Au beau pays des présumées sorcières - Georges Brau - E-Book

Au beau pays des présumées sorcières E-Book

Georges Brau

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Beschreibung

"Au beau pays des présumées sorcières" s’inscrit comme une suite élégante à Chasse au trésor à Bidart, tout en pouvant se lire librement. D’anciens combattants de l’UNC de Bidart s’engagent dans une quête poignante : réhabiliter les « Sorgins », femmes injustement brûlées vives par l’Inquisition au XVIIe siècle, et retrouver leurs descendantes contemporaines, encore en conflit avec leur entourage. Dans l’ombre, un trésor légendaire attise les convoitises de leurs détracteurs, donnant à cette enquête haletante une profondeur historique et mystique. Entre passé et présent, ce thriller captivant entraîne le lecteur dans les paysages enchanteurs de La Rhune, au cœur d’un Pays basque empreint de secrets.

À PROPOS DE L'AUTEUR 

Ancien officier supérieur au service d'organismes spéciaux, Georges Brau livre, avec ce vingt et unième roman, une immersion fascinante au cœur des arcanes d'un monde secret, où opèrent des prestataires indépendants agissant dans l'ombre.

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Seitenzahl: 361

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Georges Brau

Au beau pays

des présumées sorcières

Roman

© Lys Bleu Éditions – Georges Brau

ISBN : 979-10-422-5393-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

Éditions Esprit de tous les combats

– Safari de Sarajevo au Darfour, 2005 ;

Éditions Libre Label

– Loups de Guerre, 2007 ;

– Nébuleuse afghane, 2009 ;

Éditions du Rocher

– Passé par les armes, 2013 ;

– Mission spéciale au Sahel, 2015 ;

Éditions Les Eaux Troubles

– Entre deux feux, 2017 ;

– Filière pour Mossoul, 2018 ;

– Traque en Centrafrique, 2019 ;

Éditions Le Lys Bleu

– Uchronie pour guerriers de l’ombre, 2019 ;

– Labyrinthe en Libye, 2020 ;

– Missing au Congo, 2020 ;

– Peshmerga for ever, 2021 ;

– Hallali de Libye au Haut-Karabakh, 2021 ;

– Mission présumée d’Impossible, 2022 ;

– Oran 62 - Alternative morbide, 2023 ;

– Otages au Darfour, 2024 ; premier Prix littéraire du Bleuet ;

– Chasse au trésor à Bidart, 2024 ;

Jeunesse

Éditions Mon Petit Éditeur

– La légende du dragon d’Orx, 2012 ;

Éditions Edilivre

– Le secret des rives de l’Uhabia, 2015 ;

Éditions Le Lys Bleu

– Le trésor des naufrageurs de l’île d’Oléron, 2018 ;

Avant-propos

Cher lecteur,

Ce livre fait bien suite à Chasse au trésor à Bidart, toutefois à lire même si n’ayant pas lu ce dernier.

Pour résumer et pour ceux ne l’ayant pas lu afin de rapidement les plonger dans ce délire de l’auteur.

Il s’agit d’un thème s’articulant à la suite de la fortuite découverte d’un blason en bois ramené très étrangement par la marée sur la plage de l’Uhabia à Bidart.

S’ensuit une enquête pour tenter d’en apprendre davantage sur son origine, l’enquête confirmant que ce fragment aurait appartenu à un galion de l’Invincible Armada. Un malchanceux navire ayant fait naufrage dans les eaux territoriales de la coquette station balnéaire basque de Bidart.

D’où l’engouement général de milliers d’habitants, lesquels, pour certains, les entraînent dans de rocambolesques aventures. Avec une majorité favorable à exploiter au maximum la recherche de cette épave, sous-entendu, cela devenait un atout supplémentaire attractif pour le tourisme local.

En revanche, d’autres farouches opposants s’indignent d’une telle initiative. La jugeant pour ce qui concernait ce même tourisme de bien trop envahissant. Voire limite en saturation et donc le refus de davantage en augmenter sa densité. Notamment sur une commune où les jeunes Bidartars ne parviennent plus à s’établir et à se loger sur dans leur ville de naissance…

Ainsi, lors de pittoresques aventures, le lecteur se confronte à un passé omniprésent et parfois très étrangement venu se mêler au contemporain. Donc précisément, le drame subi par Maria Zézaya, femme locale brûlée vive sur l’ancien port de Bidart pour sorcellerie. Une sentence proférée au XVIIe siècle par l’Inquisition et sous la tutelle peu objective de l’évêque de Bayonne.

Selon la légende et à retenir de ce drame, une malédiction clamée par cette présumée sorcière avant de succomber à cet horrible supplice. Une prédiction ciblée pour Bidart et ses habitants avec plusieurs irrémédiables calamités.

Dans leur énumération, l’annonce de nombreux naufrages dans le Golfe de Gascogne et depuis avérés comme exacts, ainsi que l’ensablement de l’ex-port de Bidart, tout aussi vérifiable. Port hélas définitivement ensablé, mais bien plus grave, l’inéluctable érosion des falaises de la station balnéaire avec la montée des eaux, principal souci actuel de tout Bidartar…

Aussi, pour réussir à enrayer ces calamités, toujours et malheureusement d’actualité, à la suite d’une fortuite récupération dans les souterrains du château d’Ilbarritz de documents de ce XVIIe siècle, l’ex-colonel prénommé Paul veut tenter de réhabiliter cette Zézaya et d’autres malheureuses présumées sorcières.

Une initiative louable, même si très hasardeuse, afin de peut-être mettre définitivement fin à ces prétendues et dommageables malédictions…

À la suite du succès obtenu par ce précédent roman et présageant une même continuation dans ce sens s’inscrit une rocambolesque aventure au sein du beau pays des présumées sorcières, spécialement ciblé sur La Rhune, haut sommet des Pyrénées près de Saint-Jean-de-Luz.

