Référentiel du travail social hors murs - Collectif - E-Book

Référentiel du travail social hors murs E-Book

Collectif

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Beschreibung

Comment fait-on du travail social hors murs ?

La pratique du Travail Social Hors Murs (TSHM) se déploie au sein des collectivités locales au plus près de différents publics en situation de vulnérabilité. Peu connue, elle peut apparaître comme opaque aux yeux d’un observateur non averti. Les praticiens eux-mêmes rencontrent parfois des difficultés à expliciter leur propre action au quotidien. Afin de rendre compte de la finesse de l’exercice de la pratique et de tenter de répondre à la question : comment fait-on du travail social hors murs, les professionnels de la plateforme romande du travail social hors murs ont construit collectivement ce référentiel de pratiques.
Ce qui « fait référence » pour le travailleur social hors murs ne peut être mobilisé de manière statique, mécanique comme le prescrirait un guide de « bonnes pratiques ». Pour cette raison, au fil de cet ouvrage, le lecteur est invité à effectuer un aller-retour entre une typologie qui réduit volontairement la complexité des éléments de la pratique afin de mieux les identifier, et une série de récits rédigés par des professionnels romands du TSHM. Des récits de pratiques qui, chacun à leur manière, témoignent du savoir-faire engagé dans la diversité des situations rencontrées sur le terrain.

Découvrez un référentiel de pratiques qui expose la finesse de l'exercice de la pratique du TSHM, et présente une série de témoignages de professionnels !

EXTRAIT

L’équipe le soutient alors tout de même à mener des recherches d’emploi avec l’optique qu’il se confronte à la difficulté de trouver un travail sans avoir de diplôme en poche. Petit à petit, il lâche aussi ce soutien. Le coaching de l’équipe de Transit cesse. Nous ne voyons plus comment avancer, car notre soutien ne porte pas les fruits espérés puisque ce jeune n’est pas preneur. Il vit dans le présent et ne parvient pas à se projeter dans le futur. Par la suite, l’équipe de Transit le retrouve dans la rue, via les tournées. Il ne cesse d’indiquer que « tout va bien ». Nous manifestons toujours notre ouverture pour l’écouter et plus s’il le souhaite. Il traîne avec un groupe qui boit et fume; sans doute une période difficile pour lui. Il ne veut guère nous avouer qu’il a besoin d’un coup de main par fierté. Il mène quelques petits mandats de travail temporaire dans diverses entreprises. Il apprend sans doute durant cette période que cela n’est pas si simple de se débrouiller tout seul.

A PROPOS DE LA PLATEFORME ROMANDE DU TRAVAIL SOCIAL HORS MURS

La plateforme romande du travail social hors murs est un collectif de professionnels. Elle a rédigé en 2002 la charte du TSHM que cet ouvrage vient compléter. La plateforme se définit comme un pôle de réflexion en lien avec les problématiques rencontrées dans les pratiques professionnelles et comme un levier quant aux prises de position publiques à propos des fondamentaux du TSHM et des besoins de son public.

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Seitenzahl: 188

Veröffentlichungsjahr: 2018

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Plateforme romande du Travail Social Hors Murs

La plateforme romande du Travail Social Hors Murs (TSHM) est un collectif de professionnels1 regroupant tous les cantons romands qui disposent d’un dispositif TSHM. Elle a été rejointe ces trois dernières années par les « operatori di prossimità » du canton du Tessin.

Les professionnels se sont notamment fédérés autour de la charte du travail social hors murs, rédigée en 2002, que ce référentiel vient compléter. La plateforme se définit comme un pôle de réflexion en lien avec les problématiques et les thématiques rencontrées dans les pratiques respectives des professionnels et comme un levier quant aux prises de position publiques concernant les fondamentaux du TSHM et les besoins du public avec qui il travaille.

