Se faire des amis - Zahira Bakhtaoui - E-Book

Se faire des amis E-Book

Zahira Bakhtaoui

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Beschreibung

À l’intérieur d’un monde saturé de bruit et de connexions superficielles, Se faire des amis offre une respiration. À travers un dialogue vivant et sensible, deux voix se croisent, s’interrogent et nous invitent à repenser nos liens : qu’est-ce qu’une amitié vraie ? Comment rester authentique dans une société qui valorise le paraître ? Où trouver notre place sans nous trahir ? Sans recettes miracles, mais avec justesse et humanité, cet ouvrage mêle réflexions, humour et éclairages psychologiques pour nous guider, pas à pas, vers des relations plus sincères.

À PROPOS DE L'AUTRICE 

Zahira Bakhtaoui s’est tournée tardivement vers l’écriture comme on revient à une source intérieure longtemps contenue. Éprise de liberté et de chemins non tracés, elle refuse les cadres figés et s’attache à une littérature qui bouscule, relie et révèle l’indicible. Pour elle, écrire n’est pas un exercice de style, mais un acte vivant, spontané, presque joyeusement irrévérencieux. À travers ses mots, elle cherche à briser les carcans d’une société trop rigide et à redonner souffle à ce qui, en chacun, demande à être dit.


Zahira Bakhtaoui s’est tournée tardivement vers l’écriture comme on revient à une source intérieure longtemps contenue. Éprise de liberté et de chemins non tracés, elle refuse les cadres figés et s’attache à une littérature qui bouscule, relie et révèle l’indicible. Pour elle, écrire n’est pas un exercice de style, mais un acte vivant, spontané, presque joyeusement irrévérencieux. À travers ses mots, elle cherche à briser les carcans d’une société trop rigide et à redonner souffle à ce qui, en chacun, demande à être dit.

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Seitenzahl: 179

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Zahira Bakhtaoui

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Se faire des amis

Construire un réseau

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Zahira Bakhtaoui

ISBN : 979-10-422-7809-0

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

Avant-propos

 

 

 

Qui ne voudrait pas avoir la confiance d’un superhéros… même dans les situations les plus banales du quotidien ? Cette assurance tranquille pour oser un regard, lancer une conversation, ou simplement se sentir bien avec les autres. Pourtant, se faire des amis, tisser des liens sincères, bâtir un réseau solide… reste un défi universel – parfois déroutant, souvent décisif.

Ce livre s’adresse à toutes celles et ceux qui cherchent à mieux vivre leurs relations. Que vous soyez en pleine ascension, en reconstruction, ou en introspection, vous y trouverez de quoi nourrir votre réflexion. Ce n’est ni une méthode miracle ni un guide rigide, mais une boîte à outils vivante : des idées, des expériences, des pratiques à explorer pour enrichir vos échanges, votre confiance, et votre lien aux autres.

L’essai prend la forme d’un dialogue à deux voix – complices, humaines, parfois acides – comme une conversation prolongée avec un ami cher, un peu moqueur, beaucoup bienveillant. Ensemble, ces deux regards explorent des pistes tirées de la psychologie, de la philosophie, mais aussi de la sociologie, de l’anthropologie et des neurosciences.

On y parle de tout ce qui nous touche : la confiance en soi, la gestion des conflits, les émotions, l’intelligence émotionnelle, la transparence, l’art du « small talk », et bien plus encore. Des relations toxiques à la communication non-violente, des nouvelles technologies à leur impact sur nos liens, ce livre aborde une multitude de sujets palpitants, qui éclairent les dynamiques humaines avec lucidité et simplicité. Et si, à travers ces pages, vous découvriez une nouvelle façon d’être en lien – plus authentique, plus libre, et surtout… plus joyeuse ?

 

 

 

 

 

Début de la discussion…

quelque part dans le sud de la France

 

 

 

— Salut, j’ai absolument besoin que ça change, mon bien-être émotionnel est sur le point de s’effondrer, d’imploser. Je sens que je deviens folle.

