Je n'ai pas choisi d'être homosexuel, je suis juste chanceux - Partie 2 : ENQUÊTE - Frédéric Bellec - E-Book

Je n'ai pas choisi d'être homosexuel, je suis juste chanceux - Partie 2 : ENQUÊTE E-Book

Frédéric Bellec

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Beschreibung

L'HOMOSEXUALITÉ :« UNE APPÉTENCE PERVERSE ET SATANIQUE ! » Frédéric n'a que huit ans quand les Témoins de Jéhovah commencent à lui inculquer cette idéologie homophobe. Il grandit alors avec la conviction que les homosexuels sont promis à la destruction divine. Mais quand l'adolescence lui fait prendre conscience de sa propre différence, son sentiment de culpabilité se transforme en une longue et sourde dépression. Dans le secret et à l'abri des regards inquisiteurs, au mépris des peurs et des interdits imposés par sa religion, il trouve la force de confronter l'endoctrinement homophobe dont il a été l'objet depuis plus de trente ans à un vaste chantier d'investigation qui va le mener, hors des conventions fondamentalistes, devant le plus grand dilemme de sa vie. Frédéric Bellec livre ici un récit courageux et intimiste, à mi-chemin entre biographie et documentaire : celui d'une vie écartelée entre des dictats religieux et une attirance sexuelle non choisie condamnée par sa communauté. Un voyage édifiant et un parcours libérateur à la découverte d'un vital équilibre entre foi et raison, à la reconquête de la dignité humaine que les mouvements totalitaires ont asservie et dépouillée. Un livre à s'approprier par tous ceux qui ignorent comment briser leurs chaînes.

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Veröffentlichungsjahr: 2018

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Cet ouvrage est paru dans sa première édition en 2012 sous le titre Témoin de Jéhovah homosexuel.

Table des matières

SOPHISMES ET ÉDULCORANTS

30. L’art de simuler la vérité

31. Juger faute de pouvoir argumenter

32. Recourir à l’autorité

33. Le miroir aux alouettes

34. Le choix sans options

35. Prendre un cas pour une généralité

36. Le serpent qui se mange la queue

37. Quand prouver reste impossible

38. La corde sensible

39. L’arme du faible : la diffamation

Wikipédia et son fonctionnement

Wikipédia et son exactitude

Wikipédia : info ou intox ?

Des recherches d’amateurs

Chrétiens de ventre

40. Sonnerie de trompette

41. Conclusion sur les sophismes

DOUBLE LANGAGE

42. Stratégie divine ou langue de bois ?

43. Séparation des membres de la famille

44. Expansion à géométrie variable

45. Conscience imposée

46. L’affaire du ‘sang bulgare’

Mexique

47. L’instruction : un lavage de cerveau

48. Prostitution avec le ‘monde’

L’ONU : canasson d’une prostituée

Radiation précipitée

Un engagement à respecter

Accès à la bibliothèque de l’ONU

Justification

Après l’ONU, l’OSCE

Matthieu 24:14

Réveil tardif

RECONSTRUCTION

49. Quand il reste le meilleur

Amour versus Peur

Évolution

Le vrai danger

Secte ou pas secte

Pas d’évolution sans liberté

Ma liberté aujourd’hui

Ce qui m’attend…

Bibliographie

Index

des documents

Remerciements

SOPHISMES ET ÉDULCORANTS

« Ce qui est une nourriture pour l’un, est un poison pour l’autre. »

– Paracelse

30. L’art de simuler la vérité

« Simple est naturellement le langage de la vérité et la justice n'a pas besoin d'explications subtiles. Elle possède en elle-même sa force ; au lieu que l'injustice, malade en soi, réclame des remèdes, les sophismes. »

– Euripide, Les Phéniciennes (480-406 av. J.-C.)

L’apôtre Paul, à qui on ne pourra reprocher qu’un homéopathique machisme, mais pardonné par son zèle dans la défense du christianisme, savait bien que rien ne peut s’opposer à la vérité exprimée par Dieu, comme il l’a résumé en ces termes :

« Car, bien que nous marchions dans la chair, nous ne faisons pas la guerre selon [ce que nous sommes dans la] chair. Car les armes de notre guerre ne sont pas charnelles, mais puissantes par Dieu pour renverser des forteresses. Car nous renversons des raisonnements et toute chose altière qui se dresse contre la connaissance de Dieu ; et nous faisons toute pensée captive pour l’amener à obéir au Christ ; » – 2 Corinthiens 10:3-5.

À une certaine période de son histoire, la Watchtower utilisait à but préventif l’expression ‘vérité présente’1, consciente que sa ‘vérité’ deviendraient un jour une ‘vérité passée’, remplacée par une nouvelle ‘vérité présente’ qui à son tour deviendrait obsolète et ainsi de suite. Dans la réalité, on avait affaire – et encore aujourd’hui – à du folklore, à chaque fois habilement étiqueté de ‘nouvelle lumière’2. Mais une vérité qui n’en est pas une est un mensonge, qu’il soit gros ou petit, éphémère ou millénaire. Un mensonge répété mille fois ne devient jamais une vérité, tout comme une vérité oubliée pendant mille ans ne se meut pas en mensonge. La notion de mensonge pieux n’est donc qu’un contre-sens, une invention humaine sans fondement biblique3. L’ignorance volontaire obstinée ne dédouane en rien.

Il est difficile de faire accepter le mensonge religieux, à moins qu’il ne soit maquillé avec habileté à dessein de le faire passer pour un fait, une certitude, une évidence, voire une nouvelle lumière et dans le meilleur des cas une révélation divine. L’esprit d’analyse s’y heurte de toute façon : il y a quelque chose qui ‘coince’ dans le raisonnement. Soit ce qui est présenté comme une vérité n’est pas logique, est contraire au bon sens commun, est blessant, ou fait intervenir une gymnastique cérébrale complexe. Ou tout ça à la fois ! Comme les édulcorants, ça possède la saveur du raisonnement, mais aucunement ses valeurs nutritives. Quand la raison n’adhère plus, on a alors peut être affaire à de la malhonnêteté. Mais comment le savoir ?

