Recto/verso - Florence de Neuville - E-Book

Recto/verso E-Book

Florence de Neuville

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Beschreibung

Années 2020/2021 : Emilie, préparatrice en pharmacie, d’une nature foncièrement positive, et Sébastien, professeur de sport au caractère narcissique, deux personnalités opposées, se trouvent confrontés à la pandémie du Covid, l’une dans le travail et l’autre dans le confinement. Leurs émotions et réactions se croisent, se heurtent, donnant naissance à une histoire captivante. Comment feront-ils face à cette épreuve et survivront-ils ? Découvrez un roman mêlant espoir, désespoir, amour et humour.

 À PROPOS DE L'AUTRICE

Florence de Neuville, docteur en pharmacie, se consacre à la démystification de tout ce qu’elle a lu, appris et expérimenté dans le domaine du développement personnel. Son objectif est d’offrir à tous, à travers ses écrits, des ressources pour leur épanouissement et leur compréhension du monde, alors que nous entrons dans cette nouvelle ère spirituelle.

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Florence de Neuville

Recto/verso

Roman

© Lys Bleu Éditions – Florence de Neuville

ISBN : 979-10-422-2092-1

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.

Il faut désinstaller et réinstaller 2020

Parce que je pense qu’il y a un virus.

Soldat inconnu de la guerre de 2020

Préface

Recto

D’aussi loin qu’il m’en souvienne, je voulais être infirmière.

Mais pas n’importe quelle infirmière : une infirmière de guerre.

Mais lorsque ma mère m’a dit que pour exercer ce métier il fallait que j’apprenne à faire les piqûres sur moi, ma vocation s’est aussitôt transformée en une autre : je serai préparatrice en pharmacie.

Je vendrai des médicaments, cela sera moins douloureux !

Verso

J’ai toujours été hyperactif, je ne tiens pas en place.

Un peu, parce que c’est ma nature et beaucoup, parce que cela me permet de ne pas trop penser au manque affectif que me procure ma relation chaotique avec la personne qui m’aime et d’une manière générale, avec toute forme de relation affective.

Heureusement, j’ai un travail que j’adore, je suis professeur de sport. Ce qui me permet de bien gagner ma vie et de me dépenser autant que je veux à des heures impossibles.

Je suis maître de ma vie et j’adore être maître de celle des autres.

Recto 1

Qu’est-ce qu’on était contents le 31 décembre… à fêter l’arrivée de cette année de merde !

Appelé clairvoyant

1er janvier 2020

J’ai passé une merveilleuse soirée.

Un de mes meilleurs réveillons.

Il faut dire que cette année j’ai pris les devants car c’est moi qui ai lancé les invitations. Au moins, j’étais certaine de ne pas veiller seule devant ma télévision ou de m’ennuyer dans une de ces soirées où tout le monde est en couple.

Aussi, j’étais certaine de passer un bon moment avec des invités triés sur le volet et un menu choisi précautionneusement : chacun amènerait un plat que j’avais listé.

Il faut dire que j’étais partie de la pharmacie à dix-huit heures et que je recevais à vingt et une heures. Autrement dit, je n’aurais jamais eu le temps de tout préparer moi-même !

Table et décoration mises la veille au soir, une maman aux fourneaux toute la journée pour m’aider, avant de repartir retrouver le reste de la famille, sono commandée et réceptionnée l’avant-veille… Tout serait prêt à temps.

Sauf moi !

Pourquoi faut-il que les gens ne lisent pas complètement leurs messages ?

Comment se fait-il que les invités arrivent une demi-heure avant l’heure convenue alors que l’on est encore sous la douche ?

Mis à part cela, la soirée fut parfaite : trop de nourriture mais parfaite.

Enfin, presque parfaite car un invité, cher à mon cœur a décliné l’invitation sous prétexte qu’il était déjà pris.

Cependant, je suis entourée d’amis que j’aime, je reçois plein de SMS, les échanges de vœux sont chaleureux, tout est fait en sorte pour que j’accueille cette nouvelle année dans la joie et je sens qu’elle sera obligatoirement merveilleuse.

2020

Ça résonne plutôt bien.

Deux fois 20.

Ça ne peut être qu’une bonne année.

Moi je me dis que d’après la numérologie, une année 4 ne peut être qu’une année studieuse et très matérialiste certes, mais c’est aussi le chiffre de la réalisation concrète !

