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1664. Une jeune aristocrate française, Blanche, la fille du Comte de Jonvelle, prend la mer en direction de Naples. Trop tard, elle se rend compte qu'elle a été dupée, qu'elle est tombée entre les mains de courtisanes qui tentent de la soumettre en éveillant sa sensualité. Alors que tout semble perdu, elle reçoit l'aide inespérée de Laura. Mais que peut-elle devenir seule sur un canot, à demi-nue? Elle sera la proie de tous les pirates. C'est un corsaire génois qui la découvre et la sauve. Il en tombe amoureux tandis que son amante, la princesse Nour ainsi que l'équipage voudraient la vendre comme esclave. Manon, cependant, est partie à sa recherche. Arrivée à Naples, elle affrontera de grands dangers.
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Seitenzahl: 348
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Blanche et les courtisanes
« Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction, intégrale ou partielle réservés pour tous pays. L’auteur ou l’éditeur est seul propriétaire des droits et responsable du contenu de ce livre. Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. »
Hermione de Méricourt
Je suis née, il y a quelques années (on ne demande pas l’âge d’une dame) dans un petit village de Normandie. Très vite, je me suis rendue compte que les garçons m’intéressaient beaucoup moins que les jeunes femmes aux formes sensuelles. Je pris bientôt conscience, à mes dépens de la réprobation qu’attirait ce genre de préférence. Isolée, je me réfugiais dans les romans et les films d’aventure. À l’époque, il n’était pas facile de trouver là des héroïnes que j’avais envie d’aimer ou auxquelles j’aurais voulu m’identifier. Au sortir de l’enfance, je découvris avec ravissement la série des Angélique. J’éprouvais pour cette femme si courageuse un désir profond et je m’imaginais à sa place dans les situations les plus troublantes. Blanche est sans doute la fille tardive de mes rêveries de cette époque. Un peu plus tard, les livres d’Emmanuelle Arsan éveillèrent tout à fait ma sensualité naissante. Angélique et Emmanuelle m’accompagnèrent tout au long de mon parcours universitaire en histoire et de mes années de formation personnelle; Aujourd’hui, j’écris pour mon plaisir et pour leur rendre hommage.
À Théroigne
Livre I Chapitre 1: Les rêves d'une enfant de Gênes
Chapitre 2: Débuts en mer
Chapitre 3: Une chambre, à Barcelone
Chapitre 4: Mutineries
Chapitre 5: La Princesse captive
Chapitre 6: L'enfance de Nour
Chapitre 7: Une nouvelle concubine
Chapitre 8 Un amour interdit
Chapitre 9: La chute du Sultan
Chapitre 10: Une allégeance dangereuse
Chapitre 11: La naufragée
Chapitre 12: Ma protégée
Chapitre 13: Un désir irrépressible
Livre II Chapitre 1: Rescapée
Chapitre 2: L'amante du capitaine
Chapitre 3: Retour à Jonvelle
Chapitre 4: Un intendant cruel
Chapitre 5: La fuite de Manon
Chapitre 6: Blanche reste introuvable
Chapitre 7: La Comtesse Blanche Scaglia
Chapitre 8: Dans la clairière
Chapitre 9: Chiara la diavola
Chapitre 10: Chiara et Giulietta
Chapitre 11: Les aventures de Chiara
Chapitre 12: Manon et Chiara
Chapitre 13: La dernière trahison
Livre III chapitre 1: La Princesse trompée
Chapitre 2: Les noces de Fahd
Chapitre 3: Les espoirs de Blanche
Chapitre 4: Embuscade en mer
Chapitre 5: Le Dey
Chapitre 6: L'heure de la vengeance
Chapitre 7: La Chienne
Chapitre 8: Esclave
Chapitre 9: La cabine de Nour
Chapitre 10: L'olisbos de verre
Chapitre 11: Mise en vente
La famille de Jonvelle, trahie par un des siens, s’est disloquée. Blanche a pris la route vers l’Italie et Naples. Hélas, de mauvaises rencontres l’ont détournée de son chemin. Nous la retrouvons naufragée, presque nue sur son canot à la merci des corsaires et des marchand d’esclaves. Pourra-t-elle échapper à ce sort funeste?
