Les fleurs - Victor du Bled - E-Book

Les fleurs E-Book

Victor du Bled

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"Filles de la nature et de l’homme", aimées de tous les âges, compagnes de la douleur et de la joie, de la vie et de la mort, inspiratrices éternelles d’idéal, confidentes de l’amour, interprètes de l’amitié et de l’harmonie, de la paix et du bon goût, les fleurs ne sont pas seulement, depuis les temps les plus reculés, chantées par les poètes, reproduites par les peintres, les sculpteurs et les architectes, — elles ont encore leurs arts propres, leurs sciences, leur histoire, leur économie politique, leurs industries, et jusqu’à leur langage : elles sont en état de perpétuel devenir, et se prêtent aux métamorphoses les plus inattendues. Pendant le 19è siècle surtout, les progrès accomplis dans la floriculture tiennent du miracle. Floralies, expositions, sociétés, congrès internationaux, médailles, décorations, revues, journaux, conférenciers, écrivains, rien ne manque à la gloire des fleurs, et c’est par centaines qu’on pourrait énumérer les volumes consacrés à la rose, au chrysanthème, à l’orchidée, comme c’est par milliers qu’on peut compter les personnes qu’elles enrichissent ou font vivre en France seulement. Chaque mois, presque chaque jour voit éclore une nouvelle variété, et sans cesse, du fond de l’Asie, de l’Amérique, de l’Afrique, surgissent de précieuses conquêtes, obtenues parfois au prix de sérieux dangers par de hardis explorateurs ; car la fleur a ses missionnaires, comme la religion, comme le patriotisme, comme l’or même...

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Seitenzahl: 62

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Les fleurs

 

 

 

 

Les fleurs

Filles de la nature et de l’homme

 

 

 

 

 

 

 

Victor du Bled, &al.

 

 

 

 

 

 

EHS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les fleurs

 

Qui vous donne, ô douces fleurs, Aux baisers de l’aube écloses, Qui vous donne vos couleurs, Marguerites, lis et roses ? Qui vous lace, le matin, Vos corsages de satin ?

Et vos robes nuancées Quelle main les a tissées ?  Quand le jour s’est rallumé, Quelle voix dit à l’aurore : « Sur mon peuple parfumé « Verse en perles ton amphore ? » Qui murmure au vent du soir, Quand le ciel devient plus noir : « Brise, avant que tu sommeilles, « Rafraîchis mes fleurs vermeilles ? »  C’est ta main, Seigneur, qui fit Les étoiles et les roses. C’est ta voix, Seigneur, qui dit : « Rayonnez, mes fleurs écloses. » Les joyaux de ton écrin Sont les fleurs, Dieu souverain, Sur la terre ou l’homme passe, Et les astres dans l’espace.

 

André Van Hasselt

 

 

Les fleurs

 

Filles de la nature et de l’homme, aimées de tous les âges, compagnes de la douleur et de la joie, de la vie et de la mort, inspiratrices éternelles d’idéal, confidentes de l’amour, interprètes de l’amitié et de l’harmonie, de la paix et du bon goût, les fleurs ne sont pas seulement, depuis les temps les plus reculés, chantées par les poètes, reproduites par les peintres, les sculpteurs et les architectes, — elles ont encore leurs arts propres, leurs sciences, leur histoire, leur économie politique, leurs industries, et jusqu’à leur langage : elles sont en état de perpétuel devenir, et se prêtent aux métamorphoses les plus inattendues. Pendant le XIXè siècle surtout, les progrès accomplis dans la floriculture tiennent du miracle. Floralies, expositions, sociétés, congrès internationaux, médailles, décorations, revues, journaux, conférenciers, écrivains, rien ne manque à la gloire des fleurs, et c’est par centaines qu’on pourrait énumérer les volumes consacrés à la rose, au chrysanthème, à l’orchidée, comme c’est par milliers qu’on peut compter les personnes qu’elles enrichissent ou font vivre en France seulement. Chaque mois, presque chaque jour voit éclore une nouvelle variété, et sans cesse, du fond de l’Asie, de l’Amérique, de l’Afrique, surgissent de précieuses conquêtes, obtenues parfois au prix de sérieux dangers par de hardis explorateurs ; car la fleur a ses missionnaires, comme la religion, comme le patriotisme, comme l’or même. Avouons-le aussi, elle a ses perfidies : telles fleurs tuent, empoisonnent, servent à préparer de violents toxiques. Et cette révolution florale se développe, pourrait-on dire, en progression géométrique, tandis qu’auparavant elle s’avançait lentement, en progression arithmétique. Mais ici le mieux n’est pas l’ennemi du bien, et il ne s’agit plus de remplacer quelques abus par d’autres, comme il arrive dans certaines révolutions politiques : on a vraiment gagné, on a créé, on a profité, travaillé pour l’agrément et l’intérêt du plus grand nombre ; et l’on continue, et tout indique que le mouvement ne s’arrêtera pas.