Et puis, en résumé, mon horoscope de l’année s’annonce bon car je devrais avoir le soutien de la planète Jupiter qui m’aidera à aboutir dans mes démarches, même si en tant que troisième décan de mon signe zodiacal, on m’annonce que mes projets seront freinés de mai à septembre. On me parle tout de même deux fois d’aboutissement dans mes projets et je prends donc cela pour un signe favorable !

Cela tombe bien car j’ai l’intention de les lancer dès maintenant.

Cela devrait être aussi une année de profonde réflexion sur le plan affectif et il paraît que je ne me lancerai pas à la légère. Tout ça, toujours d’après l’astrologie, science que j’admire.

Je m’appelle Emilie et je suis célibataire.

La pharmacie où je travaille se situe dans un quartier du Cannet et j’habite à Cannes depuis maintenant trois ans.

J’ai trente-deux ans et on dit de moi que je suis jolie et élégante. C’est vrai que j’adore faire les boutiques et dénicher de nouveaux vêtements.

Je fais cela au moins un week-end sur deux.

J’adore me promener rue d’Antibes et dans le quartier du Suquet ou encore le long de la croisette, quand j’en trouve le temps car je travaille beaucoup.

Mais cette année, je croise les doigts car je voudrais vraiment trouver le grand amour.

Le véritable grand amour !

Enfin, de vous à moi je crois bien l’avoir trouvé et j’attends juste en retour d’être certaine que ce soit réciproque.

J’y place beaucoup d’espoir.

Verso 1

Je m’appelle Sébastien en vrai et Roméo dans mes rêves les plus fous. J’ai trente-neuf ans et je cultive un genre « homme très viril » qui n’est pas fait pour me déplaire. Je n’aime que les femmes et cela se voit immédiatement.

Quoique !

Mes amis me surnomment « le piège à femmes mariées » et ils ont raison. Cela dit, de vous à moi, j’aurais préféré n’attirer que des femmes libres. Ma vie aurait été certainement plus simple. Mais pour cela, je suppose qu’il aurait fallu que je consulte.

Et j’ai horreur de me remettre en question. Cela serait de toute façon trop long et trop compliqué. Je préfère cultiver le semblant de confiance en soi et je ne me laisse jamais trahir par mes émotions. Cela peut dérouter certaines personnes mais cela me confère une force que je n’aurais peut-être pas, sans ce stratagème. Remarquez, je n’ai jamais trop eu à me forcer, c’est assez naturel chez moi.

Cela dit, j’aurais peut-être dû le faire la première fois que j’ai jeté mon dévolu sur une de mes élèves qui est malheureusement pour moi, tombée rapidement enceinte de son mari alors que nous vivions une idylle passionnante. Cela m’aurait certainement aidé !

En attendant que ses enfants ne grandissent et qu’elle ne me retrouve, je vis une histoire compliquée avec une autre de mes élèves qui n’est pas libre non plus mais qui n’a pas d’enfant.

Et puis j’ai plusieurs autres élèves qui me déclarent à tour de rôle leurs flammes et comme je suis quelqu’un de serviable et de compréhensif, au lieu de les envoyer bouler, je les prends sous ma protection et je deviens leur bon copain. En fait, j’ai un véritable harem et je n’en suis pas peu fier !

Un vrai tombeur, je vous dis.

Pourtant, je n’ai rien d’exceptionnel physiquement. Je ne suis ni grand ni élancé : juste un garçon avec beaucoup de caractère et de grands yeux verts perçants.

Malgré toutes mes connaissances, aucune n’est libre ce soir, enfin si, mais elles ne m’intéressent pas plus que ça, et aucune invitation ne m’a tenté, alors je vais passer le réveillon avec mes vieux parents.

De toute façon, j’ai toujours détesté faire la fête ce soir-là car je déteste qu’on me dise quand faire la fête.

Ou faire quoique ce soit, en règle générale.

Recto 2

J’ai voulu faire comme en Italie chanter à ma fenêtre. Je vais recommencer demain pour avoir la deuxième pantoufle.

Bleu en faction

12 janvier 2020

L’Organisation mondiale de la santé publie un bulletin faisant état de 41 cas d’infection virale en Chine, à Wuhan exactement. Il s’agit en majorité de gens fréquentant le marché de poissons et fruits de mer.

« Un idiot a mangé une chauve-souris infestée… Quelle bande d’imbéciles, ces Chinois », entend-on à droite et à gauche.

« Il paraît qu’il s’agit désormais d’une épidémie et que les premiers cas ont été déclarés en fait depuis mi-décembre », lit-on par ci et par là.