Pour séduire et convaincre à tout prix, le mensonge exploite des artifices de langages, les plus courants étant regroupés sous le nom générique de sophismes4. Ils participent tous au même but : donner une vision déformée du monde ou une alternative plausible à la réalité. L’objectif est de faire adhérer à une idéologie présentée comme logique, raisonnable et donc valide.

Le sophisme est défini ainsi :

Le Trésor de la langue Française Informatisé :

« 1 - Argument, raisonnement qui, partant de prémisses vraies, ou considérées comme telles, et obéissant aux règles de la logique, aboutit à une conclusion inadmissible.

2 - Argument, raisonnement ayant l'apparence de la validité, de la vérité, mais en réalité faux et non concluant, avancé généralement avec mauvaise foi, pour tromper ou faire illusion. »

Dictionnaire du Moyen Français :

« A. - Argument, propos ou raisonnement spécieux, trompeur.

B. - Ce qui sème le doute, le trouble, ce qui falsifie. »

Dictionnaire de l’Académie Française, 8ème édition :

« Argument captieux, qui pèche ou dans le fond ou dans la forme. »

Le sophisme, ou raisonnement trompeur, existe depuis que l’homme sait s’exprimer, mentir et douter. Autant dire son âge avancé ! Il est utilisé dans les développements d’idées quand leurs auteurs, peu honnêtes ou tout simplement ignorants, tentent de se persuader, autant qu’ils veulent convaincre leur auditoire, de la consistance et de la véracité de leurs assertions5.

Il ne faut pas confondre sophisme avec paralogisme ou syllogisme :

Le sophisme

part de faits erronés ou de suppositions non démontrées pour parvenir à une conclusion elle aussi faussée, voire fantaisiste.

Le paralogisme

est également un raisonnement faux apparaissant comme crédible, mais où le locuteur est de bonne foi, contrairement au sophisme qui est destiné à tromper.

Le syllogisme

juxtapose deux vérités, liées par leurs termes, mais dont la logique d’association mène à l’erreur. Voici un exemple simple de syllogisme :

les livres bon marché sont rares. Ce qui est rare est cher.

Donc

les livres bon marché sont chers

 !

Dans l’arsenal de la propagande, les sophismes sont des armes de choix dont se servent les groupes agressifs et haineux pour désinformer ou convaincre du bien-fondé de leurs idéologies.

Les personnalités politiques sont tout aussi rompues aux sophismes. Au service de l’ambition et du pouvoir, la langue de bois qui lui est associée est presque devenue un art. Ce pseudo-langage, éloigné de la réalité, n’est destiné qu’à transmettre un message falsifié pour donner l’impression d’une maîtrise de la situation présente. Il est utilisé avec d’autant plus d’aplomb que la réalité échappe à tout contrôle. Le but n’est pas tant de donner l’impression de satisfaire l’attente du plus grand nombre que de bloquer la communication entre émetteur et récepteur, afin de faire patienter jusqu’aux prochaines déceptions. On appelle cela le langage de communication, qui envoie au public une image positive d’une situation donnée, alors qu’elle est vécue de façon bien moins flatteuse sur le terrain.

La science propose aussi ses perles que l’euphorie déclenchée par chaque nouvelle découverte peut générer à débit continu. Frédéric Bastiat, économiste et homme politique français6, en a même fait un sujet d’étude :

« Mais il est des sciences qui n'exercent sur le public qu'une influence proportionnée aux lumières du public lui-même, qui tirent toute leur efficacité non des connaissances accumulées dans quelques têtes exceptionnelles, mais de celles qui sont diffusées dans la raison générale. Telles sont la morale, l'hygiène, l'économie sociale, et, dans les pays où les hommes s'appartiennent à eux-mêmes, la politique. […] Qu'importe qu'un grand homme, un Dieu même, ait promulgué les lois de la morale, aussi longtemps que les hommes, imbus de fausses notions, prennent les vertus pour des vices et les vices pour des vertus. »

Et de conclure :

« c'est dans ces sciences que le sophisme est spécialement malfaisant, parce qu'il égare l'opinion en une matière où l'opinion c'est la force, c'est la loi. Il faut donc deux sortes de livres à ces sciences : ceux qui les exposent et ceux qui les propagent, ceux qui montrent la vérité et ceux qui combattent l'erreur. »7

La religion, enfin, constamment en quête de réponses et parfois contrariée par celles auxquelles elle refuse d’accorder du crédit, nous offre également son lot d’explications alambiquées et arbitraires pour imposer à ses ouailles son interprétation de la sagesse incomparable de Dieu, à mi-chemin entre errance et frustration, ignorance et tradition, mais toujours saupoudrée d’interdits. Le procédé consistant dans ce cas à gorger les sermons de sophismes est hautement présent dans la littérature de la Watchtower, sous presque toutes ses déclinaisons et cela sans discontinuer depuis le premier numéro de La Tour de Garde, publié en anglais en juillet 1879, il y a de cela cent-trente-neuf ans à la date de rédaction de ces lignes. Les moyens de diffusion modernes permettent désormais d’accéder à l’intégralité des éditions publiées et chacun pourra attester de l’authenticité des quelques exemples de détournement présentés dans ce chapitre.

Être éclairé sur certaines méthodes rédactionnelles, c’est être mieux armé pour les discerner en seconde lecture. Vous pourrez alors vous rendre compte à quel point le sophisme est une constante de l’enseignement religieux auquel les Témoins de Jéhovah se voient demander d’adhérer sans condition.

