Actualités des Pères de l’Église - Collectif - E-Book

Actualités des Pères de l’Église E-Book

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EditorialCe numéro reprend quelques-unes des contributions du Colloque international de Metz des 8 et 9 mars derniers, consacré à l’actualité des Pères de l’Église.
Les différents articles montrent à quel point les Pères sont actuels, tant pour l’ecclésiologie, comme l’explique Mgr Job de Telmessos à partir d’Ignace d’Antioche, que pour la catéchèse, ainsi que le souligne Gérard Rémy avec Augustin, ou encore pour la compréhension de l’Écriture comme le montrent Lorenzo Perrone à partir d’Origène et Ugo Zanetti pour les Pères du désert qui proposaient une parole de vie à ceux qui venaient les voir.
À cette actualité directe qui fait ressortir que les Pères sont nos frères dans la foi et nos Pères dans la vie de l’Esprit s’ajoute une actualité indirecte, venant de la redécouverte de certains de leurs textes, par exemple celle de vingt-neuf Homélies sur les Psaumes d’Origène, en 2012, ou encore du contexte dans lequel ils ont élaboré leur réflexion, comme Grégoire de Nazianze, dont Philippe Molac envisage la théologie trinitaire, ou enfin, celle de l’identification des sources de leur pensée, comme le précise Jacques Elfassi pour Isidore de Séville.
Finalement, Alban Massie met en évidence l’actualité des Pères, qui savent faire goûter la Parole de Dieu, dans la formation théologique et religieuse.
En 1994, nous avions consacré le numéro 55 de notre revue à L’actualité de saint Augustin, en raison de la découverte de nouveaux Sermons par François Dolbeau et des Lettres par Johannes Divjak. Depuis lors, non seulement, on a retrouvé d’autres textes patristiques, mais l’actualité des Pères, ces classiques chrétiens, ne cesse de se manifester, comme en témoignent les différents articles de ce numéro.

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« Dès le commencement, le Fils est le Révélateur du Père, puisqu’il est dès le commencement avec le Père : les visions prophétiques, la diversité des grâces, ses propres ministères, la manifestation de la gloire du Père, tout cela, à la façon d’une mélodie harmonieusement composée, il l’a déroulé devant les hommes, en temps opportun ; où il y a temps opportun, il y a profit. C’est pourquoi le Verbe s’est fait le dispensateur de la grâce du Père pour le profit des hommes : car c’est pour eux qu’il a accompli de si grandes “économies”, montrant Dieu aux hommes et présentant l’homme à Dieu, sauvegardant l’invisibilité du Père pour que l’homme n’en vînt pas à mépriser Dieu et qu’il eût toujours vers quoi progresser, et en même temps rendant Dieu visible aux hommes par de multiples “économies”, de peur que, privé totalement de Dieu, l’homme ne perdît jusqu’à l’existence. Car la gloire de Dieu c’est l’homme vivant et la vie de l’homme c’est la vision de Dieu : si déjà la révélation de Dieu par la création procure la vie à tous les êtres qui vivent sur la terre, combien plus la manifestation du Père par le Verbe procure-t-elle la vie à ceux qui voient Dieu. »

S. Irénée, Contre les hérésies, IV, 20, 7,

trad. Adelin Rousseau,

Paris, Cerf, 1984, pp. 473-474.

Sommaire

Actualité des Pères de l’Église

CPE n° 145

Éditorial — Marie-Anne VANNIER

L’actualité des Pères de l’Église — Marie-Anne VANNIER

L’actualité d’Ignace d’Antioche pour l’ecclésiologie — Job GETCHA, archevêque de Telmessos

Actualité d’Origène. L’apport des nouvelles Homélies sur les Psaumes — Lorenzo PERRONE

À la rencontre des Pères du désert — Ugo ZANETTI

La genèse de la théologie trinitaire de Grégoire de Nazianze — Philippe MOLAC

L’actualité d’Augustin catéchète — Gérard RÉMY

La découverte de nouvelles sources d’Isidore de Séville — Jacques ELFASSI

L’actualité des Pères dans la formation théologique et religieuse — Alban MASSIE

Actualité des Pères de l’Église

Éditorial

Ce numéro reprend quelques-unes des contributions du Colloque international de Metz des 8 et 9 mars derniers, consacré à l’actualité des Pères de l’Église.