« Pauvres gens », pensais-je, en apprenant que ce virus inconnu peut provoquer des troubles graves chez certains patients. Mais je suis soulagée de voir qu’il ne se transmet pas rapidement.

Comme beaucoup de mes compatriotes, je ne m’inquiète pas beaucoup car la Chine est un pays bien lointain.

Et puis, je suis en plein préparatif pour mon anniversaire.

Je veux m’offrir le plus beau des anniversaires même si ce n’est pas pour fêter mes vingt, trente ou quarante ans. Ce n’est pas un compte rond mais cela n’a aucune importance !

Je décide d’organiser cette fête dans un restaurant que je connais bien, pour y avoir déjà passé de charmantes soirées karaokés. J’adore chanter et dès que je le peux, je m’évade en chansons.

Quoi de plus merveilleux pour moi que de réunir les gens que j’aime, dans un endroit que j’apprécie, avec un DJ qui anime des soirées super sympas !

Je ne pense qu’à cela pendant des jours et regarde d’un œil distrait les journaux qui parlent de coronavirus.

« Voyons, coronavirus : famille de virus provoquant des infections respiratoires chez l’homme et l’animal qui peuvent aller du simple rhume au syndrome respiratoire aigu. Bon, on va encore avoir une grippe style H1N1, pensais-je distraitement. Il va falloir que je dise à ma patronne d’acheter du gel hydroalcoolique pour la pharmacie au cas où cela arriverait jusqu’à nous, afin de ne pas nous faire avoir comme la dernière fois. »

Ma soirée anniversaire est encore plus réussie que mon réveillon du jour de l’an.

Tous les gens que j’aime le plus sont présents, à quelques exceptions près.

Pour la première fois depuis que j’ai fêté mes vingt ans, je suis la star de la soirée.

Le DJ que je paye cher me fait chanter plus que d’habitude, partageant ainsi des duos émouvants avec mes amies préférées.

Mes larmes coulent lorsque certaines d’entre elles chantent une chanson qu’elles ont parodiée spécialement pour moi. J’en ai toujours rêvé !

Mon meilleur ami, Valentin m’offre un magnifique bracelet que je décide de ne plus quitter. De toute façon, le fermoir est tellement difficile à enlever que seule, je n’y arrive pas. Il n’a pas pu attendre le dessert pour me l’offrir et me l’a mis lui-même au poignet.

Mon professeur de gym préféré, pour qui je nourris des sentiments secrets, seulement divulgués à Val et à une lointaine amie, est venu partager le gâteau avec nous et chante même un duo avec moi, son bras serré contre le mien, m’offrant par la même occasion un cours particulier à utiliser quand bon me semble, en guise de cadeau d’anniversaire. Je rêve d’un cours très particulier qui n’a rien à voir avec la gymnastique !

On danse, on mange, on rit, on me gâte, je pleure de joie, de rire et je chante, je chante. Mes amis m’offrent au moment du dessert un micro professionnel, cadeau commun.

Mon bonheur est à son paroxysme.

Je commence l’année merveilleusement bien et je viens d’avoir 33 ans.

Je savais bien que 2020 serait une belle année, même si je feins d’ignorer le message de l’amie d’une amie qui habite en Chine et qui nous dit de nous préparer à ce que l’épidémie de coronavirus arrive chez nous ; que l’on ne nous dit pas la vérité, que c’est bien plus grave que ce que l’on veut bien nous dire et que des gens meurent à tour de bras rendant les médecins impuissants et en complet désarroi.

Mais rien ni personne ne viendra gâcher ce début d’année qui commence si bien.

Verso 2

Afin de faire plaisir à une de mes élèves, je suis allé à son anniversaire.

Quelque chose d’indéfinissable m’attire vers elle, sans que je ne puisse me l’expliquer. Est-ce son air malheureux dès que je l’ignore un peu ou au contraire sa gaieté, son espièglerie dont je n’arrive pas à me passer, sans compter sa bienveillance dont je me nourris ?

Je n’arrive pas à comprendre comment les gens sont attirés par moi, tout particulièrement lorsque je cesse de les regarder. Mais c’est un système qui fonctionne bien et qui me convient parfaitement.

Jamais personne ne m’a aussi bien traité qu’elle. Il a même fallu que je la freine, car je commençais à crouler sous les cadeaux et à en être gêné. De plus, la personne qui partage à moitié ma vie commence à avoir des doutes sur la provenance de ces nouvelles choses qui arrivent dans mon appartement.

