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Beschreibung

Recueil de témoignages de personnes qui ont séjourné en Palestine dans le cadre du Programme d'accompagnement œcuménique en Palestine et Israël (EAPPI), créé suite à la deuxième Intifada (2000). Ces « accompagnateurs œcuméniques » sont des personnes âgées de 25 à 70 ans, de toutes nationalités et de tous horizons. Depuis 2002, près de 1600 volontaires de 25 nationalités ont participé à ce programme. Leur mission est d'observer et de rendre compte des atteintes aux Droits de l'Homme et d'offrir une présence protectrice aux personnes vulnérables. Aux côtés de Palestiniens et d'Israéliens, ils œuvrent à la paix de manière non-violente. La préface est de Dominique Vidal, journaliste et essayiste, spécialiste du Moyen-Orient.

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DES MÊMES AUTEURS

L’Évangile sur les parvis, Lucienne Gouguenheim, Jean-Bernard Jolly, Didier Vanhoutte, 2015.

Israël-Palestine : de la colonisation à l’annexion

Par Dominique Vidal

La date du 6 février 2017 entrera peut-être dans l’Histoire comme un tournant décisif du conflit israélo-palestinien. Ce soir-là, la Knesset, le Parlement israélien, adoptait à une large majorité une loi dite « de régularisation ». Il aurait mieux valu dire « de confiscation » : elle ouvre en effet la voie à l’annexion de tout ou partie de la Cisjordanie. De la solution des deux États, on passerait à celle d’un seul État. Avec la perspective d’un très long combat pour l’égalité des droits. Pour bien comprendre cette rupture, il faut revenir près de cinquante ans en arrière.

La troisième guerre israélo-arabe, en 1967, dure six jours. Au septième, Israël a quadruplé son territoire. Son armée s’est emparée du Sinaï égyptien et du Golan syrien, mais aussi – et surtout – de Jérusalem-Est, de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Cette conquête marque un changement radical : l’État juif récupère le reste du mandat britannique qui lui avait échappé en 1948, et devient du coup l’unique responsable du sort de la Palestine1.

À en croire les diplomates israéliens, ces territoires occupés ne représentent qu’une carte à jouer dans de futures négociations de paix, d’autant que la résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations-Unies va souligner, le 22 novembre 1967, « l’inadmissibilité de l’acquisition de territoires par la guerre » et sommer en conséquence Israël de s’en retirer. Cinq jours plus tard, dans une conférence de presse, le Général de Gaulle déclare, visionnaire : « Maintenant (Israël) organise sur les territoires qu’il a pris l’occupation qui ne peut aller sans oppression, répression, expulsions, et il s’y manifeste contre lui une résistance, qu’à son tour il qualifie de terrorisme »...

En réalité, dès la fin juin 1967, Israël annexe Jérusalem-Est pour la réunir avec Jérusalem-Ouest et former ainsi sa capitale « réunifiée ». Au passage, il l’a étendue sur 64 km2 supplémentaires pris à la Cisjordanie. Quant à cette dernière, le plan Allon y prévoit l’implantation de colonies dites « de sécurité », notamment dans la Vallée du Jourdain2.

C’est le lancement d’un mouvement qui va, en cinquante années, permettre l’installation de quelque 650 000 colons juifs – 430 000 en Cisjordanie et 220 000 à Jérusalem-Est, les 8000 de la bande de Gaza ayant dû la quitter en 2005.

Au yeux du droit international, toutes les colonies sont illégales. Le droit israélien distingue, lui, en Cisjordanie, 131 colonies « légales » d’une centaine d’« illégales », baptisées « avant-postes ». Il s’appuie, ce faisant, sur une disposition de la IVe Convention de Genève (1949) : si celle-ci interdit le transfert de population « occupante » dans les territoires occupés, elle autorise en revanche la puissance occupante à évacuer certaines zones pour des raisons de sécurité3.

