Arrête ton baratin ! - Frank Andriat - E-Book

Arrête ton baratin ! E-Book

Frank Andriat

0,0

Beschreibung

Age : 13 ans et + Niveau de lecture : 5e-4e et +

Découvrez les aventures d'un ado pas comme les autres, prêt à tout pour résoudre ses enquête !

Bob a hérité d'un nom de famille qu'il porte en souriant.
Il aime la panthère rose, Najmah, sa nounou afghane, le boudin-compote et les enquêtes policières.
Il a résolu sa première énigme à quinze ans, au collège, quand Baratin, son prof d'anglais, a été retrouvé égorgé dans sa classe, le corps tourné vers La Mecque.
Bob est intelligent, gentil et plein d'humour. D'amour pour son prochain aussi, même quand celui-ci se moque de lui.
Bob vit des aventures rocambolesques et il ne perd presque jamais son calme.
Bob n'est pas et ne sera jamais celui qu'on croit. 

Un roman pour ado attachant et plein d'humour !

EXTRAIT 

My name is Bob, Bob Tarlouze. J’ai toujours aimé le rose. À cause de la panthère. Je l’imite à merveille. Ça faisait drôlement rire mes grands-parents. Tam, dadam, dadam… Et je prenais l’allure féline et décontractée de mon héroïne. Tarlouze, Bob Tarlouze.
Évidemment, tout va de pair. Quand on aime la panthère rose, on ne se contente pas de la singer : pour s’habiller, on choisit ses couleurs. Depuis ma plus tendre enfance, je porte des vêtements roses, dans tous les tons du rose, du clair au fuchsia. Ça faisait braire mon père :
— Mais ce petit n’est pas normal ! Qu’a t-il donc à vouloir qu’on lui offre des fringues rose bonbon ! S’il était une fille, je pourrais comprendre, mais pour un gars, ça fait tapette !

CE QU'EN PENSE LA PRESSE 

- "Ce roman socio-policier marque un nouveau jalon dans une œuvre abondante et de qualité de Frank Andriat" - L'avenir

- "Ce roman frôle le coup de coeur" - D'un livre à l'autre

- "Un héros sympa, en somme, avec lequel on passe quelques heures d'agréable lecture. On ressort du livre le sourire aux lèvres. Merci." - RiveDieu

- "
Une aventure pleine d’humour et de rebondissements qui montre aux lecteurs qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Un roman qui devrait plaire aux jeunes de 13 à 113 ans, car tous, adolescents et adultes, verront leur lecture ponctuée de grands éclats de rire." -  Vlan

-
 "Ce personnage très attachant nous montre une nouvelle facette de Frank Andriat. Outre l’enquête policière, ce roman touche à plein d’autres choses : acceptation de la différence, amour de son prochain, respect, bref toutes ces valeurs humanistes que l’auteur défend dans ses autres romans, le plus de celui-ci étant son humour, parfois un peu potache, mais tellement rafraîchissant. Très bien. A partir de 12 ans." - L’ibby lit

À PROPOS DE L'AUTEUR 

Frank Andriat griffonne ses premiers poèmes dès l'âge de treize ans, encouragé par son professeur, l’écrivain Jacques Crickillon. Depuis lors, devenu professeur à son tour, il n'a cessé d'écrire notamment sur l’importance de l’ouverture au vivant. Tous ses livres sont une manière de témoigner et de rendre hommage à la vie, à l’amour et aux autres, sans qui rien ne serait possible.
Il a publié plus de vingt livres dont notamment la série Bob Tarlouze parue chez Ker Editions. 
Pour en savoir plus sur l'auteur rendez-vous sur son site : http://www.andriat.fr/

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern

Seitenzahl: 151

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Une aventure pleine d’humour et de rebondissements qui montre au lecteur qu’il ne faut pas se fier aux apparences. [...] Un roman qui devrait plaire aux jeunes de treize à cent treize ans, car tous, adolescents et adultes, verront leur lecture ponctuée de grands éclats de rire.

– Vlan

Le premier tome des « Aventures de Bob Tarlouze » est un roman succulent, au sein duquel le héros se joue avec brio des calembours et autres moqueries que son entourage ne cesse de distiller autour d’un nom de famille pas spécialement facile à porter. [...] Un livre à déguster comme un gâteau d’anniversaire. Et à tout âge !

– L’Avenir

pour Catherine, Lionel et Dominique qui ont assisté à la naissance de Bob en Bretagne.

pour Laurence et Denis qui l’ont vu grandir en Provence.

pour Évelyne qui a vécu avec lui pendant plusieurs mois.