Au 17ème siècle, les corsaires barbaresques affiliés aux regences d’Alger, de Tunis et de Tripoli faisaient planer sur ce qui naviguait la menace de l’esclavage et de la destruction.
Je suis née et j’ai grandi à Gênes. Mon père était forgeron, lorsque ma mère mourut, il ne la remplaça pas. Nous habitions une maison étroite de trois étages, située dans une petite rue qui serpentait en gravissant la colline. Mes frères, dès qu'ils atteignaient l'âge d'entrer en apprentissage travaillaient avec lui ; plus tard, quand mon père serait vieux, ce seraient eux qui reprendraient le métier et son échoppe ; ils feraient ainsi vivre la tradition familiale. J'étais la seule fille de la famille et pour moi, il n'était pas question d'apprendre à travailler le métal. À Gênes, aucune femme ne pouvait travailler dans les forges ou même y entrer. Cela portait malheur. Alors, en attendant que j’atteigne l’âge de me rendre utile dans la cuisine ; on me laissait courir les rues et faire ce que je voulais. Gênes était une ville immense qui grouillait d’une vie cosmopolite. J'étais attirée par la vaste mer. Je passais une grande partie de mon temps près du port à regarder les navires arriver et partir. La plupart du temps, seules quelques galères étaient amarrées ; mais les rameurs de ces galères étaient, pour la plupart des criminels et des voleurs condamnés. Alors, pour des raisons de sécurité, je ne pouvais pas m'en approcher ; les autorités avaient fermé cette partie du port. Les galériens ne devaient pas avoir de contacts avec la population. De toutes manières, j’aimais mieux la forme plus légère des caravelles et des caraques. Depuis toujours, je rêvais d’embarquer sur l’un de ces navires. J’écoutais les marins parler de leurs fortunes de mer. C'étaient des aventures palpitantes ; la beauté des paysages, la découverte d'autres mondes, d'autres cultures, l'espoir de nouvelles conquêtes ; tout cela me ravissait et m'attirait. Certains ralliaient Malte, puis entreprenaient un voyage plein de dangers vers l’Orient. D’autres voguaient jusqu’en Espagne et commerçaient avec les ports de Valence ou de Barcelone. Certains passaient même les Colonnes d’Hercule pour ensuite traverser l’Océan jusqu’au nouveau monde. Je passais mes journées à regarder l’océan pour imaginer ce qu’il y avait derrière et que je souhaitais découvrir. Mais, je ne parlais à personne de mes rêves. Enfant, rêver me suffisait et aller admirer le port et la mer plusieurs heures par jour comblait mon existence.
