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Par le biais de la chanson, Georges Brassens a rendu accessibles les vers de grands poètes comme Villon, Hugo, Verlaine et bien d’autres. Il a également dévoilé au public ses propres textes, souvent perçus comme simples, mais qui recèlent une puissance insoupçonnée. Avec "Vivre pour ses idées",
Bertrand Redonnet et
Alain Perrot ont cherché à éclairer la philosophie sous-jacente à ses quelque cent-soixante chansons, explorant des thèmes essentiels tels que la mort, la religion, l’amitié, l’amour, la liberté, présents en filigrane dans toute son œuvre et formant une trame aussi subtile que profonde.
À PROPOS DES AUTEURS
Bertrand Redonnet a publié à ce jour 14 ouvrages dont deux consacrés à Georges Brassens. Au début des années 2000, il a eu le privilège de tisser des liens d’amitié avec certains des derniers compagnons du poète, comme René Iskin et Émile Miramont, alias Corne d’Aurochs.
Président fondateur de la société de conseil Value Games,
Alain Perrot nourrit depuis son enfance une profonde passion pour Georges Brassens, dont il applique les principes philosophiques dans sa vie personnelle et professionnelle. "Vivre pour ses idées" est son troisième ouvrage publié.
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Seitenzahl: 95
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Bertrand Redonnet
&
Alain Perrot
Vivre pour ses idées
Brassens, philosophe authentique
et sans prétention
Essai
© Lys Bleu Éditions – Bertrand Redonnet & Alain Perrot
ISBN : 979-10-422-4654-9
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
BERTRAND REDONNET
ALAIN PERROT
– La boîte à outils de la Supply Chain, Éditions Dunod, 2015, 2019, 2022 ;
Cet ouvrage est le fruit d’une rencontre fortuite, celle de deux passionnés de l’œuvre de Brassens :
L’un, Bertrand Redonnet, auteur de nombreux ouvrages, dont deux consacrés à Brassens et devenus des références ; l’autre, Alain Perrot, un entrepreneur qui a intégré la philosophie de Brassens dans son activité professionnelle et sa vie en général.
Inspirés par la fameuse phrase de Blaise Pascal dans la lettre 16 des Provinciales : « Je n’ai fait cette lettre-ci plus longue que parce que je n’ai pas eu le loisir de la faire plus courte », nous avons choisi d’écrire un ouvrage court, afin de saisir l’essentiel de la philosophie de Brassens, une pensée authentique et sans prétention, mais néanmoins profonde.
La philosophie savante étant souvent une discipline qui rebute, nous avons fait le choix de la rendre accessible au plus grand nombre via une simplification du contenu.
Il est dès lors important de préciser que ce livre n’est pas une encyclopédie de la philosophie de Brassens, avec son cortège habituel de références bibliographiques ou d’index des chansons du poète.
Nous nous sommes ainsi limités à indiquer les aspects qui, selon nous, suggèrent une certaine complicité de Brassens avec divers courants philosophiques allant de Platon à Nietzsche en passant par Épictète, Voltaire, Sartre, Kierkegaard, et bien d’autres encore.
Évoquer sans approfondir ni disserter sur les intentions, car la poésie peut être intellectuelle et la philosophie sensible, tant elles sont deux activités de l’esprit qui interrogent la splendeur et la profondeur du monde.
Nous avons donc survolé, mais ni en dilettantes ni en négligents. Non, en prosélytes du style minimaliste de La cane de Jeanne, la chanson de Brassens la plus courte, mais aussi l’une des plus belles.
Ceux que Brassens nommait ironiquement « les architectes de la pensée » nous le pardonneront sans doute.
Alain Perrot
Brassens, philosophe authentique et sans prétention
Au village, sans prétention,
J’ai mauvaise réputation.
Qu’je me démène ou que je reste coi,
Je passe pour un je-ne-sais-quoi.