Ne sont pas répertoriés ici tous les sophismes, car il en existe des dizaines, mais seulement les plus fréquents parmi ceux employés par le Collège central pour défendre sa position sur l’homosexualité et les homosexuels.

1 Cette expression était née d’une mauvaise interprétation du passage de 2 Pierre 1:12, traduit ainsi de nos jours : « C’est pourquoi je serai toujours disposé à vous rappeler ces choses, bien que vous [les] connaissiez et que vous soyez fermement établis dans la vérité qui est présente [en vous]».

2 Rares sont les Témoins de Jéhovah qui savent qu’en 1921, le livre La harpe de Dieu, écrit par Joseph Rutherford (page 209, paragraphe 410, dans l’édition en français), affirmait que les ‘découvertes’ et ‘inventions’ suivantes étaient une preuve de la présence du Christ depuis 1874 : les colorants artificiels, le fil de fer barbelé, les bicyclettes, les caisses enregistreuses, les écrémeuses, la dynamite, les escaliers roulants, les autocuiseurs, les machines à vendanger, la construction du Canal de Panama, les signaux de chemin de fer, l’exploration des pôles, les sous-marins, le métro, les machines à écrire, les aspirateurs. C’était ‘la vérité’ prêchée à cette époque ! La Tour de Garde du 1er octobre 1900, page 296 (anglais), affirmait quant à elle que lors du processus de restauration de l’être humain les noirs deviendront blancs ! Un niveau de discernement spirituel présenté pourtant comme suffisamment concluant pour qu’en 1914 Dieu ait décidé de choisir la Watchtower comme digne de Le représenter sur terre !

3 La Bible encourage l’utilisation de son intelligence pour comprendre les choses de Dieu et proscrit l’acceptation aveugle d’informations non vérifiées. Par exemples, Romains 1:31 parle des individus « sans intelligence » comme étant désapprouvés par Dieu. Romains 7:23 parle de la ‘loi de l’intelligence’. 1 Corinthiens 4:13-19 cite quatre fois l’intelligence comme paramètre essentiel du culte. Tite 1:10 parle quant à lui des « vains parleurs, de gens qui abusent l’intelligence ». Philippiens 1:10 demande aux chrétiens de « vérifier les choses les plus importantes ». On est donc aux antipodes d’un système autocratique imposant un enseignement ne supportant aucune contestation.

4 Le mot sophisme dérive du latin sŏphisma, qui vient du grec όφισμα (sóphisma), vocable signifiant habileté, invention ingénieuse, ou raisonnement trompeur. Ce mot sóphisma est basé sur σοφία (sophía), qui signifie sagesse, ou savoir, et désigne les discours prononcés par les sophistes grecs de l’Antiquité (les spécialistes du savoir), des professeurs de rhétorique chargés de persuader à tout prix leur auditoire, même au mépris de la vérité. C'est Aristote qui a inventé la science de la Logique pour classer les types de raisonnements (ou de syllogismes) et montrer la ‘logique’ fallacieuse à l'œuvre dans un sophisme. Voir Système de logique déductive et inductive. Exposé des principes de la preuve et des méthodes de recherche scientifique, de John Stuart Mill, éditions Pierre Mardaga, Bruxelles, 1988 (Livre 5 : Les sophismes, pages 294 à 413).

5 Le philosophe allemand Emmanuel (Immanuel) Kant, dans son livre majeur Critique de la raison pure (Kritik der reinen Vernunft), parle du sophisme comme d’une « illusion de la raison » (publié dans sa première édition en 1781, aujourd’hui disponible aux Éditions PUF).

6 1801-1850.

7Sophismes Économiques, Conclusion de la première série (1845). Extrait de l'édition originale en 7 volumes (1863) des œuvres complètes de Frédéric Bastiat, tome IV Sophismes Économiques, première série, "Conclusion", pages 119 à 126.

31. Juger faute de pouvoir argumenter

Un argument est regardé comme acceptable ou irrecevable en fonction de sa cohérence, indépendamment de l’identité de celui qui le présente. Mais pour pallier la déficience d'argumentation, un sophisme courant consiste à introduire un jugement de valeur. Le but est de conditionner l'esprit du lecteur pour l’amener à une conclusion qui d’une part est induite par des notions purement subjectives et d’autre part ferme la porte aux alternatives. Il s’agit donc d’imposer un point de vue tout en interdisant implicitement sa contestation. Le lecteur doit croire que s'il comprend les choses autrement parce que le développement lui semble bancal, c'est lui qui n'a rien compris ou, pire, c’est qu’il manque de foi ! Ce sophisme s’appelle Argumentum ad Judicium.

Le chapitre de cet ouvrage traitant de la masturbation cite plusieurs de ces sophismes. En voici d’autres, qu’on peut retrouver généreusement dans l’ensemble des publications de la Watchtower. À titre d’exemple, les occurrences des expressions suivantes sont à comptabiliser depuis 1970 (jusqu’à 2012) :

« sans l’ombre d’un doute » : 106 fois ;

« il est donc clair que » : 149 fois ;

« il ne fait aucun doute que » : 472 fois ;

« sans doute » : 6863 fois ;

« probablement » : 5440 fois ;

« tout porte à croire » : 123 fois ;

« on peut supposer » : 51 fois.

Imaginez un docteur vous annoncer :

« Ce médicament pourra probablement vous soigner et je suppose que ses effets secondaires ne seront sans doute pas nocifs pour votre santé. Tout porte à croire qu’il ne provoquera aucune allergie car personne ne s’est encore plaint, on peut alors supposer que ce traitement ne pourra que vous faire du bien ».