Cependant, avec un rappel essentiel, il ne s’agit effectivement que d’un roman, comme tel, toutes ressemblances avec des personnes de ce monde ou ayant vécu, ainsi que des évènements similaires passés, présents ou à venir, ne seraient alors que de pures coïncidences…

Première partie

Recherche de descendantes des « Sorgins »

Randonnée en flanc de montagne

Essoufflé naturellement à la suite d’une conséquente dénivelée à gravir, toutefois soucieux de garder son rythme et de ne pas remettre la charrue avant les bœufs et de virer au rouge, ce Paul raisonnable s’accorda un court arrêt.

Là et d’un regard alentour, il profita de la présence opportune d’un rocher plat pour accueillir son séant et ainsi souffler quelques instants.

Une pause salutaire lui permet de prendre du repos après des efforts dispensés d’un pas moyennement alerte.

Ainsi, à ce stade, un évident constat plutôt évocateur afin de lui faire regretter la précédente vivacité de sa lointaine jeunesse.

Cependant, désireux de rester positif et d’oublier sa fatigue, il afficha résolument un léger sourire aux lèvres. En clair, de l’ironie évaluative sur sa forme physique actuelle et comparée à celle d’antan. L’ensemble se résumait au fait de loin était le temps où une moyenne dénivelée lui causait autant d’essoufflements jumelés à des courbatures.

D’où ce bienvenu repos pour à la fois dominer sa tachycardie, mais afin aussi de joindre l’utile à l’agréable, dont l’opportunité de profiter d’admirer le paysage alentour.

Ainsi, à loisir pour ses yeux, telle une belle carte postale, s’offrit une magnifique vision panoramique. Celle-ci est capable, au même titre que la précédente dénivelée, de vous couper le souffle. Toutefois de façon bien plus agréable car très admiratif.

Limite, il était comme enivré par cette redécouverte de tant de beautés pour ceux faisant l’effort de côtoyer ces versants accidentés de La Rhune. Haut point culminant des Pyrénées, dont sa vue imprenable sur une grande partie de la côte atlantique basque et de la non moins magnifique rade de Saint-Jean-de-Luz.

Dès lors et prenant tout son temps, même si enfin reposé, il s’imposa un arrêt plus long qu’escompté afin de « s’en mettre au maximum plein les mirettes ».

Le tout de façon goulue et sans restriction, tel un véritable mort de faim occasionnellement invité à un repas pantagruélique…

En effet, très objectivement, autant Paul aimait l’océan et ses grandes vagues écumeuses, autant la montagne et ses vallées ne le laissaient pas insensible quand il était si intimement confronté à ces harmonieuses beautés.

Un environnement sauvage façonné par Dame Nature et où s’ajoutaient diverses odeurs montagnardes, certaines déjà annonçant la proche venue des premiers frimas de l’hiver.

Un cycle immuable et contre lequel personne n’y pourrait rien ou pas grand-chose, si ce ne serait que de tout s’adapter en conséquence et de prendre son mal en patience avant les futurs lointains beaux jours.

Pour Paul, nullement une première découverte, car ce site lui était des plus familiers. Surtout, car très souvent emprunté et fréquenté dans sa jeunesse très vagabonde et professionnelle, car militaire de carrière.

Période aussi révolue, quand jeune sous-officier au 1er RPIMa de Bayonne, unité parachutiste d’élite et au sein de laquelle il commença son apprentissage dans ce dur mais très attrayant métier des armes.

Toujours assis sur son rocher plat et admiratif face à ce beau paysage, ce fut sans peine et en vrac qu’inévitablement affluèrent des souvenirs. Certains relatifs à l’époque où transpirait la grande fougue d’une jeunesse ultra sportive. La conséquence naturelle d’un permanent entraînement, les parachutistes se façonnant tels des athlètes accomplis. D’où en découleraient d’indéniables qualités physiques, mais surtout celles tout aussi importantes et sinon primordiales, de hautes qualités morales.

Un ensemble peu évalué, comme maintenant avec le recul, quand tout jeune sergent et grand sportif, Paul consacrait ses performances physiques au profit de sa section.

En clair, basé sur un périodique d’entraînement hebdomadaire et avant de s’exercer à toutes les armes en dotation sur un champ de tir situé en ce même flanc de montagne et à l’époque difficilement accessible.

Une discipline dans ce plaisant apprentissage au tir où, très vite, il y excella. Au point d’être reconnu à défendre dans les concours de tir le fanion de sa compagnie, puis par la suite d’être embrigadé dans l’équipe du régiment.

Probablement et à l’origine, un don de dame nature, avec en priorité la précision exigée pour s’imposer à chaque rendez-vous, et ce, très indépendamment des inévitables et précédentes fatigues endurées.

En effet, avant d’accéder à cet éloigné champ de tir montagnard, s’imposait une longue marche en tout-terrain. Celle-ci lestée d’un lourd sac à dos pour le bivouac avec armes et munitions à se coltiner sur une trentaine de kilomètres. Trajet à accomplir depuis La Citadelle de Bayonne et avant enfin de s’exercer aux différents tirs de combat bien au-dessus des versants de Sare et du village d’Ascain.

Au cours de sa pause, ce fugace souvenir traversa avec nostalgie son esprit. Un bilan où, déjà, hélas, des décennies le séparaient de cette jeunesse ultra active.

Désormais et pourtant jadis très fréquenté, ce champ de tir n’était plus d’actualité. D’où l’œil attristé du randonneur solitaire.

En cause, les inévitables nuisances auditives générées par des détonations répétitives qui avaient progressivement amené à de logiques plaintes.

Au fil des années, les citadins des environs avaient largement débordé des limites d’Ascain et s’étaient rapprochés de cet ex-champ de tir situé entre deux vallées, les thalwegs dans le jargon militaire…

Ce vieux souvenir s’acheva sur cette pointe de regret, mais là aussi, dans l’incapacité de remonter la pendule du temps, heureusement demeuraient encore ces bienvenues nostalgies, même si générant quelques inévitables baisses de moral.

Une fois bien abreuvé, puis le souffle redevenu à un bon rythme et ses transpirations évaporées en ce tout début de matinée, Paul notant ainsi au passage la fraîcheur effective de la température ambiante en cette fin d’automne.