1 Les désignations masculines contenues dans cet ouvrage ont la valeur neutre. Elles sont utilisées dans le seul but d’alléger le texte et n’ont aucune intention discriminatoire.

Comité de rédaction

Céline AUROI, travailleuse sociale hors murs, TSHM Chablais, Valais-Vaud

Emmanuel FRIDEZ, travailleur social hors murs, Association REPER, Fribourg

Paul LEMAITRE, travailleur social hors murs, FASe, Genève

Sandra STIMOLI, travailleuse sociale hors murs, Ville de Lausanne, Vaud

Contributions des TSHM de la plateforme

Patricia ALBERT, FASe -Transit, Meyrin, Genève

David BURNIER, Ville de Renens, Renens, Vaud

Laurent CLAVIEN, ASLEC, Sierre, Valais

Nicolas DELAVY, Ginkgo, Vevey, Vaud

Bénédicte DUBUIS, Association RLC, Sion, Valais

Daphné DUCREST, Association REPER, Fribourg, Fribourg

Karim FATMI, FASe, Trois-Chêne, Genève

Aurora GALLINO, Fondation AACTS, Vevey, Vaud

Julien HERTIG, FASe -Transit, Meyrin, Genève

Adrien OESCH, Association REPER, Fribourg, Fribourg

Gonzalo PEREZ, Fondation AACTS, Vevey, Vaud

Eduardo PERIS, Ville de Lausanne, Lausanne, Vaud

Anaïs RAPO, Café Cornavin, Ville de Genève, Genève

Christel RICHOZ, Association REPER, Romont, Fribourg

Tony ROTONDO, Streetwork service mobile du Réseau Contact, Bienne, Berne

Joël SCHNEIDER, Service de la jeunesse, Bulle, Fribourg

Naïma STEIGER, Ville de Lausanne, Lausanne, Vaud

Christel TIGROUDJA, FASe, Arve-Lac, Genève

Sous la direction de

Laurent WICHT, professeur HES, Haute Ecole de Travail Social de Genève (HETS)

Coopération et remerciements

Ce référentiel a été réalisé dans le cadre d’un dialogue permanent avec les membres de la « communauté d’intérêts » du travail social hors murs.

La « communauté d’intérêts » du travail social hors murs réunit, sous l’égide d’une déclaration d’intention signée en 2012, des institutions employeuses, des instances de formation, et la plateforme romande du travail social hors murs. Elle a pour objectif de promouvoir de manière concertée le travail social hors murs en Suisse romande.

Dans cet esprit, c’est grâce au soutien concret de ses partenaires de la « communauté d’intérêts » du travail social hors murs que la plateforme romande a pu mener à bien la réalisation de ce référentiel.

Pour le soutien lors du processus d’élaboration collective de ce référentiel, par le biais de mise à disposition de temps de travail et de moyens matériels, la plateforme romande du TSHM remercie vivement :

– Association REPER

– Groupement Romand d’Études des Addictions (GREA)

– Haute École de Travail Social de Genève (HETS)

– TSHM Chablais

– Ville de Lausanne

Pour le soutien financier par le biais de la souscription qui a permis la publication du référentiel sous la forme de cet ouvrage, la plateforme romande du TSHM témoigne de sa pleine reconnaissance aux partenaires suivants :

– Fondation Genevoise pour l’Animation Socioculturelle (FASe)

– Ville de Lausanne

– Association REPER

– Groupement Romand d’Études des Addictions (GREA)

– Fondation Le Relais — Rel’ier

IINTRODUCTION

UN RÉFÉRENTIEL POUR LE TRAVAIL SOCIAL HORS MURS EN SUISSE ROMANDE

En tant que collectif des professionnels, la plateforme romande du Travail Social Hors Murs (TSHM)2 s’est attachée à élaborer collectivement et sur un mode participatif ce référentiel du travail social hors murs.