To be or not to be, that is the question.

Shakespeare

MY NAME IS BOB, BOB TARLOUZE

MY NAME IS BOB, BOB TARLOUZE. J’ai toujours aimé le rose. À cause de la panthère. Je l’imite à merveille. Ça faisait drôlement rire mes grands-parents. Tam, dadam, dadam... Et je prenais l’allure féline et décontractée de mon héroïne. Tarlouze, Bob Tarlouze.

Évidemment, tout va de pair. Quand on aime la panthère rose, on ne se contente pas de la singer : pour s’habiller, on choisit ses couleurs. Depuis ma plus tendre enfance, je porte des vêtements roses, dans tous les tons du rose, du clair au fuchsia. Ça faisait braire mon père :

— Mais ce petit n’est pas normal ! Qu’a-t-il donc à vouloir qu’on lui offre des fringues rose bonbon ! S’il était une fille, je pourrais comprendre, mais pour un gars, ça fait tapette !

Mon père est le roi de la délicatesse. Quand il sortait cela, je demandais à ma mère :

— C’est quoi une tapette  ?

Elle, les joues toutes roses (j’adorais quand elles prenaient cette couleur-là !), me répondait que « tapette » n’était pas un mot de mon âge et que je comprendrais plus tard.

C’est grâce à Mohamed que j’ai pigé. J’avais six ans. Mohamed et moi, nous jouions aux billes dans la cour de l’école. Je venais de lancer une de mes billes et elle avait filé loin du but. Mohamed a éclaté de rire et m’a dit :

— Putain, Tarlouze, tu joues comme une tapette !

J’ai fait :

— Pff ! T’as de la chance que Madame ne t’ait pas entendu ! On ne dit pas « putain ». Maman dit que c’est un vilain mot.

Mohamed a ri et m’a demandé :

— Mais ça ne te dérange pas que je te dise « tapette »  ?

— Pourquoi  ? ai-je répondu. Mon père me le dit aussi.

J’ai cru que Mohamed allait mourir. Il s’est mis à rire comme un phoque qui a pissé dans sa culotte. Plié en deux sur le sol de la cour de récré. Madame est venue parce qu’elle croyait qu’il était malade. Un attroupement s’est rapidement formé autour de nous, les filles, les potes et Madame qui criait :

— Mohamed, tu as mal quelque part  ?

Et lui, il continuait à pisser de rire et n’arrivait pas à répondre. Madame m’a demandé :

— Bob, que s’est-il passé  ?

Je me souviens très bien de ce jour-là. Je portais le t-shirt rose pétant que m’avait offert Tante Audrey, la sœur de Maman. Je me suis tourné vers la maîtresse et j’ai dit :

— Rien, Madame. J’ai envoyé ma bille de travers...

Mohamed, c’était mon ami et il n’était pas question que je dise à Madame qu’il avait sorti le mot « putain ».

— Mais encore  ? a insisté l’institutrice.

— Ensuite, il a déclaré que je jouais comme une tapette et je lui ai répondu que mon père me disait la même chose.

Je n’avais jamais assisté à une transformation pareille sur un visage. Madame a commencé à sourire et j’ai bien vu qu’elle allait rire, mais elle faisait tout pour se contenir et une grimace terrible déformait ses traits. Elle a finalement craqué, parce qu’autour de nous, les autres riaient aussi, sauf Amélie qui avait l’air triste, les autres riaient très fort, comme Mohamed et Madame qui a fini par se tenir les côtes. Et elle hoquetait :

— Oh, Bob, mon petit Bob, excuse-moi, mais c’est trop drôle !

Moi, je ne comprenais pas. D’un côté, j’étais heureux de faire plaisir à tout le monde, mais, de l’autre, j’aurais voulu comprendre comment j’avais réussi un coup pareil. C’est Amélie, la première de classe avec ses petites couettes rousses, qui m’a sorti de mon ignorance, en lâchant :

— Enfin, Bob, tu ne sais pas ce que c’est qu’une tapette  ?

— Non, ai-je répondu. Ma mère ne veut pas me l’expliquer.

Et, de sa petite voix criarde, Amélie m’a balancé :

— Mais une tapette, c’est une tarlouze !

Les autres ont ri plus fort, mais Madame a réussi à se reprendre et leur a crié de se calmer. Quand Madame élève le ton, on baisse le caquet. Elle s’est penchée vers moi, j’ai vu les larmes de joie qui brillaient encore dans ses yeux, et elle m’a déclaré :

— Bob, mon petit Bob, il faut vraiment que je te parle.