Les différents articles montrent à quel point les Pères sont actuels, tant pour l’ecclésiologie, comme l’explique Mgr Job de Telmessos à partir d’Ignace d’Antioche, que pour la catéchèse, ainsi que le souligne Gérard Rémy avec Augustin, ou encore pour la compréhension de l’Écriture comme le montrent Lorenzo Perrone à partir d’Origène et Ugo Zanetti pour les Pères du désert qui proposaient une parole de vie à ceux qui venaient les voir.

À cette actualité directe qui fait ressortir que les Pères sont nos frères dans la foi et nos Pères dans la vie de l’Esprit s’ajoute une actualité indirecte, venant de la redécouverte de certains de leurs textes, par exemple celle de vingt-neuf Homélies sur les Psaumes d’Origène, en 2012, ou encore du contexte dans lequel ils ont élaboré leur réflexion, comme Grégoire de Nazianze, dont Philippe Molac envisage la théologie trinitaire, ou enfin, celle de l’identification des sources de leur pensée, comme le précise Jacques Elfassi pour Isidore de Séville.

Finalement, Alban Massie met en évidence l’actualité des Pères, qui savent faire goûter la Parole de Dieu, dans la formation théologique et religieuse.

En 1994, nous avions consacré le numéro 55 de notre revue à L’actualité de saint Augustin, en raison de la découverte de nouveaux Sermons par François Dolbeau et des Lettres par Johannes Divjak. Depuis lors, non seulement, on a retrouvé d’autres textes patristiques, mais l’actualité des Pères, ces classiques chrétiens, ne cesse de se manifester, comme en témoignent les différents articles de ce numéro.

Marie-Anne VANNIER

L’actualité des Pères de l’Église

L’actualité des Pères de l’Église, si elle est moins évoquée aujourd’hui qu’il y a quelques années[1], n’en est pas moins réelle. Sans doute « le retour aux Pères » a-t-il fortement marqué les années 1930-1960, comme l’a souligné Michel Fédou dans l’un de ses derniers ouvrages, intitulé Les Pères de l’Église et la théologie chrétienne[2], mais aujourd’hui nous recevons les fruits de ce « retour aux Pères » : non seulement le concile Vatican II a préconisé de puiser aux sources bibliques et patristiques[3], ce qui n’a pas été sans conséquences pour la théologie chrétienne, mais nous disposons également de l’édition des textes majeurs des Pères, dans la collection « Sources chrétiennes » ; l’enseignement universitaire de la patristique s’est aussi mis en place, même si aujourd’hui il est, pour une part, pris dans la tourmente que connaissent les lettres classiques… Cet accès direct aux textes des Pères a permis de mieux saisir leur actualité, en particulier celle d’Irénée ou de Grégoire de Nysse, mais, à travers cette actualité, c’est leur statut de classiques, comme l’a montré David Tracy, qui se dessine. Or, les Pères sont véritablement des classiques, en raison de l’expérience kérygmatique qui a été la leur et de l’interprétation infinie de leur œuvre.

De plus, les Pères de l’Église, qui vivaient dans un monde en mutation qui n’est pas sans analogie avec le nôtre, ont posé les grandes orientations du christianisme : tant sur le plan de la lecture de l’Écriture que de l’anthropologie, de l’ecclésiologie, de la symbolique liturgique…, et dans bien des domaines, leur actualité est grande.