La pratique du TSHM est encore bien souvent peu connue. Elle peut apparaître comme opaque aux yeux d’un observateur externe non averti. Les praticiens eux-mêmes rencontrent parfois des difficultés à expliciter leur action au quotidien.

Pourtant, la pratique du travail social hors murs est bien un agir professionnel qui se déploie au carrefour des valeurs exprimées dans la charte, des mandats institutionnels et de la pratique engagée sur les terrains au sein des collectivités locales.

Mais, ce qui fait référence pour le travailleur social hors murs ne peut être mobilisé de manière statique, mécanique comme le prescrirait un guide de « bonnes pratiques ». Au contraire, le référentiel du TSHM doit être résolument élaboré dans un aller-retour permanent entre les différents éléments identifiés de la pratique et leur agencement particulier en fonction d’une situation d’intervention donnée et du contexte spécifique dans laquelle elle se déploie.

En d’autres termes, le travail social hors murs met en œuvre un travail « sur mesure » et son savoir-faire s’actualise en permanence dans le cours de l’exercice professionnel lui-même.

LA FORME DE CE RÉFÉRENTIEL

Afin de rendre compte de la finesse de l’exercice de la pratique et de tenter de répondre à la question : comment fait-on du travail social hors murs, la plateforme romande a résolument construit son référentiel en deux parties qui invitent le lecteur à effectuer, lui aussi, un aller-retour. Un aller-retour qui se décline entre une typologie qui réduit volontairement la complexité des éléments de pratiques, afin de mieux les identifier et une diversité de récits d’intervention rédigés par les professionnels de la plateforme qui témoignent de la complexité de l’agencement de ces éléments en situation.

Le cœur de cet ouvrage est constitué des deux parties de ce référentiel :

– La première partie (chapitre IV) présente la typologie des pratiques sous la forme d’un tableau structuré en fonction des différents niveaux d’engagement des éléments de la pratique que sont le cadre éthique et déontologique, le sens de l’action, les actions elles-mêmes et enfin les moyens mis en œuvre. Elle permet au lecteur un repérage aisé de ces éléments-clés.

– La seconde partie (chapitre V) donne une large place aux récits des TSHM romands. Ces récits sont agencés autour des différentes dimensions de l’intervention, l’action individuelle, l’action collective et l’observation qui font l’objet chacune d’un préambule explicatif.

Pour chacun des récits, le lecteur est invité à prendre la mesure du savoir-faire en situation mobilisé par le TSHM à l’aide d’une introduction en encadré qui montre l’agencement particulier des éléments de la pratique à l’œuvre dans la situation présentée. En fin de récit, un glossaire nomme explicitement ces éléments en référence à la typologie.

Au préalable, le chapitre II met en lumière l’importance de la rédaction de ce référentiel pour la plateforme et plus largement la place qu’occupe un référentiel professionnel dans l’ensemble des textes qui encadrent le travail social hors murs.

Le chapitre III revient quant à lui sur l’importance de la dimension collective et participative mobilisée lors du processus d’élaboration et de rédaction, ainsi que sur la méthodologie mise en œuvre.

Enfin, au terme de la conclusion, la postface donne la parole aux membres de la communauté d’intérêts pour leur permettre de commenter ce référentiel.

2 En Suisse romande coexistent plusieurs appellations pour qualifier cette forme de travail social : Travail Social de Proximité (TSP), éducation de rue, etc. Dans ce référentiel nous retiendrons l’appellation Travail Social Hors Murs (TSHM). L’abréviation TSHM sera employée ici pour désigner à la fois la pratique et les praticiens.

IIUN RÉFÉRENTIEL DE PRATIQUES POUR COMPLÉTER LA CHARTE

LES BESOINS DE LA PLATEFORME

La question de l’identité professionnelle des TSHM a toujours été un point récurant lors des échanges au sein de la plateforme suisse romande des travailleurs sociaux hors murs (plateforme rattachée depuis 2003 au GREA — Groupement Romand d’Études des Addictions). L’interrogation était également présente quant à la nécessité de définir ses pratiques et de développer les prémices d’un langage commun.