Le problème, c’est que cela a été un tout ou rien auquel je ne suis pas habitué, cela étant ma façon à moi d’agir d’habitude. En effet, maintenant, non seulement nous ne communiquons plus comme avant mais je n’ai plus eu droit à ses délicates attentions, depuis bien longtemps. Mais après tout, c’est sa faute car même si je n’ai pas répondu à ses avances, je sais qu’elle est toujours très amoureuse de moi. Bon ça, c’est ma tactique pour les faire craquer et ça a l’air de bien marcher avec elle.

J’adore, en temps normal, souffler le chaud et le froid. Ça m’excite et cela marche à tous les coups. Je suis certain qu’elle ne tiendra pas longtemps à ce petit jeu car c’est ma spécialité à moi !

Comme les autres, je ne veux pas la faire sortir de ma vie. Peut-être parce qu’elle est tout simplement mon élève, qu’elle est aussi belle que sexy et qu’elle me met en valeur ? Ou bien est-ce son côté naïf et innocent qui me plaît bien ?

Je ne sais pas trop. Je crois que c’est les deux ! De toute façon, cela n’a pas vraiment d’importance. Je suis, en fait, irrésistible. C’est ça la vérité.

Mes autres amies ne l’aiment pas car elles ont vu en elle une rivale potentielle. Je m’en amuse un peu et avoue jouer un double jeu qui n’arrange que moi.

Les informations dont je m’abreuve, afin de me sentir suffisamment cultivé et érudit, malgré mon manque de diplômes, font état d’un virus de la famille des coronas qui sévit en Chine depuis plus d’un mois mais qui tuerait moins que la grippe. Je vais suivre cela d’un œil seulement, étant d’une nature quelque peu alarmiste.

Cependant, ma curiosité et mon inquiétude s’éveillent lorsque j’apprends que la Chine prend des mesures de confinement dans la province du Hubei et que plus de cinquante-neuf millions de personnes sont ainsi recluses, sans communication possible avec l’extérieur, les moyens de transport internes étant bloqués.

Internes mais pas externes.

Ce qui n’est pas fait pour me rassurer mais les médias, quant à eux, se veulent optimistes, en nous indiquant que le risque d’importation du virus depuis Wuhan est quasi nul et que le risque de propagation dans la population, est donc très faible.

Preuve en est que les aéroports fonctionnent normalement.

Tout va bien.

Nous sommes le 26 janvier 2020.

Recto 3

La rivière ne coule jamais vers l’arrière. Elle va toujours en avant. Vis comme la rivière. Oublie ton passé et concentre-toi sur ton avenir. Le meilleur est à venir.

Guerrier de lumière

Février 2020

Le 16 février 2020, les autorités de la province chinoise du Hubei ont renforcé la quarantaine en confinant totalement la population et en suspendant définitivement tout moyen de transport.

Le dépistage est mis en place et le gouvernement sépare les malades, des très malades et des non atteints.

Je commence un peu à les plaindre en me demandant ce qu’ils vont bien pouvoir manger, si rien ne peut, ni entrer ni sortir de chez eux.

Je m’apprête à suggérer de commander des masques et du gel hydroalcoolique (GHA) à ma vieille patronne que je considère un peu comme ma maman et qui ne semble pas voir le danger arriver. Même mes amis se moquent de moi en me traitant d’alarmiste pessimiste, moi qui suis la personne la plus positive que je connaisse.

Je me trouve juste prévoyante.

Cela dit, j’espère que mes amis ont raison car si cette bestiole arrive jusqu’à nous, cela devrait être terrible.

Alors je pense à autre chose : je pense à lui.

Il occupe toutes mes pensées sans que je ne puisse y faire quoi que ce soit.

Cependant, j’écoute les conseils, d’une de mes rares amies dans la confidence, qui m’a suggéré de me faire désirer en ne donnant aucune nouvelle par SMS, et en l’ignorant chaque fois que j’ai cours avec lui.

Elle n’imagine même pas la torture que cela représente pour moi !

Mais je dois bien avouer que cela a l’air de fonctionner car il me semble que Sébastien (Seb comme j’aime l’appeler) revient toujours vers moi en me sollicitant par téléphone et en venant rejoindre la conversation que j’ai, lorsque je suis avec une tierce personne. On croirait presque qu’il est jaloux !

Si seulement je pouvais retrouver la complicité que j’avais avec lui l’année dernière, avant que je ne vienne tout gâcher par mon impatience impondérée, le brusquant, en l’obligeant à faire un choix qu’il n’avait peut-être pas envie de faire !

