Un amour de statue - Valérie Lys - E-Book

Un amour de statue E-Book

Valérie Lys

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Beschreibung

Suite à l'assassinat d'une diva aux Thermes de Perros-Guirec, l'enquête est confiée au commissaire Velcro, tandis qu'une autre affaire est confiée à sa collègue Déborah. Ils décident alors de faire équipe.

Une diva est assassinée aux Thermes marins de Perros-Guirec.
Le commissaire Velcro, qui vient de rejoindre la P. J. de Rennes, est dépêché sur les lieux. Heureuse surprise pour lui, Déborah, une collègue qu’il apprécie particulièrement, est elle aussi missionnée dans le département car un acte de vandalisme a été commis sur le site de la Vallée des Saints à Carnoët.
Ils décident donc de mutualiser leurs compétences afin de résoudre ces deux affaires au plus vite. Si la gentillesse de la diva fait l’unanimité, certains témoignages surprennent Velcro et l’enquête promet d’être difficile.
Quel lien entre le meurtre de la diva et la destruction de la statue ? Il semblerait que ce soit l’art car voilà que Céline et Stravinsky s’invitent à leur tour dans le jeu pour brouiller encore un peu plus les cartes tandis que le commissaire se découvre des liens avec Kundera lors de son installation à Rennes.
Le contexte de leurs investigations est décidément inhabituel et il faudra le flair de Velcro et la subtilité de Déborah pour démêler cet étrange imbroglio…

Deux enquêtes, sans lien apparent, mais qui semblent étroitement liées... Accompagnez le commissaire Velcro et Déborah dans cette aventure aux multiples rebondissements !

EXTRAIT

Alors que nous conversions de banalités, j’aperçus, collée sur le bar, une affiche annonçant le concert d’Éva Myla.
Le patron suivit mon regard.
— Le concert est annulé, Monsieur. D’ailleurs, il faut que je retire l’affiche.
— Oui, certainement.
L’homme me regarda, surpris.
— Vous êtes au courant ? Il paraît qu’elle a été retrouvée morte aujourd’hui à la thalasso.
— Je l’ai entendu dire.
Il s’approcha de moi et susurra :
— Il y a même des bruits qui courent, comme quoi elle aurait été assassinée.
— Ah, vous croyez qu’elle aurait pu être tuée ?
— Comme on dit, il n’y a pas de fumée sans feu.
— Sagesse populaire, en effet.
Le patron avait perdu toute sa rigidité professionnelle. L’excitation malsaine du bavardage morbide s’était emparée de lui. Sans aucune retenue, il continua :
— Vous savez, Monsieur, ici, on la connaissait bien. C’était une habituée.
— Ah oui ?
— Elle était charmante, polie, discrète. À chaque fois qu’elle venait, elle laissait un pourboire généreux aux serveurs. Jamais un mot plus haut que l’autre. Et puis…
De nouveau, il s’approcha de mon oreille et sur le mode de la confidence, il rajouta :
— Elle ne lésinait pas sur la carte, sur le vin ni même sur les digestifs parfois. C’était une très bonne cliente, si vous voyez ce que je veux dire…
— Je crois que je comprends bien. Vous allez donc beaucoup la regretter, elle et ses notes.
— Notes de musique et notes de restaurant.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

De la fantaisie de l'ingéniosité dans ce roman policier breton que l'on adopte dès les premières lignes. - Laure M., Happy Manda Passions

À PROPOS DE L'AUTEUR

Née dans le Val de Marne, Valérie Lys, est médecin biologiste et vit dans les environs de Rennes depuis une vingtaine d’années. Elle y dirige un laboratoire d’Analyses Médicales. Elle est aussi expert en réparation juridique et dommage corporel.
Mariée, mère de trois enfants, passionnée de peinture et de littérature, elle écrit depuis l’enfance : théâtre, nouvelles fantastiques, polars… Ses multiples voyages sont une source d’inspiration.
Elle est membre fondateur et vice-présidente du collectif rennais CALIBRE 35, dont le but est de dynamiser la scène rennaise de l’édition polar.

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Couverture

Page de titre

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CE LIVRE EST UN ROMAN.

Un amour de statue

Accoudé au balcon du 28ème étage de la tour emblématique des Horizons, je contemplais Rennes. Monde de Lilliputiens bruyant et animé. Tout au nord pointaient les huit tours du quartier de Maurepas dressées tels des dominos géants, tandis qu’à l’extrême sud, la barre du Blosne jouait aux fortifications. Face à moi, le centre-ville m’offrait le chapeau d’ardoises vertes de l’opéra, la verrue oblique et noire du planétarium de la bibliothèque des Champs Libres ou encore l’épaisse toison sombre du parc du Thabor. Tel Gulliver, il me suffisait de tendre l’index pour m’amuser à bousculer le sommet de l’antenne-relais de Cesson-Sévigné, écraser le puzzle de verre de la future gare ou bien chatouiller le nez lumineux du Couvent des Jacobins.

