Otages au Darfour - Georges Brau - E-Book

Otages au Darfour E-Book

Georges Brau

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Beschreibung

Cet ouvrage est inspiré de faits réels peu médiatisés survenus au Soudan. Quatre diplomates français se réfugient au Tchad pour fuir un Khartoum en proie à l’anarchie, mais leur exode est compromis lorsqu’ils disparaissent en plein Darfour. Mandaté comme médiateur en raison de son expérience locale, Paul, « Honorable correspondant » de la DGSE, entreprend leur recherche. Sous couverture d’une ONG dans les camps de réfugiés du Darfour et avec l’aide de paras du 13 RDP, il se lance dans des aventures palpitantes ponctuées de rebondissements. Ces péripéties, romancées pour préserver le secret-défense, impliquent également la CIA et la présence insidieuse de la société militaire privée russe, Wagner. Une enquête haletante se déroule en zone frontale, où sévissent des bandes incontrôlées de piliers, les Janjawids, soupçonnés d’avoir enlevé les diplomates français.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Dans son XIXe roman, Georges Brau, ancien officier supérieur d’organismes spéciaux, dévoile le monde clandestin des prestataires indépendants opérant dans l’ombre.

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Seitenzahl: 433

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Georges Brau

Otages au Darfour

Roman

© Lys Bleu Éditions – Georges Brau

ISBN : 979-10-422-2704-3

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

– Safari de Sarajevo au Darfour, 2005, Éditions Esprit de tous les combats ;

– Loups de guerre, 2007, Éditions Libre Label ;

– Nébuleuse Afghane, 2009, Éditions Libre Label ;

– Passé par les armes, 2013, Éditions du Rocher ;

– Mission spéciale au Sahel, 2015, Éditions du Rocher ;

– Entre deux feux, 2017, Éditions Eaux troubles ;

– Filière pour Mossoul, 2018, Éditions Eaux troubles ;

– Traque en Centrafrique, 2019, Éditions Eaux troubles ;

– Uchronie pour guerriers de l’ombre, 2019, Lys Bleu Éditions ;

– Labyrinthe en Libye, 2020, Lys Bleu Éditions ;

– Missing au Congo, 2020, Lys Bleu Éditions ;

– Peshmerga For Ever, 2021, Lys Bleu Éditions ;

– Hallali de Libye au Haut-Karabakh, 2021, Lys Bleu Éditions ;

– Mission présumée d’impossible, 2022, Lys Bleu Éditions ;

– Oran 1962 – Alternative morbide, 2023, Lys Bleu Éditions ;

Jeunesse

– La légende du Dragon d’Orx, 2012, Mon petit éditeur ;

– Le secret des rives de l’Uhabia, 2015, Édilivre ;

– Le trésor des naufrageurs de l’île d’Oléron, 2018, Lys Bleu Éditions.

Avant-propos

Afin d’aborder la lecture de ce roman, il est indispensable de s’informer de la géopolitique de certains pays africains, sombrant dans la guerre civile, d’où le rapatriement conseillé de ressortissants étrangers.

L’origine à ces débâcles est parfois concoctée par l’action insidieuse d’influenceurs étrangers afin de s’approprier les ressources du pays visé. Celles-ci devenant accessibles à la destitution du pouvoir en place, en général non sympathisant de ces instigateurs étrangers.

Au final, des destitutions synonymes d’anarchie et avec l’opportunité à des états étrangers d’intervenir en médiateurs pour s’implanter durablement et s’accaparer les richesses de ces pays.

Exemples, l’Irak, la Libye après la destitution de Saddam Hussein et Mohamed Kadhafi, dictateurs certes, mais qui maintenaient la paix au sein de leur population.

De brûlante actualité, le Soudan leur succède après l’abdication de leur président Omar Béchir. Ex-despote durant vingt ans avant d’être évincé en octobre 2021 par un coup d’État du Général Fatah al-Burkane. Ce putsch consécutif où ce dictateur venait de prendre en garde personnelle les Forces de soutien rapide (FSR) évaluées à 120 000 combattants.

(Ethnie du Darfour à majorité Janjawids [hommes à cheval] commandée par Hamdane Daglo, alias Hemedti.)

Dès lors entre ces deux factions ennemies s’instaure une rivalité sans partage, causant des milliers de morts lors de multiples affrontements et où la population n’aurait l’exode pour seule alternative.

Face à ce chaos, les étrangers occidentaux sont dans l’obligation à promptement quitter le pays. En majorité, expatriés par un pont aérien mis en place par leurs états respectifs.

Or, quatre diplomates de l’ambassade de France à Khartoum ne bénéficieront pas de cette évacuation.

Ce roman traite de la mésaventure de ces quatre fonctionnaires, retenus à « nettoyer » quelques archives très compromettantes sur l’ingérence supposée.

Le nettoyage effectué, en dernier recours, ils optent pour se réfugier par leurs propres moyens au Tchad, pays frontalier du Soudan.

Toutefois, une exfiltration risquée à obligatoirement s’aventurer dans l’inhospitalière province du Darfour où sévissent de redoutables bandes incontrôlées de ces FSR, les sanguinaires Janjawids.

Réputé connaître le Tchad et son limitrophe Darfour lors de missions précédentes, « Honorable correspondant » de la DGSE, Paul est mandaté pour porter secours à ses quatre compatriotes. Ceux-ci depuis disparus et dont le Quai d’Orsay n’a plus de nouvelles.

Comme pour chacun de ses romans, même si fortement inspirés de faits réels, l’auteur précise au lecteur que d’éventuelles ressemblances de personnes ou de circonstances et évènements d’actualité ne seraient qu’en ces prochaines lignes que de pures coïncidences…

Première partie

Enquête pour retrouver les otages

N’Djamena, mi-mai 2023

En ce tarmac hyper ensoleillé de l’aéroport de la capitale tchadienne, vêtu légèrement en prévision de hautes températures à subir, Paul transpirait déjà à grosses gouttes.

Toutefois, il se sentait peu indisposé par ce brusque changement climatique. Même si contrastant avec l’ex-fraîcheur parisienne de la veille, au point d’en sourire limite béatement. Quelque part, vraiment très heureux de fouler de nouveau son continent natal.

Ce choc thermique et ce parfum particulier ambiant concouraient à son actuelle satisfaction. Cependant tout en étant conscient que sa présence en ces lieux ne serait guère ensuite de tout repos.

Une constante à ses missions quand devant arborer l’énigmatique étiquette « d’Honorable correspondant » auprès de la DGSE.

Un qualificatif élégant afin d’éviter l’appellation bien plus péjorative de : « barbouze ».

Bref, pour l’instant, de très sympathiques sensations en ce territoire cher à son cœur et longuement parcouru au cours d’ex-opérations extérieures.

D’y revenir et indépendamment aux circonstances inhérentes à sa mandature était un réel plaisir. Plutôt ravi de renouer avec une capitale souvent fréquentée par le passé. Là où s’y associaient les souvenirs de trépidantes aventures. Mais aussi et hélas, d’inévitables regrets envers d’amis plus de ce monde, cependant pas oubliés.

Ce rapide tour d’horizon précédait le suivi d’une cohorte de passagers vers l’inévitable contrôle des passeports. Comme partout en ce vaste monde, à N’Djamena l’obligation de s’y soumettre pour ces débarqués. Dont une majorité d’autochtones de retour au pays et de rares touristes.