Ah, si je pouvais revenir en arrière et tout recommencer !

Aurai-je un jour la chance de reprendre là où ça allait bien ? Une seconde chance en quelques sortes.

J’écoute sur YouTube des tireuses de tarot qui m’assurent qu’un évènement va se produire, une sorte de force de l’univers qui va permettre de donner un nouvel élan à mes espoirs et à mes rêves.

Quoi ?

Je n’en sais rien.

Et le temps est ce qu’il est, il ne coule que dans un sens. On ne peut défaire ce qui a été fait.

À moins que…

Verso 3

Mes cours me prennent beaucoup de temps.

J’en donne dans des salles, à la solde des mairies, ou encore à domicile, en groupe ou en privé.

Je suis tellement fatigué le soir quand je rentre, que j’en oublie ma solitude, la femme qui me manque et qui devrait être à mes côtés.

Mon téléphone est mon meilleur ami et je ne m’en sépare jamais car Elisa m’envoie beaucoup de textos coquins auxquels je ne m’empresse jamais de répondre. Même si je suis dans une quasi-situation de dépendance avec elle et bien que je sache pertinemment que cela doit cesser, je ne sais pas et ne veux pas savoir comment faire. C’est la première fois que cela m’arrive : les rôles sont inversés. Jamais personne n’a été aussi autoritaire avec moi, peut-être est-ce le fait qu’elle manie la psychologie avec perfection ? Je n’en sais rien, mais cela m’intrigue.

Lorsque le manque ou l’énervement se font trop pesants, je vais courir le long de la plage, sur la croisette, en attendant les soirées qu’elle daigne passer avec moi. Elle a le don de me faire mettre en colère.

J’espace les échanges que j’ai avec mes autres élèves ne voulant pas les bercer de trop d’illusion, mais ma solitude est parfois telle, que j’avoue être bien content de les avoir à mes côtés.

Heureusement que j’ai Salomé qui arrive dès que je siffle.

Emilie, quant à elle, est persuadée qu’une guerre bactériologique est en cours et elle me fait sourire malgré moi lorsqu’elle appelle ce virus le « coronamerdus ». Cette femme est pleine d’humour !

Et comme elle travaille en pharmacie, j’écoute quand même un peu ses conseils : sait-on jamais !

Et puis une connaissance dans le milieu médical, c’est toujours utile de nos jours.

Recto 4

Si j’avais su début mars que ce serait la dernière fois que j’irais au restaurant, j’aurais pris un dessert !

Pionnière gourmande

Début mars 2020

Mon mois de mars s’annonce torride et j’adore ça !

Mon horoscope général m’annonce que la planète Mars va me galvaniser et que je n’aurai peur de rien, tandis que Vénus va faire de l’amour, du plaisir et de mon épanouissement personnel une véritable priorité, et ce, à partir du 6.

J’adore !

J’ai fait la connaissance d’un coach de vie qui en plus du sport d’entretien que je pratique déjà avec Seb, va m’apprendre à travers la pratique du yoga, entre autres, à mieux m’aimer, à savoir qui je suis vraiment et peut être à me couper de cet état de dépendance affective que j’entretiens avec mon professeur, depuis l’année dernière.

Je devrais commencer fin mars, dès que nous serons d’accord sur les jours et j’avoue que j’ai hâte de me reprendre en main. De plus, j’ai toujours rêvé d’avoir un coach et tout l’argent que je mets de côté servira à le payer afin que personne ne sache le travail que j’effectue !

Bon, de toute façon, personne ne vient mettre le nez dans mes affaires, malheureusement !

Tant pis pour le shopping, je vivrai sur mes acquis !

Ensuite, j’ai un rendez-vous programmé le dimanche 8 mars avec deux de mes meilleures amies où nous allons apprendre à nous servir d’un pendule. Oui, cette petite chose qui répond à toutes les questions qu’on peut se poser et Dieu sait s’il y en a beaucoup que je me pose !

Comme chaque mois, je m’informe sur les positions astrales de la lune afin de préparer mes méditations et de m’attarder sur mes intentions à travailler.