— Attends, tu n’exagères pas un peu ! Tu vis dans un appartement confortable, tu manges à ta faim tous les jours, et tu as même le loisir de contempler ton mal-être sans qu’on vienne te déranger, le luxe ! Et encore, je suis plutôt sympa : la guerre est à la porte de l’Europe, tu ne l’entends pas ?

— Euh ! Non, pas vraiment, mais que dois-je entendre précisément ? Attends ! Attends ! La Russie !... Ils nous font chier ! Y a qu’à envoyer un tueur à gages, descendre ce salaud et qu’on n’en parle plus.

— Méthode radicale, mais efficace, j’avoue.

— On a tous notre échelle de valeurs, notre échelle de souffrance, et inutile de comparable l’incomparable. Oui, c’est triste : la misère, la famine, les violences faites aux femmes, aux enfants, et même les violences faites aux hommes par leurs bonnes femmes. Aujourd’hui, on voit de tout. Même les partis politiques s’allient au diable pour rester au pouvoir et, pour couronner le tout, les extrêmes nous grignotent de l’intérieur. Au lieu de m’accabler, tu sais que la solitude tue. C’est un mal que l’on ne voit pas, mais qui mine et ronge toutes les facettes de notre vie.

— Tu m’en diras tant. Alors c’est ça qui te ronge, cette foutue solitude. Ici, on a tendance à avoir le ventre plein, mais on souffre de solitude.

— Tu sais, lors de mes voyages, surtout en Afrique, j’ai remarqué la proximité des gens et le bouillonnement de la vie sociale : dans les marchés, dans les maisons. C’est quelque chose de très beau à voir, de très beau à vivre. Durant mes deux mois passés à Bamako, je me suis sentie vivante, bien plus qu’en dix ans passés à Paris. Paris a été la ville où je me suis sentie la plus seule, et partout où l’on va, il y a foule. Quel paradoxe !

— En même temps, tu n’as rien d’une Parisienne !

— Ça va ! Avant que tu me bassines avec ta morale, la guerre dans le monde, je vais t’expliquer. J’arrive à l’aube de mes 36 ans, je vis dans une ville de province où, parfois, j’ai l’impression que le temps s’est arrêté. D’un côté, il y a les personnes âgées et les familles bien sous tous les rapports, je veux dire hétéronormées, et entre les deux, il n’y a rien, un vide abyssal. On peut dire que pour la diversité, on repassera demain. Et d’un point de vue culturel, ce n’est pas mieux non plus.

— J’adore ton sens de l’exagération !

— Je n’exagère pas de beaucoup, tu sais ! Mais je vis seule, comme tu l’auras compris. Avec un chat blanc que j’appelle Neurasthénie.

— Tu en as des bonnes comme ça !

— Non, je vis bien seule. Quand je parle de solitude, ce n’est qu’un doux euphémisme. Depuis quelque temps, et sans vraiment m’en rendre compte, j’ai coupé les ponts avec mon travail, une grande partie de mes relations amicales, ainsi qu’avec les sorties « mondaines » et même les moins mondaines, au profit d’une introspection d’abord choisie, puis subie, et qui, à vrai dire, perdure depuis.

— Ah oui, c’est sûr que vu comme ça, ta situation a de quoi angoisser même un moine zen.

— Et c’est moi qui ai le sens de l’exagération !

— Je ne vais pas te faire un topo sur les relations humaines, ni te dire comment arrêter de te prendre la tête et sortir de chez toi, ou encore cesser d’être égocentrique. Au final, c’est à toi de choisir…

— Non, ce mal-être, ou cette chose, est bien plus profond. Je ressens le besoin de faire table rase de tout ce que ma vie a été : un vrai boulot qui n’en serait pas un, tant le plaisir de l’exercer serait grand ; des relations authentiques, durables, et surtout, de comprendre ce mal-être que j’ai l’impression de ne pas être la seule à ressentir. Ce mal-être qui règne dans nos sociétés modernes, où l’opulence nous bouche les artères.