Ce pays hélas peu réputé pour attirer une telle clientèle de loisirs avides de splendides découvertes. Pourtant et paradoxalement, nullement, le manque de magnifiques sites. D’où peu d’encouragement publicitaire pour en vanter leurs visites.

En cause principale, et à regretter, un territoire souvent en discorde avec ses voisins frontaliers et une insécurité préoccupante dans ses provinces.

Le tout ne plaidant guère pour un développement du tourisme à grande échelle.

Vivement interpellé par un Tchadien en costume-cravate, Paul s’étonna d’être si cavalièrement sorti de cette file indienne.

Arborant cependant un large sourire, l’intercepteur le pria poliment de le suivre. Ils doublèrent aisément ces passagers à contrôler. Passe-droit obtenu avec le concours de trois policiers s’empressant de leur ouvrir ce passage prioritaire.

S’en suivirent rapidement à cette bienveillante prérogative, les explications du Tchadien cravaté afin de rassurer si besoin ce passager.

— Bonjour Monsieur Paul, je me prénomme Abdul, commandant en chef de la Douane à l’aéroport. J’ai le grand honneur de vous accueillir et de vous souhaiter la bienvenue en ce pays qui vous est cher. Apprenez aussi que notre président vous salue et espère vous rencontrer les jours prochains afin de se souvenir des précieux évènements de vos précédents séjours, présentement.

Flatté du compliment qualifié de coloré à la mode locale, souriant au langage particulier du « présentement », l’interpellé salua d’un révérencieux signe de tête son préposé à l’accueil.

Toujours aussi cérémonieux, ce dernier s’empressa de le diriger vers une salle réservée aux VIP.

Un salon climatisé où tout sourire aux lèvres, un Européen inconnu de Paul l’y attendait.

Tendant amicalement la main au nouveau débarqué, l’inconnu déclina son identité :

— Bonjour Paul, je me prénomme Mathias. J’occupe les fonctions de deuxième Conseiller culturel à l’ambassade de N’Djamena.

Toujours amusé par le pompeux titre avancé, Paul lui rendit le bonjour. Il connaissait bien l’appellation de cette couverture pour des agents de la DGSE opérant à l’étranger. Appellation soit dit en passant qui ne trompait personne sur l’accointance avérée aux services secrets français.

— Bonjour Mathias. Ce prénom me fait penser à un camarade du 1er RPIMa ayant ce même pseudo. Un chic garçon et d’une compétence peu commune…

Étonné par cette allusion d’homonymie, le chef d’antenne poursuivit les présentations.

— Mon adjoint Philippe va récupérer vos deux bagages. Notre ami Abdul vous a facilité ces fastidieuses démarches. D’où votre passeport, déjà dûment tamponné, ce qui vous évitera une longue chaîne pour l’obtenir.

Paul récupéra son document et de nouveau hocha la tête pour remercier Abdul, mais déjà Mathias poursuivait :

— Il est indéniable que ce pays vous doit bien cela. Nul ici n’ignore que vous êtes un grand ami du Président Deby et par le passé un fervent protecteur de ce territoire. D’où ces bienveillants et mérités passe-droits.

— Merci Mathias et Abdul, répondit poliment Paul, quelque part satisfait par cet excellent accueil.

— De rien cher confrère. Pour tout vous avouer, j’ai éprouvé des difficultés à éviter le déploiement du tapis rouge comme à un Président. J’ai eu beau prétexter la préférence à l’incognito, sous-entendu votre présence afin de retrouver nos compatriotes nécessitant cette indispensable discrétion, hélas à mon grand regret il n’en a rien été.

Conscient de ce peu de discrétion, Paul s’empressa d’indiquer à Mathias qu’un européen le prenait en photo et lui opérant aux vues de tous.

Reçu sans équivoque comme tel, le nouvel arrivant le prit assez négativement, comme un préoccupant signal d’avertissement.

De façon ironique, le deuxième conseiller identifia ce peu discret photographe. Il le désigna pour son appartenance à l’envahissante milice Wagner.

Ces Russes progressivement en train de remplacer la France au Tchad où ils y menaient ouvertement une politique sécuritaire au profit du gouvernement actuel. Depuis peu, ils reléguaient aux oubliettes l’armée française, même si celle-ci toujours et encore présente sur le territoire.

Au final et inconvénient à cette arrivée bien peu discrète, le débarquement de Paul en incognito présentait déjà du plomb dans l’aile.

Pas de quoi particulièrement le satisfaire, mais hélas impuissant pour ses tout premiers pas au Tchad.

Élancé, cheveux coupés courts, ce colonel Mathias se voulait d’un abord très sympathique, mais aussi un peu trop volubile. Une attitude exagérée, comme si en symbiose à sa colossale stature. Toutefois, exubérant au goût de Paul. Défaut immédiatement catalogué comme quelqu’un désireux d’en faire de trop et donnant tout son contraire en nuisant singulièrement à sa première image présentée.

En revanche, une attitude contrastée en comparaison de celle de son adjoint Philippe, vrai chat maigre et volontiers taiseux. Ce préposé aux bagages avait à peine salué le nouvel arrivant tout en chargeant ses valises dans la climatisée berline noire.

Paradoxalement à ce chaleureux accueil, Paul fut saisi par la fraîcheur ambiante de l’habitacle. Là même, où un dénommé Jonathan les attendait dans ce somptueux véhicule de l’ambassade.

En l’occurrence, c’était un autre agent de la « Boîte » avec pour particularité d’être un noir Antillais et bien assorti à sa berline. Du moins selon la plaisanterie de très mauvais goût de Mathias. Ce dernier hilare de sa douteuse plaisanterie, ce que ne partagea nullement Paul.

Le quatuor installé dans la berline de luxe, le deuxième Conseiller culturel enchaîna la discussion en proposant le programme pour cette fin de matinée.

— Je vous emmène d’abord à votre résidence, lieu où vous avez logé quand ex-patron du Bureau étude de l’ambassade, le fameux BE.

— Merci, je ne serai donc nullement dépaysé et ce sera plus discret que l’Hôtel « La Tchadienne » (ex-nom de l’hôtel Méridien lors de précédents séjours).

— Ensuite vers les onze heures, Jonathan viendra vous chercher pour déjeuner avec l’ambassadeur et le COMELEF. Repas où en guise d’apéritif, il vous sera présenté un point de situation détaillé. Son but étant d’au plus vite retrouver nos quatre agents de Khartoum et qui depuis hélas nous sommes sans nouvelles après s’être aventurés dans le Darfour.

Pas vraiment un scoop, mais Mathias jouant à l’espion bien renseigné. Aussi, volubile, il continua ses propos.

— À ce jour, nous avons perdu leurs traces, le dernier appel par téléphone satellitaire date de quarante-huit heures. Celui-ci localisé dans une zone inhospitalière où les combats se sont intensifiés. D’où votre présence afin de, si possible, les retrouver. Car paraîtrait-il selon la Piscine, vous connaissez cette région aussi bien que vos poches ?

Paul n’épilogua pas davantage et répondit par un sourire de connivence. Lui apparemment davantage intéressé par le paysage.