Ragaillardi et chassant d’un revers de volonté sa précédente nostalgie, l’ex-colonel reprit courageusement sa randonnée.

Celle-ci, et pour rappel à sa fortuite présence sur ce versant, n’avait à l’origine nullement pour but d’un retour initiatique sur son passé…

Le sourire revenu aux lèvres, Paul affichait d’être satisfait d’avoir en priorité ses yeux pleins d’étoiles. Car à la fois admiratif face à la vision d’un paysage époustouflant et où la prédominante couleur ocre de fin d’automne se mélangeait en totale harmonie à la résiduelle verdure environnante.

De quoi donner à des artistes l’envie de peindre un tableau et d’égaler les meilleures cartes postales vantant les sublimes beautés de l’arrière-Pays basque.

Petit clin d’œil très amical en pensée, car de quoi inspirer Josette et Yannick, ses amis et talentueux peintres illustrant ses livres…

L’aparté bucolique consommé et consécutif à la raison de son effective présence pédestre en ces lieux, à ce stade, Paul éprouvait de réelles difficultés à tenter de déchiffrer un très vieux plan.

Et pour cause, celui-ci datait du XVIIe siècle, précédemment retrouvé dans une vieille mallette rétrocédée en cadeau par Anna, la chef de police de Bidart.

À l’origine, un don spontané afin de le récompenser de son aide efficace lors de la mise sous les verrous de dangereux trafiquants de drogue sévissant dans leur commune.

(Lire : Chasse au trésor à Bidart)

Une vieille mallette contenant de vieux documents d’époque, lesquels avaient principalement servi à l’Inquisition pour condamner à mort ces « Sorgins ».

De malheureuses femmes reconnues très arbitrairement coupables de sorcellerie et de satanisme.

Depuis, objectivement, avec le recul nécessaire pour en juger et pouvoir en faire rétroactivement appel, il ne s’agissait que d’un sordide procès d’intention, pire car dénué de preuves avérées. En revanche, le plus souvent, que de fallacieuses interprétations et auxquelles s’ajouta une grande injustice pour ces pauvres femmes, ne bénéficiant jamais d’aucune défense.

En clair, aucune possibilité d’avocats afin de plaider leur cause et d’obtenir d’éventuelles circonstances atténuantes, bref, de seules plaidoiries capables peut-être si virulentes de leur éviter le bûcher…

Pour rappel, l’appellation « Sorgins » de façon étymologique se traduirait par « femmes donnant la vie ».

L’équivalence de nos sages-femmes œuvrant dans nos maternités, sans toutefois, à l’époque considérée, disposer alors de techniques modernes mieux adaptées…

Afin de situer le statut de ces malheureuses « Sorgins », en grande majorité, leurs maris étaient marins-pêcheurs. Ceux-ci périodiquement s’embarquaient sur l’océan pour rejoindre Terre-Neuve et les Amériques afin de pêcher la morue et aussi ramener des fourrures troquées avec les Indiens contre de la verroterie très appréciée chez ces êtres primitifs.

Les distances étant telles et la navigation uniquement à voile, bref, ces marins demeuraient absents du Pays basque, parfois plus de la moitié de l’année, sinon plus et toujours en fonction de la météo. Aussi, quand également pénurie de morues, leurs cales non encore pleines de ce poisson très recherché sont contraintes alors à retarder leur retour.

Ainsi, en première conséquence, de laisser leurs femmes seules et livrées à elles-mêmes pour assumer outre leurs charges ménagères et familiales, mais également à mener la vie active de leurs villages, certaines de compétentes conseillères municipales.

L’aparté de la condamnation des « Sorgins » rapidement évoqué, selon le vieux plan ancestral consulté avec extrême attention, sceptique, Paul était peu sûr de s’être rapproché de « l’aquelarre ». Terme local à traduire en basque par le « Pré du bouc ».

Dans le contexte du XVIIe siècle, ce lieu où lors du Shabbat et consécutif au manque d’hommes, ces « Sorgins » se seraient accouplées avec cet animal.

Ce dernier est pour mémoire honni par l’Église, puisqu’assimilé dans les écrits à un animal satanique. Le diable et Lucifer dans leurs images rapportées, arborant fièrement les mêmes sabots fourchus de cet animal…

Et ce, sans compter la puanteur effective et avérée de cet ovin.

Dans ce pré présumé, si toutefois le bon, Paul ne constata nulle présence de cet ovin aux grandes cornes et à la réputation sulfureuse de sentir très fort. Pour ne pas dire plus vulgairement, de puer bien plus que toutes les autres bêtes en pâture.

Par ailleurs et dans ce même pré, des pottiocks y paissaient tranquillement. Ces typiques petits chevaux basques, plus ou moins sauvages et fréquemment rencontrés sur ces versants montagneux des Pyrénées.

Plutôt déçu, son constat demeurant sans appel. En clair, ce plan était peu précis et ne lui était nullement d’un grand secours. Visiblement trop succinct et aux antipodes d’être une bonne carte d’état-major, comme très habitué à les consulter par le passé durant sa carrière militaire.

Au XVIIe siècle, ceux l’ayant répertorié n’y avaient hélas pas reporté des coordonnées de référence en latitudes et longitudes.

Plus pénalisant encore, aucune échelle n’y figurait, d’où l’approximation de son positionnement selon la référence idoine de ce plan.

Toutefois, consciencieux, Paul en fit le relevé précis avec son GPS. Histoire plus tard de vérifier si concordance ou pas entre les vieux documents de la mallette et ses relevés modernes.

Peut-être qu’alors, avec beaucoup de chance, d’en exploiter des recoupements plus précis.

Ainsi, à mieux y regarder pour la énième fois, seules références d’importance, en premier la ville d’Ascain dûment répertoriée.

Plus curieusement, les célèbres grottes de Sare, appelées Lézéa. Un beau site du Mégalithique, évalué temporellement à guère loin de deux millions d’années.

Tout en haut du plan et vraiment en évidence devant le ciel, se détachait majestueusement le sommet de La Rhune. Petite montagne basque ne dépassant pas les mille mètres. Donc bien éloignée du firmament, terme souvent évocateur dans les élucubrations du vieux militaire. Depuis, de nos jours, pour les moins sportifs, on pouvait facilement y accéder par un petit train à crémaillère afin de rejoindre la « venta » (auberge) du sommet.