Il paraît que, dans certains domaines, je ne suis pas futé. C’est ce qu’on me reproche souvent et, pourtant, malgré ce que les gens racontent, je suis devenu un enquêteur hors pair. Tarlouze, Bob Tarlouze. Ce jour-là, à six ans, je ne voyais vraiment pas pourquoi Madame était si sérieuse. Au fond, Amélie n’avait dit qu’une vérité banale qui m’avait fait comprendre pourquoi mon père me traitait de tapette : si tapette et tarlouze, c’est kif kif bourricot, normal que Papa emploie un mot pour l’autre.

Madame m’a pris à part et a demandé à sa collègue de s’occuper des autres élèves pendant quelques minutes. Je ne comprenais pas et j’étais inquiet. Quand elle agissait ainsi, c’était parce que quelqu’un était malade. Et ce n’était quand même pas parce que Mohamed m’avait dit que j’étais une tapette que j’étais malade, non  ? Je l’ai donc suivie dans la salle de classe et elle m’a demandé de m’asseoir sur sa chaise. Tout ce cérémonial n’augurait rien de bon et j’ai commencé à flipper.

— Bon, a commencé Madame, il faut que je te fasse une petite leçon de vocabulaire.

« Oh non ! ai-je songé. Elle me prive de ma récré pour me donner cours ! », mais je n’ai rien osé dire.

— Tu sais ce que c’est qu’un synonyme  ? m’a-t-elle demandé.

Comment pouvais-je savoir cela à six ans  ? Je ne m’appelais pas Amélie, je n’étais pas première de classe et je n’avais pas de couettes rousses. J’ai fait un mouvement de dénégation. Madame m’a pris les mains et m’a expliqué :

— C’est un mot qui signifie la même chose qu’un autre.

— Comme tarlouze et tapette  ? ai-je demandé.

Elle n’a pas pu s’empêcher de sourire.

— C’est exactement cela, mon petit Bob.

Je ne comprenais vraiment pas où elle voulait en venir. Même si les mots avaient une signification identique, je préférais m’appeler Bob Tarlouze que Bob Tapette, ça sonnait mieux et, en six ans, je m’y étais habitué. Madame semblait gênée. Pourtant, d’habitude, quand elle nous donnait une leçon de choses, elle n’avait pas sa langue en poche.

— Tu sais ce que c’est qu’une tapette  ? m’a demandé Madame d’une petite voix.

— Oui, ai-je répondu tout fier, c’est une tarlouze !

Madame a soupiré.

— Bon, a-t-elle dit plus fermement, nous tournons en rond. Une tapette, c’est un homme qui aime les hommes, a-t-elle jeté à toute allure.

Je me suis demandé pourquoi ça semblait autant l’énerver de m’expliquer cela. À la maison, Maman me répétait sans cesse, quand je me disputais avec le petit voisin, que Jésus voulait que nous nous aimions les uns les autres. Donc, c’était bien d’aimer les hommes ! Madame me regardait avec des yeux ronds et s’étonnait visiblement que je ne réagisse pas à ce qu’elle achevait de me dire.

— Tu comprends, Bob  ? Tu comprends pourquoi tes amis ont ri  ?

Je ne sais pas pourquoi, mais tout ça m’énervait terriblement et je voulais retourner dans la cour de récré. Je me suis mis à pleurer.

— Bob, mon doux petit Bob ! m’a dit Madame en me prenant dans ses bras et en me serrant la tête contre ses seins.

Je me suis dit que pleurer, c’était bien, parce que ce n’est pas tous les jours que je pouvais avoir la bouche contre les nichons de mon institutrice. Et j’ai pleuré plus fort pour qu’elle ne me lâche pas. Si une tapette est un homme qui aime les hommes, il ne faut pas oublier d’aimer aussi les femmes. C’est Jésus qui le dit : dans « Aimez-vous les uns les autres ! » il ne précise pas le sexe de ceux avec qui l’on doit faire l’amour.

La sonnerie de fin de récré a retenti et Madame m’a lâché. J’étais comblé : mon visage gardait en mémoire la douceur ferme de sa poitrine et son parfum boisé flottait dans mes narines. Pour une fois, parce que j’avais lancé une bille de travers, ça n’avait pas été comme tous les jours, ça avait été la fête !

Quand les autres sont entrés dans la classe, Madame a retrouvé sa tête de Madame, mais moi, je songeais sans cesse à la maman-nichons qu’elle avait été pour moi et j’avais envie de lui faire plaisir. Dès qu’elle posait une question, je levais le doigt, même si je ne connaissais pas la réponse et ça a encore fait rire tout le monde. La journée de classe s’est terminée dans la bonne humeur et j’étais heureux.

