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Recueil de 37 poèmes publié en 1852, Émaux et Camées est le sommet de l'art poétique de Théophile Gautier.
Liste Poèmes
Affinités secrètes
Le Poème de la Femme
Études de mains
Variations sur le Carnaval de Venise
Symphonie en Blanc Majeur
Coquetterie posthume
Diamant du cœur
Premier Sourire du Printemps
Contralto
Caerulei oculi
Rondalla
L'Aveugle
Lied
Fantaisies d'hiver
La Source
Bûchers et tombeaux
Le Souper des armures
La Montre
Les Nereides
Les Accroche-cœurs
La Rose-thé
Carmen
Ce que disent les hirondelles. Chanson d'automne
Noël
Les Joujoux de la morte
Après le feuilleton
Le Château du Souvenir
Camélia et Paquerette
La Fellah
La Mansarde
La Nue
Le Merle
La Fleur qui fait le printemps
Dernier Vœu
Plaintive Tourterelle
La Bonne Soirée
L'Art
Les Accroche-Cœurs
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PRÉFACE
AFFINITÉS SECRÈTES MADRIGAL PANTHÉISTE
LE POÈME DE LA FEMME MARBRE DE PAROS
ÉTUDE DE MAINS
I IMPÉRIA
II LACENAIRE
VARIATIONS SUR LE CARNAVAL DE VENISE
I DANS LA RUE
II SUR LES LAGUNES
III CARNAVAL
IV CLAIR DE LUNE SENTIMENTAL
SYMPHONIE EN BLANC MAJEUR
COQUETTERIE POSTHUME
DIAMANT DU CŒUR
PREMIER SOURIRE DU PRINTEMPS
CONTRALTO
CÆRULEI OCULI
RONDALLA
NOSTALGIES D’OBÉLISQUES
I L’OBÉLISQUE DE PARIS
II L’OBÉLISQUE DE LUXOR
VIEUX DE LA VIEILLE 15 DÉCEMBRE
TRISTESSE EN MER
À UNE ROBE ROSE
LE MONDE EST MÉCHANT
INÈS DE LAS SIERRAS À LA PETRA CAMARA
ODELETTE ANACRÉONTIQUE
FUMÉE
APOLLONIE
L’AVEUGLE
LIED
FANTAISIES D’HIVER
LA SOURCE
BÛCHERS ET TOMBEAUX
LE SOUPER DES ARMURES
LA MONTRE
LES NÉRÉIDES
LES ACCROCHE-CŒURS
LA ROSE-THÉ
CARMEN
CE QUE DISENT LES HIRONDELLES CHANSON D’AUTOMNE
NOËL
LES JOUJOUX DE LA MORTE
APRÈS LE FEUILLETON
LE CHÂTEAU DU SOUVENIR
CAMÉLIA ET PÂQUERETTE
LA FELLAH SUR UNE AQUARELLE DE LA PRINCESSE M…
LA MANSARDE
LA NUE
LE MERLE
LA FLEUR QUI FAIT LE PRINTEMPS
DERNIER VŒU
PLAINTIVE TOURTERELLE
LA BONNE SOIRÉE
L’ART
THÉOPHILE GAUTIER
ÉMAUX ET CAMÉES
RECUEIL DE POÈMES
Œuvres de Théophile Gautier. Poésies, volume III Lemerre 1890
Raanan Éditeur
Livre numérique 462 | édition 2
Pendant les guerres de l’Empire, Gœthe, au bruit du canon brutal, Fit Le Divan occidental, Fraîche oasis où l’art respire. Pour Nisami quittant Shakspeare, II se parfuma de çantal, Et sur un mètre oriental Nota le chant qu’Hudhud soupire. Comme Gœthe sur son divan À Weimar s’isolait des choses Et d’Hafiz effeuillait les roses, Sans prendre garde à l’ouragan Qui fouettait mes vitres fermées, Moi, j’ai fait Émaux et Camées.
Dans le fronton d’un temple antique, Deux blocs de marbre ont, trois mille ans, Sur le fond bleu du ciel attique, Juxtaposé leurs rêves blancs ; Dans la même nacre figées, Larmes des flots pleurant Vénus, Deux perles au gouffre plongées Se sont dit des mots inconnus ; Au frais Généralife écloses, Sous le jet d’eau toujours en pleurs, Du temps de Boabdil, deux roses Ensemble ont fait jaser leurs fleurs ; Sur les coupoles de Venise Deux ramiers blancs aux pieds rosés, Au nid où l’amour s’éternise, Un soir de mai se sont posés.
