Slatkine - 1918-2018 - Collectif - E-Book

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Beschreibung

Un hommage à la longévité des Editions Slatkine !

Chers lecteurs,
Slatkine fête en cette année 2018 ses cent ans ! Cent ans de livres à Genève, quatre générations au service du livre. À l’heure d’Amazon et de l’électronique, une telle longévité mérite d’être soulignée. De l’enseigne de la rue des Chaudronniers au Café Slatkine, de l’impression de reprints à l’édition, de la diffusion-distribution à la création de Slatkine & Cie, chaque génération a su apporter sa touche et se réinventer. Pour fêter cet anniversaire, treize écrivains ont accepté de nous livrer un texte. Illustré par le travail photographique de Nicolas Crispini, ce recueil vous fera voyager dans l’histoire de notre maison et l’univers de certaines plumes qui l’ont marquée. De la saga familiale à des récits plus personnels, en passant par l’essai ou la fiction, chacun rend à sa manière hommage à notre maison. Ce recueil est l’occasion de les remercier, eux et tous les auteurs figurant à notre catalogue, et vous, lecteurs, pour votre fidélité ; grâce à vous, grâce à eux, nous pouvons rêver au bicentenaire de la maison à la licorne.

Découvrez un recueil de textes qui vous fera voyager dans l’histoire de la maison et l’univers de certaines plumes qui l’ont marquée.

À PROPOS DE LA MAISON D'EDITION

Slatkine, en 2018, c’est :
• 5 marques d’édition ;
• plus de 14 000 titres au catalogue représentant un stock de plus de 3 millions de volumes;
• 250 nouveautés par an;
• un réseau de vente dans le monde entier;
• 20 personnes entre Genève, Paris et Bière;
• des bureaux à Chavannes-de-Bogis – 7, chemin des Chalets;
• une librairie à Paris – 3, rue Corneille, dans le VIe arrondissement;
• un café littéraire à Genève – 5, rue des Chaudronniers

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Préface1918-2018Quatre générations successives dans le commerce du livre

Par Michel-Édouard Slatkine

Parvenir au crépuscule de son existence, être le trait d’union entre deux générations d’anciens et une nouvelle génération de modernes, bien peu sont les hommes à qui ce privilège est échu ! Aussi, comme le dit Chateaubriand à la fin de ses Mémoires : « Maintenant, à vous, Messieurs ! »

Né l’année où Adolf Hitler accède au poste de chancelier de l’Allemagne, fils aîné d’un immigré russe dont le père était au bénéfice d’un passeport Nansen et d’une mère, Violette Suès, issue de la bonne bourgeoisie genevoise, sœur de Marcel Suès, plus connu sous le nom de Squibbs, grand reporter au temps de Kübler et Koblet, de Bibi Torriani, Hans Cattini et de la célèbre interjection « Pick a le puck », j’ai bénéficié, comme dans les contes de Grimm, des bienfaits d’une fée passionnée par les livres et dont le soutien ne s’est jamais démenti.

De mon grand-père, Mendel, j’ai le souvenir d’un homme d’une érudition extrême, d’une modestie sans pareille, dont l’austère bibliothèque, en grande partie en caractères hébraïques, m’impressionnait beaucoup. Comment ai-je pu ignorer qu’il était le témoin exceptionnel d’un mouvement politique qui allait bouleverser le monde ? Pourquoi n’ai-je jamais parlé avec lui de ses nombreux entretiens avec Lénine, qui lui fit cadeau d’un exemplaire de la IIe Internationale annoté de sa main ? Seule sa bibliothèque hébraïque est encore dans nos archives, l’ensemble des livres consacrés à l’Orient ayant été vendus entre 1918 et 1925 pour nourrir la famille, ruinée par l’annihilation totale des valeurs russes qu’il avait acquises en quittant Rostov-sur-le-Don, en 1905.

De mon père, je savais qu’il avait dû interrompre ses études de médecine après la ruine de Mendel, qu’il avait travaillé avec Zino Davidoff pour rouler les cigarettes qui firent le début de sa réputation et que ses premiers pas dans le métier du livre avaient été, après la Première Guerre mondiale, de se procurer les 5 francs journaliers nécessaires en revendant des livres d’occasion qu’il transportait dans une petite charrette accrochée à son vélo.