L’article 49 de ladite Convention stipule en effet : « Les transferts forcés, en masse ou individuels, ainsi que les déportations de personnes protégées hors du territoire occupé dans le territoire de la Puissance occupante ou dans celui de tout autre État, occupé ou non, sont interdits, quel qu’en soit le motif. » Cet article indique aussi : « Toutefois, la Puissance occupante pourra procéder à l’évacuation totale ou partielle d’une région occupée déterminée, si la sécurité de la population ou d’impérieuses raisons militaires l’exigent. » Et il conclut : « [Elle] ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa population civile dans le territoire occupé par elle. »

Cette distinction a permis à Israël un tour de passe-passe : sous couvert de « bases de sécurité » temporaires légales aux yeux du droit international, il a créé des colonies de peuplement durables parfaitement illégales. Mais cette opération a surtout permis aux gouvernements israéliens successifs d’entretenir un flou artistique sur le statut de la Cisjordanie, toujours colonisée mais jamais formellement annexée. Franchir cette « ligne jaune » l’aurait, craignaient-ils, isolé plus que jamais dans les enceintes internationales, voire exposé à de graves sanctions.

Voilà pourquoi la loi du 5 décembre 2016, confirmée en troisième lecture par la Knesset le 6 février 2017, constitue un tournant historique. Présentée comme une loi de « régularisation », elle permet en fait l’annexion de près de 4000 logements situés dans une cinquantaine d’avant-postes. Mais elle ouvre, au-delà, la voie à une annexion de l’ensemble des « avant-postes », voire de la zone C qui représente plus de 60 % de la Cisjordanie, dont les terres les plus fertiles4. À terme, c’est toute celle-ci qui pourrait passer sous la souveraineté d’Israël.

Sur ce point, l’ambition d’un Naftali Bennett, le leader du Foyer juif et ministre de l’Éducation (ainsi que de la Diaspora), n’a rien de secret. Dès le 6 octobre 2016, il déclare : « Nous devons donner nos vies pour l’annexion de la Cisjordanie.5 » Après le déplacement de l’« avant-poste » d’Amona, il précise : « Nous mettrons en place un nouveau régime juridique en Judée et en Samarie qui régulera la totalité des implantations, et de la perte douloureuse de ce bastion dans la montagne émergera l’application de la souveraineté d’Israël sur toute la Cisjordanie.6 »

Il faut dire que son parti, ultranationaliste et ultrareligieux, revendique l’héritage du Parti national religieux, qui fut toujours, avec le Gouch Emounim (Bloc des croyants), le cœur du mouvement de colonisation. S’il ne compte que huit députés et quatre ministres, le Foyer juif a néanmoins réussi, le 6 février 2017, à rallier à sa loi soixante députés, dont la quasi totalité de ceux du Likoud, alors que le Premier ministre Benyamin Netanyahou leur avait instamment demandé de s’y opposer.

De fait, l’opération de l’extrême droite israélienne s’apparente à un double putsch : contre le chef du gouvernement, empêtré dans des scandales qui pourraient lui coûter son poste ; mais aussi contre la communauté internationale, après le vote, le 23 décembre 2016, grâce à l’abstention américaine, de la résolution 2334 « anti-colonisation » du Conseil de sécurité et la tenue à Paris, le 15 janvier 2017, d’une conférence de paix avec 70 États participants. Comme un chant du cygne de la solution dite « des deux États », entonné par ceux qui... n’avaient rien fait pour l’imposer.

Qu’on ne se méprenne pas : sur le fond, Benyamin Netanyahou partage sans doute la vision de son jeune allié et rival. N’avait-il pas promis, à la veille des dernières élections législatives en mars 2015, qu’il n’y aurait pas d’État palestinien tant qu’il serait aux affaires7 ? Cette promesse contredisait celle qu’il avait faite dans son fameux discours à l’université Bar-Ilan, en 2009 : « Si nous recevons ces garanties sur la démilitarisation et si les Palestiniens reconnaissent Israël comme l’État du peuple juif, alors nous parviendrons à une solution basée sur un État palestinien démilitarisé au côté d’Israël.8 ».

Deux jours plus tard, une fois réélu mais accusé de renier son engagement en faveur des « deux États », il avait fait machine arrière : « Je ne suis revenu sur aucune chose que j’ai dite il y a six ans, lorsque j’avais appelé à une solution avec un État palestinien démilitarisé, qui reconnaît l’État hébreu. J’ai simplement dit qu’aujourd’hui, les conditions pour cela ne sont pas réunies.9 »

Ce slalom vertigineux le confirme : à la différence de Bennett et, plus généralement, de l’extrême droite, Netanyahou mesure, d’expérience, les risques d’isolement que comporte, pour Israël, toute radicalisation trop ostensible. Et il pressent que le nouveau Président Donald Trump pourrait être moins pro-israélien que le candidat Donald Trump.

