La vie qui file - Geneviève Steinling - E-Book

La vie qui file E-Book

Geneviève Steinling

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Beschreibung

Katia et Mathieu arrivent devant La Mort chacun dans une boite mais dans le même colis. Ils ignorent tout l'un de l'autre si ce n'est qu'elle s'est suicidée et qu'il est là par accident. Au moment de franchir l'ultime porte, La Vie stoppe La Mort car la Haute Autorité offre aux deux jeunes gens la possibilité de retourner parmi les vivants à la condition que le colis contienne les deux corps. Il veut vivre, elle veut mourir. Chacun tente de convaincre l'autre mais le temps presse car le fil qui les relie encore à leur propre vie se déroule à grande vitesse sur la bobine du temps et la bougie va bientôt s'éteindre. Une comédie étrange, drôle et profonde pour 2 F et 2 H qui traite de l'absurdité de la condition humaine.

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Seitenzahl: 63

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Je dédie cette pièce

à ceux et celles qui, un jour,

ont décidé de couper le fil de leur vie.

G. S.

« Le suicide n'est pas une lâcheté

comme le disent les prêcheurs qui exagèrent.

Ce n'est pas non plus un acte de courage.

C'est une lutte entre deux craintes.

Il y a suicide

quand la crainte de la vie l'emporte

sur la crainte de la mort. »

Victor Hugo (Philosophie prose, 1846:47)

Sommaire

UN SEUL DÉCOR

PERSONNAGES

Pièce en un seul acte

Bibliographie

UN SEUL DÉCOR

Lieu neutre.

Côté cour : une porte noire avec un grand M.

Côté jardin : une porte blanche avec un grand V.

Un ordinateur sur un pupitre.

Deux immenses cartons atypiques à l’image du couple (laissés à l’imagination de chacun), sont disposés devant une stèle avec inscription du prénom des protagonistes et date de naissance.

Une immense bobine est entourée d’un fil qui se déroule lentement. Dans le même temps, une grosse bougie se consume.

Pour renforcer la singularité de la situation, on jouera sur la lumière en choisissant plusieurs couleurs, qui inonderont à tour de rôle l’espace comme pour dessiner différents tableaux.

MUSIQUE(suggestions)

Au début : « La Danse Rituelle du Feu » (l’Amour Sorcier – El Amor Brujo) de Manuel de Falla.

Au final : « La Danse Macabre » de Camille de Saint-Saëns.

PERSONNAGES :

KATIA : Jeune femme naïve mais logique vêtue d’une longue tunique blanche qui lui couvre les pieds.

MATHIEU : Jeune cadre pragmatique vêtu d’une longue tunique blanche qui lui couvre les pieds.

LA VIE : Elle est belle, douce et maternelle tout en étant autoritaire avec La Mort. Elle est habillée de bleu et porte une couronne d’étoiles sur la tête.

LA MORT : Asexuée, emblématique, singulière, paradoxale, parfois effrayante ou drôle, elle est vêtue de noir et tient dans ses mains une paire de ciseaux disproportionnée.

La Vie et La Mort se chamaillent à l’image d’un vieux couple.

VOIX OFF :

- La mère de Mathieu.

- La mère de Katia.

- La meilleure amie de Katia.

Pièce en un seul acte

Sur scène : deux grands cartons atypiques.

Musique : début de « La Danse Rituelle du Feu » de Manuel de Falla.

Le rideau se lève et la lumière se fait progressivement pour devenir blanche, presque éblouissante.

La musique cesse.

Un temps de silence oppressant.

Un carton s’ouvre, Katia apparaît. La lumière l’éblouit. Elle se lève, découvre le lieu, regarde le carton de Mathieu.

KATIA : Mathieu… Mathieu …. Connais pas ! Mat, Mat. Mat, Mat, Mathieu … Non, connais pas ! (Elle essaie d’ouvrir le carton.) Ohé y a quelqu’un ? Ohé, ohé ! Ohé ! Répondez ! (Le carton bouge.)

Réaction contradictoire : Katia court se cacher à l’intérieur de son carton. Mathieu sort d’un bond, aveuglé par la lumière.

MATHIEU : Putain, ça fait mal aux yeux ! Où est-ce que je suis ? (La lumière se fait plus douce.)

Qu’est-ce que c’est que cette tenue ?

(Il aperçoit sa pierre tombale.) C’est mon nom… Et ma

photo ! C’est quoi, cette plaisanterie ?

(Il passe à côté de la bobine, la tourne d’un tour.) Bizarre.

Une bougie ! Allumée ! Bizarre.

(Il aperçoit le carton de Katia qu’elle a refermé, s’approche,

lit l’inscription.)

Katia.

Le carton de Katia s’ouvre brusquement.

KATIA :(Enjouée.) Présente !

Katia est assise mais reste dans la boîte.

Après l’effet de surprise…

MATHIEU : Ah ben, vous me rassurez, je ne suis

pas seul… Vous allez pouvoir m’expliquer à quoi rime cette mascarade…

KATIA : Mascarade ? (Calmement.) Non, je ne pense pas que ce soit une mascarade.

MATHIEU :(Énervé.) Si ce n’est pas une mascarade, expliquez-moi, j’aimerais comprendre.

KATIA : Comprendre quoi ?