D’autre part, un certain nombre de textes patris tiques sont redécouverts aujourd’hui : des lettres d’Augustin par Johannes Divjak dans les années 1980, certains de ses sermons par François Dolbeau, dont le Sermon Dolbeau 26 sur le Christ médiateur, en 1990, les Homélies sur les Psaumes d’Origène par Marina Molin Pradel, les commentaires de Fortunatien sur les évangiles… ou encore de nouvelles recherches interviennent, comme sur les deux Passions de S. Maurice d’Agaune, sans oublier les sources, qui commencent à être identifiées aujourd’hui. Ces différentes découvertes amènent à envisager une autre actualité des écrits patristiques et à revoir parfois l’interprétation qui a été donnée de leur œuvre, maintenant que nous la connaissons de manière plus complète ou plus juste.

Ainsi peut-on noter une double actualité des Pères : directe, celle qui nous interpelle aujourd’hui encore, et indirecte, celle qui vient de leur statut de classiques.

I. L’actualité des Pères

L’actualité anthropologique

Il n’est plus besoin aujourd’hui de rappeler l’actualité d’Irénée de Lyon et, à lire certains de ses textes sans en citer la référence, on pourrait penser qu’ils ont été écrits par des contemporains, comme sa célèbre phrase, où Irénée explique que « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vie de l’homme, la vision de Dieu ». Il en va de manière analogue pour les Pères du désert, qui proposent une parole de vie à ceux qui viennent les voir. On pourrait également penser à l’épectase, ce progrès continuel, envisagé par Grégoire de Nysse, en particulier dans la Vie de Moïse.

Force est de reconnaître que l’actualité, tant d’Irénée de Lyon qui a écrit ces phrases remarquables lors de sa lutte contre les gnostiques que celle des Pères du désert et de Grégoire de Nysse qui introduit la notion de progrès dans un monde où il n’en était nullement question, est d’ordre anthropologique. Or, l’apport des Pères est effectivement fondamental sur le plan anthropologique. Certaines de leurs formules restent d’actualité, d’autres sont à réinterpréter en fonction de notre époque qui ne pense plus dans les catégories gréco-romaines, mais leurs réflexions sur le rôle décisif de l’image de Dieu en l’homme, sur la liberté, sur l’invitation à la filiation divine… sont autant de réalités qui restent incontournables dans notre monde, où l’homme tendrait souvent à se faire dieu, comme le voudrait, par exemple, le transhumanisme.

Dans son ouvrage intitulé La Tentation de l’homme-Dieu, Bertrand Vergely met justement en évidence les difficultés de cette attitude qui consiste à « effacer la parole disant que l’homme a été fait à l’image de Dieu, en la remplaçant par celle disant qu’il se fait à l’image de lui-même et de rien d’autre. D’où son goût pour le rien ; qu’il n’y ait rien à part lui, lui permet tout […]. Notre monde est dominé par la logique de l’homme-Dieu […]. On peut en sortir. Il suffit pour cela de faire une révolution intérieure en passant de l’homme-Dieu au Dieu fait homme. Le Dieu fait homme est un Dieu humble[4] ». Saisis par le Christ, les Pères n’ont pas dissocié l’anthropologie et la christologie et ils ont réalisé eux-mêmes cette inversion, en reconnaissant le rôle médiateur du Dieu fait homme dans la conversion qu’ils ont vécue, et dont le plus connu est Augustin, dans la mesure où sa conversion a véritablement un caractère paradigmatique.

L’actualité à partir de l’Écriture

En effet, Augustin expérimente la conversion dans sa double dimension d’épistrophè (de retournement de l’être) et de métanoia (de conversion morale)[5]. De plus, il garde l’attitude de converti tout au long de sa vie, en en faisant même le paradigme de son œuvre.