Révolution ou évolution, ce qui frappe d’abord, c’est son caractère d’universalité : jeunes et vieux, simples et raffinés, tous subissent le charme de beauté poétique qui se dégage de ces squares, serres, jardins publics, parcs, où s’épanouissent les fleurs et les arbustes les plus rares. La floriculture fait sortir l’argent de la bourse du riche, elle le met dans la poche de l’ouvrier, auquel elle contribue à faire comprendre la nécessité du luxe et de la civilisation. Si la France marche avec la Belgique à la tête du progrès horticole, les autres nations la suivent à pas de géants, et ce n’est plus seulement en Europe, c’est dans les autres parties du monde que cet intelligent enthousiasme suscite des concurrents ou des rivaux.

Par exemple, aux États-Unis, le secrétaire ou ministre de l’Agriculture adresse chaque année au président de la République un rapport général dont la publication coûte 1500000 francs. Ce département se partage en un certain nombre de divisions : la division de Botanique fait des recherches sur les productions végétales des États-Unis et des pays étrangers, leur application à l’économie rurale ; la division des Semences distribue 500000 francs de graines chaque année ; celle des Jardins et des terrains cultive en pleine terre ou sous verre un certain nombre d’arbustes indigènes ou exotiques, répand chaque année sur le territoire plus de cent mille plants d’utilité ou d’ornement ; l’Office des Stations d’expériences centralise les rapports que lui fournissent 400 inspecteurs des Stations expérimentales, les publie avec commentaires, dispose d’un crédit de 5 millions. Ces stations d’expériences sont annexées aux Collèges ou Écoles d’agriculture : il existe un ou deux collèges dans chaque État de l’Union ; on y vit sous le régime de l’égalité la plus absolue, sans aucune distinction de race ou de couleur entre les étudiants.

Ici comme partout, les Américains ont taillé en grand : aux fermes de légumes (truck farms), aux fermes de fleurs, jardins immenses autour des grandes villes (market gardens), correspondent une intense production fruitière, maraîchère et florale, des industries comme celle des conserves ; l’offre suffit à la demande, le producteur crée souvent le consommateur, et là aussi, le crédit, cette alchimie de la richesse, accomplit ses prodiges coutumiers ; le luxe, la vanité, quelques-uns des péchés capitaux, quelques vertus aussi, contribuent à cette prospérité. L’an dernier, un amateur payait 30000 dollars certain pied d’œillet, le seul de son espèce, et l’on assure que M. Vanderbilt, mariant une de ses filles, fit tapisser l’église tout entière d’orchidées, pour une somme de 500000 francs. Un seul spécialiste cultive 38 hectares de glaïeuls. Mme Henry Barroilhet, veuve d’un banquier français, possède une ferme consacrée à la culture des fleurs pour le marché de San-Francisco : chaque jour, elle expédie par milliers chrysanthèmes, bouquets de violettes, roses duchesses de Brabant : les bouquets de violettes se vendent 2 dollars et demi la douzaine.

D’après M. Charles Baltet, auteur d’un bon ouvrage sur l’Horticulture dans les cinq parties du monde, les États-Unis, en 1894, ne comptaient pas moins de 20000 établissements ou pépinières, exploités par un capital de 800 millions de francs, avec un personnel dépassant 200000 personnes, sans compter les boutiques des fleuristes. Le Central Park, à New York, occupe une superficie de 300 hectares ; Forest Park, à Saint-Louis, ne mesure pas moins de 550 hectares : créer des parcs paysagers, où les ondulations de terrains, gazons, arbres demeurent les principaux éléments de décoration, tel semble le but de leurs dessinateurs : très peu de massifs de fleurs, mais des perspectives ouvertes sur des prairies, sur des bouquets de bois et des lacs artificiels, afin d’obtenir le délassement de l’esprit et des yeux en sortant du brouhaha de la rue, la sensation exquise des lointains horizons, cette sensation comparable à celle d’un bain très frais pendant une brûlante journée d’été. Ce système triomphe pleinement à Buffalo, Chicago, Boston ; dans les deux premières villes, les parcs intérieurs sont réunis par une longue bande de boulevards ornés ; à Boston, tout se concentre en un immense parc intérieur. Les Américains sont le seul peuple qui ait déclaré Parc National un district tout entier, celui de Yellowstone, unique pour ses beautés naturelles, tandis que la France laisse saccager par l’industrie ou l’exploitation intensive de magnifiques paysages. Que dirait maintenant Delille, qui, au XVIIIè siècle, se plaignait déjà de ces destructions d’arbres séculaires ?

Ah ! songez que du temps ils sont le long ouvrage, Que tout votre or ne peut racheter leur ombrage!