Pour le coup, il ne fait aucun doute que vous changeriez rapidement de médecin !

Des tournures plus élaborées destinées à imposer une position idéologique par intimidation apparaissent aussi de façon régulière :

« Un chrétien

mûr

estimera que… » :

« Par conséquent, un chrétien mûr estimera que marquer son anniversaire de mariage est une affaire personnelle, mais qu’il a de bonnes raisons de ne pas fêter les anniversaires de naissance » – La Tour de Garde du 15 octobre 1998 page 31.

« Un chrétien mûr […] n’adhère pas à des conjectures sur la compréhension de la Bible. Il a au contraire totalement confiance dans la vérité que Jéhovah Dieu révèle par l’intermédiaire de […] “ l’esclave fidèle et avisé ” » – La Tour de Garde du 1er août 2001, page 14, paragraphe 8.

« Il est

raisonnable

de conclure que… » :

« En se fondant sur la durée du septième “jour”, il est raisonnable de conclure que chacun des six autres “jours” est une période de 7 000 ans. » – La Tour de Garde du 1er octobre 1971, page 599, sous l’article Les jours de la création, selon le point de vue de Dieu.

« Puisque tout se fera avec ordre, il est raisonnable de conclure que les premiers à être ramenés à la vie sur la terre seront les justes, ceux qui ont servi Jéhovah fidèlement. » – La connaissance qui mène à la vie éternelle8, page 186, paragraphe 15.

Il a aussi la concaténation des expressions et les pléonasmes pour donner encore plus d’aplomb aux affirmations que l’étude des faits avancés ébranle rapidement :

« Puisque tous les sillons de l’“empreinte digitale” sont clairement visibles, une seule conclusion s’impose : incontestablement, depuis 1914, nous vivons les “derniers jours” du présent système. » – Évolution9, Page 168.

« Les Témoins de Jéhovah peuvent-ils fournir la preuve qu’‘une lettre de Christ a été écrite par eux, en tant que ministres’? Les faits parlent d’eux-mêmes. […] Il y a à présent presque autant de congrégations qu’il y avait de Témoins en 1931 […] et c’est là une preuve irréfutable que les Témoins de Jéhovah sont vraiment des ministres. » – La Tour de Garde du 15 novembre 1984, pages 14-15, paragraphe 19.

Ce procédé malhonnête se retrouve ainsi dans le Réveillez-vous! du 8 février 1995, page 17, où l’article D’où viennent ces penchants ? présentait la maltraitance sexuelle comme une des sources de l’homosexualité :

« On notera que bon nombre d’homosexuels ont été victimes de sévices sexuels dans leur enfance. Pareils sévices peuvent causer un tort physique et affectif durable, et chez certains une “déformation de l’identité sexuelle”, selon les termes d’un auteur. C’est incontestablement ce qui se passait à Sodome, où les jeunes garçons manifestaient un appétit insatiable pour les relations sexuelles perverties (Genèse 19:4, 5). À l’évidence, ils étaient un produit de l’exploitation à laquelle les soumettaient les adultes. »

Avec le renfort grammatical des locutions « à l’évidence » et « incontestablement », l’article impose aux lecteurs des explications que ni la Bible ni l’histoire ne viennent étayer car elles ne sont que le fruit de fantaisies intellectuelles pour donner une justification biblique à un raisonnement arbitraire, en jouant sur son caractère plausible pour l’établir en certitude.

Afin de démontrer que l’augmentation des homosexuels est liée à la montée de l’immoralité, le Réveillez-vous! du 22 septembre 1976, page 6, expliquait ceci :

« Aujourd’hui, le docteur Wardell Pomeroy, l’un des chercheurs de l’équipe Kinsey, prétend que le pourcentage des homosexuels n’a pas réellement augmenté mais que beaucoup d’entre eux ne se cachent plus. Il est de fait que depuis environ cinq ans ils agissent plus ouvertement. Mais, justement à cause de cette plus grande liberté, il y a tout lieu de croire que le nombre des homosexuels a augmenté. »

Ainsi, le fait que les homosexuels parlent plus librement de leur orientation aurait donné des idées à d’autres pour changer d’attirance. Ce qui expliquerait, ‘il y a tout lieu de le croire’, cette augmentation de leur nombre. On peut aller très loin dans l’absurde avec ce type de raisonnement.

Le Collège central a utilisé très tôt ce sophisme pour imposer ses interprétations doctrinales. Et il n’a jamais fait pas dans la demi-mesure. Témoin cette déclaration qu’on retrouve dans le livre La harpe de Dieu (déjà cité), écrit par Joseph Rutherford en 1921, page 208, paragraphe 408 (édition française) :

« Cette grande augmentation de la connaissance et ce prodigieux va-et-vient des peuples sur divers points de notre planète sont, sans contredit, un accomplissement de la prophétie qui témoigne du « temps de la fin ». Ces faits ne peuvent être contestés et suffisent pour convaincre tout esprit raisonnable et réfléchi que nous sommes dans le temps de la fin depuis 1799. »

Un an plus tard, La Tour de Garde du 1er mars 1922 (en anglais), confirmait ces « faits » :

« Il y a plus qu’une présomption, mais bien une preuve concluante, quelque chose de plus qu’une réalité physique qui en dit plus que des mots audibles ».