Les Lilliputiens, tels des robots stupides, déambulaient sur les trottoirs gris, conduisaient leurs petits véhicules colorés ou étaient aspirés par la bouche goulue du centre commercial d’en bas.

Le ciel rougeoyant de cette fin de journée de juin embrasait tout. Rennes donnait l’impression de revivre l’incendie de l’hiver 1720 qui l’avait ravagée quelques siècles plus tôt. Le toit du Parlement de Bretagne, jaloux, s’enflammait lui aussi comme pour rappeler son propre drame, datant maintenant de plus de vingt ans.

C’était magnifique. J’en oubliais les courbatures qui me traversaient les trapèzes, les rhomboïdes et bien d’autres muscles dont j’ignorais les noms mais dont je pouvais, ce soir, confirmer l’existence. Toute la journée, j’avais déballé des cartons, monté des meubles, reconstitué des étagères. J’avais toujours eu horreur de déménager, mais la récompense était là. Finis les trajets depuis la capitale, oubliés les moments interminables loin de ma bulle de survie. Adieu Paris.

— La ville la plus moche, mais vraiment moche.

Je sursautai. Je me croyais seul au sommet de mon Olympe mais au-dessus de moi, une voix humaine venait de briser l’enchantement. Qui pouvait bien critiquer de cette sorte ma nouvelle ville ?

Je me retournai, m’appuyai le dos contre la balustrade et penchai ma tête en arrière pour apercevoir les étages supérieurs. Un homme me fixait, accoudé tout comme moi, deux étages plus haut. 30ème et dernier étage. Je ne pouvais apercevoir que le haut.de son corps. Il paraissait vieux, sec et chauve. Ses yeux, telles des billes noires perdues au fond d’un cratère desséché, oscillaient dans un mouvement alternatif, lent et régulier, de l’horizon à mon regard. Ses doigts accrochés à la rambarde étaient hérissés d’ongles jaunes et courbes. Quelques cheveux épars et trop longs flottaient autour de son visage pointu et raviné par les ans. Il portait une veste noire d’un autre temps et je crus même apercevoir un nœud papillon sous son cou décharné. Il tenait plus du vautour que de l’humain. Je m’attendais presque à le voir prendre son envol, mais il restait là, immobile. Au bout de quelques instants, ses yeux cessèrent leurs mouvements périodiques et il se mit à me fixer sans broncher. Malgré l’aspect peu avenant du personnage, il ne s’en dégageait, à la vérité, aucune animosité particulière.

« Vraiment moche », c’est ce qu’il disait.

— Que voulez-vous dire, de qui parlez-vous ? lui criai-je, énervé par son entêtement.

Il ne parut pas comprendre ma question car il se pencha davantage et mit ses mains en cornet derrière ses oreilles. Je répétai un peu plus fort. Pour toute réponse, je n’obtins qu’un haussement d’épaules accompagné d’une moue de dégoût illustrant à la perfection le côté « moche » que la ville lui inspirait. Je m’apprêtai à répéter ma question, mais l’homme.se repoussa en arrière et disparut de mon champ de vision. J’entendis le claquement sec de la baie vitrée. Charmant voisin, à n’en pas douter ! Il m’en fallait davantage pour entacher ma joie d’immigré breton.

Commissaire à la PJ de Paris, j’avais été appelé plusieurs fois dans la capitale bretonne pour apporter de l’aide à mes collègues rennais. À chaque fois, c’était avec regret que je retournais vers la capitale. Alors, j’avais fini par sauter le pas. Il avait suffi de trois mois pour que ma mutation soit acceptée. Pour avoir été catapulté à plusieurs reprises à l’Hôtel de police de Rennes, je connaissais déjà une bonne partie de l’équipe de la police judiciaire. Il ne me faudrait pas longtemps pour prendre mes nouvelles marques.

Le jour avait finalement décidé de filer. Je rentrai à mon tour. L’appartement était agréable. Une grande pièce principale avec sa cuisine américaine, une chambre lumineuse et surtout une vaste terrasse, véritable pièce de vie pendant la période estivale. J’avais déballé avec précaution ma trompette et ma clarinette qui trônaient maintenant sur le canapé. Je m’y affalai avec délectation et fermai les yeux. Ma femme devait me rejoindre le lendemain. J’étais un homme heureux. Tout était fin prêt pour que je puisse commencer ma nouvelle vie.

La cloche de l’école d’en face sonnait 8 heures 30 lorsque je posai mes fesses derrière mon bureau. L’Hôtel de police grouillait déjà et le brouhaha rassurant de cette fourmilière en uniforme m’envahit. Je reconnus certains officiers. Nous nous saluâmes sans plus de façons. Je faisais déjà partie des meubles.