L’extrême droite israélienne, à l’inverse, mise d’évidence sur la nouvelle administration américaine. A priori, elle a raison. Trois prises de position du candidat républicain balisent sa future politique face au conflit israélo-palestinien : l’engagement de transférer l’ambassade des États-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem, où elle serait la seule, entérinant ainsi l’annexion de la ville arabe10 ; le refus de considérer la colonisation des territoires occupés depuis 1967 comme un obstacle au processus de paix ; la décision de ne plus faire pression sur le gouvernement israélien afin qu’il négocie avec les Palestiniens.

Au moins aussi significatives apparaissent deux nominations : celle du gendre du Président, Jared Kushner, comme « haut conseiller à la Maison Blanche » ; et, comme ambassadeur en Israël, celle de M. David Friedmann. Le diplomate improvisé avait, aussitôt nommé, exprimé sa « hâte » de travailler « depuis l’ambassade américaine dans la capitale éternelle d’Israël11 ». Tous deux figurent parmi les amis des colons de Cisjordanie, auquel ils apportent depuis des années un généreux soutien financier12.

Mais même une présidence qui s’annonce comme radicale doit se confronter aux réalités internationales et régionales, surtout s’agissant du Proche et du Moyen-Orient. Il lui faut notamment faire avec les États de la région, mais aussi avec l’Union européenne, la Russie, la Chine, etc. Il lui faut également faire avec l’ONU, même si elle la vitupère. Il lui faut aussi et surtout éviter des initiatives qui pourraient faire à nouveau exploser non seulement la Palestine mais les opinions arabes et musulmanes.

Autant de considérations qui expliquent le flou artistique de Donald Trump lorsqu’il accueillit Benyamin Netanyahou à Washington, le 15 janvier 2017 – j’y reviendrai.

En tout cas, si la Cour suprême israélienne validait la loi d’annexion, elle enterrerait, à terme, la solution dite « des deux États » au profit d’un seul État. Mais quel État ?

Un État ? deux États ? Le dilemme ne date pas d’aujourd’hui. Le Yichouv, la communauté juive de Palestine, en a débattu dans l’entre-deux guerres. Dans les années 1970, ce fut au tour de l’OLP d’en discuter. Et il s’agit d’une question récurrente pour les mouvements de solidarité. À mon avis, la solution « binationale » présente théoriquement, par rapport à la « bi-étatique », quatre atouts majeurs :

- d’abord il s’agit d’un véritable idéal, beaucoup plus conforme aux valeurs d’aujourd’hui. Qui rêve encore d’un monde composé d’États ethniques ou ethnico-religieux, avec les « nettoyages » qui en découlent souvent ?

- cet idéal possède, en outre, des racines profondes de part et d’autre. Avant d’opter pour deux États, l’OLP plaidait en faveur d’une Palestine laïque et démocratique13. Et, du côté juif, plus tôt, l’idée binationaliste animait non seulement des intellectuels comme Martin Buber et Judah Magnès, mais aussi des partis qui, lors des élections internes de 1944, obtinrent plus de 40 % des voix, avant d’être balayés par la poussée nationaliste indissociable de la guerre de 1947-194914 ;

- l’évolution sur le terrain a, de plus en plus, imbriqué deux peuples, avec d’un côté 650 000 colons juifs en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, et de l’autre 1 500 000 Palestiniens citoyens d’Israël. J’ajoute que, si les colonies stricto sensu n’occupent que 5 % de la Cisjordanie, elles contrôlent plus de 40 % de son espace. Sans oublier le Mur, qui annexe de facto une partie du territoire et la zone C, interdite de fait aux Palestiniens ;

- du coup, le cadre binational semble de nature à résoudre plus facilement des questions comme les frontières, la capitale, les colonies, le (double) droit au retour, etc.