De mes grands-parents maternels, que je n’ai pas connus, décédés avant ma naissance, je conserve pieusement l’impressionnante collection de gravures et d’albums consacrés à l’âge d’or de cette Suisse que les pionniers du tourisme anglais et russes découvrirent à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle.

De ma mère, je savais qu’elle avait été l’une des premières conductrices automobiles au volant d’une « Cul de poule » achetée dans les années vingt et qu’elle consacrait ses loisirs à la création de corsages en batik, dont certains ont été présentés à l’exposition universelle de Paris de 1937.

Après des études au Collège Calvin, bardé d’une licence ès lettres de la Sorbonne, j’ai rejoint mon père qui, pour aider sa famille, passait ses week-ends à préparer des collections de périodiques que toutes les bibliothèques mondiales, notamment américaines, allemandes et japonaises, recherchaient, pour combler leurs lacunes.

Mendel Slatkine, années 1940

© Archives Slatkine

Michel Slatkine

© Archives Slatkine

Alexandre Slatkine

© Archives Slatkine

Michel, Alexandre et Anatole Slatkine

© Archives Slatkine

Je me revois encore venant dire bonjour à mon grand-père, à la librairie de la rue des Chaudronniers, où il s’était installé en 1918, à deux pas du collège où j’avais préparé ma maturité, avant d’aller acheter des « brises » et des « négros » chez Cavillier, dont la boutique jouxtait la librairie.

Quelques mois d’apprentissage chez Eugénie Droz, grand maître en philologie romane, l’achat de son fonds de livres d’occasion, dont elle n’avait plus le temps de s’occuper, tout entière tournée alors vers l’édition d’érudition, me permirent de donner aux catalogues de notre librairie une nouvelle direction : la spécialisation dans les livres et les périodiques de critique littéraire et de linguistique françaises.

L’imprimerie connaissait, dans ces années soixante, une mutation profonde, passant de la typographie conventionnelle au plomb à la technique de l’offset, permettant notamment de « réimprimer » des livres et des collections de périodiques de base sans les recomposer, mais en les photographiant. Ce nouveau procédé, rendant possible de « petits tirages » (150-200 exemplaires), comblait les vœux des bibliothèques qui se disputaient les rares exemplaires d’occasion offerts sur le marché, époque sans pareille où le besoin en « bons livres » était une nécessité et où les tarifs postaux pour toutes les destinations mondiales, les « imprimés recommandés », étaient de 5 francs quand le poids ne dépassait pas 5 kilos.

Saisissant tout l’intérêt que pouvait apporter cette technique de multiplication d’un exemplaire introuvable par 100 ou 200, je me lançai dans l’aventure et publiai, en 1964, mon premier reprint, le Dialogue de l’orthographe et prononciation françœse, departi an deus livres, publié à Paris en 1550, dont les quelques rares exemplaires originaux se vendaient sur le marché d’occasion entre 1000 et 2000 francs, et que je pouvais offrir au prix incroyable de 35 francs. De 1964 à 1999, environ 8000 volumes furent réimprimés, dont plusieurs collections complètes de périodiques anciens, tels que le Mercure de France (1721-1791), L’Année littéraire de Fréron (1754-1790), le Journal de Trévoux, organe des jésuites (1701-1767) ou le Journal encyclopédique (1756-1793), organe des philosophes des Lumières.

Le revers de la médaille, c’était un stock de livres prenant des proportions inquiétantes, disséminé un peu partout en vieille ville de Genève, notamment dans la célèbre salle de l’école du dimanche décrite par Dumur, et jusque dans des quartiers périphériques, notamment à Lancy. Ma terreur : voir un de nos baux dénoncé et me trouver obligé de transporter le stock (l’équivalent de 30 camions de 40 tonnes) dans d’hypothétiques nouveaux locaux. Raison pour laquelle, en 1968, un terrain à vendre à Chavannes-de-Bogis fit mon bonheur, me permettant, au fil du temps, de disposer de plus de 12 000 m2 de rayonnages.