Un site hautement touristique et bénéficiant dans ses commerces de prix bien moins chers qu’en France, les taxes en Espagne peu pénalisantes.

D’ailleurs, Paul en profitait pour remplir sa cave à moindres frais, le Jack Daniel’s, son élixir préféré, y étant nettement plus abordable…

Sorcière ou berger ?

Curieusement, dans l’esprit de Paul, un flash s’imposa. Ces flancs de montagne se voulaient assez sauvages et subitement, il se sentit très seul. Cependant, avec la prédominante impression d’être certainement épié.

Aussi, et comme à ses plus beaux jours où il était opérationnel sur un territoire ennemi, calmement, il procéda à un méthodique et large tour d’horizon.

Un réflexe professionnel avec un découpage scrupuleux du terrain avoisinant, mais au final, sans rien voir d’étonnant. Ou bien encore, en lui recommandant de demeurer sur ses gardes, comme si l’éventualité d’un imprévisible danger.

Entraîné par le passé à cette attitude guerrière si souvent utilisée, son flair de vieux briscard redevenait d’actualité.

Un don inné avec lequel, souvent, il décelait un réel danger et s’évitait de malencontreux déboires.

Nanti de sa bonne expérience, d’emblée Paul ne rejeta pas ce subjectif avertissement.

Consécutivement à cela, un autre vieux souvenir l’assaillit tout aussi soudainement que ce précédent mauvais pressentiment d’être épié.

Ainsi, se remémora-t-il une anecdote étrange vécue lors d’une marche spéciale des « fourragères » dans cette même région.

« La fourragère » était anciennement l’appellation d’une bride pour conduire les chevaux. Depuis et par tradition, elle était devenue un attribut ornemental arboré sur les tenues de parade des militaires.

En l’occurrence, de hautes distinctions nationales militaires qui récompensaient ces régiments ayant participé à des conflits et montré leurs bravoures ainsi qu’hélas le grand sacrifice de plusieurs de leurs farouches combats.

Afin d’ensuite les mériter et fièrement les porter, puisqu’encore n’ayant pas combattu, les jeunes recrues se devaient d’accomplir une grande épreuve d’endurance. Celle-ci concrétisée par un difficile parcours en grandes dénivelées, dont l’escalade en randonneurs de plusieurs sommets basques.

Une « bovinante XXL » et dont ils s’en souviendraient longtemps, pour certains, un souvenir impérissable…

Bref, un exploit pour ces jeunes paras, histoire de leur faire découvrir leurs limites physiques et surtout, bien plus importantes, celles morales.

Toutefois, avec l’entraînement progressif enduré durant leurs précédentes classes, rien d’exceptionnel. Juste la concrétisation qu’avec de la volonté, presque plus rien de quasiment impossible…

Pour en revenir à ce curieux souvenir, Paul se remémora qu’en pleine nuit et sous une pluie glacée, avec sa section lors de cette marche des fourragères, il arpentait un très anodin sentier de montagne.

Responsable serre-file, il encourageait les plus faibles afin de garder contact avec la longue colonne serpentant de coteau en coteau avant d’atteindre les lointains sommets.

Concrètement et à titre d’encouragements répétitifs, le sergent qu’il était leur promettait que la pause ne saurait tarder. Donc sollicitant chez les moins endurcis à produire un dernier gros effort.

Ce fut alors qu’étonnamment, son arrière-garde vint à croiser une très vieille dame. Celle-ci comme si étrangement sortie d’un buisson ou bien plus vraisemblablement de nulle part. Paul et ses gars la découvrant avec une grande stupeur, puisqu’insolite, au point d’en être, tout comme ses jeunes frères d’armes, très impressionné.

Premier réflexe, se rassurer de n’être pas seul face à cette vieille dame, même si pour autant non menaçante. Sans quoi probablement, que tous auraient paniqué et pris les jambes à leurs cous sans ne jamais chercher à vouloir faire plus ample connaissance.

L’image de cette vieille dame surgie de nulle part en cette nuit noire lui avait fait penser à une caricaturale sorcière. Ainsi, plusieurs années après, quand en y repensant, s’imposa à Paul la même image fugace qu’il avait plus récemment eue à l’embouchure de l’Uhabia avec ce même type original de personne.

(Voire précédentouvrage.)

Une caricature semblable, laquelle lui fit de nouveau froid dans le dos et par réflexe, de nouveau Paul scruta les alentours avec attention, avant de s’esclaffer contre lui-même et face à une subite peur non bien maîtrisée.

Attitude en se faisant mentalement la remarque que ce n’était nullement le moment ni le lieu et encore moins les circonstances pour paniquer.

D’autant qu’il se trouvait là en plein jour et sur ce versant certes sauvage de La Rhune, mais sans autres inquiétantes caractéristiques.

Objectivement, cela tiendrait plus du fantasme que d’autre véracité, probablement en explication rationnelle où ses précédentes lectures l’auraient influencé dans ce mauvais sens.

Aussi, pour en finir avec ce vieux souvenir montagnard, spontanément, les militaires s’étaient écartés de la trajectoire de la vieille dame, lui laissant libre accès au sentier de chèvre emprunté.

Le tout scandé par le ricanement incessant de cette étrange personne déambulant seule en pleine montagne et au beau milieu de la nuit sous une pluie glacée.

Dès lors et à y repenser, la coïncidence d’un tel souvenir alors que l’ex-colonel empruntait « le pré au bouc » l’étonna beaucoup. En réactivité, il prit tout son temps pour mieux inspecter les alentours.

Un peu comme si craignant que cette étrange créature puisse lui réapparaître et ressortir des buissons de thuyas, ces denses et fréquents épineux de la région…

Pourtant en amont, il s’était promis de rester objectif et serein, réfutant toute croyance aux sorcières et encore moins aux fantômes, en vérité que des ectoplasmes uniquement entraperçus dans ses élucubrations, du moins essaya-t-il de l’admettre.