C’est le soir à la maison que ça a mal tourné. Quand Maman est venue me chercher à la sortie de l’école, Madame l’a attrapée et a dit qu’il fallait qu’elle lui parle. Mais Maman lui a répondu qu’elle avait un rendez-vous chez le dentiste et a demandé si elle pouvait reporter l’entretien au lendemain. Madame a souri et a répondu qu’il n’y avait aucun problème, mais qu’il fallait vraiment qu’elles aient une conversation sérieuse. Dans la voiture, Maman m’a demandé ce que j’avais fait de mal pour que Madame insiste ainsi.

— Rien, ai-je dit. Moi, je n’ai rien fait, mais elle m’a dit que j’étais une tapette.

Maman a blêmi.

— QUOI  ?

Ce mot m’attirait des ennuis et j’ai décidé que je ne l’aimais pas.

— Madame m’a dit que tapette et tarlouze, c’était la même chose, mais c’est Mohamed qui a commencé, pas moi, et Mohamed, il a dit que je jouais comme une tapette, même qu’il a aussi dit « Putain » parce que j’avais mal lancé ma bille, la bleue, tu sais celle que j’aime bien, je n’y comprends plus rien...

J’étais trop énervé, je me suis empatouillé dans mes mots ; c’est toujours ce qui m’arrive lorsque je veux expliquer plusieurs choses à la fois. Alors, pour exprimer mon désarroi, comme devant Madame, je me suis mis à pleurer. Ma mère, elle, ne m’a pas pris contre ses seins. D’ailleurs, ce serait difficile, elle n’en a pas ; elle a juste deux petites noisettes sous son pull et je me souviens bien combien elle s’en plaignait lorsque j’étais enfant, mais c’est une autre histoire.

Ce jour-là, donc, Maman ne m’a pas serré contre ses seins et m’a laissé pleurer. En fait, elle ne pouvait pas faire grand-chose, elle conduisait la voiture et si elle s’était occupée de moi, peut-être que nous aurions eu un accident. Elle a donné un coup de main rageur sur le volant et a grogné :

— Ton institutrice, demain, je vais lui mettre les points sur les i ! Il y a des choses qu’on ne dit pas à un enfant. Et ce Mohamed, il vaudrait mieux que tu ne le fréquentes plus. C’est un gosse mal élevé. Enfin, il ne sait peut-être pas ce qu’il dit ; il n’a pas un prénom très français !

Maman m’a choqué ; Mohamed était mon meilleur copain, nous échangions nos billes, nous partagions nos jeux et sa maman à lui, elle ne travaillait pas dans un hypermarché, comme la mienne, mais elle était professeur de lettres au lycée de la ville. Donc, pour ce qui est du français, elle devait mieux le connaître que nous, même si elle s’appelait Assia. Et elle était super gentille, super jolie, avec des beaux nichons tout ronds, pas comme ma mère et ses deux petits fruits secs.

Cette journée de mes six ans est restée gravée dans ma mémoire et, aujourd’hui, même si j’en ai trente-trois, je pense souvent à ces instants où ma vie d’enfant a basculé dans la tourmente. En quelques heures, je suis sorti de l’innocence linguistique et j’ai dû vivre avec le poids d’un nom qui, jusqu’alors, ne m’avait pas posé le moindre problème.

Dès que nous sommes rentrés à la maison, Maman a interpellé mon père qui regardait un match à la télé. C’était maladroit. Elle aurait dû savoir qu’on ne dérange pas mon père quand il vit un match de foot de l’intérieur. Même à six ans, je l’avais compris. Chaque fois que j’allais vers lui alors qu’il regardait le foot et qu’il buvait sa bière, j’étais reçu comme un chaton qui vient de le griffer en lui sautant sur les genoux. « Allez, ouste, sale bête ! » À moi, il ne disait pas ça, mais, un jour, il m’avait vexé en me lançant :

— Le foot, c’est pas pour les gamins roses ! Retourne dans la cuisine avec ta mère !

— Moi aussi, j’ai le droit de regarder Ziballe, ai-je dit !

— Zidane, petit crétin ! Oh, zut ! Tu viens de me faire louper le penalty !

Comme si c’était lui qui jouait ! Avec ses cent kilos et sa panse à chope, ce serait drôle ! À moins d’être le ballon, je ne voyais pas bien quel rôle il aurait pu avoir sur le terrain ! Mais j’ai senti qu’il était vraiment en colère et j’ai battu en retraite vers la cuisine où ma mère préparait un gâteau au chocolat.

