Récit d'un voyage à la Plata - Lettre d'Araucanie - Ligaran - E-Book

Récit d'un voyage à la Plata - Lettre d'Araucanie E-Book

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Extrait : "La médiocre instruction que j'ai reçue (je ne suis allé à l'école que jusqu'à l'âge de treize ans) ne me permet pas de me mettre au niveau d'un écrivain ; je suis tout simplement un ancien commerçant qui, par suite de son amour pour la classe ouvrière, a essayé de lui désiller les yeux en lui montrant le danger qu'il y a pour elle à écouter certains journalistes qui ne vivent qu'en entretenant les grèves et fermentant les révolutions."

À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN :

Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :

• Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
• Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Seitenzahl: 65

Veröffentlichungsjahr: 2016

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Préface

En parcourant cette brochure, le lecteur serait bien déçu s’il croyait y rencontrer des fleurs de rhétorique ou des phrases sonores.

La médiocre instruction que j’ai reçue (je ne suis allé à l’école que jusqu’à l’âge de treize ans) ne me permet pas de me mettre au niveau d’un écrivain ; je suis tout simplement un ancien commerçant qui, par suite de son amour pour la classe ouvrière, a essayé de lui dessiller les yeux en lui montrant le danger qu’il y a pour elle à écouter certains journalistes qui ne vivent qu’en entretenant les grèves et en fermentant les révolutions.

Mais patience, avec un gouvernement qui, comme celui d’aujourd’hui, a si bien commencé à les mater, il viendra un moment où le pauvre ouvrier, complètement désillusionné sur le mirage inventé par la démagogie, pourra enfin vivre tranquille en travaillant, à sa grande satisfaction et à celle de sa famille.

Il y a trente-huit ans que je combats sous le vaillant drapeau de la République pour l’abolition des privilèges que j’ai en horreur.

Il y a trente-huit ans que la cause de l’ouvrier est la mienne et dans mon pays natal (Bourges), ainsi que dans celui qui m’a adopté (Bar-le-Duc), je mets au défi qui que ce soit de me citer aucune occasion où j’ai reculé d’une semelle.

Je puis dire sans forfanterie que, par mon zèle et par mon amour pour la démocratie, je n’ai pas peu contribué à la réussite des élections républicaines, quelles qu’elles fussent.

À Bar-le-Duc surtout, on a pu s’en apercevoir.

Au moment où je termine ce manuscrit, 30 avril 1886, je lis dans un journal que deux patriotes députés, Michelin et Plantaux, après un voyage à Decazeville où ils ont pu se rendre un compte exact de la situation, confèrent en ce moment avec le ministre du commerce, et qu’une entente est à la veille de s’établir.

Ces habiles députés n’envisagent que la conciliation et, ne cherchant que l’intérêt des ouvriers, ont su capter leurs cœurs en les désillusionnant sur le mirage trompeur des démagogues.

La France entière et la République leur doivent une entière reconnaissance. Je ne cesserai de le répéter : l’ouvrier a un naturel bon et il ne sort de la légalité que lorsqu’il est trompé par des paroles flatteuses de certains aventuriers qui ne vivent que d’expédients.

Cette brochure a pour but de démontrer aux ouvriers le danger qu’il y a pour eux d’écouter certains chenapans de journalistes qui font les grèves et les révolutions où il y a toujours quelque chose à glaner pour eux.

Les ouvriers ont bien plus à gagner en écoutant le langage de certains d’entre eux qui les exhortent au ralliement pour former un grand faisceau et discuter noblement et paisiblement leurs intérêts.

Il est véritablement malheureux pour l’ouvrier souvent père d’une nombreuse famille, noble cœur, pourvu des meilleurs sentiments, d’être entraîné par le manque complet d’instruction, de ne pouvoir discerner entre le bien et le mal, et de souvent pencher de ce dernier côté, en écoutant les belles phrases des députés intransigeants et collectivistes, qui font parade de leurs opinions avancées pour servir une cause qu’ils savent mauvaise ; car en somme qu’est-ce que sont ces grèves et ces révolutions ? où mènent-elles ?