Mais son actualité vient aussi de sa capacité à universaliser cette expérience de la conversion à partir de l’Écriture, comme cela ressort de la structure même des Confessions, où les neuf premiers livres sont consacrés à la constitution du sujet Augustin à travers les méandres de sa conversion et les trois derniers, à la réalisation de son identité au miroir de l’Écriture, plus précisément des deux premiers chapitres de la Genèse, ce qui n’est pas sans anticiper les analyses de Paul Ricœur sur « l’instauration d’un soi par la médiation des Écritures[6] », ce qui donne aussi à la subjectivité toute une profondeur que l’on redécouvre aujourd’hui. On comprend dès lors pourquoi on dit souvent que la subjectivité a fait son entrée en Occident avec S. Augustin. Mais pour ce faire, Augustin n’a pas opté pour l’introspection, il s’est compris grâce à l’Écriture.

Par le fait même, Augustin fait ressortir que l’actualité des Pères, qui étaient de grands lecteurs et commentateurs de l’Écriture et qui ont dégagé toute leur théologie de la Bible, vient justement de leur lecture actualisante de l’Écriture, non seulement pour eux-mêmes qui sont pétris par la Bible et qui prennent tour à tour la figure du nouveau Moïse, du nouveau Paul…, mais aussi et surtout pour leurs communautés auxquelles ils font comprendre l’actualité de l’Écriture qu’ils lisent. Cette lecture actualisante de l’Écriture est proposée par le Christ lui-même, en particulier dans l’Évangile des disciples d’Emmaüs. Issue du midrash, cette lecture est toujours parlante aujourd’hui, comme l’expliquera Alban Massie.

Ainsi n’y a-t-il pas opposition, mais complémentarité entre la Tradition vivante, représentée par les Pères, et l’Écriture, comme l’a souligné Dei Verbum, la constitution dogmatique sur la révélation divine de Vatican II. Il serait même possible d’aller plus loin et de souligner que les Pères ont été en quelque sorte les pionniers de Dei Verbum, qui se réfère fréquemment à eux, en montrant que « l’Écriture est l’âme de la théologie[7] ». En effet, toute leur œuvre théologique est tirée de l’Écriture, tant sur le plan anthropologique que christologique, trinitaire, eschatologique, sans oublier les méthodes de lecture qu’ils ont proposées et les synthèses théologiques qu’ils ont souvent réalisées dans leurs homélies.

L’actualité à partir de la liturgie

Si l’actualité des Pères apparaît clairement dans la liturgie orientale, il n’en demeure pas moins que certaines formules utilisées aujourd’hui encore viennent directement des Pères, en particulier la prière de consécration des évêques qui remonte à Hippolyte de Rome.

Plus généralement, les Pères ont beaucoup apporté à la compréhension du mystère pascal, qui est actualisé en chaque liturgie, tant sur le plan théologique que sur celui du symbolisme liturgique que l’on redécouvre depuis quelques années. Il en va de manière analogue pour le symbolisme baptismal et la mystagogie, initiés par les Pères et repris aujourd’hui.

L’actualité pour l’ecclésiologie

Les Pères ont également été les premiers à mettre en place les structures ecclésiales et à réfléchir sur l’ecclésiologie, comme en témoignent, par exemple, le commentaire de Jean Chrysostome sur les Actes des Apôtres ou encore la réflexion d’Ignace d’Antioche sur le rôle de l’évêque, qui ne manque pas d’actualité.

D’ailleurs, Lumen gentium, la constitution dogmatique sur l’Église de Vatican II, invite à revenir aux Pères qu’elle cite 121 fois[8], en se référant 17 fois à Ignace d’Antioche. « Plus encore, c’est le mouvement même de la Constitution qui s’enracine dans la pensée d’Augustin, pour cette théologie de l’ecclesia peregrinans[9] […]. La définition de l’Église comme un mysterium reprend un thème élaboré par la patristique[10] ». L’accent est mis sur l’unité de l’Église. « Un texte de Cyprien, emprunté au Commentaire de l’Oraison dominicale, rappelle la nature transcendante de l’unité ecclésiale. L’Ecclesia apparaît ainsi comme le peuple, réuni dans l’unité du Père, du Fils et de l’Esprit. Ecclesia de Trinitate ; le thème patristique en annonçant un motif provisoirement mineur donne une force neuve à cette illustration du mystère qu’est l’Église[11]. » C’est à la lumière du mystère trinitaire que l’Église est comprise dans le premier chapitre de Lumen gentium et les écrits patristiques permettent d’en rendre compte.