Il reconnaissait avec plaisir l’avenue empruntée à la sortie de l’aéroport et où pédibus-jambus, les Tchadiens se rendaient à leurs occupations matinales.

Pour « l’Honorable correspondant » de la DGSE, la jouissance d’un retour nostalgique vers le passé de ses souvenirs.

Comme si voulant se rassurer, d’emblée il constata que rien n’avait changé, lui confirmant si besoin son non-dépaysement…

Point de situation

Dans ce même ordre d’idée de non-dépaysement, la cité française s’offrit telle la dernière fois où il l’avait quittée. Seuls les « gardis », nom local des vigiles, y étaient nouveaux. Ces sympathiques personnels chargés de contrôler cette coquette résidence d’expatriés français.

La barrière franchie, Paul visionna avec nostalgie ces lieux auparavant bien fréquentés. Plusieurs souvenirs remontèrent en mémoire. Une cité sécurisée et où durant cinq OPEX au Bureau d’étude de l’ambassade il y avait longuement séjourné, à la fois pour y loger et aussi pour y déjeuner.

CE BE étant le terme grandiloquent pour un job de renseignement, Paul y étant employé par son régiment d’élite le 13 RDP.

Depuis, beaucoup d’eaux avaient coulé dans le Chari, fleuve bordant la capitale et le séparant du voisin Cameroun.

Au cours de ces palpitants séjours opérationnels, des images vivaces remontèrent en mémoire. Souvent ponctuées d’aventures exaltantes et dangereuses, mais aussi de sympathiques rencontres en cette même cité.

Pêle-mêle, plusieurs portraits défilèrent, dont d’émouvants pour certains…

Cependant, il ne put davantage s’attarder sur ces clichés mémoriels. La berline stoppant devant son ancienne villa, la plus reculée de toutes, comme si voulu avec sa fonction de barbouze. Surtout car la moins grande et pour célibataire et non pour famille.

Là, un vieux domestique avec mille courbettes se hâta d’ouvrir la portière. En preuve de son évidente affection envers son locataire, ses yeux étaient vraiment larmoyants.

Dès lors et à la stupéfaction de ses accompagnateurs, spontanément, Paul l’attira vers lui pour le serrer fort dans ses bras et le désignant du prénom de « mon cher Jean ».

Un fidèle employé congratulé affectueusement et sans se forcer, montrant également au passage que cet « Honorable correspondant » retrouvait à la fois ses marques et de vieilles complicités.

D’ailleurs, le barbouze s’empressa de demander des nouvelles de la famille. Puis, ils conclurent ces retrouvailles par le rituel salut local, claquant leurs doigts au final du serrage de leur main.

Évident constat adressé à Mathias et à ses collègues sur cet homme très intégré aux coutumes du Tchad.

Ébahis face à ce spectacle de franche amitié offert, ils le quittèrent.

La grosse berline viendrait le rechercher aux alentours de onze heures et quart.

Deux heures et demie de délais et où Paul aurait le temps de déballer ses valises. Viendrait, en priorité, une douche froide pour se revigorer. Puis en rituel, le plaisir de boire l’excellent café de l’ami Jean.

Auparavant, l’œil complice, celui-ci s’empressa de lui montrer dans le bar, l’alléchante présence de bouteilles de Jack Daniel’s.

La boisson préférée du barbouze, mais Paul sagement attendrait à plus tard son désir de trinquer avec de l’alcool.

Une attention téléguidée pour les futurs mérités « bakchichs » dans l’escarcelle de Jean. Paul réputé également pour ses largesses.

Cependant, encore trop tôt pour l’apéro et de constater, avec ironie, l’intention volontaire de ce Mathias, désireux de vite lui plaire.

Attitude qui d’emblée le mit sur la défensive, le dicton « trop poli pour être honnête » venant opportunément l’alerter.

Requinqué par sa douche froide, avec Jean, Paul rangea ses affaires dans les armoires et commodes. Toujours en promettant au passage de l’en lui laisser une partie à son départ. Ce don s’associant à une vieille expérience en terre africaine afin de se garantir du bon entretien de ses fringues durant son séjour.

À sa montre, disposant de temps avant de se rendre à l’ambassade, en dégustant le bon café, Paul s’attarda à relire les notes prises à Noisy lors de sa réunion préparatoire à la DGSE.

En premier, le barbouze se rappela d’avoir hésité avant d’accepter cette mission. Une hésitation reposant sur le fait d’à peine moins de cinq mois depuis son retour d’Afghanistan. Une mission également menée pour libérer des agents de la DGSE pris en otages. Autre aventure mouvementée et riche en rebondissements, avec au bilan, outre la réussite, encore des blessures morales non encore toutes cicatrisées.

(Lire : Mission Présumée d’Impossible)

Toutefois, et indépendamment à cette hésitation, l’inaction lui pesait en son beau Pays basque. Ensuite et connaissant l’individu, la proposition était trop tentante. Paul, semblable à une pile électrique, ne tenant jamais trop longtemps en place. Sans compter en bonus ce pays, Le Tchad pour y opérer.

Bref, ce dicton approprié à sa personnalité : « changer le naturel, il revient toujours au galop ».

Pour ne pas dire que l’on ne se refaisait pas…

Telle une drogue dont il serait dépendant, le goût de l’aventure chez lui demeurait omniprésent. Raison l’ayant décidé d’accepter l’alléchante opportunité, même si peu évidente quant à la mener à bien et avec succès.

Cependant et en final, son accord fut surtout consécutif à l’identification avérée parmi ces personnes disparues, d’y reconnaître son vieil ami Sancho. En l’occurrence, un frère d’armes reconverti en secrétaire d’ambassade et depuis, affecté à sa capitale Khartoum.

Cela ne le laissa nullement insensible, ni à rester les bras croisés. La résultante d’une sensation prévisible. Ses rusés et perspicaces employeurs ne l’ignorant certainement pas.

D’où la sollicitation orientée en ce milieu particulier, avec ce que l’expression « entraide para » exigerait chez tous frères d’armes parachutistes dignes de cette appellation.

Aussi et probable peut-être, que sans l’ami Sancho à sauver, Paul aurait pu décliner cette proposition. Mais à coup sûr, un refus plus tard regretté. Et ce, même si conscient d’hélas vieillir et de ne plus posséder les mêmes qualités physiques d’auparavant.

Analysant le pourquoi de l’appel à sa propre personne par ses employeurs, cela faisait suite à quelques qualités indéniables chez ce barbouze.

D’une part, sa grande connaissance du terrain et d’autre part à son évidente expérience en la matière. Enfin pour clore la liste qualitative prévalant cette sélection plutôt que celle d’un plus jeune barbouze, son autre atout majeur résidait dans la possession d’un hyper performant carnet d’adresses. Celui-ci, capable de lui ouvrir de précieux contacts pour retrouver rapidement ces quatre diplomates disparus en cet inhospitalier Darfour.

Relisant ses notes de Noisy, curieux en la circonstance, Paul s’imprégna des identités des personnes à retrouver. Exceptée évidemment celle connue de Sancho, son jeune frère d’armes.

Facilitant leurs identifications, des photos étaient jointes aux CV des trois autres agents. Également afin de faciliter les recherches y étaient mentionnés leurs habitudes et d’éventuels travers.