La pleine lune du 9 mars semble nous présenter deux thématiques qui se résument ainsi : « ilfaudra essayer d’y voir clair et faire preuve de discernement au milieu de grandes vagues émotionnelles collectives qui vont nous traverser et nos relations seront boostées à condition de laisser dernière nous nos blessures qui nous empêchent de vivre ce que l’on souhaite. »

Mais alors que je vais à mon cours pendulaire, Valentin, m’appelle pour me dire qu’il est malade, avec beaucoup de fièvre, de la toux et une grande fatigue depuis quelques jours. Cependant, il me rassure vite, face à mon inquiétude, en me disant qu’il commence à peine à reprendre des forces et que ce n’est donc pas la peine de passer le voir.

Je suis partagée entre l’appréhension que ce soit le « coronamerdus » dont on commence de plus en plus à parler et dont on ignore tout, et la satisfaction de voir qu’il commence à aller mieux et donc qu’ainsi il a développé des anticorps qui le préserveraient de la suite, s’il devait y en avoir une.

Cela dit, je suis contente de ne pas avoir à passer chez lui car je ne veux pas prendre le risque d’être infectée à mon tour.

Je surveille à distance, de façon bijournalière, ses moindres écarts de température et toux suspectes mais continue à vivre comme si de rien n’était. Ce n’est pas de ma faute si je m’attache beaucoup aux gens que j’aime, et lui est comme le frère que je n’ai jamais eu. Alors, je le bichonne.

Cet inconscient est allé s’acheter la voiture décapotable de ses rêves alors qu’il était encore malade et que les frontières deviennent sensibles, depuis que l’Italie a commencé à recenser des cas dans le nord du pays.

Et le nord du pays n’est pas si loin du sud du pays où nous habitons.

Je le vois arriver fort heureusement le dimanche soir en bonne santé mais épuisé.

Comme dans mes rêves les plus lointains, je l’aperçois dans une magnifique voiture décapotable, celle qui ressemble à mes désirs les plus fous et que je me promets d’avoir un jour.

— Tu viendras draguer avec moi ? me nargue-t-il.

Le timing me paraît déplacé mais je suis contente tout de même pour lui.

— Avec plaisir, bien que je n’aie pas besoin de draguer !

— Ah oui, et bien justement, tu devrais aller draguer quelqu’un de plus intéressant !

Valentin n’aime pas mon Roméo et je n’arrive pas à comprendre pourquoi. Bien qu’entre nous il n’y ait jamais eu aucune ambiguïté, je le soupçonne d’être un peu jaloux.

Je le trouve encore un peu pâle et fatigué et le lui dis.

Fort heureusement, mon ami est entre de bonnes mains (sa mère est infirmière) mais je lui conseille quand même de rester au repos afin que son état s’améliore de jour en jour, jusqu’à être parfaitement guéri pour notre départ à Paris le 13. En effet, à l’occasion du congrès annuel des pharmaciens, j’aime monter chaque année à la place de ma titulaire qui me donne ses invitations.

J’en profite toujours pour aller dans les meilleures brasseries de la capitale et faire une orgie de pièces de théâtre. Mais comme je déteste y aller seule, Valentin se sacrifie à chaque fois pour venir avec moi. Je lui offre chaque année l’hôtel et quelques restaurants en échange de sa bienveillante compagnie. C’est toujours pour nous, un grand moment de bonheur et de partage où nous en profitons pour parler de nos amours éplorées.

Cependant, quelques jours avant le départ, le gouvernement annonce que tous les rassemblements de milliers de personnes seront annulés. Je décide quand même de partir malgré l’annulation dudit congrès, car tout est déjà payé et réservé et ma virée shopping dans la capitale est quelque chose à laquelle je tiens beaucoup !

J’ai mes petites boutiques attitrées et un rituel est un rituel !

Tout en surveillant toujours du coin de l’œil l’état de santé de mon ami, je me régale de ma visite au musée éphémère sur l’impressionnisme, qui sera en fait la dernière autorisée car tout ferme au fur et à mesure, derrière notre passage.

Je commence un peu à regretter d’être montée à Paris, la crainte m’envahissant, mais je décide quand même d’aller faire les boutiques et je découvre en effet des pièces rares soldées à bon prix par des magasins qui nous disent ne pas être certains d’être encore ouverts lundi prochain. J’ai l’impression de jouer un rôle dans un mauvais film.

Le théâtre où nous devions aller pour la soirée nous annonce fermer ses portes et l’hôtel qui nous reçoit compte, en tout et pour tout, cinq vaillants clients.

L’atmosphère est étrange mais les rues sont pleines de monde et les transports en commun fonctionnent.

Je me vexe quand une copine qui habite la capitale refuse de nous recevoir comme convenu, le samedi soir, ayant appris que Val avait été malade et je me fâche quand dans le bus un vieil homme éternue sans prendre aucune précaution, envoyant à la dérobade ses postillons éventuellement contaminés.