— Salut Velcro !

Le commissaire Delcourt, géant bedonnant et sans âge, venait de pénétrer dans la pièce. Il ne savait pas frapper aux portes ni tenir sa langue, mais sa vitalité et la largeur de ses paluches m’avaient plu dès nos premières enquêtes communes.

— Bonjour, commissaire Delcourt.

Je me levai et lui tendis la main, mais Delcourt avait toujours considéré toutes ces manifestations de politesse comme une perte de temps et une pure hypocrisie, aussi ne fus-je ni surpris ni vexé de voir ma main rester orpheline. Sans illusion, elle se replia d’ailleurs rapidement dans ma poche.

— Content que vous soyez enfin des nôtres, Velcro, d’autant que votre première affaire bretonne vous attend. Je viens d’avoir un coup de fil du commissariat de Perros-Guirec. Ils ont retrouvé un corps au centre de thalassothérapie de la plage du Trestraou. Rien n’a encore été touché. On y va immédiatement. Allez, en route !

On ne pouvait pas dire que le commissaire Delcourt s’encombrait de palabres inutiles. J’aimais cette efficacité et son côté « rentre-dedans » qui ne lui faisait pas que des amis. J’enfilai ma veste et nous quittâmes le commissariat. Malgré sa carrure imposante, Delcourt se déplaçait aussi vite qu’une étoile filante. Il dévala les escaliers, rejoignit le parking à grandes enjambées puis s’engouffra dans un véhicule banalisé. Sa ceinture était bouclée et le moteur vrombissait déjà alors que j’ouvrais seulement ma portière. L’air breton devait décidément être vivifiant.

— Vous êtes bien installé, Velcro ? Pas trop de difficultés pour trouver un logement ?

— En plein centre. Aux Horizons, avec une vue imprenable.

— Veinard ! Vous êtes à deux pas du commissariat, c’est commode. Vous pourrez tout faire à pied.

Je l’observai du coin de l’œil. Son crâne chauve était sec comme une boule de cricket. Des bretelles d’un autre temps plissaient sur ses cuisses.

— Vous trouvez que Rennes est une belle ville, commissaire Delcourt ?

— Un peu qu’elle est belle, notre ville, Velcro ! Qui oserait dire le contraire ?

— Justement, un de mes voisins du dessus n’a pas l’air de l’apprécier beaucoup.

— Alors, je vous conseille de ne pas l’inviter à votre crémaillère.

Il partit d’un gros rire. Sa bedaine tressautait sur ses cuisses, tendant ses bretelles comme un bilboquet hystérique.

Le trajet se déroula sans encombre. La côte était magnifique et l’arrivée à Perros-Guirec par les hauteurs de la ville offrait un spectacle à couper le souffle. Tout en bas, la plage s’offrait à notre regard, demi-lune bordée des fameux rochers de granite rose. Le site était connu pour la beauté de ses Sept-Îles, réserve naturelle où s’ébattaient fous de Bassan, macareux-moines, cormorans, guillemots de Troil ou encore fulmars boréaux, sous l’œil attentif de quelques pingouins et phoques nageant autour de ces îles aux lignes arrondies.

Le bâtiment trônait face à la mer depuis les années 1920. Delcourt m’apprit qu’il n’avait été transformé en centre de thalassothérapie que bien plus tard, prenant alors le nom de « Thermes Marins ». Majestueux souvenir de la présence anglaise sur cette côte, sa large baie vitrée au plafond gigantesque lui donnait un style typiquement British qu’adorait la côte bretonne et qui se mariait à la perfection avec les propriétés accrochées aux crêtes abruptes du chemin des Douaniers. À peine sorti de la voiture, j’admirai la belle façade de l’établissement. Je fus transporté deux siècles en arrière. Je m’attendais à voir passer une vieille De Dion-Bouton, appuyé sur le pommeau de ma canne d’ébène, une montre à gousset dans la poche de mon gilet trois-pièces et un binocle plissant mes narines poudrées. Je respirai profondément. Comment pouvait-on commettre un crime dans un lieu aussi éloigné des agitations mesquines et envahissantes du XXIe siècle ?

Nous poussâmes une large porte à tourniquet. Une odeur iodée nous enveloppa aussitôt. L’entrée de la thalassothérapie se trouvait juste à notre droite. Pas étonnant d’être plongé, à peine la porte franchie, dans l’univers du massage, des bains et des boues aux vertus thérapeutiques ou simplement relaxantes. Un escalier nous faisait face. Arrivé à un palier, il se divisait en deux volées, en se donnant un petit air d’escalier d’Opéra pour nous emmener jusqu’au hall central. La baie vitrée nous faisait face. La mer pénétrait presque dans la pièce tant la vue était dégagée. Un salon de cuir occupait l’espace central, un piano l’un des coins, l’accueil un autre. Une large porte vitrée à deux battants s’ouvrait sur la salle de restaurant qui s’étendait sur toute la longueur de la baie. Une impression de sérénité se dégageait de ce lieu unique. Quelques ombres en peignoir et claquettes blancs déambulaient dans le couloir menant aux chambres. Pas de bruit, pas de bousculade. Nous avions l’impression de nous déplacer dans de la ouate, dans un autre espace-temps.