MATHIEU : (Perdant patience.) Ça, c’est quoi ! C’est quoi tout ça ?

(Il marche à grands pas énervés.) Où sommes-nous ?

KATIA : Vous ne devinez pas ?

MATHIEU : Non.

KATIA : Moi, je crois savoir.

MATHIEU : Qu’est-ce que vous attendez pour me le dire ?

KATIA : Dois-je vraiment ?

MATHIEU : Vous commencez à m’agacer. D’abord, qui êtes-vous ? Il ne me semble pas vous connaître.

KATIA : C’est la première fois que je vous vois aussi. Faisons connaissance. Moi, c’est Katia.

MATHIEU : Je sais, votre prénom est inscrit ici. Moi, c’est Mathieu.

KATIA : Je sais, votre prénom est inscrit là.

MATHIEU :(Se radoucissant, comme à lui-même.) C’est quoi, cette blague ?

KATIA :(À voix basse.) Ce n’est pas une blague. (À voix haute.) Vous et moi sommes… Euh… Comment vous dire… Enfin, vous comprenez…

MATHIEU : Non. Sinon pourquoi je vous le demanderais ?

KATIA : Nous sommes… Bon, disons, nous sommes passés dans un autre monde.

MATHIEU : Je n’ai pas envie de rire.

KATIA : Moi non plus.

MATHIEU : Alors expliquez-moi pourquoi nous sommes là, qui nous y a emmenés et dans quel but.

KATIA : Je suis comme vous. Je découvre. Et j’en tire la conclusion que vous savez.

MATHIEU : Non, justement je ne sais pas mais cette ambiance sordide ne me dit rien qui vaille… Je m’en vais. Et vous feriez bien d’en faire autant. (Il essaie d’ouvrir la porte sur laquelle est marqué V.) C’est fermé à clé.

(Il essaie d’ouvrir la porte marquée d’un grand M.) Fermée à clé. Aussi. Et le M ? Sur cette porte-là ? À quoi correspond-t-il ? Merde ! Qu’est-ce qu’il veut dire ?

KATIA : M… M…. M comme …

(Elle rit.) M comme Mathieu.

MATHIEU : Vous n’avez pas l’air de percuter.

KATIA : Je plaisantais.

MATHIEU : Je ne peux ouvrir ni cette porte-là, ni celle-là. Vous savez ce que ça veut dire ?

KATIA : Oui.

MATHIEU :(énervé) Non vous ne savez pas ! Ça veut dire que nous sommes, vous et moi, enfermés dans ce lieu qui ne comporte aucune fenêtre.

KATIA : Pas la peine de vous mettre dans cet état. C’est normal qu’il n’y ait pas de fenêtre.

MATHIEU : Quand vous aurez fini de jouer aux devinettes, faites-moi signe !

Indifférente, elle se lève, regarde les stèles.

KATIA : Vous êtes né la même année que moi ! Comme c’est drôle, juste un jour avant moi.

MATHIEU : Je ne vois pas en quoi c’est drôle mais bon…

KATIA : Il manque la date de notre mort… Pour le coup ce sera la même pour vous et pour moi.

MATHIEU : Comment pouvez-vous le savoir ?

KATIA : Le M sur cette porte, il veut dire « mort ». Vous et moi sommes morts. Morts ! Ici et maintenant.

MATHIEU : Déduction idiote.

KATIA : Et pourquoi ?

MATHIEU : Parce que vous et moi parlons et tout le monde sait que les morts ne parlent pas.

KATIA : Ça, c’est ce qu’on nous a appris là-bas. Reconnaissez que personne ne l’a jamais vérifié.

Du bruit stressant. Regards interrogatifs.

La porte marquée M s’ouvre brusquement.

La Mort, majestueuse et atypique entre tenant en main une immense paire de ciseaux.

Katia et Mathieu ne semblent pas très rassurés.

LA MORT : Bientôt vous ne parlerez plus. (Elle s’avance, inspecte Mathieu et Katia.) Ils ont été corrects pour la livraison. Ils ont tenu les délais.

MATHIEU : Livraison ! Délai ! Qu’est-ce que ça signifie ? (Se reprenant.) Vous êtes qui, vous ?

LA MORT: Tu ne devines pas ?

MATHIEU : Non.

KATIA : Moi si… Euh… Enfin… Je crois savoir.

MATHIEU :(À La Mort.) C’est quoi, ce délire ?

La Mort vérifie ce qui est écrit sur les stèles et compare les photos qu’elle a en main avec les deux personnages.

LA MORT : Mathieu… Katia … La bougie est allumée… La bobine est bien là… Le fil tourne… Tout y est. (Un temps.) Toi, tu es Mathieu et elle… Katia. La marchandise est conforme.

MATHIEU : La marchandise !

(À Katia.) Vous êtes de la marchandise, je suis de la marchandise, nous sommes de la marchandise.

KATIA : Ils ou elles sont de la marchandise.

MATHIEU : Ça n’a pas l’air de vous déranger.

KATIA : Ben, c’est logique : nous sommes arrivés dans des cartons ! (Elle s’assied dans son carton.)

MATHIEU : Comme des bouquins, des fringues, des outils, des… du…

KATIA : … Du maquillage.

LA MORT :