Donc, quand Maman l’a interrompu en plein match, je me suis dit que ce n’était pas une bonne idée. Malgré mes six ans, j’avais déjà une intuition très juste parce que ça a tout de suite pété et que mon père a explosé en hurlant :

— Mais, enfin, Madeleine, c’est l’Olympique de Marseille qui joue à la télé !

Là, c’était vraiment la galère parce que l’Olympique de Marseille, c’est l’équipe fétiche de mon père et que le déranger pendant un match de son club, c’est comme interrompre le pape pendant la messe. Maman n’a pas capté la gravité du moment ; elle était trop énervée par ce que m’avait balancé Madame et elle a insisté :

— Ton fils s’est fait traiter de tapette par son institutrice !

— Goaaal ! a hurlé mon père. C’est goaaal !

Et il a jeté les bras si fort en avant qu’il a renversé la bière qui se trouvait sur la table.

— Johnny, merde ! a crié ma mère. Merde !

Je me suis enfui dans ma chambre parce que, dans le salon, ça virait à la scène de ménage. C’était rare entre eux, mais quand ça leur prenait, ça sentait le déluge et mieux valait ne pas rester dans les parages. Pour que Maman lâche un gros mot devant moi, il fallait qu’elle ait pété un câble. Leurs cris traversaient le plafond et moi, la tête enfoncée dans l’oreiller pour ne rien entendre, je songeais avec nostalgie aux seins de mon institutrice qui avaient bien plus fière allure que mon coussin de plumes défraîchi.

Deux heures plus tard (entre-temps, ma mère s’était rendue chez le dentiste), il a fallu qu’on remette ça à table ! Mes parents s’étaient vachement calmés, ma mère cédait toujours dans les disputes et, comme l’Olympique de Marseille avait gagné 4-2, mon père satisfait souriait de nouveau. Il s’est tourné vers moi et il a dit :

— Bob, c’est quoi cette histoire que m’a racontée ta mère  ?

— C’est rien, ai-je répondu.

Devant moi, il y avait du boudin-compote, mon plat préféré et, pour rien au monde, je ne voulais échapper à ce délice. Mais il était écrit que, ce jour-là, ni Jésus ni le diable ne seraient attentifs à mes vœux ! Mon père a froncé les sourcils et a répété :

— Bob, c’est quoi cette histoire que m’a racontée ta mère  ?

Le boudin-compote refroidissait, je n’avais pas le choix. Plus vite je me mettrais à table, plus vite je pourrais manger. Mon père a toujours été du genre pitbull et je ne lui en veux pas parce que c’est une qualité que j’ai héritée de lui et qui, dans les enquêtes que je mène aujourd’hui, est un atout considérable. Quand j’ai un suspect dans la mâchoire, je ne le lâche pas. Merci, Papa ! J’ai donc respiré un grand coup et, allant droit au but, j’ai répondu :

— Elle m’a dit que tapette et tarlouze signifiaient la même chose.

— Juste ! a décrété Papa.

— Et qu’une tarlouze, c’est un homme qui aime les hommes.

— Mon Dieu ! s’est exclamée ma mère.

— Juste ! a ajouté Papa.

— C’est tout ! ai-je conclu. Je peux manger  ?

— Attends ! a dit Papa. Ça t’a fait du mal  ?

— Quoi  ?

— Que la maîtresse ait dit ça !

— Ben non, puisque c’est vrai !

— Qu’est-ce qui est vrai  ? a demandé Papa.

— Que je suis une tapette !

— Mon Dieu ! s’est exclamée ma mère.

— Je te l’avais bien dit qu’à force de s’habiller en rose, il le deviendrait, a lancé Papa à Maman.

— Qu’est-ce que le rose a à voir là-dedans  ? ai-je demandé. Le rose, c’est la panthère.

— « Le rose, c’est la panthère ! » a répété mon père sur un ton excédé. Ce gamin n’est pas de moi !

— Mais tu es aussi un Tarlouze, non  ?

Là, Maman a souri comme Madame à l’école.

— Ne me dis plus jamais ça ! a dit Papa en fronçant méchamment les sourcils.

— Tu t’appelles pas Tarlouze peut-être  ?

— Je m’appelle Tarlouze à cause d’une erreur d’un employé municipal, a répondu Papa. Mon vrai nom, c’est Farlouze.

J’en suis resté bouche bête ; c’était la première fois de ma vie que j’apprenais que je n’avais pas le même nom que mon père.