— Bonjour, Messieurs, puis-je vous être utile ?

Delcourt se dirigea déjà vers l’hôtesse qui s’était adressée à nous.

— Commissaires Velcro et Delcourt. Nous sommes attendus par les hommes de la PJ de Perros-Guirec qui doivent déjà être dans vos murs.

Tout en parlant, il lui mit sa carte sous le nez. Sans un mot de plus, la femme contourna son bureau et nous demanda de la suivre. La thalassothérapie se situait bien au rez-de-chaussée. Nous retrouvâmes l’odeur marine et, affublés à notre tour des nu-pieds obligatoires pour accéder aux soins, nous débouchâmes sur la piscine. L’ambiance y était tout autre. Des rubans jaunes délimitant le pourtour du bassin avaient été mis en place et des techniciens scientifiques occupaient tout l’espace. Je souris malgré moi en constatant qu’eux aussi portaient les claquettes officielles. Curieux androïdes aux corps boudinés dans une tunique plastifiée stérile et affublés de sandales de plage.

Au centre de la piscine flottait une sorte de nénuphar d’un rouge flamboyant. À son sommet, les cheveux de la femme — car il s’agissait bien d’un corps féminin — formaient comme une corolle noire. Elle flottait, irréelle et tellement calme. Les techniciens nous avaient attendus et commençaient maintenant à la hisser sur le bord. Le nénuphar se replia sur lui-même pour ne laisser finalement apparaître qu’un corps longiligne habillé d’une longue robe de soirée moirée, rouge.

Nous nous approchâmes de la victime. Ses traits livides et flétris par le bain prolongé laissaient néanmoins apercevoir une bouche bien dessinée et de longs cils recourbés. Ses bras longs et minces se concluaient sur des mains aux doigts interminables et aux ongles irréprochables. Curieusement et malgré son état, il se dégageait de cette femme beaucoup de féminité. La longue robe collée au corps le révélait avec pudeur. La silhouette était fine mais sans maigreur. Une large plaie à l’arrière du crâne d’où suintaient encore quelques gouttes rosées, ne laissait aucun doute sur la cause de la mort. Delcourt et moi-même étions penchés sur le cadavre lorsque des cris accompagnés de pas précipités nous firent sursauter.

Une jeune femme accourait et, malgré les officiers qui tentaient de l’arrêter, elle réussit à se faufiler jusqu’au corps. Nous nous relevâmes et fîmes obstacle à une avancée plus audacieuse.

— Calmez-vous, Madame ! tonna Delcourt.

Le corps imposant du commissaire se colla contre celui de la femme, qui se trouva dans l’impossibilité de faire un pas de plus.

— Je veux la voir, s’il vous plaît. C’était mon amie. Laissez-moi la voir, implora-t-elle.

— Je veux bien que vous l’approchiez, mais à la condition que vous ne la touchiez pas, Madame.

Delcourt avait l’art des deals. La jeune femme parut réfléchir quelques instants puis hocha la tête en guise d’acquiescement. Delcourt s’écarta.

Elle se pencha sur le corps. Des larmes coulaient sur ses joues. Ses doigts dessinèrent le contour du visage sans pour autant l’effleurer.

Nous la laissâmes quelques instants reprendre ses esprits. Accroupie, elle nous regarda finalement tour à tour. Les larmes inondaient maintenant son visage.

— Vous allez retrouver son assassin, n’est-ce pas ? nous supplia-t-elle.

— Pourquoi pensez-vous qu’elle a été assassinée, Madame… ?

Elle se releva brusquement puis tendit la main à mon collègue.

— Excusez-moi, Messieurs. Je suis sous le choc. Je m’appelle Marie Pedron. Je suis esthéticienne et je travaille aux Thermes depuis plus de dix ans. Éva, enfin madame Myla, était une cliente régulière. Elle venait tous les mois depuis mes débuts ici avec une régularité d’horloge suisse. Vous comprenez, une cantatrice professionnelle se doit d’avoir des mains impeccables et un teint au-dessus de tout soupçon.

Nous l’écoutions sans broncher. C’était une jeune femme d’une trentaine d’années de type méditerranéen. Deux épaisses nattes flottaient sur de magnifiques épaules, preuve que les massages aux algues et aux boues marines avaient aussi la vertu de muscler les deltoïdes. Ses yeux noisette nous fixaient sans ciller.