Paul s’attarda sur une dénommée Patricia. Une pulpeuse blonde quadragénaire et aux formes avenantes. Professionnellement, elle assurait la fonction d’officier de renseignement à l’ambassade de Khartoum comme spécialiste du monde arabe. En revanche, pour sa couverture, spécialement chargée de développer la francophonie au Soudan.

Suite à cette description, Paul ne put s’empêcher de penser à une autre Patricia, cette journaliste côtoyée également au Tchad lors d’une précédente mission.

(Lire : Safari de Sarajevo au Darfour)

Après cet aparté mémoriel, Patricia présentait un palmarès intellectuel impressionnant dont plusieurs diplômes. Avec Sciences Po s’ajoutait une maîtrise d’histoire des pays africains. Une érudition lui ayant valu sa sélection au sein de la DGSE comme officier traitant. Très vite, elle bénéficia d’une brève expérience au Caire en Égypte avant de rejoindre la capitale du Soudan.

En revanche, le pourquoi de son court séjour en Égypte n’y était nullement expliqué. Probablement, en conclut le barbouze, l’application de la sacro-sainte loi du cloisonnement. Seule mention y figurant, son manque d’expérience en milieu hostile et la recommandation d’être épaulée si les évènements dégénérant.

Hélas, ce bref aparté restant court et peu explicite.

Cependant, en marge de cette fiche, arbitrairement, Paul l’avait souligné en rouge.

Il n’ignorait pas que parfois, ces agents issus du civil n’étaient guère habitués au grabuge. Une différence en comparaison aux collègues militaires avec déjà plusieurs OPEX sur leur carte de visite au moment d’intégrer « La Boîte ».

Au final, Patricia était un intéressant personnage qui ne laissa pas indifférent « l’Honorable correspondant ». À moins que cela ne soit exclusivement dû à sa beauté et son sex-appeal, se surprit-il à s’autocritiquer…

Le second otage se prénommait Pierre. Ex militaire, lieutenant-colonel comme Paul, mais ayant rejoint « la Boîte » qu’en fin de carrière. Pour lui et à noter, sans jamais n’avoir postulé dans des stages internes, notamment au service action.

Cependant et à son palmarès, quatre OPEX à son compteur. Celles-ci jamais ponctuées de citations de bravoure ou d’exploits militaires.

Pour sa défense, de l’arme de l’artillerie, rares seraient les occasions de participer à des faits d’armes héroïques. Par nature, leurs interventions se voulaient éloignées du front, même si un appui essentiel et efficace pour ceux exposés au contact de l’ennemi.

Ce Pierre occupait le poste de chef de cette antenne DGSE à Khartoum et l’avait tenu jusqu’au bout avant de s’évaporer dans la nature. Pour justifier son retard d’évacuation, il avait reçu l’obligation de « tout nettoyer ». Spécifié en rouge sur ce dossier comme bien réalisé. Bref, derrière lui, aucune trace compromettante pouvant nuire à l’image de la France.

Professionnellement, un excellent respect des consignes comme il sied à tout militaire digne de cette flatteuse appellation.

En revanche, ce chef d’antenne serait en possession de documents importants sur des agissements condamnables des deux protagonistes se disputant le pouvoir à Khartoum. Dont principalement de notoires compromissions, celles-ci dénoncées par une source provenant d’un Biélorusse prénommé Ygor et officiant auprès de la milice Wagner.

De nouveau, ce pseudonyme de Wagner fit sourciller le barbouze. Déjà deux fois en peu d’heures, un envahissement prématuré et a priori jugé déjà de particulièrement dérangeant…

Le troisième de ces fuyards de l’ambassade se nommait Germain. Ex-chuteur opérationnel au 1er RPIMa, unité des Forces spéciales et du grade d’adjudant-chef. Ce Germain avait pleinement satisfait au sélectif stage action de la DGSE.

Ainsi et en compagnie de l’ami Sancho, Germain serait un combattant aguerri et non des moindres. Notamment si sollicité lors du périple routier lors de la traversée du Darfour. Ceci à la grande différence des deux autres collègues, arbitrairement jugés non du même gabarit opérationnel pour affronter cette zone inhospitalière.

Enfin et avec ce Germain, était mentionné un dénommé Farid. Un Soudanais conducteur de ce 4x4 Toyota, dernier modèle. Cet employé et interprète avec lequel ce quatuor avait depuis plus de soixante-douze heures quitté l’ambassade de Khartoum.

En relisant ces brèves annotations, Paul ne se sentit guère avancé pour mieux débuter son enquête. Aucune esquisse de la moindre piste afin de retrouver ces quatre fuyards.

Plus qu’à espérer lors de sa réunion préparatoire à l’ambassade qu’il puisse en apprendre davantage.

À ce stade, comme de rechercher une aiguille dans une grande meule de foin.

Mais il n’eut pas le temps de mieux y repenser, car fidèle aux horaires, déjà Jonathan sonnait à sa porte pour le conduire à l’ambassade.

La distance les séparant de ces deux quartiers étant courte et à cette heure proche de midi, le trafic encore assez fluide dans la capitale du Tchad.

Paul prit congé de Jean et embarqua dans la belle limousine, direction l’ambassade de France…

Immersion à l’ambassade

Le trajet vers l’ambassade lui offrit des tas de bons souvenirs, Paul peu dépaysé par l’environnement. Au point de presque y croire qu’il n’avait quitté N’Djamena que très récemment.

Pourtant, plusieurs années étaient passées depuis son dernier séjour. Limite joyeux, il ouvrit sa fenêtre afin d’en ressentir avec délectation de typiques odeurs embaumant ce folklore de la capitale.

Au feu rouge, comme jadis, il y découvrit la présence insistante de pauvres gamins en haillons, brandissant leurs écuelles cabossées afin de réclamer l’aumône aux automobilistes.

Réceptif, Paul se fendit de quelques billets sous le désapprobateur avis de son conducteur.

Vindicatif, Jonathan prétexta que cela ne leur rendrait pas service, tout au contraire.

Ironiquement, Paul y répondit du tac au tac :

— C’est sans doute votre premier séjour au Tchad ?

La réponse fusa sur un ton sec, limite peu courtoise.

— Rien à voir avec l’expérience ou pas, Monsieur ! La plupart de ces gamins sont des voleurs et de par votre vitre imprudemment entrouverte, rapides comme l’éclair, ils peuvent vous voler. Nos consignes de mises en garde sont formelles et s’appliquent en permanence sur les rues pouilleuses de N’Djamena.

Le ton était donné et même si peu enclin à entreprendre un dialogue devenant à la longue stérile, Paul se fendit d’une réplique volontairement dénuée de polémiques :

— Personnellement, j’ose prétendre et sans être de nature alarmiste, que l’on craint beaucoup plus à Paris qu’en cette capitale de N’Djamena.

Une pique émise sur un ton neutre et sans aucune idée de davantage poursuivre sur ce thème. Au point de jeter un froid dans l’habitacle et créer un long silence durant la suite du voyage.

Une morosité perdurant jusqu’à l’ambassade et où comme à l’accoutumée dans les souvenirs de Paul, une longue file d’autochtones y faisait patiemment la queue.

Un guichet les y triait avant d’ensuite les autoriser ou pas de poursuivre leurs démarches afin d’obtenir leurs visas pour rejoindre la France.