En parlant de théorie, j’en aurais bien besoin. Comment font les gens qui semblent tout réussir ? Est-ce qu’ils mettent leur cerveau en mode off ?

Sont-ils faits de chair et d’os ? Se fichent-ils royalement des autres ? Ou bien, leur désir de réussite est-il si ardent qu’il agit comme un trou noir, absorbant toute la lumière sans ménagement ?

— » Réussissent tout », de quoi parles-tu ? La réussite est un concept très subjectif. Tout d’abord, tout dépend de ce que l’on considère comme une réussite. Moi, ce que je vois dans ce que tu me dis, c’est une personne en quête de sens !

— Tu vois bien de quoi je parle ? Les gens ne se comportent pas de la même façon avec un SDF qu’avec un mec avec du blé…

— Les gens sont souvent aveuglés par leur propre aveuglement… Tu sais, le bourrage de crâne dès le plus jeune âge, et les pubs qui tournent en boucle n’arrangent rien. Quand tu essaies de regarder un programme sur la TNT, qui n’est déjà pas très intéressant en soi… Eh bien, on te sature l’esprit avec de prétendues belles voitures, des personnes parfaites, et on glorifie le jeunisme, la beauté, etc. Peut-on encore vieillir en paix ?

— Attends une petite minute, je décide d’être très moche juste pour les faire chier !

— Pas sûr que cela fonctionne ! Là, c’est seulement ton miroir qui va péter un câble et probablement ta voisine de palier si elle est un peu trop sensible !

— Situation désespérée, action désespérée ! La réussite avec un grand « R » serait pour moi une forme géométrique qui posséderait plusieurs facettes, formant un ensemble équilibré et harmonieux.

— Je trouve ta version très poétique… En parlant de forme géométrique, ça me fait penser à la pyramide de Maslow sur les besoins fondamentaux de l’être humain… Maslow a classé les besoins fondamentaux dans une pyramide… Cette théorie peut expliquer pourquoi notre besoin de socialiser est si fondamental. Cette théorie pourrait également être l’une des facettes de ta réussite ?

— Oui, que dit cette théorie ?

— Maslow a classé cinq besoins fondamentaux de l’homme sous la forme d’une pyramide. À sa base se trouvent les besoins physiologiques, suivis du besoin de sécurité, puis du besoin d’appartenance, ensuite du besoin d’estime, et enfin du besoin d’accomplissement, qui occupe le sommet. La pyramide de Maslow repose sur une idée simple : un individu ne peut pas trouver la motivation nécessaire pour satisfaire une catégorie de besoins supérieurs tant qu’il n’a pas satisfait une catégorie inférieure. Ce mécanisme s’applique à chaque niveau de la hiérarchie des besoins définis par Abraham Maslow.

— Cette idée de motivation me rappelle l’image de l’âne qui avance, attirée par la carotte suspendue devant lui. En somme, si je saisis bien : « pas de bras, pas de chocolat », ce qui revient à dire qu’il n’y a pas de bonheur possible sans répondre d’abord à ses besoins essentiels. Vraiment brillant, ce Maslow !

— Oui, il est évident que la métaphore de la carotte qui motive l’âne prête à sourire… Mais, plus sérieusement, sur ce même sujet, une série d’études menées par des chercheurs de Harvard pendant plus de 75 ans a montré que les êtres humains les plus heureux sont ceux qui maintiennent des relations sociales de qualité tout au long de leur vie.

Ce n’est donc pas le nombre d’amis que l’on a qui compte, mais bien la qualité des liens que l’on entretient avec eux. Ces relations nous maintiennent en bonne santé physique et mentale. Si les relations harmonieuses avec notre famille, nos amis et notre communauté contribuent à notre bien-être, la solitude, quant à elle, s’avère être un véritable poison, qui peut littéralement nous détruire.