La Mauvaise Réputation
Par les temps inquiétants, voire anxiogènes, qui courent, il est sain, sinon vital, de posséder une boussole morale qui nous indique notre vrai nord, quelles que soient les turbulences du monde et les agitations des marchands de panacées.
Pour notre part, cette boussole morale se nomme Georges Brassens, depuis que nous avons découvert son premier album, qui comportait déjà au moins neuf futurs grands classiques sur douze chansons. Ce fut un véritable coup de foudre artistique qui, depuis, ne nous a plus quittés. Au-delà de l’admirable poésie des textes et des mélodies faussement simples, il y avait déjà des messages sociétaux clairs et percutants, enrobés par l’humour espiègle qui caractérisera Brassens tout au long de sa carrière :
Non, les braves gens n’aiment pas que,
L’on suive une autre route qu’eux.
Tout le monde médit de moi,
Sauf les muets, ça va de soi.
La Mauvaise Réputation
Depuis, nous avons écouté, lu, appris, chanté toutes ses chansons, et à l’instar de Rien à jeter, nous avons jugé que tout était bon chez Brassens, qu’il n’y avait rien à jeter. Ainsi, à chaque moment de la vie, on peut trouver une chanson qui franchit les trois filtres de Socrate : la vérité, la bonté, et l’utilité.
Par exemple, si vous avez vingt-six ans et que vous jurez de tout remettre à neuf, écoutez Le boulevard du temps qui passe, ou Marquise – poème de Corneille mis en musique par Brassens –, selon votre humeur du moment. Vous saisirez et savourerez d’autant mieux l’instant présent, le Carpe Diem des Romains et de Nietzsche.
Si l’heure de la retraite a sonné, passé le moment d’euphorie durant lequel vous aurez comme mantra devant vos amis « la retraite c’est chouette », vous vous souviendrez que dans la Grèce antique, Hypnos et Thanatos étaient des frères jumeaux, et réaliserez que ce n’est pas le moment de vous assoupir. Vous pourrez alors écouter Trompe la Mort, et repartir plein d’ardeur vers de nouvelles aventures.
Si vous perdez un être cher, écoutez Le vieux Léon, réécoutez-le, chantez-le à tue-tête, et ce, pendant « quinze ans d’malheur. » Vous ferez alors l’expérience de la catharsis dont parle Aristote dans sa Poétique consacrée à la tragédie (la partie consacrée à la comédie ayant disparu comme le savent tous ceux qui ont lu ou vu « Le Nom de la Rose »de Umberto Ecco/Jean-Jacques Annaud).
Ainsi, bien que Brassens n’ait jamais eu la prétention d’être un philosophe, parmi tous ses titres, en tout et pour tout, on trouve une allusion à Montaigne dans Les Copains d’abord et deux fois le mot philosophe dans Altesse, son œuvre est tout imprégnée de philosophie à la fois humaniste, épicurienne, libertaire, individualiste, bienveillante, et anticonformiste, inspirée entre autres par Platon, Épicure, Montaigne, Nietzsche et Sartre, mais surtout authentique et sans prétention, car basée sur sa vie – notamment ses galères – et en symbiose avec sa personnalité.
Comme Montaigne, en parlant de lui et de ses proches, Brassens parle de la condition humaine dans son ensemble.
Si sa philosophie est un cocktail extrêmement diversifié, elle n’en est pas moins cohérente et lui confère une singularité, qui s’en tient à l’étymologie grecque du mot : l’amour de la sagesse.
Cependant, cette philosophie ne peut se résumer à une expression emblématique choc telle que « l’essentiel n’est pas de vivre, mais de bien vivre » pour Platon, « celui qui ne sait pas se contenter de peu ne sera jamais content de rien » d’Épicure, « savoir par cœur n’est pas savoir » de Montaigne, « Dieu est mort » de Nietzsche, ou « l’existence précède l’essence » de Sartre.