Toutefois, il ne pourrait nier que les légendes puisaient toujours leurs origines dans des faits troublants et parfois dénués de tout entendement, du moins ceux dignes de cette appellation.

Ce constat établi, Paul se sourit à lui-même, relevant sa stupidité de se conduire ainsi, car avouant de ne pas être trop fier de lui…

Mais alors qu’il venait juste de se faire la morale sur son côté trop influençable, soudain son cœur battit la chamade. En effet, il venait de se faire brusquement interpeller par un berger sorti également de nulle part. Celui-ci cependant non menaçant en lui souhaitant aimablement le bonjour en basque :

— « Agur », vous êtes perdu l’Ancien ?

Se ressaisissant, Paul souhaita spontanément le même « Agur » (salut) et lui avoua d’avoir dévié de sa trajectoire initiale. Notamment, à la recherche de grottes non répertoriées comme celles plus connues de Sare ou de celles de Zugarramurdi sur le versant espagnol.

Calmement, l’homme s’approcha de Paul et fit d’emblée la remarque que cette carte à l’étrange allure de par son papier ne devait pas être trop précise.

Volontiers et limite goguenard, il attesta qu’à sa connaissance, aucune grotte existante dans les environs.

Dans la foulée, il rajouta d’être natif du coin et de par son métier de berger, d’arpenter fréquemment ces versants montagneux.

Bref, il connaissait parfaitement les environs…

Puis, sans s’attarder davantage après ses succinctes explications, l’inconnu siffla son chien, un berger Patou et les deux disparurent derrière des bosquets, laissant de nouveau un Paul en pleine expectative.

En effet, après l’apparition soudaine de ce berger et non fort heureusement d’une vieille dame, plusieurs questions s’imposèrent.

D’abord, cette curieuse confirmation d’avoir ressenti d’être épié et son flair légendaire donc toujours opérationnel, seul point positif.

Ensuite et information à bien prendre en compte, qu’aucune grotte existante dans les environs, du moins si le berger ne lui avait pas menti.

En règle générale, ces montagnards souvent bourrus et peu enclins à sympathiser avec des étrangers, comme si les considérant davantage comme des intrus désireux de s’implanter dans leur privé environnement.

De quoi laisser un Paul dans l’expectative et cependant réactif, il tenta de se reprendre, à la fois pour cesser d’inutilement fantasmer et surtout de demeurer le plus objectif possible.

Vœux pieux qu’il essaierait d’appliquer par la suite…

Vaines recherches

Après ces bonnes résolutions de prises, mais au final, Paul fut particulièrement déçu de n’avoir pas retrouvé la grotte indiquée, même si celle-ci plus ou moins bien précisée sur son vieux plan.

Selon toute vraisemblance, un lieu répertorié comme stratégique, car où s’y trouveraient peut-être d’autres importants indices inhérents au trafic de ces « Sorgins ». Le mot « trésor » non à ce stade encore évoqué, comme si désireux de ne pas occasionner trop de convoitises. Pourtant s’agissant effectivement d’Écrits dûment suggérés dans les témoignages annexes de feu l’évêché de Bayonne du XVIIe siècle.

Cependant, l’heure s’écoulant rapidement, cela incita le néo chercheur d’abandonner pour aujourd’hui ses toutes premières investigations. Sous-entendus, qu’il y en aurait beaucoup d’autres, jamais s’arrêter sur un échec, autre devise parachutiste.

Pour l’heure, il serait grand temps d’aller se restaurer afin de reprendre à la fois des forces et de préférence un meilleur moral, celui-ci depuis peu très enfoui dans ses chaussettes.

Aussi, au grand risque de solliciter davantage et voir de trop ses émoussées articulations, l’ex-colonel prit courageusement tout schuss la longue dénivelée précédemment arpentée.

Gaillardement et essoufflé, cependant heureux du périple si rapidement accompli, il rejoignit ainsi son véhicule. Resterait ensuite à se diriger vers Espelette où il avait rendez-vous avec ses trois inséparables compères Dédé, Tonio et Jacquot. Ses grands amis et aussi membres de l’association des Anciens Combattants de Bidart et avec lesquels en leur efficace compagnie, ils menèrent surtout la traque de leurs ennemis. Le sieur Maurice et toute sa clique de dealers de drogue mis en partie et grâce à eux, sous les verrous.

(Voir : « Chasse au trésor à Bidart ».)

Entre autres multiples qualités, paras comme lui, ses trois camarades avaient pour point commun d’être surtout de confirmés randonneurs.

Ainsi, quand la saison s’y prêtant car d’actualité, ils devenaient volontiers de grands ramasseurs de champignons. Spéciale discipline avec de longues cueillettes où ils excellaient dans des lieux répertoriés depuis des lustres, certains hérités de bouche à oreille de leurs parents. Des secrets jalousement gardés.

Au point après leurs efficaces cueillettes d’en faire de nombreux bocaux pour avoir la possibilité enviable d’en déguster toute l’année. Leurs congélateurs pleins à ras bord, sans compter leurs fréquents et généreux partages inopinés avec d’autres congénères.

Ces caractéristiques rapidement évoquées, Paul s’interrogea sur le lieu choisi pour ce déjeuner, un rendez-vous précis et nullement anodin.

En effet, au programme de leur imminente et sympathique rencontre, ses amis lui présenteraient une de leurs vieilles connaissances basques.

En l’occurrence, celle-ci réputée être une mémoire vivante bien ciblée sur de nombreuses légendes locales.

Donc un pôle attractif et nettement intéressant, puisqu’orienté précisément sur d’actuelles recherches entreprises et concernant tout particulièrement les énigmatiques « Sorgins ». Sous-entendu également, dans le but de, si possible, pouvoir les réhabiliter.

Une sorte de Graal difficilement atteignable, mais comme chacun n’ignore nullement : « qui ne tente rien n’a rien… ».

Aussi, en dépit d’avoir beaucoup lu sur ces légendes, Paul désirait en connaître davantage sur des mythes locaux encore souvent racontés lors des veillées.