Sans doute les Pères interviennent-ils là comme des classiques, mais en fait, dans Lumen gentium, leur actualité est à la fois directe et indirecte.

II. L’actualité indirecte des Pères

En tant que classiques, l’actualité des Pères est fondamentale, tant dans l’interprétation de l’Écriture qui est infinie et qui nous amène à des découvertes que dans le dialogue œcuménique et interreligieux et dans la théologie contemporaine.

L’actualité des Pères dans le dialogue œcuménique et interreligieux

Nous ne reprendrons pas le colloque sur « le Renouveau patristique et l’œcuménisme », repris dans CPE n° 140, ni le projet MSH : « Judaïsme et christianisme chez les Pères », qui a montré comment les Pères ont été les héritiers du judaïsme, en particulier sur le plan de l’exégèse, mais nous noterons simplement qu’aujourd’hui encore la référence aux Pères peut faire évoluer le dialogue œcuménique, en particulier en ecclésiologie, et peut ouvrir de nouveaux chemins pour le dialogue judéo-chrétien, comme l’a montré Daniel Boyarin dans son ouvrage Le Christ juif.

L’actualité des Pères dans la théologie contemporaine

D’autre part, même si l’époque des grands théologiens qui ont puisé aux sources patristiques : Karl Rahner, Yves Congar, Henri de Lubac, Hans Urs von Balthasar… est terminée, il n’en demeure pas moins que l’actualité des Pères est toujours importante pour la christologie et la théologie trinitaire contemporaines. Non seulement, ils en ont posé les bases, mais ils permettent aussi d’opérer un discernement sur telle ou telle question. On leur doit des distinctions de la théologie contemporaine,

la différence entre la christologie d’en haut, celle qui met l’accent sur la divinité du Christ, et la christologie d’en bas, celle qui s’intéresse davantage à son humanité. En théologie trinitaire, la distinction entre la Trinité immanente et la Trinité économique reprend, à sa manière, la différence que les Cappadociens avaient vue entre la théologie, qui exprime la Trinité en elle-même, et l’économie, qui rend compte de son action dans le monde.

* * *

Force est donc de constater que l’actualité des Pères est importante et ce colloque va nous permettre de mieux en mesurer l’enjeu et je remercie à l’avance tous les intervenants qui vont nous montrer qu’en faisant de la patristique nous ne sommes pas seulement des archéologues mais nous recevons une parole vivante pour aujourd’hui.

Marie-Anne VANNIER

Université de Lorraine, IUF

Marie-Anne Vannier a une double formation en philosophie et en théologie. Parmi ses publications : « Creatio », « conversio », « formatio » chez S. Augustin, Fribourg, Éd. Universitaires, coll. « Paradosis », 1991, éd. augm. 1997 ; S. Augustin et le mystère trinitaire, Paris, Cerf, 1993 ; Les mystiques rhénans (dir.), Paris, Cerf, 1996 ; Encyclopédie S. Augustin. La Méditerranée et l’Europe (dir.), Paris, Cerf, 2005 ; Les « Confessions » de S. Augustin, Paris, Cerf, 2007 ; Les Pères de l’Église et la naissance de l’ecclésiologie (dir.), Paris, Cerf, coll. « Patrimoines », 2009 ; Saint Augustin ou la conversion en acte, Paris, Entrelacs, 2010 ; La christologie et la Trinité chez les Pères (dir.), Paris, Cerf, coll. « Patrimoines », 2013.

[1]. Cf. André Benoît, L’Actualité des Pères de l’Église, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1961.

[2]. Paris, Médiasèvres, 2013, pp. 53-82.

[3].Cf. Collectif, Ressourcement. Les Pères de l’Église et Vatican II, Paris, Cerf, 2014.