Afin d’établir les principes de travail qui régissent le travail social hors murs, la plateforme publie en 2004, la « Charte du travail social hors murs »3, avec le concours de l’organe suisse alémanique de travail social hors murs (FaGass). Cette charte permet également aux professionnels, ayant des publics cibles différents et travaillant dans des régions et des contextes variés, de s’identifier au travail social hors murs à travers la reconnaissance de principes de travail rassembleurs.

Le référentiel TSHM

Puis, en 2011, après de nombreuses discussions, la plateforme se positionne positivement quant à la mise en œuvre d’un chantier référençant les pratiques TSHM. Un groupe de travail composé de TSHM est formé dans le but de mener à bien le processus de création du présent référentiel.

Afin de trouver les soutiens nécessaires, pour ce qui s’avérera être un travail de longue haleine, le groupe de travail se rapproche de diverses institutions employeuses et d’une instance de formation.

L’idée d’un référentiel TSHM autodéterminé apparaît…

Petit à petit, le choix du groupe de travail se porte sur un référentiel autodéterminé, un référentiel rédigé par et pour les professionnels. L’effet escompté de ce dernier est une meilleure compréhension de ce champ professionnel et une plus grande visibilité. Les résultats auront pour visée de permettre à la profession de s’autodéterminer en s’axant uniquement sur son action pragmatique.

… ainsi que celle d’une communauté d’intérêts

Parallèlement, le groupe de travail invite les institutions employeuses de TSHM, le GREA et la HETS-Genève à s’unir afin de créer une communauté d’intérêts. Cette dernière a pour finalité de resserrer les liens entre la plateforme des TSHM, les institutions employeuses et les instances de formation. Elle a également pour objectifs la promotion du travail social hors murs et l’explicitation des principes et de ses diverses réalités.

La récolte des données à Mauborget, le point de départ

Le 31 août 2012, le groupe de travail propose une journée de travail collectif aux TSHM de Suisse romande. Ces derniers sont conviés à participer à des ateliers de travail à Mauborget et à partager leurs pratiques professionnelles. Cette journée fut incontournable dans le processus de création de ce référentiel. Ce fut également le moment idéal pour signer la déclaration d’intention liant les membres de la communauté d’intérêts.

LA PLACE D’UN RÉFÉRENTIEL DANS « L’ENCADREMENT » DU TSHM

Les métiers du social se construisent dans un double mouvement. Leurs objectifs et leurs actions sont déterminés par le cadre prescrit de la commande publique et institutionnelle : il s’agit de répondre à un besoin social repéré dans la collectivité et de le mettre à l’agenda politique par le biais des mécanismes institutionnels.

Mais, dans le même temps, ces métiers se construisent par le bas, sur le socle des valeurs partagées et défendues par les praticiens du travail social et par l’apprentissage de savoir-faire. Un apprentissage qui s’opère par le biais de l’expérience transmise par les professionnels expérimentés aux professionnels débutants et par le truchement d’une formation certifiante dispensée par des écoles professionnelles.

Ainsi la construction de l’identité d’un professionnel du social comme le TSHM, et par là son engagement dans l’action au quotidien, appelle une réflexion permanente autour de son positionnement entre trois types d’appartenances :

– son appartenance institutionnelle à une institution employant des TSHM,

– son appartenance professionnelle au collectif de la plateforme des TSHM romands

– son parcours personnel de formation, auquel il conviendrait encore d’ajouter la diversité des trajectoires de vie propre à chacun.

Considérer que la profession de travailleur social n’est pas uniquement déterminée par le pôle institutionnel implique une vision exigeante des métiers de l’humain au service de la collectivité. Cette vision exigeante ne réduit pas les professionnels à de simples exécutants de la commande institutionnelle, mais elle les place résolument en position de participer à l’observation des questions sociales et à la construction des réponses à apporter aux personnes concernées.