Notamment avec pour intérêt principal, d’élucider si certains catalogués comme proches de rites sataniques et de ce fait probablement donc plutôt voisins de la sorcellerie. Ceci avec peut-être l’idée inespérée de trouver une quelconque relation avec feue la présumée sorcière brûlée vive Maria Zézaya.

Ainsi, par grande chance, le cas d’en apprendre un maximum avant d’entériner la quête à ce stade prématuré de son hypothétique réhabilitation.

Un vœu au fil des jours devenant une réelle obsession chez Paul. Au point de ne cesser d’y penser et de négliger le reste de ses habituelles préoccupations, comme auparavant l’étaient le plus souvent dans ses loisirs ses fréquentes écritures.

D’ailleurs, à ce propos, ses éditeurs venaient encore de le relancer, car d’habitude prolixe, là c’était devenu le calme plat. En clair, aucun surf envisagé sur les ondes mouvementées de ses chapitres livresques…

En effet, depuis la narration de ses récentes aventures à Bidart et un indéniable succès à la parution de son divertissant vingtième roman, sa fidèle muse semblait l’avoir momentanément abandonné.

Pourtant, objectivement, ce n’étaient pas les thèmes qui lui manquaient pour assouvir son insatiable soif d’écrire.

Mais là et très étrangement à ses habitudes, son clavier demeurait volontiers muet, à part de rechercher sur le Net d’éventuelles pistes relatives à ce beau pays de ces plus que jamais présumées ou plutôt prétendues sorcières…

Alors et peut-être comme promis par ses trois potes, ce treize heures trente, bel horaire de repas à l’espagnol, trouverait une bienvenue indication susceptible de mieux l’orienter dans son originale quête d’en apprendre davantage sur la sorcellerie locale.

Pour anticiper au cours de ce long transfert vers Espelette, Paul ressassait une multitude de questions à poser à cet érudit du folklore basque.

A priori, il demeurerait très ouvert à la moindre anodine suggestion.

L’ex-colonel n’ignorait nullement qu’en règle générale, tous les folklores s’inspiraient pour leur majorité sur de vieilles légendes.

Mais sans omettre que pour la plupart d’entre-elles et à leurs origines, ces légendes s’étaient développées et parfois très induites à partir d’un fait réel.

Ensuite et avec l’usure naturelle du temps, certains importants détails s’étaient perdus ou devenus trop flous pour attester formellement de leur éventuelle véracité…

Voire également et hélas à trop s’en éloigner. Cela souvent dut aux prolixes exagérations de talentueux narrateurs désireux de captiver leurs auditoires et au risque évident d’en dénaturer de son réel contenu.

Dès lors, s’en suivraient de dommageables déformations, le plus souvent car bien enjolivées à dessein, afin d’être les mieux colportées au cours des années à venir et pour en devenir à jamais : des légendes…

Selon l’ami Dédé, Paul trouverait en la présence de leur convive prénommé Manolo, un conteur hors du commun et qui sans retenue répondrait aux multiples et pertinentes interrogations de l’ex-colonel.

En l’occurrence, ce Manolo se présentait comme un octogénaire plutôt ventripotent, d’où sa réputation d’être un excellent convive. Il s’enorgueillissait au point de posséder un classement très personnalisé à cataloguer les auberges locales, uniquement celles dignes de figurer sur son très personnel guide culinaire.

Dédé affirmait car convaincu que son classement n’aurait rien à envier au célèbre guide Michelin.

D’ailleurs, c’était pour cette même raison que Manolo avait personnellement choisi la gargote en question.

Une coquette auberge qui répondait avec excellence aux doléances des compères de Paul, ceux-ci friands et désireux de s’offrir un gueuleton à base de gros gibier.

Pourtant, à première vue en se garant au plus près, d’apparence l’établissement ne payait guère de mine. Même si ne reniant pas son style basque et ses vives couleurs rouges et blanches très récemment repeintes et éclatantes au point d’inciter la clientèle à en pousser la porte.

En revanche et selon l’orfèvre Manolo, ce restaurant serait garanti hors catégorie. Ce conteur le classifiant sans retenu de détenir le meilleur label, notamment pour le gibier. D’ailleurs, avant de passer à table, on faisait obligatoirement visiter aux initiés l’arrière-salle où faisandaient avant d’être dégustés divers gibiers locaux.

N’en croyant pas ses yeux, Paul fut logiquement subjugué, pensant se trouver au sein d’un cimetière animalier. Ceci dit tant les proies nombreuses et attendant leur funeste destin pour le seul plaisir des invités à ces repas gargantuesques.

Au menu de ce jour en cette sympathique auberge, du sanglier pur basque. Celui-ci labélisé d’avoir été abattu la veille dans les environs, la chasse pourtant non ouverte.

De là et d’en déduire à du braconnage, le silence généralisé y répondit à l’unisson et sans que cela ne choque trop personne autour de la table.

Sous-entendu que la réglementation étrangère, qualificatif attribué à la France, comme si étant à l’étranger, n’ayant parfois que peu ou prou d’application dans la région, jusqu’à en déduire que les gardes-chasses inexistants ou alors complices…

En fins connaisseurs, les convives en bavaient déjà à l’avance. Les parts promises copieuses et haut de gamme, d’où nul besoin d’entrées.

Outre le plat consistant, Manuela, la femme aubergiste, ne lésinait pas sur les légumes de saison, eux aussi du pur local.

Bref et à l’avance, tous s’en léchaient les babines tout en prenant une sangria maison offerte par la sympathique tenancière.

Le tout agrémenté d’inévitables tapas, tradition locale oblige, d’où encore pour justifier de l’inutilité des entrées, la charcuterie locale en tapas palliant largement.

Bref, le Pays basque dans toute sa splendeur culinaire…

Cependant, dès l’accueil, Paul s’était senti quelque peu esseulé. La langue basque reprenant naturellement ses droits auprès de ces purs natifs locaux.

L’espace d’un long instant pour fêter leurs retrouvailles, ces Basques bondissants en oublièrent les évidentes lacunes linguistiques de Paul. Lequel étranger bien que sympathisant, malgré de réels efforts, ne maîtrisait nullement cette langue très colorée.