Reconnaissant la berline noire, la grille promptement fut ouverte par des gardiens locaux en uniforme reconnaissable de vigile. Ces préposés à la sécurité « cornaqués » par des gendarmes français officiant à partir d’écrans supervisant la protection de l’ensemble de l’édifice.

Identifié à sa sortie du véhicule, spontanément et avec liesse, plusieurs gardiens vinrent saluer le nouvel arrivant. Un accueil joyeux pour ce « Monsieur Paul », enfin revenu au Tchad. Certains entamèrent des pas de danse d’allégresse pour saluer ce retour « à la maison » d’un des leurs…

Probablement Paul attendu, car bénéficiant de l’efficace « téléphone arabe » distillant son retour au pays.

Au final, et unanime, un touchant témoignage d’amitié envers ce Français.

Paul s’empressa de saluer ces visages familiers et souvent sans hélas se rappeler les patronymes de ces Chibanis. Des « Gardis » avec lesquels, quand chef du BE en ces lieux, il lui arrivait de partager le chaï dans leur « gourbi » attenant et réservé aux vigiles.

L’œil noir à l’entrée du sas d’accueil, ne goûtant nullement aux sympathiques retrouvailles avec ces gardiens locaux, Mathias piaffait sur place. Apparemment, étant plutôt pressé d’intercepter ce visiteur. En l’affichant ouvertement, il lui remit son badge d’accès de VIP. Évitant au barbouze de remplir les sempiternelles fiches pour prouver son identité et montrer patte blanche.

Paul fut amusé par l’énervement de son hôte et également heureux de son non-dépaysement en cette belle enceinte. Une ambassade paraissant identique, au point de nouveau, lui laisser croire qu’il ne l’avait jamais quittée.

Nullement guidé et précédant Mathias, Paul se dirigea vers le premier étage où siégeait le confortable bureau de l’ambassadeur.

En ce même long palier de ce couloir, le barbouze passa devant son ex « Bureau Étude », éprouvant sans le partager, un léger pincement au cœur. Transpirait la nostalgie d’une époque révolue, avec au bilan professionnel, des jours et des mois passés à collationner les renseignements et à les transformer en synthèses pour d’autres organismes souvent très demandeurs.

D’un naturel curieux, Paul en profita pour jeter un rapide coup d’œil à l’intérieur de son ex-bureau. Une demi-douzaine de militaires y travaillait sur de performants ordinateurs. Des consoles multiples avec grands écrans, résultat de l’évolution du progrès technique et indispensable pour la collecte de précieux renseignements.

Au passage, et même si n’apparaissant pas sur leurs tenues, il s’agissait bien de paras du 13 RDP, son ex-régiment d’élite toujours spécialisé dans le renseignement opérationnel.

Certains d’entre eux l’entraperçurent par la vitre et lui sourirent spontanément. Probablement également informés de l’arrivée dans leurs murs de celui de leur unité d’élite surnommé « The Légende ».

Un élogieux palmarès de leur grand Ancien, où s’inscrivaient de longs séjours opérationnels avec au total treize belles années au sein du 13 RDP. Une coïncidence de chiffre au demeurant amusant toujours Paul.

Puis et comme si cela ne suffisant pas, cinq OPEX employé comme officier supérieur réserviste patron de ce même BE. Une épopée laissant également des traces avec d’importants évènements y faisant date. De quoi concourir davantage à cette flatteuse légende le précédant partout où il voyageait. En quelque sorte, sa rançon de la gloire.

Même et si à son goût, un peu trop flatteuse en dépit d’être en grande partie non surfaite et donc pleinement méritée.

D’indéniables succès en missions opérationnelles et reconnus unanimement au point de forger cette belle « Légende » qu’aucun Dragon du 13 RDP n’ignorait…

Toujours pressé par Mathias, Paul ne put s’attarder davantage et saluer ses jeunes frères d’armes. Son accompagnateur prétexta de ne pas trop faire attendre le « number one » de l’imposant bastion français au Tchad.

À regret, Paul obtempéra à la pressante sollicitation. Cependant, il se jura de plus tard revenir rencontrer ses collègues du 13 RDP. Dont au passage de familiers visages reconnus et non des moindres, car bien plus que d’habituelles relations professionnelles.

Présenté au « number one », comme Mathias cataloguait l’ambassadeur, l’accueil de ce grand manitou et de sa kyrielle de conseillers fut courtois. Toutefois, sans plus et à quelques réserves près.

Indépendamment des sourires affichés, dans cette salle de brainstorming plana de suite un léger malaise. Sans doute, celui-ci provoqué par une décevante curiosité générale et assez perceptible. Un climat d’effectif désappointement, lequel fit sourire Paul, comme si attendu ou pressenti par le barbouze.

Réactif à l’étonnement unanime, puisqu’effectivement bien un et de taille, Paul se l’expliqua mentalement sans ne rien laisser paraître.

Probablement que sa flatteuse appellation de « The Légende » n’était pas en conformité à l’imagination de ces diplomates.

Il y aurait fort à parier d’attendre voir débarquer un sosie de Rambo ou d’un autre James Bond. Alors qu’en lieu et place, leur faisait face un dynamique sexagénaire, aux antipodes des habituels clichés d’agents secrets dont regorgent tous ces films d’espionnage.

Pourtant, rapidement à ce désappointement, ce personnage leur sembla alerte. Avec la particularité en croisant son regard, d’entrevoir un œil vif et inquisiteur s’attardant pour en évaluer chaque personnalité.

Au final, plutôt très gênant pour certains.

Bref, pour l’ensemble de ce bel aréopage, ce ne serait nullement Rambo comme imaginé et donc en majorité nombreux quelque peu déçus.

Conscient du désappointement suscité, Paul en conclut qu’ici comme ailleurs, l’habit ne ferait décidément pas le moine…

Il s’en amusa face à ces observateurs cravatés, jouissant de la climatisation, même si trop engoncés dans ces costumes boutonnés.

Attitude contrastant avec cet invité. Lui en tenue sport, décontracté, visiblement guère intimidé par ce plutôt guindé comité d’accueil.

Au tour d’horizon des participants et remarqués parmi ces civils, car en tenue militaire, Mathias lui présenta trois officiers supérieurs. En premier, un colonel de l’aviation, ancien pilote de chasse et faisant office de COMELEF du détachement français au Tchad.

Auprès de lui, deux autres colonels de l’Armée de terre. L’un occupant la fonction de chef d’état-major et l’autre comme officier opération.

Toutefois et d’emblée regretté, aucun n’arborait le beau et seyant béret rouge. Donc appartenant a priori à la « Régulière », comme péjorativement regretté par leur visiteur.

L’officier opération était chargé de présenter le point de situation actualisé à ce jour, aidé en cela par un sous-officier du grade d’adjudant.

Celui-ci fin prêt à faire défiler le classique PowerPoint sur un grand écran.

Les présentations closes, d’un regard, Paul constata que dans ses souvenirs, cette salle de réunion préparatoire n’avait pas changé d’un iota. Il se remémora de typiques réunions houleuses. Parfois peu courtoises et menées en ces mêmes lieux. Les évènements d’alors donnant souvent lieu à de vives altercations et surtout de divergences pour appréhender les problèmes de l’époque.