Depuis longtemps, je n’avais plus de mère. Elle était morte en donnant naissance à mon quatrième frère ; je n'avais que sept ans. Une de mes tantes, Gloria, la plus jeune sœur de ma mère l’avait alors remplacée à la maison ; c'était une jeune fille brune, rieuse et pleine de vie. En effet, ma zia n’avait que six ans de plus que moi ; elle était vis-à-vis de moi comme une sœur, en plus affectueuse. Elle s’occupait de la maison, préparait les repas, raccommodait nos habits. Elle était aussi censée m'initier aux tâches domestiques. Mon père m'avait commandé de l'aider et à ma zia, de me corriger si je me montrais désobéissante ; mais je m'échappais et je vagabondais sur le Port. Gloria qui m'adorait, ne savait pas me réprimander et se montrait beaucoup trop indulgente. Elle me grondait un peu quand je rentrais vraiment trop tard, mais elle cachait toujours ces escapades à mon père. De mes aventures, je lui rapportais souvent de menus présents : un fruit que j’avais dérobé, une pièce que l’on m’avait donnée en échange d’un petit service ou alors une des sucreries que j’avais pu acheter avec. Quand je rentrais, nous rejouions à chaque fois la même scène avec beaucoup de passion. Tout d'abord, elle se plaignait amèrement de mon absence, de mon abandon et du travail inouï qu'elle avait dû accomplir sans moi ; alors je baissais la tête, les larmes aux yeux. Puis d’un air contrit, j’avouais avoir oublié ses recommandations et avoir oublié le temps qui passait. Je lui demandais pardon de tout mon cœur. Devant ma mine déconfite, ma zia ne pouvait pas tenir son sérieux, ne parvenait pas à s’empêcher de sourire. Alors, elle me soulevait de terre et aussi, m'embrassait sur les joues en gage de réconciliation. Ensuite, je lui apportais ce que j’avais chassé pour elle. Je ne sais pourquoi mes cadeaux l’émouvaient terriblement. Dernière fille d'une famille nombreuse ; Gloria avait poussé sans beaucoup d'attentions, ni de soins. Elle n'était guère habituée à obtenir des marques d'affection ou des présents. Ma zia me serrait alors dans ses bras et me couvrait de baisers. C’était le moment que je préférais. Jour après jour, nous revivions ces retrouvailles avec plus ou moins de cris, de bouderies, de rires. Le jeu, finalement, nous plaisait autant à l'une qu'à l'autre et c'était devenu entre nous, comme un petit rituel.
Ensuite, après le dîner, après avoir servi les garçons et mon père, après avoir lavé leur vaisselle, nous nous asseyions sur un petit rebord en pierre et, la tête contre sa poitrine, je lui racontais mes histoires de marins et de pays inconnus. Ma zia m'écoutait, les yeux écarquillés par l'intérêt et la passion. Elle me demandait les détails, me demandait parfois de contrefaire ceux que j'avais rencontrés. Elle riait beaucoup à mes imitations. De temps en temps, elle me murmurait que j’étais étrange que Dieu s'était trompé avec moi, qu'il avait placé l’esprit d’un garçon téméraire dans le corps d’une fille gracile. Mais je savais que, dans la fratrie, j'étais de loin sa préférée. Elle voyait en moi le portrait de ma mère, sa sœur adorée, trop tôt disparue. Ainsi, dès qu’elle avait une minute libre,elle voulait la passer avec moi ; elle me racontait sa petite enfance, les câlins et l’infinie douceur du temps qu’elle passait avec ma mère. La nuit, comme j’étais la seule autre fille de la maisonnée, nous devions partager le même lit. Durant toute mon enfance, j'ai eu des nuits paisibles. J’adorais me blottir contre elle et entendre le doux bruit de sa respiration.
Sur le port, je commençais à reconnaître et à imiter les différentes sonorités des langues que j’avais appris à différencier : le français, le catalan, le castillan, le turc, le grec, l’arabe. J'avais le don de l'imitation et je parvenais à reproduire les mots les plus étranges. Pour ma part, je tentais de comprendre et d'apprendre quelques phrases dans chacune de ces langues. Les marins repérèrent vite la fillette insolite qui semblait si douée pour répéter ce qu’ils disaient. Ils en étaient flattés et chaque fois qu'ils accostaient à Gênes, ils faisaient en sorte de m’en apprendre davantage. Après quelques aller-retours, je pouvais soutenir avec la plupart d'entre eux une conversation simple. Honorés d’entendre une petite gamine de Gênes leur parler dans leur langue, ils me donnaient des récompenses, souvent ces pièces de monnaie que je portais fièrement à ma zia. Ils me chargeaient parfois de quelques courses parce que j’étais la seule qui comprenait ce qu’ils voulaient. Plus tard, je m'étais rendue compte qu’il y avait une langue que tous parlaient pour communiquer entre eux et qu’il fallait absolument que j’apprenne. On l’appelait « lingua franca » ; elle était comprise sur toutes les rives de la Méditerranée. Tout bon matelot d'ici avait à cœur de la connaître. Alors, je m’y appliquai particulièrement. Il ne me fallut que quelques semaines pour parvenir à la maîtriser. Au bout de quelques mois, je la savais aussi bien que n’importe quel marin.
