Pourquoi n’as-tu rien dit ? - Lara De Gendt - E-Book

Pourquoi n’as-tu rien dit ? E-Book

Lara De Gendt

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Beschreibung

Et toi, et vous, où étiez-vous ? Comment nommer cette cécité ? Devant notre foule d'enfances à la dérive… À toi, l’adulte, je pose aujourd’hui cette question : « Pourquoi n’as-tu rien vu ? »

À PROPOS DE L'AUTRICE  

Lara De Gendt explore à travers son œuvre les zones d’ombre de la mémoire et les silences du passé. Marquée par une époque où les enfants vivaient sous la menace latente d’être « attrapés » ou « enlevés », elle puise dans ces souvenirs pour interroger le déni, le fantasme collectif et la réalité. Son écriture, à la fois poignante et intime, donne une voix à l’indicible et éclaire des vérités enfouies.

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Seitenzahl: 53

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Lara De Gendt

Pourquoi n’as-tu rien dit ?

Témoignage

© Lys Bleu Éditions – Lara De Gendt

ISBN : 979-10-422-5267-0

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.

Présentation

Et toi, et vous, où étiez-vous ?

Quel était le nom de cette cécité ?

Face à notre foule d’enfances en dérive…

À toi, l’adulte, j’adresse aujourd’hui cette question :

« Pourquoi n’as-tu rien vu ? »

C’est à cette époque, celle où les enfants étaient des proies, que nous avons grandi.

Nous pouvions être « attrapées », « enlevées ».

Un jour, sans doute, ai-je pensé que c’était mon tour.

Jadis, ma vérité était indicible.

Et semblait inaudible.

Tous ceux qui avaient aperçu se sont tus.

Je flottais comme dans un espace hors réalité.

Embarras, fantasme collectif, déni ?

Puis, Judith a parlé.

Pour protéger sa fille.

Avec des mots qui accusent.

Ceux qui dénoncent, qui appellent les limites, rappellent l’interdit.

Questionnant l’impunité des abuseurs.

L’abus d’adultes sur les petites filles de ma génération.

Et le voile est tombé. Le brouillard s’est dissipé.

Je n’étais plus seule. Nous étions nombreuses.

C’était un phénomène de société.

Ce n’était plus « ma faute ».

Inéluctablement, je me suis affranchie, j’ai rejoint cette dénonciation.

Celle qui dit l’impensable d’une transgression insoutenable.

Celle qui refuse que cette transmission, cette démission, ne se perpétue.

Celle qui reprend sa place et, ce faisant, remet les adultes à la leur.

Celle qui réclame justice et exige la protection de l’enfance.

À son appel #Moi Aussi Judith, j’ai répondu.

Puis j’ai participé à son projet de court métrage et j’ai pris ma place dans la foule.

L’entendez-vous, ce cri ?

Tonnerre brisant le tabou.

Cette insurrection, cette révolte d’enfances blessées, de sujets bafoués, réduits à la « silenciation », résignés à la honte, à l’errance et à la perte de confiance.

L’entendez-vous ce mugissement ?

Depuis si longtemps, des décennies…

Après nous… ?

Pourquoi Dieu demande-t-il à Abraham de sacrifier son enfant ?

Comme preuve d’acceptation de l’ordre établi ?

Ou était-ce pour le mettre à l’épreuve en testant l’obéissance divine inconditionnelle… ?

Pour questionner tout à la fois : son pouvoir de tyran et la capacité de désobéissance de sa créature ?

L’infanticide s’érigerait-il en fondement de notre civilisation ?

Ne faut-il pas plutôt l’entendre comme un pas à ne pas franchir : un interdit faisant Loi ?

Mais où est-il donc, l’ange de Yahvé faisant irruption pour retenir la main de l’adulte à l’encontre de l’enfant et éviter un tel sacrilège ?

Que se passe-t-il lorsque l’homme cède à la tentation de la violation des trois interdits fondamentaux1 faisant société ?