Dès lors, ce mouvement complexe entre ces différents pôles peut se dérouler en osmose lorsque la commande institutionnelle s’inscrit dans les cadres de références de la profession, par exemple lorsqu’il s’agit de soutenir des jeunes ou des adultes en situation de précarité. Mais il peut aussi se dérouler en tension, dans le cas où la commande publique enjoint les TSHM à réguler les comportements des personnes dans l’espace public.

Ces situations de tensions impliquent alors d’être en mesure de débattre, d’échanger entre les différents acteurs, et pour cela il importe de pouvoir se référer aux tiers neutres que sont les textes de référence qui encadrent ces différents pôles.

Le tableau suivant permet de comprendre l’agencement des différents textes de références existants pour chacun des pôles concernés. Il s’agit alors de distinguer les textes qui mettent en exergue les valeurs qui encadrent l’action sociale ainsi que les finalités de l’intervention, des textes qui eux, s’attachent à décrire les logiques de cette intervention.

Dans le pôle institutionnel, l’on trouve généralement des textes qui décrivent la mission de l’institution. Une mission qui s’entend comme la description du cadre de la réponse institutionnelle à un problème public identifié au sein d’une collectivité. Cette mission est étayée par des textes décrivant le mandat du TSHM. Un mandat qui a une valeur de prescription puisqu’il désigne les principaux axes d’intervention que les praticiens sont amenés à emprunter pour mener à bien la mission de l’institution.

S’agissant du pôle professionnel, la charte romande du TSHM élaborée collectivement au sein de la plateforme s’attache à mettre en avant les valeurs qui sous-tendent l’action des travailleurs sociaux en balisant ainsi le cadre déontologique de l’action professionnelle. Mais, ce faisant, elle ne dit que peu de choses des pratiques engagées au quotidien sur le terrain.

Dès lors, tout l’enjeu de la construction d’un référentiel de pratique au sein du pôle professionnel se présente comme la capacité des professionnels eux-mêmes à montrer comment l’exercice de la pratique peut se faire dans le respect du cadre déontologique de la charte. Il s’agit alors pour les praticiens de mettre en lumière pratiques et savoir-faire afin d’expliciter ce qu’ils font – comment ils le font – dans quels contextes – et avec quels supports et quels outils.

3http://www.grea.ch/charte-des-tshm

IIIUNE MÉTHODOLOGIE COLLECTIVE ET PARTICIPATIVE

Dans la perspective de nommer leurs pratiques et de tenter de montrer la complexité de l’engagement de savoir-faire professionnels, les TSHM de la plateforme avaient deux options. La première consistait à confier à un intervenant externe la mission de rencontrer les TSHM, de recueillir leurs représentations du métier, d’observer les pratiques et de livrer ensuite une analyse distanciée des savoir-faire à l’œuvre. L’autre option consistait à tenter de conduire ce mécanisme d’explicitation de la pratique collectivement par le biais d’un travail mené par les professionnels eux-mêmes et structuré par un soutien méthodologique externe. C’est cette seconde option d’un travail collectif et coopératif qu’a résolument choisie la plateforme pour mener à bien la construction de ce référentiel.

Travailler collectivement impliquait alors de pouvoir faire participer l’ensemble des professionnels de la plateforme qui le désiraient et, dans le même temps, d’être en mesure de traiter le matériel ainsi recueilli dans un collectif plus restreint. C’est à cette fin qu’a été désigné au sein de la plateforme un petit groupe de TSHM accompagné d’un enseignant HES chargé de la dimension méthodologique.

La démarche coopérative de construction du référentiel s’est constituée sur la base d’un aller-retour entre le collectif élargi des TSHM de la plateforme et le collectif plus restreint du groupe de travail.