Voyez comment, dans la suite de l’article, étaient considérés ceux qui doutaient d’une telle chronologie (à commencer par les membres du clergé et par extension tous les ‘apostats’), pour ensuite réaffirmer sa position. Une démonstration qui aurait pu suffire à elle-même pour illustrer l’Argumentum ad Judicium et aussi l’Argumentum Ad Hominem, sophisme apparenté qu’on verra plus loin, qui consiste quant à lui à attaquer l’individu au lieu d’argumenter :

« Les faits démontrent sans l‘ombre d’un doute que la majorité de ceux qui sont en possession de la connaissance de l’hébreu et du grec se prennent vraiment trop au sérieux. Ils commencent à croire qu’ils en savent tant qu’ils peuvent s’arroger le droit de s’élever contre ce qui est fait par d’autres. Ils s’éloignent de la voie du Seigneur et s’appuient sur leur propre compréhension, qui est à l’opposé (Proverbes 3 :5,6). Habituellement ils parlent et écrivent de telle façon qu’un homme normal n’y comprend rien ; ce faisant, ils espèrent en tirer gloire aux yeux des autres. Parce qu’ils pensent posséder une sagesse plus grande que les autres, ils font des déclarations dogmatiques, sans se préoccuper de ce qui est vrai ou faux, comptant sur le fait que les autres vont tout gober car ils sont incapables d’analyser leur sagesse supposée.

Les faits, incontestables, par conséquent, montrent que « le temps de la fin » a commencé en 1799 ; que la seconde présence du Seigneur a commencé en 1874. »

Depuis, le Collège central est revenu sur tous ces « faits » qu’un « esprit raisonnable et réfléchi » ne pouvait contester. Mais il en a produit d’autres, tous aussi ‘incontestables’. Loin d’être inutiles, ces « faits » ont au moins permis d’ajouter les Témoins de Jéhovah à la longue liste des faux prophètes de notre temps, des nouveaux charlatans de la religion.

8 Publié en 1995 par les Témoins de Jéhovah.

9 Publié en 1970 par les Témoins de Jéhovah.

32. Recourir à l’autorité

Ce sophisme, l’Argumentum ad Verecundiam (appel à l’autorité), a été approché dans le chapitre sur la masturbation. Il s’agissait en l’occurrence de faire appel au renommé biologiste Alexis Carrel pour donner artificiellement du poids à l’argumentation selon laquelle la masturbation pourrait être source de déficience intellectuelle.

Voici un autre exemple de ce recours abusif à l’autorité. On le retrouve dans le Réveillez-vous! du 8 juin 1972, pages 18 et 19, sous l’article Protégez-vous de la pandémie vénérienne :

« L’extension de l’homosexualité contribue elle aussi à répandre le mal. Les homosexuels sont plus “volages” que le reste de la société, et ils acceptent moins facilement que les autres de se faire traiter. Un rapport a montré que plus d’un tiers des hommes syphilitiques avaient eu au moins une fois des rapports homosexuels. »

L’article ne donne aucune référence sur le « rapport » en question. Ces informations ne sont de toute façon pas destinées à être contrôlées par un lectorat composé de Témoins de Jéhovah habitués à tout accepter, mais vise à apporter de la densité à l’argumentation : ‘Les homosexuels sont plus dépravés que les hétérosexuels, donc plus susceptibles de contracter des maladies vénériennes.’ C’est le message à faire passer. Et cela ne peut être que véridique puisqu’ ‘un rapport l’a montré’ !

Une méthode voisine de l’appel à l’autorité, l’appel à l’humilité, consiste à invalider ou rabaisser le bien-fondé d’une affirmation en faisant appel à une autre, attestée ou non, qui vient remettre en question la première. On trouve un exemple type de ce procédé dans le Réveillez-vous! du 22 août 1993 (déjà cité dans le chapitre Homosexualité : choix ou génétique ?), à la rubrique Coup d’œil sur le monde, page →, dans le commentaire d’un article du magazine américain Newsweek, titré How Many Gays Are There ? (Combien y a-t-il de gays ?) :

« Aux États-Unis, pendant des dizaines d’années, les associations de défense des droits des homosexuels ont affirmé que ceux-ci représentaient 10 % de la population et profité de ce pourcentage élevé pour exercer des pressions politiques. Or, ce chiffre de 10 %, résultat d’études réalisées dans les années 40 et 50 par Alfred Kinsey, était de plus en plus contesté. “Les études les plus récentes placent les homosexuels et les lesbiennes entre 1 et 6 % de la population”, révèle la revue Newsweek. […] Newsweek cite ce jugement d’une sociologue de l’université de Washington, Pepper Schwartz, sur le chiffre des 10 %: “C’est un chiffre tout bonnement faux.” »

Ici, le Réveillez-vous! souhaite invalider la proposition chiffrée de Kinsey (10% d’homosexuels parmi la population) par d’autres plus récentes (de 1% à 6%), en invoquant la déficience de ses méthodes de travail, appuyée par la déclaration d’une sociologue10. Que les seconds chiffres soient plus proches de la réalité ou non, cela n’est pourtant d’aucune importance dans le cas qui nous concerne. Car ce que l’article omet de préciser, c’est que le Newsweek paraphrasé, daté du 14 février de la même année, ne présente pas une synthèse des dernières recherches en matière de sexualité. Il se bornait simplement à exposer la puérile guerre des chiffres opposant d’un côté les mouvements de défense des droits des homosexuels qui soutenaient la thèse des 10% de Kinsey et de l’autre les activistes ‘anti-gay’ qui ne voulaient pas dépasser le 1% (en s’appuyant sur un ouvrage publié en 1990 par Judith A. Reisman : Kinsey, Sex and Fraud)11. Aucun pourcentage précis satisfaisant à la réalité ne pouvant à l’époque être adopté plus qu’un autre, l’article concluait par les propos plutôt modérés d’un anti-gay provocateur, Paul Cameron12, adepte du modéré ‘3%’ et fondateur du Family Research Institute de Washington :

« Il est difficile de trouver quelqu'un écrivant dans ce domaine qui ne soit pas motivé par des préoccupations idéologiques »

L’article ne faisait que montrer chaque belligérant tirant la couverture vers lui, s’appropriant les études et les chiffres collant au mieux avec ses propres convictions. Il faudra attendre 2010 et les travaux du professeur Balthazart13 pour réhabiliter avec des données actualisées les résultats de Kinsey, pourtant considérés a posteriori comme ventripotents. Ainsi, à partir d’un simple article plus proche de Clochemerle14 que de la revue scientifique, le Collège central, en choisissant ses phrases, donne l’apparence de publier les dernières conclusions scientifiques chiffrées sur le sujet.