Mes rêves me hantaient. Je passais toujours davantage de temps à rôder auprès du port. Mon père avait promis à ma mère, sur son lit de mort, de faire de son mieux pour bien nous éduquer, et surtout de ne pas me délaisser. Alors, il avait supplié ses beaux-parents de laisser Gloria, leur benjamine le rejoindre. Elle avait dix ans de moins que ma mère, dont elle était la sœur préférée. Gloria était la seule qui pourrait pallier pour nous le vide laissé par la mort de maman. Mais tous les dimanches, ma zia retournait dans sa maison paternelle, alors mon père, homme consciencieux prenait le temps de s’occuper de moi, de me demander ce que j’avais fait ou appris. Grâce à la complicité de la zia qui préparait toujours des repas à l'avance ; je pus exagérer un peu mes progrès en cuisine. Un jour, je lui racontai que j’avais appris à parler plusieurs langues. Interloqué, il vérifia mes compétences et me demanda comment et pourquoi je l’avais fait ; il voulut me sonder pour savoir ce que j'avais en tête. Il était bien trop rusé et attentionné pour que je lui résiste. J'avouais alors mes rêves, tout en craignant sa réaction. Je lui racontai que je voulais devenir marin, découvrir le monde et peut-être en conquérir certaines parties. Il ne me gronda pas. Ce fut pire, il éclata de rire. J’entends encore aujourd’hui ce rire franc et sans retenue. Il ne détestait pas mon côté intrépide et aventureux. Il n’aimait guère les manières soumises que l’on avait ici coutume de donner aux filles. Mais mon projet était selon lui fou, irréalisable. Les métiers de la mer étaient interdits aux femmes. Jamais aucun équipage n’accepterait une fille comme matelot ou bien même comme mousse. Elles avaient, me dit-il, la réputation de porter malheur sur un navire comme dans une forge. Comme je pleurais beaucoup, vexée de son rire et déçue de ce qu’il m’avait appris ; il m’emmena choisir une des sucreries dont je raffolais. Mais au fond de moi, j'avais compris ce qu’il voulait me dire et je m'étais résignée. Il n’était pas raisonnable de poursuivre un rêve que tous voudraient empêcher de se réaliser. Cela me rendrait triste et insatisfaite.
Avec le désir ardent d'être heureuse, je pris conscience de la nécessité d'être raisonnable, je fis alors le choix de renoncer à mes rêves et de mettre fin à mes escapades, en guise de preuve de ma volonté d'avancer. Je devais grandir et aider davantage ma zia ; c'était ainsi que je deviendrais une bonne épouse. Elle constata le changement qui s'était opéré. D'un côté, elle n'était pas mécontente de me voir plus souvent à ses côtés. Cependant, lorsque parfois, elle me retrouvait les yeux dans le vague, assise sur le rebord de la fenêtre ; une vague de tristesse et de compassion l'envahissait. Elle feignait alors de manquer de fruits, de sucreries ; c'était l'occasion de m’ordonner ainsi d’aller me promener au port, et si je pouvais, de lui rapporter un de ces menus présents qu’elle affectionnait tant. Je descendais vers le port, décidée à résister à mes rêves. Je n'y allais que parce que cela faisait plaisir à Gloria. Je discutais un peu avec les marins, en restant bien sur mes gardes, de peur de me laisser emporter par mes rêves. Un jour, cependant, sur le quai, je rencontrai un vieil homme assis sur un banc. Ses cheveux étaient blancs, sa peau ridée comme un parchemin ;il regardait la mer de son regard vitreux, avec nostalgie. Je devinais que cet homme-là avait parcouru les mers, mais je voulais m'en assurer. Je le lui demandai donc. Il me répondit avec hauteur, qu’il n'était pas un ancien matelot, mais bien un ancien quartier-maître. Il semblait amer de ne plus pouvoir naviguer. Il