Mais ces avantages ne sauraient cacher, toujours théoriquement, trois faiblesses majeures :

- d’abord la question de la volonté des peuples. Car on imagine mal comment imposer un État unique démocratique à deux peuples qui n’en voudraient ni l’un ni l’autre : c’est actuellement le cas de la majorité écrasante des Israéliens, mais aussi d’une forte proportion de Palestiniens, qui ne souhaitent pas vivre avec les Juifs israéliens que symbolisent pour eux les soldats et les colons15. Une étape bi-étatique apparaît donc au moins comme une transition nécessaire pour que les uns et les autres acceptent un jour de vivre ensemble ;

- le deuxième obstacle relève de la lucidité politique : depuis que l’OLP s’est prononcée en faveur des deux États, elle n’a pas réussi à obtenir le sien d’Israël, malgré l’isolement croissant de ce dernier. Comment, dès lors, le mouvement national palestinien et ses alliés pourraient-il lui arracher un État unique démocratique, que les Israéliens perçoivent comme la destruction de leur État – alors que la création d’un État palestinien à ses côtés peut leur apparaître comme un moyen d’intégrer Israël dans son environnement arabo-musulman ?

- enfin, si le rapport des forces est insuffisant, l’État unique ne risque-t-il pas de se résumer à la réalité actuelle : le « Grand Israël », à savoir un État d’apartheid ? Quid du statut des deux peuples, dont aujourd’hui l’un jouit de tous les droits, y compris politiques, et l’autre d’aucun ? Quid du statut des colonies, dont il faudrait accepter le maintien au nom de l’« équilibre » avec les Palestiniens d’Israël ? Quid des garanties données à chaque peuple et chaque religion quant à la préservation de ses intérêts à court et long termes au sein de l’État unique ? La bataille pour l’égalité des droits risque d’être longue et ardue, d’autant qu’elle pourrait perdre en visibilité sur la scène internationale.

Autant de questions qui se posent désormais, non plus théoriquement, mais pratiquement. Et d’abord celle du statut des Palestiniens, annexés avec leur terre. Pour l’extrême droite israélienne, pas d’hésitation : il est exclu de les considérer comme des citoyens de peur que, devenus majoritaires, ils remettent en cause le caractère juif de l’État.

Or, selon les démographes, ce moment-là arrivera bientôt : le Bureau central palestinien des statistiques (BCPS) estime qu’en 2017, les Palestiniens seront aussi nombreux que les Juifs en Israël-Palestine, avec 6,58 millions d’âmes de part et d’autre16 – sans tenir compte de la diaspora palestinienne à l’étranger, estimée à environ 5 millions de personnes17 ; côté israélien, on relativise ces chiffres, en soulignant la poussée démographique juive en Israël et plus encore à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. L’Institut de la statistique de Jérusalem estime la population israélienne à 8,6 millions, dont 20,7 % d’Arabes18. Bref, l’État unique version Bennett deviendrait rapidement un État d’apartheid.

Au sein du Likoud, cette perspective ne convient pas à quelques (rares) voix discordantes, qui commencent à se faire entendre, à commencer par celle du Président de l’État, Reuven Rivlin. Partisan du Grand Israël, il estime néanmoins : « Appliquer la souveraineté à une zone, a-t-il déclaré le 13 février, donne la citoyenneté à ceux qui y vivent. Il n’y a pas de loi [différente] pour les Israéliens et pour les non Israéliens.19 » Et le fils de l’ex-Premier ministre Menahem Begin, Benny Begin, député du Likoud, s’oppose à une loi qu’il qualifie de « loi des voleurs20 ».

Côté palestinien, les réactions restent rares. Plusieurs dirigeants de l’Autorité palestinienne se sont contentés de réaffirmer leur attachement à la « stratégie des deux États ». Il est vrai que le tournant engagé prend l’OLP à contrepied. Alors que l’État de Palestine, reconnu par 138 États, est entré à l’ONU comme à la Cour pénale internationale, à la grande fureur de la droite et de l’extrême droite israéliennes, ces dernières l’effacent d’un coup de gomme. Faut-il s’accrocher aux deux États et, du coup, aux acquis politiques et diplomatiques qu’ils incarnent ? Ou bien se préparer à une nouvelle stratégie à un État ? Ou les deux ? Un jeune diplomate proche de Marwan Bargouti, Majed Bamya, a fait entendre un son de cloche original : « Nous ne pouvons plus, écrit-il le 8 février sur sa page Facebook, reporter la préparation de la transition vers une lutte anti-apartheid susceptible de mobiliser la totalité de notre peuple, d’encourager les pressions internationales, de rétablir l’espoir, de réaffirmer l’importance primordiale de notre cause et de préparer la voie vers la libération nationale.21 »