Deux vers de Don Juan nous fournissent cependant un indice éloquent :
Gloire à qui n’ayant pas d’idéal sacro-saint,
Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins !
Cela peut sembler une évidence, mais imaginons une seule seconde que ce précepte soit appliqué sur les réseaux sociaux, sur la route, dans les transports en commun, au bureau, en politique, et pourquoi pas par les dictateurs.
Le monde n’en serait certainement que meilleur.
En vérité, la philosophie de Brassens n’est pas une démonstration comme peuvent l’être celles de Descartes, Spinoza, ou Kant, qui sont de véritables systèmes de pensée. Dans ses lettres à son ami philosophe Roger Toussenot, Brassens écrira d’ailleurs :
« La philosophie m’ennuie toujours autant. Que tu le veuilles ou non, elle sent le professeur, le didactisme, la dialectique. Que veux-tu que je fasse de ces architectures de la raison ? »
En réalité, Brassens parle là d’une forme de philosophie, qui pense pour penser, le plus souvent de façon absconse, mais qui ne produit rien de concret, à part peut-être nous déprimer, et dont l’archétype est Heidegger :
« Dès qu’un humain vient à la vie, il est déjà assez vieux pour mourir. »
Dans le langage courant, lorsque l’on dit à quelqu’un « arrête de philosopher », on pense à ce type de philosophie stérile dont parle Brassens.
Mais à l’opposé de cette philosophie, il y a Nietzsche, que Brassens admire, car il est autant poète que philosophe, et surtout il est le chantre de la pulsion créatrice, à laquelle il oppose le nihilisme.
Ainsi, contrairement à la philosophie cérébrale, mais stérile de son ami Toussenot, la philosophie de Brassens est beaucoup plus concrète, car elle démarre par sa passion pour les mots, la poésie, et la création.
Pour en prendre toute la mesure, il faut se plonger dans Le Grand Pan, le texte le plus philosophique de Brassens :
Du temps que régnait le grand Pan,
Les dieux protégeaient les ivrognes,
Un tas de génies titubants,
Au nez rouge, à la rouge trogne…
Le Grand Pan
Sous des dehors festifs et joyeux avec l’image sympathique du dieu Pan, qui pourtant donna le mot panique, Le Grand Pan est un texte extrêmement érudit qui parle en fait de la mort de Pan, renvoyant ainsi à « l’origine de la tragédie » de Nietzsche, lequel utilise cet événement mythologique pour symboliser la fin de la tragédie grecque et la perte de la poésie dans le monde hellénique, associées à l’essor du nihilisme selon Nietzsche ! Brassens, c’est un peu comme le film « Inception » de Christopher Nolan : il y a le premier niveau comme Fernande, le deuxième niveau, Le Fantôme, et le troisième niveau comme Le Grand Pan, pour ceux qui veulent bien s’en donner la peine.
C’est la raison pour laquelle il n’aurait aucune substance à nous présenter si on demandait à un lecteur chevronné de Proust ou à un Brassensophile averti, un résumé, un condensé, de la philosophie de Brassens ou de « À la recherche du temps perdu » de Proust. Car pour comprendre la philosophie de Brassens, il faut le lire, l’écouter, le chanter, avec ou sans guitare, le relire, mâcher chaque mot à voix haute, à l’instar de ce qu’écrivit Rabelais à la fin du célèbre prologue de Gargantua :
« …il vous faut être sages pour humer, sentir et estimer ces beaux livres de haute graisse, légers à la poursuite et hardis à l’attaque. Puis, par une lecture attentive et une méditation assidue, rompre l’os et sucer la substantifique moelle. »
Mais le jeu en vaut la chandelle, car au bout du voyage d’apprentissage par infusion de la philosophie de Brassens, il y a des principes de réflexion et d’action à la portée de tous, et à des années-lumière de la philosophie aride que l’on apprend au lycée, et dont peu se souviennent vingt ans après.