Pourtant plutôt polyglotte, avec l’anglais, l’espagnol et l’arabe, mais promettant qu’un jour prochain il s’y mettrait, bien aidé en cela de ses amis basques…

Pour l’heure, seuls quelques mots de politesse lui suffirent à montrer d’être une sympathique « pièce rapportée ».

Pourtant, il adorait depuis son immersion à Bayonne en 1966 ce beau pays et pour preuve dès sa retraite, il s’y était en famille définitivement établi…

Comme sérieusement recommandé par Manolo pour ne surtout jamais gâcher ce grand plaisir gustatif, le repas se fit en silence, seuls les bruits répétitifs des actives mâchoires y étant autorisés.

Une douce musique synchronisée par un insatiable appétit et au final, un régal général.

Le sanglier affirmait ainsi sa qualité de plat royal et méritait une dégustation dénuée d’aucun verbiage inutile.

Un respect à la fois pour en honorer sa saveur et au point d’en redemander davantage, quitte à se faire péter la sous-ventrière.

Bref, une dégustation accomplie dans un silence religieux…

Folklore et légendes

Le repas pantagruélique fini, le dessert bien arrosé de Manzana locale, cela laissa enfin libre court au distingué et sieur moulin à paroles. Un qualificatif élogieux et plutôt mérité pour cet excellent conteur prénommé Manolo.

Dès lors et indépendamment de ces agapes hautement gustatives, ses récits prolongèrent le repas jusqu’en début de soirée.

Celle-ci ponctuée cependant d’un inévitable deuil à devoir hélas déplorer, cependant sans ne verser beaucoup trop de larmes, en effet la bouteille de Manzana n’y avait pas survécu…

En prévision de trop de notes à prendre, exercice pénible car en pleine digestion, sagement Paul s’était muni d’un dictaphone.

Un choix judicieux pour tout enregistrer et surtout pour plus tard pouvoir au besoin s’en référer avec justesse.

En cause, la mémoire parfois fugace d’une part et aussi d’autre part, l’appellation de certains patronymes méritant d’en retenir les termes exacts et sans ne trop à risquer de les dénaturer.

Attentif, Paul opta de rester pendu aux lèvres du narrateur, même si en reconnaissant déjà plusieurs patronymes parmi l’ensemble des fabuleux personnages décrits de façon toujours colorée par ce sympathique Manolo.

Comme si jugé primordial, au début de son exposé, le conteur insista particulièrement sur ce personnage légendaire qu’était « Mari ».

Aussi, pointilleux, s’empressa-t-il de préciser sur l’orthographe de ce patronyme, le fait de ne point être écrit avec un « e ». Et ce, bien en dépit d’être une femme selon la vieille légende colportée et surtout car unanimement reconnue comme la créatrice de toutes vies au sein de la nature.

Cependant, ce fut avec gravité qu’il la décrivit de posséder en terrible et redoutable pouvoir. Notamment, celui d’être capable de provoquer de terribles orages, lesquels s’accompagnant toujours de tonnerres terrifiants, ceux-ci semblables comme annonciateurs d’une imminente fin du monde.

Dans sa vie peu commune à travers le monde sauvage, cette réputée « Mari » s’accompagnait de plusieurs « Sugaar », bien comprendre en ce nom anodin, qu’étant concrètement de peu commodes dragons appelés également « Erensièges ».

De quoi et avec de tels monstres et lorsqu’au hasard de ses fréquentes et versatiles humeurs le désirant, rendre de par sa seule présence un climat hyper inquiétant…

Le ton était donné et de suite Paul osa interrompre Manolo, car une question venait brusquement de le tarauder au point de causer cette impolitesse, du moins son intervention jugée comme telle.

— Mon cher Manolo, ôte-moi d’un doute camarade. Probablement que la Manzana abondante facilitant le tutoiement. – Explique-moi pourquoi la terrible et réputée loyale Inquisition dans le procès fait à Maria Zézaya, y mentionne que cette sorcière possédait également de tels maléfiques pouvoirs destructeurs. Notamment, comme de provoquer de telles catastrophes en appelant les orages pour punir les habitants de la région et conjointement les navires croisant dans les parages. D’où ma pertinente question, n’y aurait-il pas effectivement un amalgame avec cette même « Mari » que tu viens avec grande qualité de nous présenter ?

Réceptif à ce problème de probable amalgame, Manolo resta quelque peu muet, semblant en priorité réfléchir à la pertinence de cette probable grande énigme en devenir. D’autant que le conteur n’ignorait nullement la légende inhérente à la malédiction de cette sorcière Zézaya. Celle-ci citée par l’Inquisition et qui selon ses malédictions aurait provoqué de nombreux naufrages dans le golfe de Gascogne.

Un dilemme difficilement explicable de prime abord par le conteur Manolo, le grand érudit pourtant en contes et légendes locales.

Aussi, hélas pour Paul, sa réplique très attendue ne lui fut guère trop convaincante.

Presque tel un rugbyman acculé dans ses vingt-deux mètres et se devant de rapidement botter en touche.

Dès lors et choisissant pour l’occasion un ton monocorde et bien différent de celui de ses précédentes évocations, il évoqua de façon résignée qu’il aurait vraiment fallu vivre à cette époque pour pouvoir objectivement en statuer avec précision.

Bref, le doute subsisterait pleinement, ce qui ne ferait pas du tout les affaires de l’ex-colonel.

Plus précisément ensuite, penaud d’avoir été pris sur ce sujet quelque peu en défaut, comme pour s’en excuser, Manolo évoqua qu’avant et après la malédiction de Zézaya, les tempêtes avaient toujours existé. Et également, de très fréquents naufrages en ce même golfe de Gascogne. Ce en quoi, c’était en effet très vrai.

Bref et à donc bien le conserver en mémoire, avec ou sans présence de sorcières ou de toutes autres prétendues malédictions.

Puis percevant la mine plutôt déconfite de Paul face à l’effective Lapalissade, charitablement, il émit le fait que certains écrivains aussi dénaturaient parfois et sciemment la vérité.

