Démocratie ? - Mouvement Utopia - E-Book

Démocratie ? E-Book

Mouvement Utopia

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Beschreibung

Sommes nous vraiment en Démocratie ? ?

Sommes nous vraiment en Démocratie ? ? Formellement, pour la plupart des pays économiquement développés dont la France, on peut répondre oui. Liberté d’association, d’information, votations…sont inscrites dans notre constitution et les séquences électorales rythment notre vie politique. Mais qu’en est-il de la Démocratie ?réelle, vivante, participative, de ce fameux pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple ?
L’objet de ce livre est d’analyser l’état actuel de notre Démocratie ?en France et de proposer des solutions pour construire un nouvel âge démocratique.

A travers une réflexion politique alternative, découvrez une analyse de l’état actuel de la Démocratie ?en France qui propose des solutions pour construire un nouvel âge démocratique.

EXTRAIT

Jamais la crise démocratique n’a été plus forte qu’en ce début de xxie siècle. Avec les questions sociales et écologiques, elle menace notre capacité de vivre ensemble et fracture nos sociétés. Notre « Démocratie ? » est plus délégataire que représentative, purement compétitive et nullement coopérative. Le vote est de moins en moins reconnu comme un moyen d’expression de la vie politique et l’abstention dépasse dans beaucoup d’élections les 50 %, rendant les élus certes légaux mais peu légitimes pour nous représenter. Heureusement nous ne sommes ni dans une dictature ni dans un régime de droit divin, mais ne serions-nous pas dans un régime que nous pourrions qualifier d’oligarchie libérale ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Trait d'union entre le mouvement social, le monde politique et le monde intellectuel, le Mouvement Utopia est une coopérative politique d'éducation populaire qui vise à élaborer un projet de société solidaire et convivial, écologiquement soutenable, dont l'objectif est le Buen Vivir. Utopia défend ses convictions écologiques et altermondialistes dans une perspective de dépassement du capitalisme et de la logique productiviste.

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Préface

La démocratie est à refaire ! L’injonction n’est pas nouvelle.

Depuis l’avènement des formes modernes de citoyenneté et de représentation politique, il y a plus de deux siècles, la démocratie est périodiquement décrite comme étant en crise, et des voix s’élèvent pour exiger que soit comblé le fossé toujours béant entre ce que le président américain Abraham Lincoln avait désigné en 1863 comme étant « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » et le fonctionnement réel des systèmes politiques.

Mais cette fois, au début du XXIe siècle, la question démocratique se pose dans un cadre très différent.

Nous commençons enfin à comprendre, à défaut d’en être déjà tous persuadés, que dans le monde mondialisé dans lequel nous vivons, déstabilisé en permanence par des opérations financières transnationales, secoué par des crises climatiques ou sanitaires qui ne connaissent pas les frontières et par la relocalisation conflictuelle des puissances économiques, où les niveaux de prédation inouïs sur nos ressources naturelles non renouvelables qu’impliquent nos modes de vie s’accompagnent d’un accroissement vertigineux des inégalités, nous courrons à notre perte et nous obérons irrémédiablement l’avenir des générations futures.

Nous commençons enfin à comprendre que nous allons devoir inventer un nouveau monde, plus sobre, plus résilient, plus attentif aux générations futures ; nous allons devoir inventer d’autres richesses, plus solidaires, une autre conception de la prospérité et du bien-être. Consommation, production, travail, mobilités, modèle industriel, énergie, fiscalité, flux internationaux, etc., tout doit être remis à plat. Et pas seulement au sommet, dans de vastes plans élaborés par les élites dirigeantes, mais au plus près de chacun d’entre nous, dans notre vie quotidienne.

C’est là qu’intervient la question démocratique.

Car ce nouveau monde nous ne pourrons l’inventer que tous ensemble. Disons-le alors clairement : la question démocratique n’est plus aujourd’hui la poursuite d’une utopie, elle est la clé de notre survie. Nous avons besoin de la démocratie – d’une autre démocratie – pour penser la crise et, surtout, inventer ce nouveau monde garant de notre survie. Nous avons besoin d’une démocratie du XXIe siècle, celle de l’entrée dans l’âge de l’Anthropocène, caractérisé par l’influence désormais massive de nos activités sur le système-Terre, alors que celle dans laquelle nous vivons encore a été pensée, dans son architecture, entre le XVIIIe et le XIXe siècles ; nous avons besoin d’une démocratie vivante, pluraliste, inclusive, sociale, bien inscrite sur les territoires de la vie quotidienne, favorisant le débat et la co-élaboration citoyenne des politiques publiques, attentive aux conséquences à long terme de nos actions.