Quelles sont les failles de cette injonction ordonnant de renoncer à toute attaque contre la filiation afin de nous préserver de la dissolution du lien social, de protéger l’espérance en un avenir possible, en une aube meilleure pour l’humanité ?

Pourtant, il s’agit bien d’un principe de réalité : l’obligation de transmission au profit des générations suivantes. Un devoir de protection pour que d’autres adviennent. Un impératif lié à une part de renoncement pour devenir et sublimer. La nécessité de faire civilisation pour ne pas sombrer dans la barbarie.

Mais cet ordre des choses recèle une épreuve subjective existentielle : un don de soi, une part d’abnégation.

Supporter le manque, ne pas céder sur son désir2, au pousse à jouir3, se résigner au respect des limites, à l’accueil de l’autre, à ne pas lui nuire, et consentir à du dévouement : voilà des valeurs éthiques qui mettent à l’épreuve tout un chacun.

En refusant de s’y résoudre, en résistant à sa succession, au passage du flambeau, à la perte d’un « tout pouvoir », s’accrochant au « toujours plus de profit », l’humain attise la rancœur, la colère, l’affrontement, la violence. Mais aussi, la lutte des générations.

Au risque de l’assassinat du père, du matricide ou de l’infanticide. Réel, symbolique et/ou culturel.

Effacement, dénigrement, meurtre de l’autre : l’abolition du sujet, sa réification, son assujettissement.

Après nous le déluge ?

Quel est cet outrage ?

Un forçage pour tenter d’évincer l’angoisse ?

Un cramponnement au pouvoir, à l’emprise, au contrôle et, ce faisant, une tentative d’évincer le déclin ou un empêchement au don, à l’hospitalité…

Envers et contre la filiation.

Symptôme de société.

Rester au-devant de la scène, dans la file prioritaire ? Résister, coûte que coûte, encore un peu, au passage du relais ?

Et qu’en est-il devenu « des femmes et des enfants d’abord » ?

Ne pas se résoudre à lâcher des privilèges devenus destructeurs, mortifères et bâillonner des générations d’enfants torturés par diverses violences et de l’éco-anxiété.

Société qui sacrifie les enfants ?

Transgression ? Anges absents ?

Au nom du droit à la jouissance individuelle ? De cette aspiration à l’épanouissement de soi ?

Contrat social inconscient ? Commandement symbolique ?

Civilisation de l’avènement d’un « Impératif sadien »4 ?

Idéal du « droit à la propriété », à la possession, à disposer d’autrui…

Enfermés dans une « bulle narcissique », nous rendant incompétents à considérer l’autre dans sa différence. Surdité à sa parole par monopole de désir, de jouir, par égarement, par « amour » ?

Quel est donc ce prétendu « consentement »5 ?

Imaginaire, halluciné projeté ?

Quel est ce pouvoir d’abuser, cette autorité défaillante au détriment du soin à l’enfance, à sa réalité, à ses besoins, à ses attentes ?

Quel est le nom de cette attaque au respect de la différence des générations, à l’interdit de l’inceste ?

Quelle est cette banalisation du détournement de mineurs, des abus sexuels et des viols ?

Quelle est cette impunité de l’autorité des pères qui transgressent ?

Quel est donc le nom de cette civilisation ?

L’entendez-vous, ce cri, celui d’un « # Me too », rassemblant une foule ?

Tonnerre brisant le tabou.

Cette insurrection, cette révolte d’enfances blessées, de sujets bafoués, réduits à la « silenciation », à la honte, à l’errance et à la perte de confiance.

Depuis si longtemps, des décennies…

Telle Philomèle6, fille du roi Pandion, violée par son beau-frère, le Tharce Térée, qui, de surcroît, pour s’assurer qu’elle ne puisse rien en dire, lui coupe aussi la langue.

Ce n’est pas qu’elle ne désirait pas appeler à l’aide :