Naturellement, je raconte tout ça au fur et à mesure à mon Seb qui répond de temps à autre à mes SMS, ce qui me met en joie. Le tout sous le regard réprobateur de Valentin. Il n’est pas bête et sait pertinemment que j’aurais préféré être avec cet autre homme que lui à Paris, mais il a la délicatesse de ne rien en dire.

Partout dans les médias, on commence à parler de distance de sécurité à respecter et de gestes barrière à apprendre tels que : bien tousser ou éternuer dans sa manche à défaut de mouchoir.

Nous évitons le métro et nous commençons de plus en plus à regretter d’être là alors que nous aurions été plus en sécurité dans nos domiciles respectifs.

Et si notre avion, prévu ce dimanche 15, était annulé ?

J’ai dans mon sac des masques que nous avons commencé à vendre aux plus prévoyants ou peureux de nos clients, mais j’ai tellement l’air ridicule en les portant, que je garde mon écharpe sur la bouche à chaque fois que je croise quelqu’un, ce qui me donne, sûrement, un air encore plus débile.

Mais je ne veux pas être la seule avec un masque, même si le ridicule ne tue pas.

Je dégaine mon gel hydroalcoolique à chaque fois que mes gants touchent quelque chose, si bien que je ne suis pas certaine qu’il m’en restera en rentrant et que mes gants résisteront à ce traitement.

De mon lit à Paris, puisque toutes les activités ont été annulées, je commande par drive mes courses que j’irai chercher dimanche soir en rentrant à Cannes.

Les médias commencent à m’affoler et je n’ai pas envie de trouver les magasins vides en revenant chez moi. De plus, je ne veux pas avoir le moindre contact avec des étrangers qui sont peut-être porteurs sains.

Une heure auparavant, nous avons dîné dans le dernier restaurant ouvert, apprenant au même moment qu’ils avaient tous reçu l’ordre de fermer, à partir de minuit ce samedi 14 mars.

La peur commence à me prendre aux tripes et une nausée remonte lorsque j’apprends que l’Italie, pays frontalier, compte déjà 24 000 cas et pas loin de 1500 morts.

Val n’a plus de fièvre mais chaque petite toux ou expectoration de sa part ou de la mienne devient suspecte et nous nous demandons s’il ne faudrait pas porter le masque en permanence.

Je vois arriver le dimanche 15 mars avec un profond soulagement et nous choisissons de regagner l’aéroport en taxi, trois heures en avance, masque sur le visage.

Après tout, nous ne sommes plus les seuls et en cas de vie ou de mort, le ridicule ne tue plus.

Dans l’avion, un couple de personnes âgées ne cesse de tousser et la colère monte à nouveau en moi. La carlingue est remplie à bloc et si ces deux-là ont le « coronamerdus » c’est pratiquement tous les passagers et le personnel qui sont contaminés.

Trop heureuse de retrouver ma ville natale, je me jure de rester bien sage à la maison pour les jours qui viennent.

Je passe chercher mes courses au drive, mais en revanche, je n’irai pas voter pour les municipales, bien que j’aie envie de changer de maire. Rien ne m’exaspère plus que les propos contradictoires des hommes politiques : restez à la maison mais allez voter !

Demain, je me renseignerai un peu plus sur ce virus mystèrieux !

Verso 4

Les beaux jours commencent enfin à poindre tout doucement le bout de leur nez, en ce début de mois de mars.

La nature sent déjà le printemps qui s’annonce peut-être en avance cette année, et moi j’ai décidé de déménager.

Comment changer de vie si je reste toujours dans ce petit appartement que je partage depuis peu avec un chat ? Bête que je suis allé chercher chez une amie qui venait d’avoir une portée dont elle ne savait pas quoi faire.

J’ai choisi une femelle que je ferai stériliser dès que ce sera le moment car j’envisage de me trouver une maison avec jardin. Je rêve de pouvoir déjeuner dehors, donner des cours à l’air libre et voir ma nouvelle colocataire poilue, aller et venir à sa guise. L’avantage avec les animaux, c’est qu’ils ne vous contrarient jamais et sont toujours affectueux et fidèles. C’est moins compliqué qu’avec les humains !

Mon seul problème pour acheter est le budget, car étant seul, je ne peux pas monter très haut en gamme et les prix dans la région sont inversement proportionnels à la surface habitable. Un peu comme à Paris peut-être.