Le regard de Delcourt était rivé sur ses claquettes. Il avait gardé ses chaussettes, ce qui lui donnait un air de moine parti en goguette à la plage. Les circonstances auraient été différentes, j’aurais ri de bon cœur, mais là…

Delcourt restant muet, je m’approchai de la jeune femme et posai ma main sur son épaule pour la mettre en confiance.

— Vous avez des raisons de croire qu’il s’agit d’un meurtre, Madame ?

Un vent de panique souffla sur les prunelles brunes de l’esthéticienne.

— Non, aucune, Commissaire, mais de voir toute cette police, là, et elle, noyée, avec du sang plein la tête… Je ne sais pas. J’ai tout de suite imaginé qu’elle avait été tuée.

— Vous lui connaissiez des ennemis ?

— Non, aucun. Elle était admirée de tous. C’était une diva. Elle voyageait dans le monde entier. Elle devait chanter ce soir pour un concert de bienfaisance. Vous voyez, elle avait bon cœur, bien que ce fût une grande dame.

— C’est donc pour cela qu’elle porte une robe de soirée ?

La jeune femme se tourna vers le corps comme pour vérifier sa réponse.

— Oui, elle venait souvent avant ses concerts. Ce soir, je lui avais fait son soin comme d’habitude. Cela la relaxait avant de monter sur scène. Je pense d’ailleurs qu’elle venait autant pour les soins que pour nos papotages. Nous nous entendions comme deux copines de collège toutes les deux.

— Elle vous a paru être comme d’habitude ?

— Oui, absolument. Je n’ai rien remarqué de particulier. Elle était toujours tendue avant les représentations. Pourtant, elle en a fait, des grandes salles de concert, vous pouvez me croire, Commissaire ! Qu’est-ce qu’elle a pu me raconter ! Mais elle était si respectueuse de son public, quel qu’il soit, qu’elle se donnait à fond, même pour un gala de bienfaisance.

— C’était une véritable artiste, conclus-je, abondant dans son sens.

— Exactement, Commissaire. Je pensais qu’elle était partie. Elle avait mis sa tenue de concert pour gagner du temps. Elle s’habillait souvent ici lorsqu’elle jouait dans une salle à proximité. Elle disait que c’était plus commode que dans les loges minuscules de certains lieux de spectacle.

Pendant que la jeune femme parlait, nous vîmes le corps prendre le chemin de la housse plastique habituelle. Seule la flaque rosée, imperturbable, continua à ruisseler le long des joints du carrelage de la piscine.

Éva Myla, ce nom m’était familier. Amateur de musique classique, je croisais souvent son nom sur des pochettes de CD ou dans des magazines spécialisés. Elle avait en effet une réputation internationale et son registre de voix en faisait pâlir plus d’une. À ce niveau de performance, la concurrence était féroce, les enjeux majeurs et l’élimination par une rivale était donc à envisager.

Delcourt se grattait consciencieusement le crâne. Reste d’un temps néandertalien et chevelu.

— Pauvre femme ! Elle avait l’air d’être si belle…

En effet, elle l’était. Je me souvenais de son air calme, de ses yeux marron glacé et de ses cheveux de jais ondulant autour d’un visage ovale à la forme parfaite. Je l’avais vue au Théâtre du Châtelet, elle portait ce soir-là une magnifique robe noire près du corps, toute en dentelle, au décolleté plongeant qui laissait deviner une peau lisse et régulière comme une coquille d’œuf. Le début des seins tendait l’étoffe sans aucune vulgarité. Debout, les jambes légèrement écartées, le dos droit et les bras tendus vers l’assistance, elle était d’une élégance qui tenait du miracle. Ses doigts flottaient au-dessus de la partition, des trémolos émouvants libérant les larmes du public, un son de voix bouleversant. Pourtant, le chant lyrique n’était pas mon art préféré. Habituellement, je le trouvais trop artificiel, trop loin de la vérité mais là, c’était de toute beauté.

— Fauchée en pleine gloire…

Delcourt me dévisagea.

— Ah oui ?

Je lui racontai alors ma brève rencontre avec la musicienne. Ses yeux s’écarquillaient de plus en plus.

— Vous m’en direz tant, Velcro ! Je ne vous aurais jamais imaginé amateur de musique classique au point d’aller à des concerts.

Il n’attendait aucune réponse de ma part.

La piscine se vidait progressivement de ses occupants. Bientôt, nous nous retrouvâmes seuls tous les trois, Delcourt, l’esthéticienne qui n’osait pas bouger et moi-même. Tous les trois en claquettes blanches, trois pantins ridicules partis chacun dans des univers parallèles. Le silence avait envahi la vaste pièce quand, brusquement, nous vîmes apparaître un visage qui m’était familier.

— Déborah ! m’éxclamai-je.

— Commissaire Velcro, quel plaisir de vous retrouver !