Pour inventer ce nouveau monde il nous faut donc inventer une nouvelle démocratie.

Mais, disons-le tout aussi clairement : cette entreprise n’a de chance d’aboutir que si elle mobilise le plus grand nombre et ne se réduit pas à des préconisations d’experts ou d’essayistes mondains. C’est peut-être l’enjeu le plus essentiel de la période : ouvrir le plus largement possible le chantier de ce nouveau monde, de ses valeurs et de ses institutions ; reconnaître l’existence d’une véritable compétence citoyenne, autre que celle que procure le métier politique ou l’expertise politologique, qui puisse se déployer dans des espaces publics, circuler entre eux et s’y renforcer ; proposer à tous des instruments critiques d’élaboration collective de cette nouvelle démocratie que nous appelons de nos vœux.

C’est ce que fait Utopia, avec persévérance et ténacité, dans une démarche collective et avec un rare souci d’ouverture aux autres, confrontant dans un débat serré, mais toujours bienveillant, les propositions, traquant les idées reçues mais faisant son miel de toutes les innovations favorisant la co-élaboration du monde de demain. Ce petit livre foisonnant est une belle expression de cette ambition.

Bastien FRANÇOISProfesseur à l’Université Paris 1 Panthéon-SorbonnePrésident de la Fondation de l’écologie politique

Introduction

Du grec dêmos, peuple, et kratos, pouvoir, étymologiquement le terme démocratie signifie le pouvoir du peuple. C’est bien le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, sans qu’il n’y ait de distinctions dues la naissance, la richesse ou la compétence. La spécificité d’un système démocratique est que les gouvernés sont également des gouvernants et à ce titre sont parties prenantes dans les décisions concernant la vie de la cité. Le peuple est à la fois sujet et souverain, donc censé agir dans son propre intérêt.

Jusque-là, tout va bien. Mais c’est dans la déclinaison, la pratique, et la mise en œuvre de ces grands principes que tout se gâche. Car l’exercice de la démocratie, loin de se réduire à l’élection périodique de représentants, est un processus continu et sans cesse perfectible. Et le peuple n’est pas toujours un ensemble homogène. Il peut y avoir des peuples aux intérêts et avis qui peuvent être divergents voire contradictoires. Les pratiques démocratiques doivent alors arbitrer entre les tensions inévitables qui en résultent, tout en respectant les minorités1.

Une démocratie réelle et continue demande des citoyens formés et informés, une effective séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, l’indépendance et la pluralité des médias, de lutter contre les inégalités et les discriminations, le respect de l’environnement, la primauté du politique sur l’économique, des institutions qui garantissent les libertés individuelles et collectives, l’existence de contre-pouvoirs, une égalité parfaite devant la loi et devant les possibilités d’émancipation et d’épanouissement personnels…

Ce livre démontre que l’on en est loin.

Jamais la crise démocratique n’a été plus forte qu’en ce début de XXIe siècle. Avec les questions sociales et écologiques, elle menace notre capacité de vivre ensemble et fracture nos sociétés. Notre « démocratie » est plus délégataire que représentative, purement compétitive et nullement coopérative. Le vote est de moins en moins reconnu comme un moyen d’expression de la vie politique et l’abstention dépasse dans beaucoup d’élections les 50 %, rendant les élus certes légaux mais peu légitimes pour nous représenter. Heureusement nous ne sommes ni dans une dictature ni dans un régime de droit divin, mais ne serions-nous pas dans un régime que nous pourrions qualifier d’oligarchie libérale ?

Après les migrations, l’énergie, le travail, l’alimentation et les Communs, le Mouvement Utopia a consacré un temps important de sa réflexion collective à la démocratie. L’objet de ce livre, au travers des parties « idées reçues » et « propositions », est d’analyser l’état actuel de notre démocratie en France2 et de proposer des solutions pour construire un nouvel âge démocratique.

1. « La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité mais la protection de la minorit é», Albert Camus, Carnets III.

2. Nous n’abordons pas dans cet ouvrage la question spécifique de l’Europe et de ses institutions, qui demanderait un livre en soi.