Ma chatte, que j’ai appelée « Tigresse » en rapport à son magnifique pelage, m’aide à apaiser la frayeur qui est en train de m’envahir au fur et à mesure que j’écoute les médias et que personne ne doit découvrir.

Mon élève préparatrice en pharmacie m’a proposé du gel désinfectant et des masques que j’ai volontiers acceptés.

Elle est venue me les apporter dans un magnifique cabriolet conduit par un de ses amis que je déteste et dont elle me parle depuis que je la connais. Je sais qu’elle est folle de moi et j’ai fait semblant, tant bien que mal, d’y mettre le holà à chaque fois que j’ai pu. Mais j’avoue que j’aime bien sa présence et sa bonne humeur. Elle me fait rire et puis aller faire un tour avec cette jolie femme dans la belle voiture, que veut lui prêter son ami débile efféminé, ne se refuse pas. Frimer un peu n’a jamais fait de mal à personne.

Dès que nous le pourrons et dès que les beaux jours viendront, nous irons rire comme des fous sur la croisette. Enfin, comme des fous, avec elle, ce sera avec modération tout de même, car on pourrait nous voir.

Et je ne veux pas qu’on me voit avec qui que ce soit, de façon trop courante.

On ira juste « se la péter, » comme elle aime le dire !

Je ne la comprends pas toujours car elle a à la fois un côté « sûre d’elle », quand elle prédit quelque chose ou parle de son métier et d’un autre, un manque total de confiance dans tous les autres domaines. Mais, c’est cela que j’aime bien.

J’adore ressentir les failles des gens. Je crois bien que c’est d’ailleurs devenu une de mes spécialités. Et j’aime bien appuyer dessus, car j’ai remarqué que cela me donne un certain pouvoir, ce qui n’est pas fait pour me déplaire. Je suis le spécialiste de la découverte du point faible des autres.

En attendant, je vais aller exercer mon devoir de patriote : je vais aller voter.

Par contre, j’irai un peu tard car je ne veux croiser que le minimum de monde afin de prendre le moins de risques possible, même s’ils ont pris des précautions particulières telles que : « venez avec un masque, gardez un mètre de distance entre vous et prenez un stylo différent chaque fois ».

Merde, cela fait un peu peur, non ?

Moi qui ai tendance à paniquer un peu vite, tout cela n’est pas bon pour moi.

Mais, chut, personne ne doit le savoir.

Recto 5

Vos grands-parents ont été appelés pour la guerre, vous êtes appelés à rester dans vos canapés, courage, vous pouvez le faire !

Sentinelle en observation

Lundi 16 mars 2020

Toutes les écoles, les crèches, les lycées et les facultés ferment.

Les enfants sont des éventuels porteurs sains.

Ils sont ravis, moi inquiète.

Tous les masques et le peu de gel qu’on avait reçus se sont vendus en une journée.

Les gens, qui s’étaient moqués de moi, le mois dernier, n’ont pas osé m’en réclamer, alors je leur en ai proposé avant de ne plus en avoir.

Naturellement, Sébastien est la première personne que j’ai livrée.

Mon week-end à Paris a un arrière-goût de dernier week-end de liberté, mais il a eu l’avantage de me rapprocher de lui, car nous avons échangé plus de messages en trois jours que depuis les six derniers mois.

Je sens la peur monter d’un cran de part et d’autre et j’ai appris, par voix officieuse, qu’un confinement devrait être mis en place rapidement.

Comme en Italie.

De plus, le président de la République doit parler ce soir à la télévision.

Cela ne présage rien de bon.

Les hôpitaux de l’est de la France hurlent le même discours que celui que j’avais entendu des Chinois fin janvier : pas assez de lits, pas assez de moyens, pas assez de respirateurs, des morts à la pelle. Tout cela à cause du rassemblement religieux qu’il y a eu à Mulhouse, il y a peu de temps !

Au même moment, mon collègue de travail nous annonce qu’il a perdu sa belle-mère pendant que j’étais à Paris et qu’il souhaite prendre les trois jours auxquels il a droit : mercredi, jeudi et vendredi qui arrivent.

La pharmacie est noire de monde quand la jeune apprentie nous annonce quant à elle, qu’elle ne sait pas comment faire garder sa fille de deux ans et demi et qu’elle ne viendra pas la semaine prochaine.

Une profonde angoisse commence à monter.

Comment allons-nous faire pour tenir la pharmacie seulement ma patronne et moi alors que de plus en plus de monde y pénètre ?