me raconta tout ce qu'il avait été, le respect qu'on lui devait autrefois, les yeux qui se baissaient en croisant son regard. Sur un navire ; il savait diriger presque toutes les manœuvres, à lui seul, il pouvait mener une caravelle de l'autre côté de l'horizon. Il me raconta son métier et sa vie. La carrière d'un marin était longue et semée d'embûches ; tous les marins devaient commencer par un apprentissage, comme dans tous les autres métiers. Tous débutaient en servant l'équipage, en tant que novices, ils occupaient la position de mousse. Le mousse assumait, sur le navire, toutes les corvées ; il devait faire sans poser de question tout ce qu’on lui demandait ; tout comme les apprentis de papa le faisaient à la forge. Un jour, s’il avait bien servi, il devenait matelot. Sinon, on le débarquait et il devait prier pour qu'un autre navire l'embauche et puis le ramène chez lui. Parmi les matelots, seuls les meilleurs devenaient quartiers-maîtres. “C’est ce que j’étais devenu me dit le vieillard avec fierté. C’est ce que tu deviendras toi aussi si tu es aussi intelligent que tu es as l’air, mon garçon”, ajouta-t-il. Il continua avec une voix où l'on pouvait entendre tout son ressentiment. Malheureusement, un jour, on avait décidé qu’il était devenu trop vieux, pour assumer les fonctions de quartier-maître. Alors, on avait organisé une belle fête, on lui avait donné un petit pécule et puis on l'avait débarqué du navire. J’étais assez bouleversée par ses paroles. Ce qu’il m’avait raconté ne sortait pas de l'ordinaire, tout autre marin de Gênes aurait pu me raconter quelque chose de similaire. Mais il y avait eu cet instant magique où il m’avait appelée « mon garçon » et cela avait fait germer une idée en moi qui m'obnubilait tout en me faisant peur. Un vieux marin presque aveugle, en entendant le son de ma voix m’avait appelée « mon garçon ». Dans ma tête bouleversée naissaient des idées folles.
Ma zia n'arrêtait pas de me dire que Dieu s'était trompé en me faisant le corps d'une fille, que l'âme d'un garçon aventureux était cachée là, à l'intérieur de mon corps si frêle. Déjà, l'exercice et mes vagabondages m'avaient rendue souple et forte. Grâce au vieux quartier-maître ; je savais maintenant que ma voix ne me trahirait pas. Seule mon apparence, les vêtements féminins que je portais pouvaient révéler ma vraie nature aux autres. De retour à la maison, je dus, comme chaque jour aller décrocher les vêtements que j’avais étendus la veille, entre les deux arbres de notre jardin. Je les apportai dans le salon pour les y plier. En face du grand miroir, je regardais les vêtements de mes frères ; au bout d'un moment, je ne résistai pas à l'envie qui me troublait. Je les essayai. Je passai un pantalon d'Alberto, le plus jeune de mes frères, puis une de ses chemises et, enfin, une veste. Je m’arrangeai d’une manière que je trouvais très masculine et je me regardais dans la glace. Je sursautai en y découvrant zia, dont le regard fixe était posé sur moi. Je m’attendais à ce qu’elle me gronde et récrimine ; mais elle resta interdite, immobile. Elle s’approcha de moi, me caressa le visage en me disant d'une voix douce combien j’étais beau. Elle était aussi folle que moi. Le soir, nous nous sommes endormies blotties l’une contre l’autre avec plus de tendresse et d’ardeur. Peu à peu, je pris l’habitude de porter ces vêtements et j'osai aller sur le port, ainsi parée. J’étais encore trop jeune pour devenir mousse, mais je renonçais à mon prénom, Isabella, pour me faire appeler Luca. Comme le soir, je racontais tout à ma zia ; elle prit l’habitude quand nous étions seules de m’appeler, elle aussi, Luca.