Ces recherches permettent également de mieux comprendre les raisons qui poussent certaines personnes à vivre dans l’isolement. Bien que des facteurs individuels ou des traits de personnalité puissent entrer en jeu, la cause principale réside souvent dans l’accumulation d’expériences émotionnelles négatives. Autrement dit, on ne naît pas seul, on le devient.

— Pour conclure, le lien avec Maslow se limite à la forme géométrique de sa célèbre hiérarchie des besoins. Quant à moi, je refuse de réduire la réussite à la simple obtention d’une carotte comme l’obtention d’un emploi, d’une famille ou d’amis, ou à la satisfaction basique de certains besoins.

— Il y en a qui s’en contenteraient… Mais je comprends ce que tu veux dire. On peut avoir tout dans la vie : un travail, une famille, des amis, et pourtant ressentir de l’ennui, un vide profond, et finalement éprouver un profond sentiment d’insatisfaction.

J’apprécie particulièrement cette définition de la réussite, dans son sens sociologique : « Réussir aujourd’hui, c’est être capable d’inventer son propre modèle, de tracer les contours de son unicité. » Cette vision n’est-elle pas tout de même plus attrayante que celle du modèle libéral traditionnel associé à la réussite ?

— Oui, cette définition peut sembler séduisante sur le papier, mais je la trouve bien trop abstraite. Ce que je perçois principalement dans cette définition, c’est une forme d’égoïsme et d’égocentrisme dont certains font preuve. C’est, en réalité, une véritable hémorragie du collectif.

— Ce que je perçois dans tes propositions, c’est une position critique, voire en décalage, par rapport aux concepts de réussite.

— Je pense que les gens manquent tout simplement d’imagination et de courage. Cela dit, il y a une part de vérité dans ce que tu dis : je dois bien admettre que je suis peut-être légèrement rebelle. En effet, je me reconnais davantage dans la vision de Cynthia Fleury, philosophe, qui perçoit la réussite comme une double injonction, à la fois personnelle et sociale. Chacun aspire à réussir, mais également à le démontrer, notamment à travers les réseaux sociaux. Selon elle, cela conduit à une véritable « aliénation sociale et psychique ».

— Voici une autre définition proposée par Alain Girard concernant la notion de réussite sociale. Selon lui, un homme qui a réussi est celui qui a atteint le sommet de l’échelle sociale. La reconnaissance de sa réussite lui est attribuée par les autres, et plus particulièrement par le groupe social auquel il appartient. Il s’agit d’un consensus social qui définit, de manière générale, celui qui est considéré comme ayant réussi, sur la base de critères propres à cette société, tels que la gloire, la richesse, l’autorité, le pouvoir, etc. Bonus intéressant : bien que cette définition remonte à 1961, elle reste étonnamment actuelle.

— Vu sous cet angle, je me sens légèrement mieux… Parler de sanction sociale, ça ne donne pas envie… Ça fait même flipper !

— Pourrais-tu m’en dire davantage sur ta propre définition de la réussite ? À quelle forme géométrique fais-tu référence ? Et pourquoi, selon toi, devrait-elle s’agir d’une forme géométrique ?

— Peu importe la forme qu’elle prend, ma propension à tout contrôler s’exprime sans doute à travers ce langage géométrique. Avant tout, j’aimerais comprendre comment établir des relations humaines à la fois saines, stimulantes et enrichissantes, toutes ces interactions qui participent au sentiment d’épanouissement. On pourrait dire que cela représente la première facette de ma figure géométrique imaginaire.

— Je suis convaincu que les relations saines que tu souhaites dépendent d’un état d’esprit positif, cultivé en amont. Comme on dit : « Mauvais état d’esprit, mauvais moment dans la vie. » Quelle que soit la situation, un état d’esprit négatif accroît les chances que les choses prennent une mauvaise tournure.

— Attends, tu ne vas quand même pas me sortir le discours habituel sur le développement personnel. De nos jours, on l’individualisme est valorisé au détriment du lien social. Et voici où cela nous conduit : l’émergence d’égos démesurés, de personnes dépressives, de névrosés… bref, de gens perdus, parmi lesquels je me compte, pour ne rien arranger !