J’avais rencontré Déborah lors de l’une de mes enquêtes précédentes en Bretagne. Je devais reconnaître qu’elle avait joué un rôle non négligeable dans ma décision de venir m’installer définitivement à Rennes. Elle avait été d’une aide précieuse et son caractère m’avait séduit. Sa silhouette aussi, il fallait bien l’admettre. Sa silhouette fine, ses cheveux blonds frôlant ses larges épaules dans un carré impeccable et son regard bleu sombre lui conféraient une distinction froide qui me plaisait au plus haut point. Il avait été convenu qu’elle serait mon bras droit lorsque son emploi du temps à la PJ le lui permettrait. La voir arriver alors que je ne m’y attendais pas me transporta donc de joie.

Elle avait réussi à échapper aux nu-pieds. Elle portait toujours des talons hauts et le contraste entre ses jambes élégantes et nos pieds avachis de curistes aurait déridé un croque-mort en plein burn-out.

Machinalement, je me redressai, tentai de rentrer mon ventre de plus en plus épanoui, passai ma main dans une mèche de moins en moins rebelle. Puis, ajustant mes lunettes et caressant négligemment ma barbiche rousse, je feignis l’indifférence tout en la dévorant des yeux.

— Désolée, je comptais arriver en même temps que vous mais j’ai été appelée pour une affaire de la plus haute importance.

Le ton ironique de sa voix tranchait avec l’air solennel et mystérieux de son regard intelligent.

— Une autre disparition ? questionna mon collègue.

— Non, pire ! Un massacre.

Un sourire avait germé au coin de sa bouche et des pétales blancs apparurent entre ses lèvres entrouvertes.

— Je reviens de la Vallée des Saints de Carnoët, tout près d’ici. Là-bas, il y a une colline qui se prend pour une Île de Pâques bretonne du troisième millénaire. Elle est hérissée d’énormes statues de granite. Plusieurs tonnes chacune. Toutes de saints bretons. Dans la nuit, l’une d’elles a été vandalisée. C’est un des sculpteurs qui l’a découvert en arrivant ce matin.

— Si je comprends bien, on vous dérange pour un acte banal de délinquance ?

— C’est tout à fait ça. Comme je connais un peu l’officier de Perros et que je savais que vous veniez ici, j’en ai profité pour aller voir de mes propres yeux.

— J’espère au moins qu’elle vaut le déplacement, cette statue ?

— J’avoue qu’elle est très étonnante. Toutes les œuvres d’art sont censées représenter un saint breton, mais celle-là représente deux hommes qui s’enlacent. Curieux pour des saints, non ?

— J’ignorais qu’il y avait des saints gays en Bretagne !

C’était Delcourt qui, muet jusqu’à présent, n’avait pu s’empêcher de s’esclaffer. Dès que la religion s’invitait dans la conversation, un attrait irrépressible s’emparait de lui. Une histoire qui datait de son passé d’enfant de chœur probablement.

Déborah était visiblement satisfaite de son petit effet. Elle ajouta :

— Ce parc existe déjà depuis un certain temps, il y a plus d’une centaine de statues. Les artistes les réalisent en bas de la colline. En fait, c’est plutôt impressionnant. Il paraît qu’il y a même un Ankou.

— Un Ankou ?

C’est le serviteur de la mort en Bretagne, un squelette armé d’une faux montée à l’envers dont il se servait pour collecter les âmes. Il se promenait la nuit avec sa charrette. Celui qui entendait grincer ses essieux savait que son heure avait sonné…

— C’est gai !

— Comme mes deux hommes qui se bécotent, rajouta Déborah.

Delcourt émit un grognement qui pouvait autant signifier son approbation que son désaccord.

Les lèvres de Déborah se refermèrent dans une moue faussement vexée. Elle se rapprocha du commissaire et lui susurra à l’oreille :

— Vous n’avez pas envie de livrer votre âme à l’Ankou, Commissaire ?

Je me sentis brusquement un peu à l’écart et je n’aimais pas ça.

— Bien, si nous pouvions revenir à nos moutons, s’il vous plaît. Je vous rappelle que nous avons une affaire de meurtre à élucider et ça ne va pas se faire tout seul.

— OK, Chef !

Depuis l’arrivée de Déborah, Marie Pedron n’avait pas bougé. Elle assistait en silence à notre discussion tout en suivant des yeux le corps plastifié de son amie quittant l’établissement. Je m’empressai de la présenter à Déborah.

— Vous aussi, vous aimez la musique classique ? lui demanda Déborah, gênée de s’être laissée aller à un humour déplacé dans un tel moment.