PREMIÈRE PARTIEIDÉES REÇUES

Idée reçue n° 1La France et les pays occidentaux sont en démocratie

La démocratie est à la fois un outil et un objectif. Elle doit être au cœur du projet d’émancipation, c’est-à-dire d’abolition des logiques de domination entre êtres humains et permettre la participation réelle des citoyens à la vie de la cité. Elle doit être défendue comme une valeur universelle qui, si elle ne signifie pas uniformisation des régimes et institutions, donne à l’individu des droits, protège les minorités et combat les aliénations1.

Il suffit de contester la politique gouvernementale pour s’entendre dire que pouvoir la critiquer est la preuve que nous sommes en démocratie. Un peu court.

Chacun sait que nous ne vivons pas dans une démocratie directe, mais dans une démocratie dite « représentative ». Mais ce terme est en réalité une tromperie. Théoriquement, un élu exprime la volonté de ceux qui l’ont mandaté. Or, la plupart du temps il ne le fait pas. Et à supposer qu’il le veuille, il n’en a pas le droit, car le mandat impératif est interdit par la Constitution. Il est donc plus juste de parler de démocratie délégataire. Nous votons pour des élus qui décideront sans obligation de nous rendre compte. Notre vote s’apparente donc à un chèque en blanc que nous leur donnons pendant toute la durée de leur mandature.

Sommes-nous en démocratie, c’est-à-dire dans un régime où le peuple gouverne, où ses représentants mettent en œuvre la volonté populaire ? En réalité, nous sommes gouvernés par une oligarchie, c’est-à-dire le pouvoir d’une élite, comme l’explique Hervé Kempf2 : « Ce n’est pas la démocratie, pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple, c’est l’oligarchie, le pouvoir de quelques-uns, qui délibèrent entre eux des solutions qu’ils vont imposer à tous. » On peut ajouter que c’est même une oligarchie ploutocratique le plus souvent. Et Hervé Kempf ajoute : « Deux illusions caractérisent la vie politique des pays occidentaux : la première consiste à se croire en démocratie quand on glisse vers le régime oligarchique, la seconde est de considérer l’économie comme l’objet presque exclusif de la politique. »

Certes, il ne s’agit pas de dictature, mais nous vivons dans une apparence de démocratie, dans une oligarchie travestie en démocratie. Manuel Cervera-Marzal ne dit pas autre chose : « L’idée selon laquelle nous ne sommes pas en démocratie n’implique pas que nous serions en régime totalitaire, dictatorial, ou tyrannique – cela signifie simplement qu’il faut refuser de nous laisser enfermer dans l’alternative démocratie ou totalitarisme et qu’il faut donc mobiliser un troisième concept (intermédiaire) qui permet de caractériser nos régimes politiques comme étant oligarchiques3. » Les pouvoirs économiques et financiers, les multinationales et leurs lobbys sont plus forts que les états dits démocratiques et trop souvent en capacité d’imposer leurs volontés (chantage à l’emploi, à la délocalisation, l’introduction des OGM, etc.) y compris au niveau de Bruxelles (la « victoire » de la troïka sur Syriza en Grèce).

1. Ces aliénations sont nombreuses : elles sont aujourd’hui intrinsèquement liées au fonctionnement de l’économie et de la société. Le capitalisme développe des rapports de subordination fondés sur la propriété du capital productif. Il détruit l’environnement et remet sans cesse en cause l’idée de bien commun, n’ayant pour seul dessein que la croissance et la maximisation du profit. Dans le même esprit, le travail constitue toujours le principal vecteur d’intégration sociale, au détriment d’une participation de tous à la vie de la cité. La consommation éclipse la participation. Face à cette logique capitaliste et face à l’ensemble des oppressions et dominations, la démocratie doit constituer le pivot de la transformation de nos sociétés.

2. L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie, Hervé Kempf, Seuil, 2011.

3. Manuel Cervera-Marzal, La gauche et l’oubli de la question démocratique, D’ores et déjà, 2014.

Idée reçue n° 2Les élections sont la meilleure expression de la volonté populaire

La démocratie ce sont les élections. Il faut déconstruire cette identification mystificatrice et rappeler que pendant deux millénaires – d’Aristote à Montesquieu – il était admis que les élections correspondaient à un régime oligarchique et que c’est en réalité toujours le cas.