Mais quelle différence cela fait-il qu’il y ait 1% ou 10% de la population qui soient homosexuels ? Il faut garder à l’esprit que même sur une base faible, 1%, rapporté à une population terrestre de sept milliards d’individus15 donne environ 70 millions d’homosexuels, l’équivalent de la population française. Sur le classement par population des 195 pays répertoriés16, ils arriveraient en 20ème position, entre la République Démocratique du Congo et la Thaïlande. Ils seraient dix fois plus nombreux que le nombre de proclamateurs Témoins de Jéhovah ! J’évoquais une guerre des chiffres, le Collège central y participe activement. Car alors qu’il affirme haut et fort que l’immoralité progresse à vitesse grand ‘V’ dans le monde… :

« Le nombre des homosexuels augmente » – La Tour de Garde du 15 février 1971, page 108.

« il y a tout lieu de croire que le nombre des homosexuels a augmenté. » – Réveillez-vous! du 22 septembre 1976, page 6.

… le nombre d’homosexuels devrait selon lui suivre une courbe identique :

« Nous observons actuellement l’augmentation de la criminalité et de l’immoralité » – La Tour de Garde du 15 février 1972, page 102.

« Compte tenu de la dégradation progressive des mœurs, la corruption et l’égoïsme des hommes sont sans aucun doute pires aujourd’hui qu’il y a quatre mille trois cents ans. » – La Tour de Garde du 1er février 1975, page 86, paragraphe 26.

« Aujourd’hui, la dégradation des mœurs est bien pire, et celle-ci progresse tous les jours » – Réveillez-vous! du 22 décembre 1981, page 27.

« on assiste aujourd’hui à une dégradation alarmante des mœurs » – Réveillez-vous! du 22 juillet 1994, page 31.

Mais lorsque le Collège central se détache des généralités pour chiffrer la population homosexuelle, il devient beaucoup plus timide, insinuant qu’elle ne serait pas si forte que cela, voire insignifiante, et que les mouvements de défense des homosexuels exagèrent pour se donner de l’importance. Dans une logique de progression continue de la dégradation des mœurs, rien ne devrait pourtant justifier aux yeux du Collège central que le nombre d’homosexuels est réduit. Il aurait même plutôt intérêt à insister sur une augmentation de leur nombre pour conserver une cohérence dans la croyance en un plongeon irrépressible de l’humanité dans l’immoralité. Qu’est-ce qui le motive à tenir un discours inverse dès qu’il s’agit de la population gay ?

La réponse tient à peu de choses. La prise de conscience du nombre estimé d’homosexuels ne rangerait plus ces derniers dans la catégorie des minorités à ignorer, ce que leurs revendications s’attachent à formuler. Ils veulent être reconnus comme des êtres humains ordinaires. Or, le Collège central est loin d’approuver cet activisme, lui qui consent froidement à la mise à mort des homosexuels, incapable, en raison de son anorexie de cœur, de faire la séparation entre une attirance non voulue et ce qu’il appelle ‘un choix de vie’ :

« La Loi que Dieu promulgua pour la nation d’Israël exigeait que les homosexuels soient “mis à mort sans faute”. (Lévitique 20:13.) Quant aux lois qu’il a données aux chrétiens, elles révèlent qu’il n’a pas changé d’avis. » – La Tour de Garde du 1er septembre 1983, page 25.

« les Écritures établissent clairement que, à moins de changer, les homosexuels n’hériteront pas du Royaume de Dieu et “méritent la mort” » – Réveillez-vous! du 22 janvier 1989, page 9.

Le Collège central est donc enclin à minimiser, à marginaliser la réalité homosexuelle. Il préfère voir les gesticulations d’un groupe ultra-minoritaire aux revendications misérables, non représentatif de quoique ce soit si ce n’est du reflet de la perversité du monde. Il lui serait totalement insupportable de devoir admettre un jour que si tant d’êtres humains sont homosexuels alors que la nature semble majoritairement attirer mutuellement l’homme et la femme, la réponse est peut-être ailleurs que dans son accusation gratuite et blessante de « dépravés17 » !

10 Pepper Schwartz, professeur de sociologie, est très connue et appréciée aux États-Unis pour ses nombreux travaux littéraires sur la sexualité et la vie de couple. Elle a d’ailleurs fait don de plusieurs de ses publications à la Bibliothèque de l'Institut Kinsey.

11 Édition Huntington House (Lafayette, Louisiane). Judith A. Reisman est une américaine conservatrice connue pour ses critiques acerbes envers les travaux de Kinsey. L’édition du 6 décembre 2004 du magazine américain NewYorker, rapporte que Judith A. Reisman compara la jeunesse homosexuelle à la jeunesse hitlérienne. Dix ans plus tôt, sa plainte contre l’institut Kinsey qui l’avait poursuivie pour diffamation après la parution de son livre Kinsey, Sex and Fraud , fut rejetée.