— Attention, tu risques de virer « coco » avec toutes tes idées sur le collectif. Mais avant de porter un jugement, prenons le temps d’examiner ce que le développement personnel peut nous apporter. Ne penses-tu pas que tout ce qui a le potentiel d’améliorer la vie des gens mérite qu’on s’y intéresse ?

— Absolument, Maître Yoda avec sa sagesse venue d’une autre galaxie !

— Tu verras, le développement personnel, c’est passionnant ! J’aime particulièrement reprendre ces célèbres vers de l’écrivain britannique William Ernest Henley, extraits de son poème Invictus. Ils résument à eux seuls l’essence du développement personnel et de la quête de soi : « Je suis le maître de mon destin, le capitaine de mon âme. »

— Je kiffe… Restons sur cette belle phrase !

— Ne te fais pas d’illusions, tu n’échapperas pas à mon discours… Le développement personnel, c’est une démarche qui invite à une réflexion profonde sur soi-même et à la mise en valeur de son potentiel, dans le but d’acquérir une meilleure connaissance de soi. Cela permet à chacun de comprendre ses aspirations authentiques et de tendre vers leur réalisation, en se fixant des objectifs clairs et motivants.

— J’ai l’impression que tu me parles d’une émission de télé-réalité d’aventure bien connue… en mode guerrier.

— Le développement personnel incarne à la fois un mode de vie, un état d’esprit et une méthode destinée à redonner du sens à son existence. N’est-ce pas une belle évolution ? Autrefois, on se souciait peu de savoir si les gens allaient bien… Évoquer de telles idées aurait pu nous valoir d’être condamnés au bûcher, sans même un procès.

— C’est certain, vu sous cet angle… mais ce temps-là semble tout de même révolu, non ? Bien que je perçoive ces idées de développement personnel comme une sorte de fourre-tout, je dois admettre que cette quête de sens est à la fois universelle et respectable. Mais j’ai une question : que fait-on lorsque cette quête ne mène nulle part, alors qu’il faut continuer à payer les factures ? Sans parler du regard des autres… et cette sensation d’inutilité qu’ils nous renvoient. Avant, je faisais un travail que je n’aimais pas, et aujourd’hui, j’ai la désagréable impression de brasser de l’air… Attends un instant ! Je vais expliquer à ma conseillère France Travail que je suis en quête de ma véritable nature. Tu crois qu’elle comprendra et que je pourrai continuer à percevoir mes indemnités ?! Honnêtement, il y a un décalage flagrant entre ce que tu me dis et la réalité du quotidien… celle des gens ordinaires.

— Eh bien, as-tu déjà entendu parler du concept de jeûne intermittent ? Il est peut-être temps de l’explorer ! Blague à part, cela peut sembler décalé, et ça l’est probablement, mais il est essentiel de s’adapter à cette réalité. Il faut chercher des solutions et trouver un juste équilibre entre qui tu es et ce que tu souhaites accomplir.

— Cela me rappelle ce que nous évoquions tout à l’heure : la part de notre individualité et la part collective que nous devons assumer. Il s’agit de trouver un équilibre en composant harmonieusement entre les deux.

— Je suppose…

— Accorde-moi une minute, je voudrais comprendre ce que le développement personnel dit à propos de cette fameuse quête de sens. Tu sais, je commence un petit peu à revoir ma manière de percevoir le développement personnel. « Le changement, c’est maintenant ! ».

— Soyons clairs : je ne voterai ni pour toi ni pour François Hollande. Revenons à notre quête de sens et au développement personnel ! Comme si savoir qui nous sommes et ce que nous voulons dans la vie n’était pas déjà assez compliqué, il fallait en plus y ajouter quelques siècles de réflexion philosophique et psychologique.

L’aventure commence il y a plusieurs siècles : des philosophes aux gourous modernes, en passant par la folie des années 70 et 80 jusqu’à l’essor technologique. Mais ce n’est que récemment que tout cela a pris des airs de feuilleton Netflix.