Mais je grandissais et mon corps semblait vouloir timidement prendre mes formes féminines. Elles commençaient doucement à se dessiner, nécessitant le choix de vêtements astucieux pour les camoufler. Ce fut Zia qui eut l’idée de serrer ma poitrine avec une bande de tissus ; comme elle n’était pas encore très développée cela la fit complètement disparaître. Je regardais ma tante ; j'avais vraiment de la chance, si j’avais eu la même poitrine que Gloria mon déguisement n’aurait jamais pu convaincre. Aujourd’hui encore, je considère mon apparence physique, que certains trouvent ingrate, comme une bénédiction ; elle m'a permis de vivre mes rêves, sans être découverte. Avec l’aide de ma zia, je ressemblais, maintenant, à un petit jeune homme frêle, mais plein d'énergie. Quand je rentrais, elle m’appelait pour jouer son petit mari. Je me comportais comme tel ce qui nous amusait beaucoup. Ne te moque pas, ce jeu était innocent, aucun baiser ne fut trop inconvenant, parfois nos lèvres se rencontraient, mais nous en restions là ; au fil du temps, cependant, nous devenions toujours plus tendres. Je me suis toujours demandé ce qu'il serait advenu de nous si je n'avais pas quitté Naples. Je crois que nous nous aimions. Mais, je lui racontais tout et elle savait que je voulais partir. Gloria ne voulait que mon bonheur, et souhaitait s'effacer pour que je l'obtienne. Son amour pour moi était donc sans espoir et elle le changeait en affection et en soins, se dévouant plus que jamais à mon bien-être.
Si bien accompagnée, je parvins à l’âge de douze ans. À Gênes, on recrutait, à cet âge-là les nouveaux apprentis. Toutefois, les jeunes filles bénéficiaient d'un répit, elles devaient attendre un peu plus pour atteindre quinze ans, l'âge où elles pouvaient être fiancées. Mais moi, à cet âge, je ne voulais qu'une chose, plus que tout, j'espérais devenir mousse, m’engager pour de bon sur un navire, et enfin vivre mes rêves. Me promenant sur le port, j’appris par hasard qu’un navire qui devait appareiller pour l’orient, recherchait de nouveaux apprentis. Je me présentais, sans peur, au capitaine. Il me toisa. Sa main aurait pu enserrer complètement une de mes cuisses. Il hésitait à m'embaucher parce que ma maigreur l’inquiétait. Il voulut vérifier que j'étais vigoureux. Il me demanda de tirer sur un bout. Je passai le test avec toute la détermination dont j'étais capable. Reprenant mon souffle, j'attendais le cœur battant, la réponse qu’il allait me donner. À la fin, malgré ses réticences, il accepta de m’engager. Il avait lu dans mon regard la volonté farouche et la passion qui m’animait. Il me signifia que je devrais devenir plus fort et qu'en attendant, aucune tâche ne me serait épargnée. Il n'avait aucune raison de me ménager et de m'accorder des privilèges. J’acceptais ces conditions sans discuter. Le soir, de retour à la maison, je retrouvais ma zia, et je lui racontais tout. J’étais heureuse ; elle l’était pour moi. Cependant, le fond de son cœur était triste et désolé, mais elle tenta de me cacher son chagrin et je respectai sa dignité en faisant mine de ne pas le voir. Le navire appareillerait le surlendemain. Nous passâmes, alors, ces deux journées ensemble sans nous quitter d'une semelle. Souvent, elle me prenait la main et l'embrassait éperdue. La dernière nuit, elle me réveilla en silence, me fit asseoir et entreprit de couper mes longs cheveux. Quand cela fut fait, elle me donna les habits qu’elle avait préparés pour moi. Elle avait dépensé une bonne partie de ses économies pour cela. C’était l’heure de partir. Elle m’embrassa avec tendresse et des larmes coulaient de ses yeux. L'émotion me submergeait alors, nous échangeâmes un véritable baiser, dont il fut difficile de nous défaire. En partant, je lui arrachais le cœur. Je ne me l’avouais pas, mais mon cœur aussi était serré. J’étais partagée entre le chagrin du départ et la joie de ce nouveau monde qui s’offrait à moi. Isabella était en train de mourir pour céder la place à Luca.