De cette dialectique entre la plateforme et le groupe de travail, il est possible de dégager deux étapes principales. La première a permis la création de la typologie des pratiques présentée dans cet ouvrage. La suivante a consisté à montrer toute la complexité de la mise en œuvre de ces pratiques sur le terrain par la rédaction de récits basés sur des situations d’intervention singulières réellement vécues par les praticiens et situées dans les différents contextes d’action du TSHM en Suisse romande.

UNE PREMIÈRE ÉTAPE : RÉDUIRE LA COMPLEXITÉ PAR LA CONSTRUCTION D’UNE TYPOLOGIE DES PRATIQUES

Les ateliers de Mauborget, un premier recueil des pratiques

Le coup d’envoi de la construction du référentiel de pratiques a été donné par la plateforme qui a invité l’ensemble de ses membres à une journée de travail dans les brumes du pied du Jura à Mauborget, comme en témoigne l’invitation diffusée par la Plateforme.

Cette journée s’adresse à vous, travailleurs-euses sociaux-ales hors murs, éducateurs-trices de rue, travailleurs-euses de proximité,… de Suisse romande ! Nous vous proposons un espace d’échange et de réflexion sur votre pratique professionnelle. La particularité de cette rencontre est d’identifier l’ensemble des pratiques et des enjeux liés à l’intervention de terrain dans une dynamique thématique intervention – observation et individuelle – collective par l’entremise d’ateliers.

Les données récoltées grâce aux enregistrements audio durant les ateliers permettront, par la suite, d’initier une première esquisse du référentiel TSHM autodéterminé, afin de définir une base commune au TSHM en Suisse romande.4

Lors de cette journée, cinquante participants issus de l’ensemble des cantons romands ont répondu présent afin de nourrir concrètement une schématisation de l’intervention qui fait consensus au sein des TSHM de la plateforme. Cette schématisation présente le croisement des axes de l’action et de l’observation de la réalité sociale sur le terrain avec les dimensions cibles de cette intervention : le collectif d’une part (la collectivité locale, les divers groupes avec lesquels les TSHM œuvrent) et l’individuel, d’autre part (les personnes concernées).

Quatre ateliers thématiques isolaient volontairement et quelque peu artificiellement les carrefours entre ces axes et ces dimensions :

– l’observation individuelle

– l’observation collective

– l’action individuelle

– l’action collective

L’ensemble des participants a pris part aux quatre ateliers afin de nommer les pratiques et leurs enjeux pour chacun de ces carrefours. À l’aide d’une technique visuelle, l’ensemble des contributions des participants a été consigné et à la fin de la journée, une multitude d’éléments de pratique, d’actions et d’enjeux de terrain ont été recueillis sur de grands panneaux.

LE TRAVAIL DE CLASSIFICATION DU GROUPE DE TRAVAIL ET LA MISE EN LUMIÈRE D’UNE TYPOLOGIE POUR RÉDUIRE LA COMPLEXITÉ DE LA PRATIQUE

Afin de prendre le relais de ce premier recensement collectif et coopératif de la diversité de pratiques, le groupe de travail a commencé par retranscrire toute la matière consignée sur les panneaux. Cette matière abondante et riche avait été livrée de manière brute par les participants aux ateliers et tout l’objectif se présentait pour le groupe de travail de structurer quelque peu les éléments mis en avant.

Après une lecture attentive de la diversité des éléments recueillis, le groupe de travail s’est attaché à élaborer un cadre d’analyse sous la forme d’une typologie qui a pour objectif de distinguer les différents niveaux de l’engagement dans la pratique, et ce tant sur le plan de l’action individuelle et collective que sur celui de l’observation.

Sur la base de cette typologie, le groupe a entrepris un important travail de catégorisation afin de répartir les éléments recueillis dans ces différents niveaux.

Les résultats de ce travail ont permis de construire la typologie des pratiques sous la forme d’un tableau synthétique.