Marbre, perle, rose, colombe, Tout se dissout, tout se détruit ; La perle fond, le marbre tombe, La fleur se fane et l’oiseau fuit. En se quittant, chaque parcelle S’en va dans le creuset profond Grossir la pâte universelle Faite des formes que Dieu fond. Par de lentes métamorphoses, Les marbres blancs en blanches chairs, Les fleurs roses en lèvres roses Se refont dans des corps divers ; Les ramiers de nouveau roucoulent Au cœur de deux jeunes amants, Et les perles en dents se moulent Pour l’écrin des rires charmants. De là naissent ces sympathies Aux impérieuses douceurs, Par qui les âmes averties Partout se reconnaissent sœurs. Docile à l’appel d’un arome, D’un rayon ou d’une couleur, L’atome vole vers l’atome Comme l’abeille vers la fleur. L’on se souvient des rêveries Sur le fronton ou dans la mer, Des conversations fleuries Près de la fontaine au flot clair,
Des baisers et des frissons d’ailes Sur les dômes aux boules d’or, Et les molécules fidèles Se cherchent et s’aiment encor. L’amour oublié se réveille, Le passé vaguement renaît, La fleur sur la bouche vermeille Se respire et se reconnaît ; Dans la nacre où le rire brille La perle revoit sa blancheur ; Sur une peau de jeune fille Le marbre ému sent sa fraîcheur ; Le ramier trouve une voix douce Écho de son gémissement ; Toute résistance s’émousse, Et l’inconnu devient l’amant. Vous devant qui je brûle et tremble, Quel flot, quel fronton, quel rosier, Quel dôme nous connut ensemble, Perle ou marbre, fleur ou ramier ?
Un jour, au doux rêveur qui l’aime, En train de montrer ses trésors, Elle voulut lire un poème, Le poème de son beau corps. D’abord, superbe et triomphante, Elle vint en grand apparat, Traînant avec des airs d’infante Un flot de velours nacarat : Telle qu’au rebord de sa loge Elle brille aux Italiens, Écoutant passer son éloge Dans les chants des musiciens. Ensuite, en sa verve d’artiste, Laissant tomber l’épais velours, Dans un nuage de batiste Elle ébaucha ses fiers contours.
Glissant de l’épaule à la hanche, La chemise aux plis nonchalants, Comme une tourterelle blanche Vint s’abattre sur ses pieds blancs. Pour Apelle ou pour Cléomène, Elle semblait, marbre de chair, En Vénus Anadyomène Poser nue au bord de la mer. De grosses perles de Venise Roulaient au lieu de gouttes d’eau, Grains laiteux qu’un rayon irise, Sur le frais satin de sa peau. Oh ! quelles ravissantes choses, Dans sa divine nudité, Avec les strophes de ses poses, Chantait cet hymne de beauté ! Comme les flots baisant le sable Sous la lune aux tremblants rayons, Sa grâce était intarissable En molles ondulations. Mais bientôt, lasse d’art antique, De Phidias et de Vénus, Dans une autre stance plastique Elle groupe ses charmes nus : Sur un tapis de Cachemire, C’est la sultane du sérail, Riant au miroir qui l’admire Avec un rire de corail ;
La Géorgienne indolente, Avec son souple narghilé, Étalant sa hanche opulente, Un pied sous l’autre replié, Et, comme l’odalisque d’Ingres, De ses reins cambrant les rondeurs, En dépit des vertus malingres, En dépit des maigres pudeurs ! Paresseuse odalisque, arrière ! Voici le tableau dans son jour, Le diamant dans sa lumière ; Voici la beauté dans l’amour ! Sa tête penche et se renverse Haletante, dressant les seins, Aux bras du rêve qui la berce, Elle tombe sur ses coussins ; Ses paupières battent des ailes Sur leurs globes d’argent bruni, Et l’on voit monter ses prunelles Dans la nacre de l’infini. D’un linceul de point d’Angleterre Que l’on recouvre sa beauté : L’extase l’a prise à la terre ; Elle est morte de volupté ! Que les violettes de Parme, Au lieu des tristes fleurs des morts Où chaque perle est une larme, Pleurent en bouquets sur son corps !
Et que mollement on la pose Sur son lit, tombeau blanc et doux, Où le poète, à la nuit close, Ira prier à deux genoux !
Chez un sculpteur, moulée en plâtre, J’ai vu l’autre jour une main D’Aspasie ou de Cléopâtre, Pur fragment d’un chef-d’œuvre humain. Sous le baiser neigeux saisie Comme un lis par l’aube argenté, Comme une blanche poésie, S’épanouissait sa beauté ; Dans l’éclat de sa pâleur mate Elle étalait sur le velours Son élégance délicate Et ses doigts fins aux anneaux lourds ;