À l’origine de ces pugilats oraux, fréquemment on y retrouvait Paul, en net désaccord avec les autres analystes. Lui généralement aidé en cela par son incontestable expérience de terrain. D’où en contradiction avec ces diplomates à son goût bien trop bureaucrates.

L’éternel combat de Paul et à son humble avis, la prochaine réunion en cours prendrait la même direction. Au point de devoir d’emblée revisser les boulons et à penser de se retrousser les manches.

Sous-entendu, l’affrontement pressenti d’inévitable…

Réunion préparatoire

En préambule, l’ambassadeur ouvrit le débat pour annoncer qu’il ne devrait durer qu’une petite demi-heure, questions comprises. Donnant ainsi ses priorités, ce beau monde devant aller ensuite se restaurer dans ses dépendances privées face à l’ambassade. Une cité regroupant tous ces diplomates et leurs familles au sein d’un cadre idyllique et hyper protégé par des militaires tchadiens et de vigiles assermentés.

Le sous-officier fournit à Paul un dossier avec plusieurs documents, dont une carte renseignée du Darfour, ainsi que des photos des quatre otages à retrouver au plus tôt.

Cet apport de documents devant éviter à Paul de prendre des notes et d’être toutes ouïes pour éventuellement recevoir des scoops susceptibles de le faire davantage avancer.

Il remercia le donateur tout en lui demandant si pas moyen de baisser la climatisation.

Le barbouze frissonnait à la différence de ceux habitués à subir l’air frais pulsé en cette véritable glacière. Avec ironie, leur visiteur signifia de se croire en Sibérie et aucunement en pleine Afrique.

Conciliant à sa sollicitation, même si certains peu enclins à s’y soustraire, la température devint enfin plus clémente pour « l’Honorable correspondant ». Et la réunion débuta par un point de situation orienté sur la partie Est de l’Ennedi. La région nord du pays et avec pour particularité d’être limitrophe au désertique Darfour. Ce même lieu qu’espéraient atteindre sains et saufs les quatre diplomates qui s’étaient tardivement exfiltrés de Khartoum.

Pour illustrer les propos de l’orateur en charge de mener les explications, d’inquiétantes photos satellites y montraient de rares campements devant prochainement faire l’objet d’investigations.

En clair, des actions coups de sonde de l’Armée tchadienne, mais avec peu d’espoir de se solder d’un concret résultat.

Probablement, pensa Paul, d’inutiles coups d’épée dans le sable de cet environnement aride.

Toutefois et dixit l’orateur, ceci serait entrepris ces jours prochains en étroite collaboration avec l’armée tchadienne afin de s’éviter la moindre impasse.

Même sans être un grand spécialiste, large comme trois départements français, d’un simple regard, le périmètre à couvrir se présentait comme immense et ultra difficile d’accès. Excepté pour des hélicoptères tactiques.

À l’évidence, si contraints à sillonner en véhicules ces grands espaces désertiques, cela inutilement ferait trop perdre de temps. Sans négliger en bonus, l’épuisante fatigue engendrée sur ces pistes peu praticables. D’autant de n’être pas encore être complètement sortis de la saison des pluies. Environ moins d’un petit mois d’attente encore à patienter.

En première déception retenue par Paul, selon le chef d’État-major, les moyens aériens seraient hélas monopolisés pour un urgent déploiement aux abords du lac Tchad. Une réquisition consécutive aux attaques de djihadistes de Boko-Haram, lesquels venaient de massacrer une centaine de villageois tchadiens.

Aussi, la priorité du COMELEF consisterait à urgemment neutraliser cette bande de djihadistes. Et ce, même si comme à leur habitude après leurs razzias, ces pillards se seraient vite dispersés de l’autre côté de la proche frontière.

Pour information, Paul apprit que cette mobilisation de moyens aériens français datait de quarante-huit heures, après que la France fut vivement sollicitée par leur pays hôte.

Après le départ des Troupes françaises du Mali et du Burkina Faso et en cours au Niger, N’Djamena était devenu l’unique plate-forme pour tenter d’éradiquer ces bandes incontrôlées. Pour le COMELEF, une tache démesurée, d’autant que les crédits alloués non proportionnels aux énormes besoins pour cet impossible défi.

D’où et regrettable constat, la France perdait progressivement du terrain en Afrique. Celui-ci immédiatement repris par les milices russes de Wagner. Mais également par les Chinois, lesquels discrètement s’implantaient sur ce territoire.

Seul point positif pour Paul, il connaissait cette région pour y avoir accompagné le plus réputé des anthropologues, feu Monsieur Coppens. Célèbre personnage qui au cours de ses recherches dans l’Ennedi avait retrouvé un australopithèque plus vieux que la doyenne de nos ancêtres, la célèbre Lucie d’Éthiopie.

Pour l’anecdote, sa magnifique trouvaille fut baptisée par le Président Idriss Deby du nom de « Toumaï ». Nom en souvenir d’un frère d’armes mort au combat et l’ayant accompagné durant toute la rébellion.

Au cours de cet aparté, pour Paul, ce serait un souvenir toujours vivace pour avoir eu l’occasion d’escorter ces réputés paléontologues.

La parenthèse fermée, sagement, le nouvel arrivant attendit la fin de ce brillant exposé, toutefois dénué de scoops intéressants pour mener sa mission.

Il quémanda la parole, ce que d’emblée l’ambassadeur lui accorda.

— Messieurs, c’est une véritable chasse au trésor de proposée par Paris et maintenant par vous. D’autant si comme hélas annoncée, dépourvue d’indispensables moyens aériens.

Un léger silence ponctué de regards accusateurs de l’orateur jeta un froid dans l’assistance.

Presqu’à croire que la « clim » subitement redevenue efficace.

Habilement, Paul reprit la parole afin de profiter de son évident avantage. Une habitude chez lui, de toujours battre le fer quand il est chaud…

— Sans de meilleurs renseignements de vos performants satellites, et j’avoue à ce stade de trop maigres indices en ma possession, il est quasiment inutile que je me rende déjà sur place. Notamment sans connaître par où commencer mes investigations. Toutefois, je ne refuse nullement ce défi, puisque la vie de quatre de nos compatriotes en dépend.

Un nouveau silence perdura, un peu comme si Paul voulait enfoncer le clou.

Dès lors, nul dans la salle ne désira lui reprendre la parole, attendant la suite mais quelque part également, en surtout l’appréhendant.

En peu de temps, et à l’évidence, le nouvel arrivant venait de prendre l’ascendant sur ses auditeurs.

De quoi maintenant le regarder avec beaucoup plus d’attention que celle précédente très restrictive et arbitrairement prêtée à son arrivée.

Aussi et tour à tour toisant avec insistance chacun, un peu comme si en quête d’une inquisitrice appréciation, d’autorité « l’Honorable correspondant » reprit la parole. D’abord, pour leur annoncer comment appréhender cette mission quand nanti de si peu et succincts éléments en sa possession.

— Dans l’immédiat, j’aurai besoin de prendre d’indispensables contacts avec quelques relations locales. En clair, d’être à l’écoute du téléphone arabe et d’au plus vite recueillir plus de précisions que celles naïvement j’espérais et hélas non présentées. Pour ce faire, je sollicite une voiture pour me rendre sous peu à ces rencontres locales.

— Pas de problème, répliqua instantanément Mathias, Jonathan vous accompagnera.

