants ou anciens dirigeants, des régimes de pensions complémentaires, dites extra-légales. Ces régimes complémentaires consistent à assurer aux bénéficiaires des avantages financiers extra-légaux au moment de la retraite.

L’arrêté royal du 14 mai 1985 a imposé l’externalisation des régimes de pensions extra-légales. Cela signifie que la gestion des cotisations, capitaux et avantages extralégaux doit être confiée à un organisme extérieur agréé à cet effet (compagnies d’assurance ou fonds de pension autonomes constitués sous forme d’A.S.B.L.). Ainsi, les primes versées par l’entreprise à un fonds de pension ou à une assurance constituent des charges de personnel à comptabiliser dans un compte 622 «Primes patronales pour assurances extra-légales», et non plus des provisions.

Il était, cependant, toujours possible de constituer des provisions pour les dirigeants indépendants. Toutefois, à partir du 1er janvier 20126, la constitution ou l’augmentation de provisions internes en vue de financer une constitution ou convention de pension sous seing privé au profit des gérants et administrateurs de société indépendants n’est plus autorisée. Ainsi, les seules provisions qui se trouvent actuellement dans les bilans des sociétés sont des anciennes provisions.

Il est à noter qu’une entreprise pourrait également décider d’en octroyer à titre de libéralité (en complément de la pension extra-légale). Dans un tel cas, les versements libres effectués par l’entreprise sont aussi à comptabiliser au compte 624 «Pensions de retraite et survie».

B.Les provisions pour prépensions7

Le régime de la prépension conventionnelle vise à promouvoir le maintien au travail des travailleurs moins âgés, par la mise à la prépension de travailleurs âgés de plus d’un certain âge. Cette mise à la prépension, à l’initiative de l’entreprise, s’accompagne du versement par celle-ci d’une indemnité s’ajoutant à l’allocation de chômage. Cette indemnité est payable jusqu’à la date de prise en cours de la retraite.

L’obligation souscrite par l’entreprise de verser à ses travailleurs prépensionnés l’indemnité susvisée, alors qu’elle ne bénéficiera plus de leurs prestations, constitue dans son chef un engagement ferme et une charge qui, indiscutablement, prend naissance au cours de l’exercice où la décision a été prise.

Selon l’article 95 de l’A.R./C. soc., cet engagement doit être rencontré par une provision appropriée. En effet, bien que les engagements financiers résultant de décisions de mise à la prépension constituent des dettes certaines, leur montant ne peut toutefois faire l’objet que d’une estimation. Leur montant est tributaire de la survie probable des bénéficiaires, de l’éventualité de voir les prépensionnés reprendre une activité professionnelle en renonçant au régime des prépensions ainsi que des variations de l’indemnité, à la suite notamment de la fluctuation de l’indice des prix.

Ce montant devra être estimé avec prudence, sincérité et bonne foi. Le moment où la provision devra être constituée correspond au moment où le congé est notifié au travailleur8.

En ce qui concerne le montant à provisionner, celui-ci doit tenir compte du montant, du risque de mortalité et de l’éventuelle indexation. Dans ses avis nos 107/99 et 107/1310, la C.N.C. indique que le montant des provisions pour les prépensions (indexées ou non) doit être évalué à leur valeur actuelle et non à leur valeur nominale.

Section 2

Provisions pour charges fiscales

Il s’agit des provisions constituées pour couvrir les charges fiscales pouvant résulter de la rectification de la base imposable ou du calcul de l’impôt (article 95, paragraphe 2, A.R./C. soc.). Ce type de provisions ne concerne que les litiges avec l’administration fiscale qui sont portés devant les tribunaux.

Bien que l’entreprise conteste l’avis de rectification, le risque d’imposition complémentaire existe toujours. Ainsi, lorsque ce risque est considéré comme étant raisonnablement sérieux, il est nécessaire d’enregistrer une provision.

Les provisions fiscales doivent faire l’objet d’une mention dans l’annexe sous la rubrique «Provisions pour autres risques et charges»11.

Section 3

Provisions pour grosses réparations et gros entretiens

Des provisions pour risques et charges doivent être constituées pour couvrir les grosses réparations et gros entretiens. Comme le précise la C.N.C. dans son avis no 107/112, ces provisions doivent correspondre à des charges ou des dépréciations ayant pris naissance au cours de l’exercice ou au cours d’exercices antérieurs.

Ces provisions doivent avoir pour objet de couvrir des charges certaines concernant:

– des grosses réparations à effectuer sur des immeubles, des machines à la suite de détériorations, accidents, endommagements…;

– des gros entretiens dans le but de conserver l’utilisation du bien.

Il est à noter que ces provisions ne peuvent être constituées pour couvrir des dépenses futures correspondant à des investissements en actifs immobilisés. La notion d’investissement fait référence à l’acquisition de nouveaux actifs; alors que l’entretien a pour objet de maintenir la valeur d’un actif existant.

Exemple

Le fait de remplacer l’ancienne toiture (plateforme) par une toiture vitrée constitue un investissement (augmentation de la valeur du bâtiment) qui ne peut être couvert par une provision.

En ce qui concerne l’évaluation du montant de la provision, il est fortement conseillé aux entreprises de demander des devis à des entreprises spécialisées. Cela permettra de la justifier comptablement et fiscalement.

Section 4

Provisions pour autres risques et charges

Ce sont des provisions constituées pour couvrir des risques et charges autres que ceux relatifs aux pensions et obligations similaires, aux charges fiscales et aux grosses réparations et gros entretiens.