— Avant de connaître Éva, je n’y connaissais rien et puis à force de parler avec elle, d’imaginer ses concerts tant les récits qu’elle m’en faisait étaient magnifiques, j’ai commencé à en écouter un peu. Au début, Éva me conseillait, elle me faisait découvrir des œuvres faciles, connues du grand public, vous savez ces morceaux qui vous tirent des larmes et vous bouleversent en vous transportant ailleurs. Puis, tout doucement, elle m’a expliqué des œuvres plus intimistes, me les a décortiquées, des chefs-d’œuvre dont je n’aurais même pas soupçonné l’existence. Elle me faisait remarquer des passages en apparence anodins, les moments les plus difficiles, la note à ne pas rater, le dièse impossible ou le simple soupir qui vous soulève le cœur d’une émotion indescriptible. Un simple petit soupir, une toute petite virgule de rien du tout qu’un néophyte ne remarquerait même pas sur la portée et qui, pourtant, a un effet tellement magique ! Vous savez, Commissaire, je suis née dans une famille où la seule musique que l’on écoutait, c’était les flonflons du 14 juillet et l’accordéon d’Yvette Horner. Je l’écoutais sans l’interrompre.

Elle avait besoin de s’épancher après le choc qu’elle venait de subir.

— Vous lui connaissiez des amis ? De la famille ? lui demandai-je au bout d’un moment.

— J’ai croisé quelquefois son époux. Un homme d’une soixantaine d’années, pas très sympathique d’ailleurs. Philippe, je crois. Je ne sais pas ce qu’il fait dans la vie. Éva m’en parlait assez peu. Je ne pourrais pas vous dire s’ils formaient un couple uni.

— Vous savez où nous pouvons le trouver ? Il va falloir que nous lui annoncions la nouvelle.

— Pauvre homme !

— Un téléphone pour le joindre ?

— Oui, Éva me l’avait donné un jour. Il doit être dans mon calepin qui est dans mon casier. Donnez-moi une minute, Commissaire. Je vais le chercher et je reviens tout de suite.

— Prenez votre temps.

Marie Pedron disparut dans le hall. Pas très maligne mais sympathique fille et qui pourrait peut-être nous être d’une grande aide.

— C’est curieux, elle parle de sa cliente comme si elle en était amoureuse. Vous croyez qu’elles étaient amantes ?

Delcourt avait l’art d’interpréter à sa sauce des situations pourtant logiques et cohérentes. Je me demandais souvent comment pouvait bien être fait son cerveau ; son autopsie nous révélerait certainement bien des surprises. Déborah devait se poser la même question.

— Quelle curieuse idée, Commissaire ! Vous avez devant vous une jeune fille à la corticalité vite saturée et qui a eu accès au paradis de la musique classique grâce à une rencontre improbable. Il est normal qu’elle soit en admiration devant sa génitrice artistique.

— Si vous l’exprimez comme cela, Déborah, alors je m’incline.

Delcourt amorça une révérence du plus grand comique, vite interrompue par le retour de l’esthéticienne.

La jeune femme tenait serré un petit calepin rouge. Son pouce coincé entre deux feuilles montrait qu’elle avait visiblement retrouvé les coordonnées du mari de la victime.

À peine en possession du numéro, Delcourt fila pour annoncer la mauvaise nouvelle à celui-ci.

— Quant à nous, nous allons rendre une petite visite au directeur de l’établissement. Je trouve qu’il est bien discret cet homme-là, rajoutai-je à l’attention de ma collègue.

Les couloirs sentaient les algues et les embruns. Les murs blancs hésitaient entre ceux d’un bloc opératoire et ceux du paradis, ce qui n’était d’ailleurs peut-être pas si éloigné que cela. Je retrouvai avec plaisir mes mocassins et m’assis bientôt dans le bureau de monsieur Busso, le directeur, comme me l’apprit la plaque accrochée sur sa porte. Peu de femmes devaient lui résister. Cheveux noirs, regard bleu de husky et des dents d’une blancheur alpine. C’était le genre d’homme à gérer plusieurs affaires importantes de front, aussi n’y allai-je pas par quatre chemins.

— Vous ne paraissez pas très perturbé par ce qui se passe dans votre établissement, je me trompe ?

— Bien évidemment, je suis bouleversé, mais je ne serais d’aucune utilité au bord de la piscine. Je ne ferais que gêner vos hommes, et puis la mort me fait peur, je préfère me terrer dans mon bureau.

— Je comprends. Nous sommes désolés de vous prendre de votre temps mais nous pensons que madame Myla a été assassinée.

Le directeur ne broncha pas. L’annonce d’un meurtre dans son établissement ne parut pas l’émouvoir. Tout au plus se redressa-t-il légèrement, puis il toussota et nous regarda plus fixement.

— Assassinée, je ne comprends pas. Tout le monde l’aimait ici. Pourquoi l’éliminer ? C’est ridicule !

— En effet, le personnel que nous avons rencontré confirme qu’elle était très appréciée. Il n’empêche que, d’après les premières investigations de notre légiste, une chute l’aurait précipitée de face dans l’eau mais la plaie qu’elle porte à la nuque a été faite par un objet contondant.