Ainsi, lorsque l’on demandait à Thomas Sankara1 ce qu’est la démocratie, il répondait :

« La démocratie est le peuple avec toutes ses potentialités et sa force. Le bulletin de vote et un appareil électoral ne signifient pas par eux-mêmes qu’il existe une démocratie. Ceux qui organisent des élections de temps à autre et ne se préoccupent du peuple qu’avant chaque acte électoral n’ont pas un système réellement démocratique. Au contraire, là où le peuple peut dire chaque jour ce qu’il pense, il existe une véritable démocratie, car il faut alors que chaque jour l’on mérite sa confiance. On ne peut concevoir la démocratie sans que le pouvoir, sous toutes ses formes soit remis entre les mains du peuple : le pouvoir économique, militaire, politique, le pouvoir social et culturel. »

Dans son acception actuelle, le vote propose un choix et permet soit d’élire des gouvernants représentatifs, soit de répondre à une question posée sous forme de référendum ou de plébiscite.

Historiquement les formes du vote furent très nombreuses, et la conquête du droit de vote fut précédée par d’intenses combats. Notons cependant qu’il ne fut accordé aux femmes en France que très tardivement (1944).

Si l’on peut considérer que dans une démocratie, le droit de vote est l’un des droits fondamentaux du citoyen, représente-t-il pour autant la seule ou la meilleure expression de la volonté populaire et la démocratie se réduit-elle aux élections ?

Aussi bien dans son principe (électif) que dans ses modalités (élections et systèmes électoraux), le vote correspond de moins en moins à l’expression du peuple. Dans notre système démocratique les citoyens ne votent pas pour qui ils veulent, mais contre celui ou celle qu’ils ou qu’elles ne veulent pas. Le sentiment dominant est que les représentant.es ne représentent plus qu’eux-mêmes ; « ils gouvernent au nom de peuple, mais sans lui2 ».

Magnifié (vote obligatoire) ou honni (no vote, voter c’est abdiquer3), le vote est devenu une forme d’expression de moins en moins populaire comme en attestent le nombre croissant de bulletins nuls et blancs, la montée de l’abstention (dans sa dimension « démocratique ») qui devient parfois majoritaire, et la non-inscription sur les listes électorales. Comment pourrait-il en être autrement à partir du moment où les élections ne constituent pas un engagement pour les élu.es qui ont ensuite liberté d’agir à leur guise, de plus en plus souvent sous forme de trahison des promesses et des espérances ?

Le plus bel exemple de détournement, « ce déni de démocratie », est celui de la ratification du TCE (Traité Constitutionnel Européen), adopté sous une autre forme et sans guère de modifications (traité de Lisbonne) par le Parlement français à plus de 75 %, alors qu’il avait été rejeté par 56 % des français.es par référendum (2005). « On ne peut que s’interroger sur la validité d’un système qui montre, élection après élection, ses failles et ses faiblesses et dans lequel le peuple est toujours le grand perdant4. »

Nous ne pouvons plus accepter que le processus de décision soit le monopole exclusif des élus. En ce sens, il importe de mettre en place d’autres systèmes électoraux, d’autres modes de scrutin, et de promouvoir d’autres formes de démocratie que la démocratie élective. C’est l’un des objets de la deuxième partie de ce livre.

1. Thomas Sankara, chef d’État du Burkina Faso de 1983 à 1987, assassiné en 1987.

2. Loïc Blondiaux, Le vote peut-il encore changer les choses ?, débat Médiapart Live, juin 2016.

3. Antoine Buéno, No vote, manifeste pour l’abstention, éd. Autrement, 2017.

4. Antoine Peillon, Voter c’est abdiquer, éd. Don Quichotte, 2017, et Voter c’est abdiquer, Élysée Reclus, Lettre à Jean Grave, 1885.

Idée reçue n° 3Le référendum exprime toujours la volonté populaire

Le référendum est un procédé de démocratie semi-directe par lequel l’ensemble des citoyens d’un territoire donné est appelé à exprimer une position (positive ou négative) sur une proposition concernant une mesure qu’une autorité a prise ou envisage de prendre. Considéré comme un mode d’expression de la souveraineté nationale, le référendum existe en France depuis la Révolution, ses principes sont reconnus et ses modalités actuelles sont définies dans la constitution de 1958 (articles 3, 11, 89).

Le référendum d’initiative populaire a été adopté en 2008, mais il exige 4 500 000 signatures pour qu’il soit effectif, ce qui limite beaucoup son usage.