Certains d’entre eux comme si désireux d’auréoler au mieux leur texte. Ou bien plus simplement aussi parfois, afin d’adroitement rebondir face à une page blanche survenant par manque de preuves tangibles et surtout plus fréquemment, par regrettable pénurie d’inspirations.

Manolo osa la réplique suivante, n’ignorant nullement que face à lui était un écrivain confirmé :

— Vous en savez certainement quelque chose, n’est-ce pas Monsieur Paul ?

Amusé par l’emploi de ce ton sarcastique et approprié en la circonstance par ce conteur local, à son tour Paul releva le défi et se résigna à également botter en touche.

Histoire, en priorité, de gagner d’abord du temps et de lui permettre ensuite de mieux ainsi réfléchir.

Dès lors et comme pour s’en excuser, il prétexta de n’être qu’un modeste romancier et non un écrivain. Il rajouta que la différence à ce stade étant de taille, et ce, même si son texte se référant par certains passages à de l’histoire avec un grand H majuscule et celle-ci alors reconnue comme telle…

Un long silence accompagna l’ultime réplique, reléguant à l’oubli les « Ega ou Ekni », le soleil, ou encore « Ilou » la lune, sans ne négliger « Basajaunak » le seigneur de la forêt, et le non moins redoutable « Tartalo ». Ce terrible cyclope mangeur de chrétiens et autres énigmatiques « Laminakz », ces êtres étranges vivant cachés sous les ponts.

Bref, l’énumération colorée de tous ces personnages légendaires et ayant fait l’objet de larges commentaires chez l’intarissable Manolo, depuis et enfin laissé totalement libre à les évoquer dans son inépuisable folklore.

En revanche, il resta bien peu en verve sur le cas très recherché par ses auditeurs de ces prétendues « Sorgins ».

Toutefois, il ne nia jamais leurs existences et y rajouta avec malice que probablement celles-ci s’étaient entretemps agrémentées de légitimes descendances. Lesquelles d’ailleurs et selon l’occasion, entretenaient toujours leurs mémoires, dont quelques traditions de Shabbat lors de périodiques et cycliques changements de lunes.

Curieusement aussi, l’amalgame avec une secte y fut largement évoqué. Puisque et a priori, nulle personne extérieure à leur cercle restreint d’autorisée à les suivre au cours de leurs ancestrales coutumes et autres rites dévolus à perpétuer ce souvenir…

L’allusion au monument commémorant l’affreuse page d’histoire vieille de quatre siècles « Oroit Mina », à traduire par « le souvenir de la douleur » et érigé à Saint-Pée sur Nivelle en témoignant sur ces horribles supplices subis pour ceux encore et bien trop nombreux l’ignorant…

Quand vint enfin l’heure de se quitter, au bilan et à part un repas gargantuesque et non moins de grande qualité, Paul était plutôt déçu lors de sa sympathique rencontre avec Manolo. Car même si le personnage des plus amusants, mais en définitive, l’ex-colonel peu ou prou avancé dans son enquête.

Seule autre piste cependant et plutôt importante pour au plus vite tenter de la rencontrer, l’existence d’une guérisseuse opérant non loin de Saint-Pée sur Nivelle.

Car, excusez du peu, présentée comme une présumée descendante de ces sorcières, d’où et de logiquement avoir retenu toute l’attention de Paul.

Ainsi, du bout des lèvres, Manolo l’avait désignée comme l’une des dernières héritières de ces ex « Sorgins » brûlées vives en place publique. Confidence ponctuée d’un évident trouble très apparent chez le conteur, au point de pour s’acquitter d’une telle importante confession, de l’associer quasi instinctivement à un rapide signe de croix. Un peu comme si surtout désireux de conjurer l’éventualité d’un mauvais sort.

Dès lors et tous ses sens bien en éveil, il n’en fallut pas davantage à Paul pour désirer rencontrer au plus tôt cette étrange personne.

Cependant, à cette heure devenue très tardive, sagement, il remit au lendemain sa visite.

Néanmoins, il se renseigna sur la possibilité à comment la rencontrer, dans sa très curieuse démarche, Paul fut averti par l’aubergiste qu’il lui faudrait se munir de beaucoup de patience.

L’explication à cela était que cette guérisseuse recevait de nombreux patients, lesquels dès l’aurore faisaient la queue devant son humble et vieille demeure dans les bois proche du lac de Saint Pée sur Nivelle.

Qu’à cela ne tienne, Paul s’y rendrait donc très tôt le lendemain, restant pour ce soir couché à l’auberge.

Cependant, comme ses autres camarades peu enclins à le suivre dans ce souhaité prochain rendez-vous, ceux-ci s’en retourneraient à Bidart mais demeureraient à l’écoute si besoin demain ou plus tard de leurs services.

L’entraide entre Anciens Combattants demeurant toujours d’actualité.

Ne resterait plus ce soir à Paul de dîner en solo, une nouvelle grosse part de ce succulent sanglier l’attendant…

D’ailleurs tout en dégustant ce mets délicieux, avec un clin d’œil ironique aux éventuels végétariens qui ne savaient pas ce qu’ils perdaient en saveurs et délices, soudainement un fugace flash assaillit le romancier…

L’évocation de cette guérisseuse basque lui remémora un vieux souvenir d’OPEX. Précisément vécu en Centrafrique en la personne d’une « Mamie-Wata », un étrange personnage qui aussi guérissait ceux venus la consulter.

(Lire « Traque en Centrafrique ».)

Cela parvint en partie à gâcher l’actuelle dégustation de son plat, Paul se remémorant le danger de ces très peu anodines rencontres avec ce genre de personnes mystiques. Dont, notamment, d’éventuelles alarmantes prédictions car parfois ces guérisseuses en possédaient surtout aussi ce don.

De quoi lui donner quelques inquiétudes et perturber par la suite son sommeil, l’image de « Mamie-Wata » peu rassurante pour ne pas faire d’inévitables cauchemars…

Toutefois, cela lui avait pas mal réussi en Centrafrique, alors pourquoi pas dans ce Pays basque.