Je vais vous le dire : à la ruine de ceux qui y prennent part, à la déconsidération et quelquefois à l’échafaud, quelles que soient les causes qui les ont amenées. Exemple : En 1847, j’avais vingt-quatre ans, je voyageais avec cheval, voiture et marchandises ; en passant sur la place du Marché de Châteauroux, une douzaine de peaux sur mon épaule, je fus sommé par un maréchal-des-logis de dragons à avoir à déguerpir au plus vite, pour éviter de me trouver dans la bagarre ; je rentrais vite au café Ruffin et je vis par les fenêtres arriver un escadron de dragons se ranger sur la place.

Il était à peine arrivé qu’un escadron de femmes, le rouleau à mesurer le blé à la main, se précipitèrent sur les dragons en leur jetant à la tête leur rouleau ; les dragons furent obligés de les charger pour les disperser, les femmes désarmées prirent des pierres ; c’est alors que tous les carreaux des maisons voisines volèrent en éclat.

Quelle était donc la cause de cette bagarre ? C’étaient les céréales qui s’étaient aussi mises en grève, si l’on peut employer cette expression, et que l’ouvrier ne pouvait obtenir, même avec de l’argent ; le froment valait plus de 40 francs le sac, les malheureux étaient contraints de manger du pain de seigle (quand ils en trouvaient) et d’orge.

Quelques jours après, sur le marché des Buzançais, les dragons avaient été appelés, là également le blé faisait complètement grève, la foule exaspérée se porta sur un moulin du sieur Chambert et réclama de la farine contre de l’argent, bien entendu ; ce dernier eut le malheur de refuser et de se barricader ; il jouait sa tête ; effectivement la porte fut défoncée, mais aussitôt un coup de fusil partit de l’intérieur et un homme tomba raide mort. Le sieur Chambert alla se blottir sur un toit derrière une cheminée, il en fut bientôt débusqué. Une fois en bas, on lui coupa la tête qu’on promena au bout d’une pique.

Les trois malheureux auxquels la faim avait fait commettre une pareille monstruosité et qui s’appelaient Bienvenu, Veluet, manœuvres, et Michaut, sabotier (ce dernier n’avait pas vingt ans) furent jugés et condamnés à la peine de mort, et malgré les sympathies qu’attirait Michaut par son jeune âge, malgré une demande en commutation de peine signée par le jury, ils furent tous les trois exécutés sur la place publique de Buzançais.

Le président des assises, (bonapartiste du premier empire), a insisté pour que les trois exécutions aient lieu, vu l’énormité du crime.

Cette disette de grains à laquelle se joignait le mauvais vouloir des ministres de Louis-Philippe d’accorder au peuple la liberté de réunion pour les banquets réformistes, amenèrent la Révolution et la proclamation de la République.

Ah ! si ces malheureux avaient eu des Fuisseaux ou des Hurtault pour les guider, ils n’en seraient pas venus à pareilles extrémités, leur manque complet d’instruction les empêcha de discerner les conséquences des actes qu’ils allaient commettre ; ils étaient coupables, il est vrai, mais l’ignorance et la misère étaient bien pour quelque chose aussi. (On verra dans le corps de ce livre ce que sont Hurtault et Fuisseaux.)

Quelle reconnaissance la classe ouvrière ne doit-elle pas avoir aux Jules Ferry, Gambetta, Brisson, Jules Develle, etc., pour le patriotisme et l’ardeur qu’ils ont déployés dans leur lutte contre la réaction, contre les jésuites et pour la laïcisation de toutes nos écoles.

Que ne doit-elle pas non plus à la municipalité et au Conseil municipal de Bar-le-Duc, pour avoir, en aussi peu de temps, fondé de si belles et aussi nombreuses écoles.

Aujourd’hui sera ignorant celui qui persistera à vouloir l’être et personne n’aura le droit, pour sa justification dans un méfait quelconque, d’invoquer son ignorance.

Aussi, il faut espérer que l’instruction versée à flots portera ses fruits et empêchera le retour de semblables atrocités.

E.L.P.

En ce moment où, en France comme en Belgique, éclatent des grèves dans tous les bassins houillers, grèves suivies de pillages et d’incendies, où le frère soldat est contraint de tirer sur son frère ouvrier mineur, il est noble et beau de voir surgir comme par enchantement un simple citoyen armé de la branche d’olivier et venir dire à ses frères : Assez de sang comme ça, ce n’est pas avec de semblables moyens que vous arriverez à la réforme sociale que vous demandez.