[4]. Bertrand Vergely, La Tentation de l’homme-Dieu, Paris, Le Passeur, 2015, pp. 8 ; 131-132.

[5]. Cf. Pierre Hadot, « Épistrophè et métanoia dans l’histoire de la philosophie », Actes du XIeCongrès international de philosophie, Louvain, 1953, vol. XII, p. 32.

[6]. Cf. Paul Ricœur, « Expérience et langage dans le discours », in Jean Greisch (dir.), Paul Ricœur : l’herméneutique à l’école de la phénoménologie, Paris, Beauchesne, 1995, p. 179, n. 3.

[7]. Dei Verbum, n° 24.

[8]. Cf. Charles Pietri, « L’ecclésiologie patristique et Lumen gentium », in Le deuxième Concile du Vatican (1959-1965), Rome, École française de Rome 113, 1989, pp. 511-537, ici p. 516.

[9]. Ibid.

[10].Ibid., p. 517.

[11].Ibid., pp. 521-522.

L’actualité d’Ignace d’Antioche pour l’ecclésiologie

Si Ernest Renan affirmait au XIXe siècle au sujet d’Ignace d’Antioche (m. v. 107) qu’il « fut vraiment le patron de l’épiscopat, le créateur du privilège des chefs d’Église, la première victime de leurs redoutables devoirs[1] », l’ecclésiologie eucharistique du XXe siècle, telle que développée par de grands théologiens catholiques et orthodoxes comme Nicolas Afanassieff (1893-1966), Jean Zizioulas (né en 1931), Jean-Marie Tillard (1927-2000), a su rappeler sur la base des lettres d’Ignace d’Antioche que c’est l’eucharistie qui structure l’Église. En ce sens, l’eucharistie était pour N. Afanassieff le sacrement même de l’Église[2], et selon le concile Vatican II (1962-1965), l’eucharistie fait l’Église. La présente étude souhaite revisiter l’enseignement d’Ignace d’Antioche en lien avec les questions ecclésiologiques souvent soulevées de nos jours comme celles du mono-épiscopat, de la primauté et de la synodalité au sein de l’Église locale, et celle du sacerdoce universel des fidèles, pour montrer l’actualité d’Ignace d’Antioche dans l’ecclésiologie contemporaine.

I. Le mono-épiscopat

On considère habituellement que c’est Ignace d’Antioche qui a répandu le principe du « mono-épiscopat », l’évêque ayant seul toute autorité dans la communauté ecclésiale. Comme l’écrivait encore récemment Michel-Yves Perrin :

Une direction collégiale a ici fait place à un évêque unique – les savants utilisent l’expression du mono-épiscopat – qui préside à une communauté hiérarchisée dotée de prêtres et de diacres. Le ton particulièrement polémique de cette correspondance laisse penser qu’une telle transformation a suscité débat. Révolution ou mutation graduelle ? Les sources ne permettent guère de répondre, même si les épîtres pastorales, dont l’authenticité paulinienne est généralement déniée, et en conséquence l’assignation chronologique très disputée, attestent une tendance à la précision croissante des fonctions et obligations des serviteurs des Églises, l’établissement de ministres permanents et une spécialisation progressive des tâches. Certains spécialistes identifient même dans ces textes les traces d’un mono-épiscopat[3].

Quel en était exactement la raison ou l’importance ?

Le passage des épiscopes-presbytres, auxquels venaient s’ajouter les fonctions charismatiques du didascale et du prophète héritées de l’époque apostolique, à un seul évêque, chef unique du corps ecclésial comme cela apparaît chez Ignace d’Antioche, a dû se faire par la transmission à un seul évêque, dans chaque ville, des pouvoirs qu’exerçaient jadis sur plusieurs villes les apôtres puis les prophètes. Le théologien et historien orthodoxe Vlassiov Phidas parle justement d’une « évolution du ministère apostolique de l’episcopè