12 Pendant plus de trente ans, Cameron a publié des études personnelles à propos des homosexuels sans jamais les faire paraître dans des revues spécialisées, suggérant qu’ils ne sont que des prédateurs et des pervers malades. Adepte des déclarations aussi diffamatrices qu’étonnantes, il affirma que « Les homosexuels sont trois fois plus enclins à admettre avoir effectué un appel téléphonique obscène » et qu’« ils ont une vie extrêmement courte » ! Désavoué par ses collègues à plusieurs reprises, il a été rejeté en 1983 de l'American Psychological Association pour violation d’éthique. En 1986, l'American Sociological Association a formellement condamné Cameron pour ses fausses déclarations dans ses ‘recherches’. Fin 2010, en réaction aux charges qui pesaient sur lui, Cameron a proposé de taxer les gays et les adultes célibataires en raison de leur incapacité à produire des enfants et a suggéré que les gays et les lesbiennes subissent une « humiliation publique ». Bien que la propagande de Cameron soit reconnue comme trompeuse, de nombreux autres groupes (dont l’Association des familles américaines) continuent d’utiliser ses prétentions, sans bien sûr citer leur source - Intelligence Report, Hiver 2010. Numéro 140. http://www.splcenter.org.

13 Se reporter au chapitre Homosexualité : choix ou génétique ?

14Clochemerle est un roman satirique publié en 1934, mettant en scène un village français constamment déchiré par des querelles mineures et très cocasses.

15 La petite philippine Danica May est officiellement devenue le 7 milliardième habitant de la planète terre le 31 octobre 2011.

16 Chiffres de juillet 2011, par la Central Intelligence Agency World Factbook -https://www.cia.gov

17La Tour de Garde du 1er août 1984 page 10.

33. Le miroir aux alouettes

La méthode consistant à monter de fausses analogies exploite les similarités qui existent entre certaines situations pourtant dissemblables afin de justifier le bien-fondé d'une assertion. À mon sens, l’exemple le plus grotesque que le Collège central ait jamais utilisé figure dans le Réveillez-vous! du 22 septembre 1976, pages 11 et 12, déjà cité dans le chapitre sur la masturbation :

« une chose est certaine : les homosexuels ont choisi ce mode de vie. […] Warren Blumenfeld, coordonnateur du Centre national des étudiants homosexuels, fait même une comparaison avec l’achat d’une automobile. Il dit : “L’un préfère une Cadillac, l’autre une voiture de sport.” On devient donc homosexuel parce qu’on le veut bien. »

En optant pour la facilité de se cacher derrière l’intervention d’un tiers, le Collège central valide ainsi l’une des plus monumentales bouffonneries jamais publiées sur les homosexuels pour forcer un point de vue définitivement homophobe. Observez comment le paragraphe est rédigé : jamais Blumenfeld n’a affirmé qu’on choisit son orientation comme on choisit une voiture, il déclare uniquement :

« L’un préfère une Cadillac, l’autre une voiture de sport (texte anglais originel : One person likes a Cadillac and another likes a sports car) »

Une dizaine de mots et c’est tout ! Intégralement décontextualisés. On parle de voiture, rien de plus.

J’ai voulu me rapprocher de la source de cette déclaration étonnante en contactant personnellement le Professeur Warren J. Blumen-feld, heureusement toujours bien présent dans les médias américains au travers de sa lutte contre l’homophobie18. L’échange rapide et enrichissant par messagerie électronique s’est déroulé en une seule soirée, preuve s’il en est de l’utilité d’Internet dans la quête de réponses. Voici la traduction de l’essentiel de l’échange19 :

ENVOYÉ A WARREN BLUMENFELD [email protected] - 19/11/2011 à 19:08 :

« ‘One person likes a Cadillac and another likes a sports car’.

Pourriez-vous confirmer avoir fait une telle comparaison ? Et si oui, dans quel ouvrage pourrais-je la retrouver ? Que vouliez-vous dire précisément ? »

REÇU DE WARREN BLUMENFELD - 19/11/2011 à 20:55 :

« Je fus le coordinateur du Centre National des Étudiants Gay de 1971 à 1973. Je n’ai pas souvenir avoir fait la déclaration à laquelle vous vous référez. Au lieu de cela, vous pouvez lire un éditorial bien plus récent que j’ai rédigé cette année sur le sujet que vous abordez. Je le reproduis ci-dessous.

Cordialement,

Warren Blumenfeld

[…]

Dr. Warren J. Blumenfeld

Associate Professor

Department of Curriculum and Instruction

Iowa State University

Ames, IA 50011

Office 515-294-5931

Home 515-232-8230

E-mail: [email protected]

Blog: http://www.warrenblumenfeld.com »

MA RÉPONSE - 19/11/2011 à 21:13 :

« Merci Warren pour votre réponse très rapide. Mais cela ne répond pas à ma question : pensiez-vous réellement en 1974 qu’être homosexuel n’est qu’une affaire de choix au même titre que choisir ou non une Cadillac ? Ou le magazine Réveillez-vous! n’a-t-il fait qu’utiliser certains de vos propos pour donner l’impression que c’est ce en quoi vous croyiez alors ? »

SECONDE RÉPONSE DE WARREN BLUMENFELD - 19/11/2011 à 21:49 :

« Comme je ne me souviens absolument pas avoir fait cette déclaration, je doute pouvoir dire ce à quoi je pouvais bien penser, surtout il y a 40 ans.

Mais ce que je sais, c’est que quelque soit l’argumentation utilisée (« on est né ainsi » ou « c’est un choix »), elle n’a jamais été et ne sera jamais efficace parce que nous ne pouvons pas convaincre les gens sectaires en utilisant la logique.

[…] JE SUIS INTIMEMENT CONVAINCU QUE LE FAIT MÊME DE POSER LA QUESTION (QUELLES SONT LES CAUSES DE L’HOMOSEXUALITÉ, DE LA BISEXUALITÉ ET DU TRANSGENDERISME ?) EST UNE CAUSE DE PRÉJUDICE HOMOPHOBE. Nous ne demandons jamais aux personnes hétérosexuelles : « Qu’est-ce qui vous a poussé à être hétérosexuel ? ». La question elle-même présuppose que ‘quelque chose a mal tourné un jour’, que ‘nous sommes hors du naturel, de l’ordinaire’, issue du postulat que l’hétérosexualité est normale et l’homosexualité déviante.