La réponse de Paul époustoufla l’assistance, refusant d’emblée l’aimable proposition, même si celle-ci partant d’un bon sentiment.

— Non, merci, Mathias, j’opère généralement en solo. Et pour tout vous avouer, les autochtones à rencontrer ne seront pas particulièrement accueillants envers des agents de « la Boîte ».

— Mais vous en êtes pourtant de la Maison ?

— Certes, mais à la notable différence, de posséder des liens intimes qui m’unissent depuis longtemps à cette exigeante clientèle. Laquelle et en règle générale est bien peu recommandable. En clair, il s’agira d’abord des Haoussas, trafiquants arabes qui possèdent le monopole de tout ce qui est prohibé au Tchad, armes, drogues et trafic d’esclaves. Bref, sans leur collaboration et espérons-le, de précieux renseignements à monnayer contre quelques gages en compensation, je pense honnêtement de ne jamais retrouver nos quatre compatriotes.

Après cette réplique révélatrice de l’important carnet d’adresses de cet « Honorable correspondant », Paul se désaltéra.

Moment où opportunément, le premier Conseiller prit à son tour la parole. Un net rictus ironique affiché au coin de ses lèvres.

— Cher ami, je n’ignore pas votre solide expérience sur ce pays. J’y associe volontiers les accointances différentes, variant du Président en personne, jusqu’aux trafiquants Haoussas. Mais si je ne m’abuse, voilà plusieurs années que vous n’êtes pas revenu sur ce territoire. Et très honnêtement, je pense que beaucoup de choses ont changé depuis votre dernier séjour.

Un silence volontaire fut mis à profit avant de porter l’estocade et reprendre ainsi la conduite de cette réunion. L’ensemble énoncé toujours avec ce rictus affiché, proche à la fois de condescendance et aussi de mépris.

— Hélas pour vous, et vous ne tarderez guère à le constater, c’est comme au poker, si les donnes ne sont plus les bonnes. En clair, comme vous le dîtes souvent, vous ne possédez plus les mêmes atouts que par le passé. Du moins si vous me permettez cette image ludique de jeu.

Amusé par la tirade de cet éminent diplomate, Paul sourit à son interlocuteur avant de lui répondre mais aussi de la même façon sarcastique. Son timbre proche du ton employé par son interlocuteur.

— Apprenez, cher Monsieur, que j’aime bien le poker, et ce bien que je fréquente beaucoup moins les casinos, si également l’allusion cachée à vos propos. En revanche, différemment de vous séjournant deux ou trois ans dans ce pays, mais en restant calfeutré dans vos bâtiments hyper sécurisés, personnellement j’y ai débarqué très souvent. La première date de 1978 à l’opération Tacaud. Ensuite, plusieurs OPEX, dont Manta et enfin à plusieurs reprises à Épervier et ensuite cinq OPEX au BE dans ce même bâtiment. Bref, au total, une dizaine d’années si l’ensemble de ces séjours mis bout à bout.

Un tour de table scrutateur permit à l’orateur d’enfoncer le clou et de répondre à l’estocade précédente par une pique tout aussi violente et percutante.

— Ici et à chaque fois, j’y ai tissé des liens très étroits, vivant en symbiose totale avec les Tchadiens. Donc différemment qu’entre Européens et noblesse locale, comme vous vous appliquez à l’exercer durant votre mission de diplomate. Enfin et pour conclure, je connais la ville comme ma poche et me risque sans peur dans des quartiers où vous n’y mettrez jamais les pieds durant votre séjour.

Un long silence fit suite à la tirade de Paul, chacun évitant son regard accusateur. Mais quelque part, nombreux presque convaincus de ce qu’était effectivement leur séjour doré à l’ambassade.

Celui-ci aux antipodes du sinistre Bololo, ce quartier malfamé de la capitale et auquel leur accusateur venait de faire allusion afin de leur signifier ouvertement leur totale méconnaissance.

Cette directe accusation mérita une nouvelle pause pour se désaltérer alors que la tension était montée d’un cran.

- Bref Monsieur le premier Conseiller, perso je n’ai rien à perdre, à part peut-être ma vie comme feu le commandant Galopin. Et si on a sollicité en haut lieu ma présence, c’est bien que malgré vos présumées compétences, pour l’instant vous n’avez guère avancé dans les recherches de nos quatre compatriotes. En revanche, dans tout au plus quarante-huit heures, je serai en mesure de vous dire si je continue ou pas cette mission. D’ailleurs et avec votre permission, Monsieur l’Ambassadeur, je ne vais pas m’attarder plus longtemps ni déjeuner avec vous. Ceci afin d’au plus vite prendre d’impérieux contacts avec de vieux amis locaux, lesquels et rassurez-vous, ne m’ont jamais oublié.

Sur ce, saluant de la tête, Paul s’empressa de réclamer la voiture au deuxième Conseiller Mathias, montrant ainsi d’être pressé d’entrer en contact avec ses sources.

Sous-entendu, celles-ci plus performantes que l’ensemble de ces diplomates cravatés. Immédiatement au garage de l’ambassade, Jonathan lui rétrocéda une 306 Peugeot pas d’un premier âge. Mais le nouvel arrivant s’en contenta, d’autant qu’il fréquenterait sous peu des lieux inhospitaliers.

Sous-entendu, la belle Berline noire risquerait d’y laisser ses roues, voire d’être complètement démontée.

Puis et avant de quitter ce véritable havre de paix en comparaison aux lieux malfamés où il se rendrait sous peu, Paul prit quelques minutes pour appeler ses contacts et d’en faire la sélection.

Il opta en priorité pour Mahamat, ex-officier supérieur de la garde présidentielle, lequel à la retraite, mais toujours fidèle conseiller de la présidence.

En l’occurrence, un ami tchadien de longue date, leur relation datant du stage des capitaines en 1982 à l’E.A.I, l’école d’application de l’infanterie à Montpellier. Et à cela et non des moindres, d’ajouter que Mahamat s’était avéré d’une aide précieuse lors d’une OPEX en ce même Darfour.

(Lire Safari de Sarajevo au Darfour)…

Ensuite, il contacterait les autres sources potentielles après rendez-vous pris par téléphone.

Pas mécontent de cette belle entrée en matière, avec assez de pain sur la planche pour débuter une toute première fournée, Paul se sourit à lui-même. Plutôt très satisfait d’avoir fait effacer le rictus insolent de ce diplomate…

Conditions de rétention

Loin de N’Djamena, et au cours de ces dernières soixante-douze heures d’exode, les quatre fuyards de l’ambassade de Khartoum venaient d’éprouver de très sérieux déboires.

Après leur fuite pour s’éviter le pire de la guerre civile à Khartoum, leur sortie de la capitale s’était moyennement passée. Une circulation chaotique en empruntant la route plein sud menant vers la ville d’Al Obeid, un itinéraire jonché de cadavres. Les affrontements avaient été sanglants et donnaient froid dans le dos en dépit d’une chaleur accablante.

Pourtant, un itinéraire volontairement choisi et recommandé afin d’au mieux contourner l’important trafic en cours, les autres axes complètement saturés. Mais là aussi, cette pénétrante était surbookée par des milliers de citadins fuyant les combats fratricides à la périphérie de la ville.

Bref, peu d’alternative pour ces Français et pas vraiment le meilleur des moyens pour quitter le Soudan quand hélas retardataires pour bénéficier du pont aérien.