Ces provisions sont destinées à couvrir les risques de pertes et charges découlant:

– de sûretés personnelles ou réelles constituées en garanties de dettes ;

– d’engagements de tiers ;

– d’engagements relatifs à l’acquisition ou à la cession d’immobilisations ;

– de l’exécution de commandes passées ou reçues ;

– de garanties techniques attachées aux ventes et prestations déjà effectuées par la société ;

– de litiges en cours (article 54, A.R./C. soc.).

A.Provisions pour sûretés personnelles ou réelles constituées en garanties de dettes13

Ces provisions concernent des risques et charges relatifs aux engagements hors bilan (classe 0). Pour la plupart de ces engagements, il existe une obligation sous condition suspensive; c’est-à-dire tant que la condition suspensive n’est pas réalisée, il n’y a ni charge, ni dette. Toutefois, lorsque la condition suspensive survient, l’entreprise est débitrice de l’engagement. Elle devra donc comptabiliser la charge et la dette.

Lorsqu’en cours d’exercice, la survenance de la charge liée à l’engagement devient probable, une provision doit être constituée. Toutes les dispositions relatives à l’enregistrement de ces provisions pour engagements hors bilan (méthodes d’évaluation, événements qui imposent la constitution, la reprise des provisions) doivent être inscrites dans les règles d’évaluation de l’entreprise.

B.Provisions pour engagements au profit de tiers

Lorsqu’une entreprise s’est portée garante de dettes ou d’engagements pour le compte de tiers en accordant des sûretés personnelles ou réelles et qu’il existe une forte probabilité de devoir faire face à ces engagements, elle doit constituer des provisions.

Exemple: engagements liés aux effets mis à l’escompte. Le tireur de l’effet devra évaluer si, à l’échéance, le tiré pourra honorer ou non ses obligations.

C.Provisions pour engagements relatifs à l’acquisition ou à la cession d’immobilisations

Certains contrats de vente prévoient le paiement de dommages et intérêts en cas de refus d’achat. Dans la même logique, des pénalités peuvent être prévues en cas de non-exécution de la vente. Lorsqu’une entreprise estime qu’elle ne pourra honorer ses engagements (achat ou vente) et qu’elle devra donc payer une somme en compensation de l’inexécution du contrat, une provision devra être constituée.

D.Provisions pour exécution de commandes passées ou reçues

Sont visées ici les provisions à constituer pour faire face à des charges probables qui pourraient survenir en cas de non-exécution ou d’exécution non conforme de commandes passées ou reçues. Dans de tels cas, l’entreprise non respectueuse du contrat devra estimer le montant à payer en tant qu’intérêts de retard, coûts d’expertise… Il est à noter que la plupart de ces charges peuvent être prévues contractuellement.

E.Provisions pour garanties14

La vente de biens ou la prestation de services s’accompagne en général, soit en vertu de règles de droit commun, soit en vertu de dispositions contractuelles particulières, de garanties pour vices cachés, de garanties de conformité, de garanties «pièces et main-d’œuvre»… Il s’agit pour le vendeur ou le prestataire de services d’engagements indiscutables qui engendreront des charges, c’est-à-dire qu’ils seront tenus d’exposer des frais et de fournir des prestations additionnelles qui ne feront pas l’objet d’une facturation nouvelle.

L’arrêté royal du 8 octobre 1976 impose la constitution de provisions pour couvrir ces charges qui ne pourront, généralement, faire l’objet que d’une estimation. L’obligation de constituer la provision est directement liée à la naissance de l’engagement de garantie. C’est au moment où le bien est vendu ou la prestation fournieque la provision doit être constituée. C’est donc le compte de résultats de l’exercice qui bénéficie du produit de l’opération qui doit supporter les charges probables afférentes à cette garantie.

Quant au montant de la provision, il doit être évalué avec prudence, sincérité et bonne foi. La tenue de statistiques quant au nombre d’interventions et au coût engendré par celles-ci au cours des années antérieures peut être un guide pour l’appréciation des charges et des risques actuels.

De plus, la provision constituée doit être adaptée annuellement si l’évaluation du risque effectif montre que la provision constituée est insuffisante ou excessive15. L’adaptation s’effectue de manière globale et non pour chaque contrat séparément.

F.Provisions pour litige en cours

Selon l’avis no 107-11 de la C.N.C.16, lorsqu’un produit a été encaissé, mais fait l’objet d’un litige, son inscription au compte de résultats doit être accompagnée de la constitution d’une provision pour litige en cours. Le montant de la provision devra tenir compte, sur la base des critères de prudence, de sincérité et de bonne foi, du risque effectif pesant sur l’entreprise de se voir contrainte de restituer tout ou partie du produit en cause. À l’instar de toutes les provisions, cette provision devra, selon l’évolution du risque effectif, être ultérieurement maintenue, ajustée ou reprise.

Il est à noter qu’en cas de litige pour lequel l’entreprise est assurée, la provision porte uniquement sur le montant de la franchise lorsque le contrat d’assurance en prévoit une.

G.Provisions pour risques et charges divers

Il s’agit de toutes les provisions qui ne rentrent pas dans les catégories précédentes. Dès qu’une entreprise estime que les conditions nécessaires pour la constitution d’une provision sont réunies, elle se doit d’en constituer une.

Exemples

– Les provisions pour risques et charges environnementaux17