Dix jours plus tard, lors d’une conférence de presse à Jéricho, Saeb Erekat, secrétaire général de l’OLP, réaffirmait la perspective des deux États, mais affirmait : « Contrairement au projet d’apartheid de Netanyahu d’un État et de deux systèmes, la seule alternative aux deux États souverains et démocratiques dans les frontières de 1967 est un État unique laïque et démocratique avec des droits égaux pour tous, chrétiens, musulmans et juifs, dans l’ensemble de la Palestine historique.22 »

Le sommet Trump-Netanyahou, à la mi-février 2017, a (un peu) éclairé la politique proche-orientale de la nouvelle administration américaine. Si le Président n’a pas confirmé le transfert de l’ambassade à Jérusalem (ni l’annulation de l’accord avec l’Iran) et s’il a prié son hôte de faire preuve de « retenue » en matière de colonies, il a, pour la première fois dans l’histoire contemporaine des États-Unis, envisagé un abandon de la solution des deux États. Verbatim : « Je regarde deux États et un État, et si Israël et les Palestiniens sont contents, je suis content avec la solution qu’ils préfèrent. Les deux me conviennent. » Le soir même, toutefois, l’ambassadrice des États-Unis à l’ONU, Nikki Haley, rappelait que Washington soutenait « absolument » la solution à deux États... « sans écarter des alternatives »23. Ce qui n’a pas empêché Naftali Bennett d’en conclure : « Une nouvelle ère, de nouvelles idées, pas besoin d’un troisième État palestinien au-delà de la Jordanie et de Gaza.24 »

Nous nous trouvons donc bien, chacun le sent, au début d’une nouvelle étape dans l’histoire du conflit israélo-palestinien. Et beaucoup de questions restent encore sans réponse. La Cour suprême validera-t-elle, ou non, la loi d’annexion ? Donald Trump donnera-t-il son feu vert à l’opération engagée par Naftali Bennett ? La communauté internationale baissera-t-elle les bras devant cette violation sans précédent de son droit ? Les principaux acteurs prendront-ils toute la mesure du tournant en cours et s’y adapteront-ils ? De surcroît, ces interrogations s’expriment dans un monde où l’architecture internationale est profondément ébranlée par la vague populiste qui déferle : Brexit, présidentielle américaine, poussée des extrêmes droites en Europe, sans oublier l’évolution des régimes russe, turc, philippin, etc.

Plus que jamais, l’avenir est incertain. Et notamment pour les Israéliens et les Palestiniens. La réponse, en revanche, ne change pas : c’est l’intervention des opinions, la solidarité avec tous ceux qui luttent pour une paix juste et durable.

1. De 1949 à 1967, la Jordanie occupa Jérusalem-Est et la Cisjordanie, qu’elle avait annexés, tandis que l’Égypte contrôla la bande de Gaza. Ni l’une ni l’autre n’y avaient créé un État palestinien...

2. Conçu par le général Yigal Allon, alors vice-Premier ministre, ce plan prévoyait l’annexion de Jérusalem et de ses environs et divisait la Cisjordanie en deux, attribuant la vallée du Jourdain et l’est de la Judée à Israël.

3. www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19490188/index.html

4. Les accords d’Oslo ont placé la zone C sous le contrôle total d’Israël pour la sécurité et l’administration. Elle couvre 62 % de la Cisjordanie. Elle intègre également l’ensemble des colonies, l’intégralité des routes y menant, les zones tampon près du Mur et quasiment toute la vallée du Jourdain, de Jérusalem-Est et du désert. Toutes les frontières y sont situées.

5. i24news.tv.fr, 7 octobre 2016.

6. Site The Times of Israel, 1er février 2017.

7. Le Monde, 17 mars 2015.

8. Libération, 14 juin 2009.

9. Le Monde, 19 mars 2015.

10. Voté par le Congrès en 1995, ce transfert n’a été mis en œuvre par aucun des Présidents américains successifs.

11. Le Monde, 16 décembre 2016.

12. Voir « Ces colonies israéliennes financées par la galaxie Trump », Médiapart, 15 février 2017.

13. On date généralement l’engagement de l’OLP en faveur des deux États du Conseil national palestinien (CNP) d’Alger tenu le 15 novembre 1988. En réalité, le premier pas date de bien plus tôt : le CNP, le 9 juin 1974, se prononce au Caire pour « une Autorité nationale indépendante, nationale et combattante sur toute partie libérée de la Palestine ».