L’autre problème, c’était l’acheminement des livres en direction de la France, les formalités douanières décourageant la plupart des acheteurs. Par le plus grand des hasards, ou plus probablement par l’intervention de ma bonne fée, un éditeur d’érudition, à la tradition bien établie depuis la fin du XIXe siècle, le libraire-éditeur Honoré Champion, alors aux mains de propriétaires d’origine russe, était à vendre. Cette acquisition me permit de trouver un relais direct avec la France en facilitant le passage de la frontière.

L’ancien dépôt de la librairie au N° 4 de la rue de l'Athénée à Genève

© Archives Slatkine

Les bâtiments de l’entreprise à Chavannes-de-Bogis, années 1990

© Archives Slatkine

Gérald Bruderlin et Michel-Édouard Slatkine, fin des années 1970

© Archives Slatkine

Il ne faut pas oublier la difficulté technique posée par les petits tirages, les imprimeurs ne proposant une rentabilité acceptable qu’à partir d’un nombre d’exemplaires minimum se situant aux alentours de 1000. Je fus mis en relation avec un jeune imprimeur, mon collaborateur de toujours, Gérald Bruderlin, qui s’enthousiasma pour le projet, qui étudia et mis au point une technique, et réunit une équipe de collaborateurs spécialisés, tant dans la photographie des ouvrages originaux, leur impression sur des machines venant de Suède, que dans la reliure. Cette étude déboucha sur la création, en 1973, de notre propre imprimerie, sans laquelle l’aventure n’aurait pu réussir.

Nos réimpressions, de l’ordre de 400 à 600 volumes par an, comblaient les besoins d’institutions internationales. Avec l’adjonction d’une maison d’édition d’érudition proprement dite, elles allaient faire de Slatkine et de Champion les éditeurs majeurs dans ces spécialités.

En même temps, l’amitié que j’entretenais depuis des années avec le journaliste Jean-Claude Mayor et le photographe Nicolas Crispini donna naissance à l’édition proprement dite, avec la sortie de Genève, passé-présent sous le même angle, dont les ventes ont approché les 10 000 exemplaires.

En 1990, je rencontrai Bertrand Favreul, directeur des Éditions Robert Laffont et fondateur d’Interforum, sa société de distribution. Il me fit part de son désir de trouver un partenariat en Suisse romande pour la diffusion de ses ouvrages, de ceux des Éditions du Seuil, ainsi que des célèbres albums Tintin de Casterman. Ainsi vit le jour la société Servidis, en 1991, raffermissant encore nos relations avec l’édition française.

Il faut encore évoquer la tentative (avortée) d’un livre de poche relié, la collection Fleuron, dont une centaine de titres virent le jour. Si le succès fut très vif en Suisse, l’accueil qui lui fut réservé en France fut moins enthousiaste. De même, la création d’une nouvelle maison d’édition, Verticales, aujourd’hui propriété des Éditions Gallimard, nous permit de publier une trentaine d’ouvrages qui sortaient totalement de notre créneau éditorial.

L’arrivée de mes deux fils, Michel-Igor et Ivan, dans les dernières années du XXe siècle, a donné à notre aventure une pérennité réjouissante.

Je clos ces quelques pages par une note nostalgique et mélancolique. Si la fin du XVIe siècle a tourné une page de l’histoire universelle, par l’arrivée des techniques de l’imprimerie qu’on attribue à Gutenberg et par les découvertes de Christophe Colomb, il apparaît de plus en plus que l’arrivée de l’internet et des procédés de numérisation est, à son tour, à l’origine d’un changement radical dans l’histoire du livre et de son influence. L’érudition, les bibliothèques telles qu’on les a connues, subissent de profondes mutations. Il ne s’agit pas de dire « C’était mieux avant », Pétrarque le disait d’ailleurs en 1350, mais la librairie ancienne et l’édition d’érudition se doivent de trouver aujourd’hui de nouvelles voies, parallèles au numérique, pour rester à la taille de l’homme, de ses forces et de ses faiblesses.

Et maintenant, the show must go on !