Au XIXe siècle, des esprits brillants comme Ralph Waldo Emerson et Henry David Thoreau nous ont offert leur sagesse sur l’importance de se connaître soi-même et de vivre de manière authentique. Merci à eux, mais on attend toujours le mode d’emploi !

Au début du 20ᵉ siècle, Carl Jung et Abraham Maslow ont repris le flambeau avec des concepts comme l’estime de soi et l’autoactualisation. En somme, l’idée était : « devenez la meilleure version de vous-même », mais sans pression, bien entendu.

— Je pense être la meilleure version de moi-même lorsque, au cours de la journée, on ne m’a pas qualifiée plus d’une ou deux fois de « petite conne ». Ce n’est pas un mauvais ratio, non ?

— Te connaissant, je confirme que le ratio est excellent. Donc au cours des années 1950 et 1960, le développement personnel a fait une entrée remarquée dans la culture populaire, porté par des auteurs tels que Norman Vincent Peale avec Le Pouvoir de la Pensée positive et Dale Carnegie avec Comment Gagner des Amis et Influencer les Gens. Après tout, quoi de plus emblématique du « succès » qu’un bon livre d’autoamélioration trônant sur votre table de chevet ?

Les années 1970 et 1980 ont ensuite marqué l’essor des techniques de méditation, de visualisation et de pensée positive. Puis, dans les années 1990, des figures comme Tony Robbins ont révolutionné le domaine en rassemblant des foules dans des stades lors de leurs conférences et séminaires. Après tout, pourquoi se contenter d’un livre quand on peut assister à un véritable show à l’américaine ?

— Ah non, je ne marcherai pas sur le feu pour surmonter mes peurs comme ses propres adeptes.

— Rassure-toi. Aujourd’hui, le développement personnel est plus populaire que jamais, et il s’est adapté aux nouvelles technologies. Merci les applications mobiles et les réseaux sociaux ! Maintenant, on peut recevoir des conseils de vie en temps réel... parce que se remettre en question à deux heures du mat’, c’est tellement 3ᵉ millénaire, entre les applis et réseaux sociaux.

En résumé, le développement personnel, c’est comme le vin : ça se bonifie avec le temps. Des philosophes de jadis aux applications de dernière génération, il y en a pour tous les goûts et toutes les époques. Certains bien-pensants diront : « Alors, prenez du temps pour vous, définissez vos objectifs et plongez dans l’aventure du développement personnel. »

— Ça fait très secte, ta dernière phrase !

— Je te testais pour savoir si tu suivais !

— Du coup, j’attends pour les techniques… Parce qu’après tout, qui ne rêve pas d’une meilleure estime de soi – et d’un peu plus de confiance au quotidien ?

— En voilà une idée toute simple : les bases de la psychologie du développement personnel préconisent d’abandonner les idées négatives et de les reformuler en pensées positives. C’est une ontologie optimiste et simplificatrice qui est associée au volontarisme.

— C’est quoi ce charabia « d’ontologie optimiste et simplificatrice… » ? Tu crois que c’est en me parlant comme ça que je vais y arriver ? Tu es sérieux ?

— Excuse-moi ! Je me suis laissé porter par l’enthousiasme. Alors, Émile Coué, pharmacien et psychothérapeute belge établi à Nancy, a écrit en 1926 Maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciencieuse. Revenons plus précisément à la méthode… Il avait pour habitude de répéter vingt fois de suite et trois fois par jour cette formule : « Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux. » Il a résumé en quelques principes sa technique, appelée par la suite « Méthode Coué », qui consiste à atteindre un équilibre de l’organisme et du psychisme grâce à l’autosuggestion.

— Quelle belle formule ! Mais moi aussi, j’ai la mienne, écoute ça… Je me répète tous les matins, entre les WC et la salle de bain, que je suis merveilleuse, magnifique, même si je me sens comme une grosse « mot censuré » …

— Voici ton erreur : tu manques de positivité et de conviction !