[…] Nous ne devons à PERSONNE une quelconque justification sur pourquoi nous sommes attirés par un sexe plus qu’un autre. Nous n'avons pas plus à étaler notre vie devant N'IMPORTE QUI. Pour rebondir sur les paroles de René Descartes, « Je pense donc je suis », je dis « J'existe, donc je suis ». »

Et voilà comment le Collège central continue d’exploiter des propos décontextualisés – et peut-être inventés de toutes pièces – pour appuyer ses vues homophobes. Si le professeur Warren J. Blumenfeld n’a aucun souvenir d’avait fait une telle déclaration, pourtant particulièrement forte, accusatrice et à l’opposé de ses propres convictions, il faut noter qu’il n’est pas le seul. En effet, elle n’apparaît dans aucune archive connue : livre, magazine, journal, interview, émission télévisée… Sauf dans un Réveillez-vous!… et relayée exclusivement par des Témoins de Jéhovah sur certains forums de discussions et réseaux sociaux. Habitués à tout prendre pour argent comptant de la part du Collège central, ils se font ainsi les complices d’une vaste campagne d’homophobie internationale. Une dizaine de mots seulement qui suffiront pourtant à rédiger une conclusion radicale :

« On devient donc homosexuel parce qu’on le veut bien »

18http://warrenblumenfeld.academia.edu/WarrenBlumenfeld.

19 Les paroles d’introduction, les parties hors sujet et les formules de politesses ne sont pas retranscrites pour alléger la lecture, ce qui donne à la conversation la fausse impression d’un style télégraphique et dur, ce qui ne fut bien entendu pas le cas. L’autorisation de publication de cet échange privé a été accordée par Warren J. Blumenfeld dès le lendemain.

34. Le choix sans options

Il s'agit de faire croire que face à un choix il n'existe que deux alternatives, alors qu'en réalité elles peuvent être plus nombreuses. Exemple type :

« Tout homosexuel est un hétérosexuel qui s’ignore » – La Tour de Garde du 15 février 1971, page 108.

Une affirmation à l’emporte-pièce doublement fausse :

Un homosexuel n’est pas plus un hétérosexuel en puissance qu’un gaucher n’est un droitier en puissance. Il est homosexuel, c’est tout.

Entre ces deux orientations, il y a la bisexualité, qui comble le fossé avec une répartition inégale entre l’attirance pour son propre sexe et celui pour le sexe opposé.

Ci-dessous, un autre exemple de faux dilemme. Il faut choisir entre loisir ou ‘spiritualité’ :

« Nous adonnons-nous à notre détente favorite au point que notre spiritualité en souffre? Ou nous soucions-nous d’abord de nos besoins spirituels et prenons-nous un peu de détente après, dans la mesure où le temps le permet ? Il faut souvent choisir, car on peut rarement avoir l’un ET l’autre, mais plutôt l’un OU l’autre. » – La Tour de Garde du 1er février 1979 page 18 paragraphe 6.

Enfin, dans ce nouvel exemple d’exclusion du tiers, soit on est dans la Watchtower, figurée ici par l’ « organisation de Dieu », soit on adore Satan. Toute autre option est inenvisageable :

« il n’existe pas de zone neutre entre l’organisation de Dieu et celle de Satan. » – La Tour de Garde du 1er juin 1983, page 19, paragraphe 12.

Mais je décerne la palme du faux dilemme à l’insupportable démonstration de vulgarité que l’on trouve dans La Tour de Garde du 1er décembre 1974, page 708, dans l’article L’homosexualité – le point de vue de la Bible est-il raisonnable ? :

« Prenez le cas de deux homosexuels. Tous les deux prétendront être un homme, mais l’un d’eux ne doit-il pas jouer d’une manière ou d’une autre le rôle de la femme ? Dans le cas de relations homosexuelles, entre hommes ou entre femmes, il faut utiliser un artifice quelconque pour remplacer ce qu’un individu de sexe différent apporte “naturellement”. Tout cela est-il raisonnable ? La Bible parle fort justement des pratiques homosexuelles comme de quelque chose qui est “contre nature”. »

Concernant deux homosexuels masculins, « Tous les deux prétendront être un homme ». Ne le sont-ils pas déjà qu’ils aient besoin de le ‘prétendre’ ? C’est humiliant et dégradant.

J’avais neuf ans quand j’ai lu pour la première fois cet article. J’en ai un souvenir d’autant plus net qu’il me mettait déjà mal à l’aise alors que je n’en saisissais pas la pleine portée vu mon âge. On se croirait ici témoin d’une discussion grivoise lors d’une pause-café ! Qui peut avoir une vision si déformée et simpliste de la façon dont peuvent se manifester les sentiments qui unissent deux êtres humains ? Une question d’autant plus embarrassante que le Réveillez-vous! du 8 juin 1997, page 7, dans l’article Qu’est-ce qui modèle votre point de vue ? prétend apporter une réponse :

« La pornographie crée une dépendance et engendre une vision déformée de la sexualité. »

Comme l’évoque déjà brièvement le lexique au début de cet ouvrage, c’est effectivement la pornographie qui présente la pénétration comme une incontournable pratique amoureuse entre deux hommes. Très nombreux sont les homosexuels qui ne pratiquent pas la pénétration anale pour exprimer leur amour mutuel et bien plus nombreux sont les hétérosexuels qui, paradoxalement, la pratiquent ! Ne seraient-ce pas plutôt ces derniers qui seraient dans ce cas « contre-nature », dans le sens où le Collège central exploite cette expression ?