Ainsi et même si en véhicules neufs et hyper climatisés, ils durent subir un difficile roulage sur des routes surchargées et parfois jalonnées de fréquentes escarmouches. Notamment avec des conducteurs soudanais peu enclins à leur céder le passage en dépit de répétés clacksons intempestifs et de leur dissuasive escorte de vigiles. Déjà transpiraient les premiers regrets de ces compatriotes pour avoir opté sur cet itinéraire pourtant préalablement recommandé comme le plus fluide…

En fin de cette première journée de fuite en avant, ce fut donc non sans mal que ces diplomates avaient enfin réussi à bifurquer plein ouest afin de rejoindre la ville provinciale d’Al Fashir. Celle-ci s’inscrivant d’ultime étape avant de s’engager plus profondément vers l’inhospitalier Darfour et d’atteindre la frontière du Tchad.

Cependant peu avant Al Fashir, leur première mésaventure arriva plus tôt qu’initialement appréhendée.

Déjà en amont pressentie peu coopérative, leur escorte de vigiles s’éclipsa discrètement. Une désertion en dépit d’importants bakchichs payés d’avance et avec la promesse de les doubler à l’arrivée. Une disparition survenue lors du repos des diplomates et d’une halte pour refaire les pleins des véhicules.

Un départ sans préavis face à ces naïfs voyageurs occidentaux et malgré la somme conséquente déjà versée au début de ce périple.

Afin d’expliquer l’abandon de ces vigiles, Farid leur fidèle interprète resté avec eux, prétexta des nouvelles alarmantes à la radio. De quoi provoquer une grande panique, ces vigiles refusant catégoriquement à s’engager dans ce Darfour de tous les dangers.

Une réaction excusable, jugeant la zone dangereuse avec ces bandes incontrôlées de Janjawids pullulant dans ce no man’s land.

Depuis la nuit des temps, des pillards s’y adonnaient à de sanglantes razzias. Seule différence actuelle, ils avaient désormais troqué leurs chevaux contre de puissants 4x4 japonais.

D’ailleurs, les deux grosses berlines de l’ambassade seraient certainement leurs proies en cas de malencontreuse rencontre…

Bref, ces guerriers se comportaient tels des Zarguinas, ces coupeurs de route en Centrafrique, réputés pour rançonner les caravaniers et écumer leur région, de véritables pirates des temps modernes.

Comble de malchance, ces contrées désertiques étaient dépourvues de garnisons militaires. Celles en capacité d’enrayer ou de sévir contre ces multiples exactions. Ainsi et de même ethnie que leurs amis des Forces de soutien rapide (FSR) et de leur chef Hemedti s’opposant au président actuel Abdel Fatah al Burkane, chez ces incontrôlables Janjawids du Darfour, cette guerre pour la présidence serait qu’accessoirement leur priorité. Traditionnellement, ils persistaient à demeurer les écumeurs de cette région inhospitalière. D’autant que risquant peu car bénéficiant d’une impunité totale.

Très rares étaient les répressions à leur encontre, puisque leurs crimes trop loin des garnisons voisines et n’attirant nullement l’attention des dirigeants en charge de faire régner l’ordre.

Ainsi et désormais sans escorte conséquente, ces quatre compatriotes se sentirent très esseulés pour tenter de faire face à ces pillards du désert. Mais courageusement, car peu concevable d’opérer un demi-tour avec l’anarchie à Khartoum, ils poursuivirent leur route.

Dès lors et ce qui devait arriver se déroula non loin de la frontière tchadienne. Alors qu’ils espéraient avoir finalement réussi, ils tombèrent dans une embuscade pas très loin de la ville du sud, le réputé marché à bestiaux de Nyala.

Leurs deux véhicules furent stoppés par un groupe d’une trentaine de Janjawids armés jusqu’aux dents, et faits rapidement prisonniers.

Inutile de résister, car non en nombre suffisant et ils se résignèrent à cette déchéance de finir en otages de leurs ravisseurs.

Également pour leur malheur, lors de cette malencontreuse interception, par manque de réflexe, ils n’avaient pu hélas donner de précisions sur leur localisation, leurs téléphones satellitaires confisqués.

Plus moyen de communiquer avec l’ambassade au Tchad, laquelle suivait jusque-là et heure par heure leur difficile exode de Khartoum.

Outre l’absence de communication, les premiers jours de leur captivité, ces quatre Français furent souvent changés de place. Plus grave encore que ces périodiques changements, leurs ravisseurs jusque-là n’avaient jamais réclamé de rançons pour leur libération.

Une étonnante attitude chez ces avides pillards, lesquels en règle générale, ne tardaient jamais à réclamer d’importants dividendes pour négocier la libération de leurs otages. De là l’hypothèse esquissée par l’ambassade de N’Djamena, leur chef local peu enclin à avouer cette prise d’otages par crainte de représailles. En réalité, mais encore ignoré par l’ambassade, au début désireux à se remplir les poches, un dénommé Sliman aurait contacté la milice Wagner, désireux d’échanger ses otages contre de l’armement.

Ces mêmes Russes qui, depuis plusieurs années, opéraient semi-clandestinement au Soudan.

Une coopération effective, d’autant que récemment Hemedti le chef des SFR leur avait promis, en cas de prise de pouvoir, de leur laisser installer une base navale à Port Soudan. Un vieux rêve de Poutine pour avoir enfin un accès facilité en mer Rouge. Projet d’actualité à la suite de l’abandon des Américains pour le contrôle de cette région.

Après ce contact entre ce Sliman et les Russes, leur tractation resta en attente de prochains pourparlers pour l’éventuel rachat ou pas de ces diplomates français, si moyennant beaucoup d’armement.

Des enchères menées après d’âpres discussions sur la réelle valeur des otages. Une hésitation compréhensive de ces Russes, lesquels au final peu désireux à s’encombrer de ces diplomates.

Bref, et même si moyennement intéressés pour se faire une bonne réputation comme médiateurs, le responsable Igor avait conclu un deal avec ce Sliman. En clair, il le chargea de conserver momentanément leurs prisonniers dans un camp secret. Accord entériné avec en dédommagement pour ce service rendu, la cession de quelques armements et surtout de récents véhicules tout-terrain.

Une tractation afin de leur laisser le temps de réfléchir à comment utiliser au mieux la récupération de ces quatre diplomates.

Ce fut donc et à leur grande déception que Patricia, Pierre, Germain et Sancho changèrent de prison, transportés vers un camp plus au sud-est de Nyala.

Seul petit espoir, au cours d’une visite des Russes, d’être effectivement libérés par eux. Mais très vite hélas une déception, ces Popovs repartis sans chercher à contacter ces Français.

D’ailleurs, l’intervention de Germain cherchant à les apostropher s’était soldée par une sévère bastonnade. Sans qu’aucun membre de Wagner ne lève le petit doigt pour y mettre fin. Dès lors, très mal en pointà la suite de la raclée subie, Germain mit plusieurs jours à s’en remettre. Avec au bilan plusieurs côtes de cassées et un visage hyper tuméfié ayant doublé de volume.

Dans ce contexte, ses trois collègues optèrent à se faire oublier. Patricia davantage que les hommes, car belle femme et instinctivement, craignant plus pour sa vertu.