Déborah n’avait pas bougé. Elle fixait le directeur, figé comme un insecte pris au piège, les pattes collées sur du papier tue-mouches. Seuls ses doigts s’agitaient en jouant négligemment avec un trombone. Attitude classique du type qui cache mal son désarroi. Il ne portait pas d’alliance, ce qui ne m’étonnait guère de la part d’un tel homme.

— Vous connaissiez bien madame Myla ?

— Comme toutes les bonnes clientes, et du fait de sa renommée aussi. Elle était une belle publicité pour notre établissement. Tout le monde la chouchoutait, mais comme je viens de vous le dire, ce n’était pas difficile car c’était une personne charmante.

— Vous connaissiez son époux ?

— Non, jamais vu.

— Vous ne lui connaissiez pas de problèmes, elle ne vous avait parlé de rien, récemment ?

— Non, elle était comme d’habitude. Belle et sereine. Une artiste accomplie.

— Elle ne vous était pas indifférente, dirait-on… intervint Déborah.

Monsieur Busso avait repris le contrôle du beau mâle en action.

Le petit sourire plein de sous-entendus qu’il lança à Déborah ne suffit néanmoins pas à la déstabiliser. Je connaissais bien le répondant de ma nouvelle collaboratrice. Il lui en fallait bien davantage pour perdre le contrôle.

Ils se toisèrent quelques secondes, puis l’homme rompit le silence :

— Ce sont les femmes qui ne sont pas indifférentes à mon égard et non l’inverse, Madame…

— Appelez-moi Déborah, cela évitera les politesses fastidieuses.

Je n’en revenais pas ! La Déborah froide et hautaine que je connaissais lui mangeait déjà dans la main. Il avait suffi de quelques minutes pour que la femme qui se tenait à côté de moi rougisse et se dandine sur sa chaise comme une jeune oie devant un jars en rut.

Sur ces entrefaites, j’estimai que la conversation avait assez duré. Je pourrais revenir seul un autre jour, lorsque l’enquête aurait avancé. Nous saluâmes le directeur qui nous raccompagna jusqu’à la porte de son établissement. Il serra chaleureusement la main de Déborah, très chaleureusement même. Il effleura à peine la mienne mais prit le temps de me souffler à l’oreille un « À qui sait attendre… » qui faillit me faire sortir de mes gonds.

— Charmant, cet homme…

Ce fut le seul commentaire de mon bras droit, debout, le regard perdu vers l’horizon qui nous faisait face. J’étais décidément bien épaulé !

Déborah me regarda de biais. Elle sourit malicieusement et me mit la main sur l’épaule.

— Allez, ne vous en faites pas, Commissaire. Il y a beaucoup d’autres valeurs dans la vie que le charme et le sex-appeal !

Ma moue sceptique en rajouta à sa gaîté moqueuse. Je la retrouvais telle que je l’avais rencontrée l’année passée lors d’une autre enquête à Rennes. Une femme à la vive intelligence et à la sensibilité délicate.

— En attendant le retour de Delcourt, vous seriez d’accord pour un petit tour sur le chemin des Douaniers, Déborah ?

— Avec plaisir, Commissaire.

Elle partit d’un grand rire franc comme je les aimais tant. Nous partîmes donc d’un bon pas vers la falaise, à gauche du centre de thalassothérapie. La mer était calme. Des planches à voile tentaient de prendre un vent faible et irrégulier. Des voiles colorées me rappelaient mes étés d’enfance passés chaque année au bord de l’Atlantique. Je respirais fort. Des vauriens retournés sur le sable mouillé attendaient leurs navigateurs en herbe. Nous passâmes devant des cabines de bois datant de la riche période anglaise. Le chemin devint alors plus étroit, les rochers plus proches. La côte déchiquetée nous apparut au décours d’un tournant. Elle était de toute beauté et portait merveilleusement bien son nom de Côte de granit rose. Le soleil jouait avec les roches et leur donnait des formes tantôt humaines tantôt animales.

— Granit ou granite, Commissaire ?

— Comment ça « granit ou granite », Déborah ?

— Avec un « e » ou sans « e » ?

— Sans « e », quelle question !

— Ça dépend, Commissaire. « Granite » est un terme de géologie qui désigne la composition minérale spécifique d’une roche, alors que « granit » caractérise son aspect, sa structure, quelle qu’en soit sa nature.

— Vous m’étonnerez toujours, Déborah. Nous sommes là devant une nature magnifique sous un soleil estival et vous, vous pensez à mettre un « e » ou à ne pas en mettre !

— Oui et alors ? C’est même parce que nous nous promenons ici et que le soleil rend ces rochers si beaux que je pense au mot « granit ». Qu’est-ce que cela a de si extraordinaire ?

— Rien, rien, laissez tomber.