14. Cf. Palestine 47 : un partage avorté, Éditions André Versaille, Bruxelles, 2008.

15. Selon un sondage réalisé en décembre 2016 par le Centre pour la recherche sur la paix Tami Steinmetz (CET), l’Université de Tel-Aviv et le Centre palestinien de recherches politiques, 55 % des Israéliens et 44 % des Palestiniens prônent une solution à deux États, tandis que 36 % des Palestiniens, 19 % des juifs israéliens et 56 % des arabes israéliens soutiennent une solution à un seul État (wwwi24news.tv.fr, 16 février 2017).

16. The Times of Israel, 30 décembre 2016.

17. On l’estime entre 6 et 7 millions, dont 5,6 millions de réfugiés enregistrés par les Nations-Unies.

18. Site Israel Valley, 1er janvier 2016.

19. Site The Times of Israel, 14 février 2017.

20. The Washington Post, 6 février 2017.

21. Sur sa page Facebook, 6 février 2017.

22. Site de l’AFPS, 16 février 2017.

23. Le Monde, 15 janvier 2017.

24. https://assawra.blogspot.fr/2017/02/israelpalestine-trump-seloigne-de-la.html

Liste des acronymes utilisés dans cet ouvrage

BM : Banque mondiale

CCFD : Comité catholique contre la faim et pour le développement

CEEEFE : Commission des Églises évangéliques d’expression française à l’étranger

CHRS : Centre d’hébergement de réinsertion sociale

CICR : Comité international de la Croix-Rouge

COE : Conseil Œcuménique des Églises

CPT : Christian Peacemaker Team (Chrétiens artisans de paix)

DCC : Délégation catholique pour la coopération

Défap : Service protestant de mission

EA : Accompagnateur œcuménique

EAPPI : Ecumenical Accompaniment Programme in Palestine and Israel (Programme œcuménique d’accompagnement en Palestine et Israël)

FPF : Fédération protestante de France

ICAHD : Israeli Committee against House Demolition (Comité israélien contre les destructions de maisons)

INALCO : Institut national des langues et civilisations orientales

OCHA : Office for the Coordination of Humanitarian Affairs(Bureau de la coordination des affaires humanitaires) (ONU)

ONG : Organisation non gouvernementale

ONU : Organisation des Nations-Unies

TIPH : Temporary International Presence in Hebron (Présence internationale temporaire à Hébron)

UNESCO : United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization(Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture)

UNHCR : United Nations High Commissioner for Refugees(Haut-commissariat pour les réfugiés des Nations-Unies)

UNOCHA : United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs(Agence des Nations-Unies pour la coordination des affaires humanitaires)

UNRWA : United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East (Office de secours et de travaux des Nations-Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient)

Chapitre I

Le Programme d’accompagnement œcuménique en Palestine et Israël (EAPPI)

C’est un programme coordonné par le Conseil Œcuménique des Églises. Créé en réponse à l’appel des responsables des 13 Églises de Jérusalem, suite à la deuxième Intifada, en 2000, il envoie des volontaires en Cisjordanie. Depuis 2002, près de 1600 personnes de 25 nationalités ont participé à ce programme, pour trois mois, en tant qu’accompagnateurs œcuméniques (EA).

Sa vision : un avenir où l’occupation de la Palestine aurait disparu, où tant les Palestiniens que les Israéliens jouiraient d’une paix juste, dans la liberté et la sécurité garanties par la législation internationale.

Sa mission : être témoin de la vie sous occupation, s’engager avec les Palestiniens et Israéliens qui militent localement pour une paix juste, faire évoluer l’engagement de la communauté internationale dans le conflit, afin qu’elle agisse contre l’injustice régnant dans la région.

Les accompagnateurs et accompagnatrices offrent une présence protectrice aux communautés vulnérables ; ils observent et rendent compte des atteintes aux droits de l’homme. Ils rejoignent les rangs de Palestiniens et d’Israéliens qui œuvrent à la paix de manière non-violente. Ils soutiennent les Églises locales. À leur retour chez eux, ils utilisent leur expérience de première main à ouvrir les yeux du monde aux réalités de l’occupation, ils font campagne pour une résolution juste et pacifique du conflit israélo-palestinien basée sur le droit international. Les accompagnateurs ont entre 25 et 70 ans, viennent d’horizons très divers, et partagent tous un profond engagement pour les droits de l’Homme.