UNE SECONDE ÉTAPE : REVENIR À LA COMPLEXITÉ DE L’AGENCEMENT DES SAVOIR-FAIRE EN SITUATION

Si la typologie des pratiques élaborée lors de ce premier mouvement distingue clairement les différents niveaux de l’action, elle ne dit rien en revanche de la complexité de l’agencement de ces éléments dans un contexte et dans une situation donnée. Autrement dit, cette typologie ne fait pas apparaître les savoir-faire métiers en situation5.

La rédaction de récits de pratiques

Afin d’être en mesure de mettre en lumière la complexité de ce savoir-faire en situation, le groupe de travail a invité les membres de la plateforme à rédiger des récits de pratiques à partir de chacun des axes d’intervention repérés par la typologie.

Chaque TSHM a pu choisir l’axe d’intervention qu’il souhaitait aborder avec le récit d’une situation de pratique en lien avec son contexte d’intervention.

Les consignes données aux auteurs les invitaient à se référer aux différents niveaux de la typologie et à nommer les éléments qu’ils avaient mobilisés pour agir dans la situation d’intervention choisie.

Dix-huit TSHM de l’ensemble des cantons romands ont proposé des récits issus de leurs actions au quotidien, chacun avec leur angle d’attaque, leur sensibilité, leur style d’écriture propre.

L’analyse des récits de pratiques avec les éléments de la typologie : un modèle dynamique des pratiques

La sensibilité, l’originalité, le foisonnement de ces récits de pratique ont sans doute dépassé les espérances du groupe de travail. Dans chacun des récits se retrouvent les différents niveaux distingués par la typologie, mais dans chaque récit, le choix et l’agencement des éléments explicités dans la typologie sont mobilisés de manière singulière.

Le groupe de travail s’est alors attaché à tenter d’expliciter le lien entre la complexité de chacun de récits et les éléments mobilisés et agencés issus de la typologie des pratiques. C’est de ce croisement qu’émerge l’art de faire, le savoir-faire du TSHM en situation.

4 Invitation à la Journée de réflexion sur la pratique du travail social hors murs. 31 août 2012

5 Libois, J. (2013). La part sensible de l’acte. Présence au quotidien en éducation sociale. Genève : éditions ies.

IV.LA TYPOLOGIE DES PRATIQUES

VLES RÉCITS DE PRATIQUES

AUTOUR DE L’ACTION INDIVIDUELLE

Il n’est pas aisé de dissocier les axes de l’action individuelle, de l’action collective et de l’observation, car comme nous le mettrons en exergue par la suite, ces axes se croisent, s’entrelacent, s’entrechoquent, voire se combinent et s’assemblent tout en même temps lors de la mise en place d’une intervention sociale hors murs. Dans ce processus réside, sans nul doute, toute la complexité de l’action sociale traditionnelle et plus particulièrement l’action sociale hors murs qui n’a, actuellement, que peu d’écrits et de recherches pour en rendre compte.

Dans ce chapitre, l’action individuelle est abondamment illustrée, elle décrit de façon substantielle la pratique des TSHM en Suisse romande. Ceci démontre, entre autres, l’importance que revêt cet axe pour les intervenants de terrain.

Il s’articule, pour l’essentiel, autour de trois dimensions : le généraliste polyvalent, la notion de confiance et la proximité/accessibilité des TSHM.

Le rôle de généraliste permet ce double mouvement antinomique qui s’articule d’une part comme un « limitateur » à l’action, car le généraliste n’a pas de spécialisation à proprement parler, d’autre part il est cet omnipraticien, ouvert à tous contextes, à tous individus et devant composer avec tous types de situations. Il est ce que Marie-Odile Marty6 qualifie de « spécialiste de la non-spécialité » qui permet, selon elle, au travailleur social « d’être toujours là où apparaissent de nouvelles marginalités, de nouveaux symptômes de dysfonctionnement ».