Mon navire était un navire de commerce qui s’appelait la Fortuna. Il avait deux mâts et un petit équipage d’une vingtaine d’hommes. Nous étions trois mousses et j’étais le plus jeune et le plus frêle des trois. Dans la cale, on ne m’attribua pas la meilleure place. Cela m’était égal, je réalisais mon rêve. J’étais prête, disponible et volontaire pour tout. Les premiers jours, on me demanda surtout de laver le pont. Laver, c’était quelque chose que j’avais appris. J’y mettais toute mon énergie et le pont devenait aussi propre que ma maison de Gênes. Je savais qu'en mettant toute mon âme à frotter le sol ; je me renforçais. Assez vite, je vis d'ailleurs se dessiner l'ébauche de mes muscles. Tout en lavant le pont, j’observais les marins, leurs manœuvres. Je regardais leur façon de hisser les voiles et de les replier. Le soir, dans la solitude de mon hamac, je répétais leurs gestes précis. Un jour, brusquement, une voile se prit dans un des crochets qui servaient à monter pour la défaire. Elle menaçait de se déchirer. Le quartier-maître demanda qu’on aille sur le champ, la décrocher ; mais le navire tanguait sur une mer houleuse et les matelots se regardaient ne se décidant pas à se porter volontaires pour cette manœuvre dangereuse. Je saisis ma chance et les pris de vitesse. Surmontant mon vertige et ma peur, je grimpais habilement jusqu’à la voile, alors que le mât était ballotté par la houle. Les marins arrêtèrent leurs activités pour me regarder monter avec agilité. D’un coup sec, je libérai la voile et redescendis sous leurs applaudissements. Le quartiermaître me félicita, puis il parla de moi et de mon courage au capitaine. Désormais, dès qu’il fallait grimper quelque part, on me regardait et je bondissais toujours prête. Comme là-haut, il y avait des nœuds à faire ; on demanda à un vieux marin de prendre le temps de me les apprendre. J'étais très motivée et j'apprenais vite alors bientôt, je sus faire aussi bien que lui tout ce qu'il était capable de m'apprendre.
Parmi les trois mousses, j’étais, sans conteste, celui qui progressait le plus. On m'attribua bientôt une meilleure place pour dormir ; ainsi que certains privilèges que, d'habitude, on réservait aux marins confirmés : une nourriture plus abondante, parce qu'il fallait "que je me remplume"et parfois même une pinte de bière. Les deux autres mousses m’enviaient, mais comme pour rien au monde, ils n’auraient voulu faire ce que je faisais ; ils se résignèrent. À la fin du voyage, le capitaine devait désigner parmi nous ceux qui seraient conservés pour devenir matelot. Je fus la seule à être choisie et les deux autres durent, comme c'était la coutume, tenter leur chance sur un autre navire. On me découvrit alors tous les secrets et les savoirs du métier. Au bout de quatre ans d’apprentissage ; j’étais devenue une des leurs, un matelot de la Fortuna. Le quartier-maître qui aimait mon enthousiasme, m’apprenait tout ce qu’il savait complétant ainsi ma formation. Il prenait plaisir à voir à quelle vitesse j'apprenais. Je devins capable de le remplacer à l’occasion pour diriger les manœuvres les plus simples. Notre route ordinaire reliait Gênes à Beyrouth, en passant par Malte. Nous faisions, sur cette route deux ou trois aller-retours par an, mais cela dépendait de l'état de la mer. Il y avait bien sûr de la piraterie dans cette zone ; mais notre compagnie avait passé un accord avec la Sublime Porte et payait un tribut pour ne pas subir d’attaques intempestives. Lorsque nous croisions un de ces navires ; nous hissions le drapeau blanc. Les pirates montaient à bord de notre navire, mais le capitaine leur présentait le parchemin, alors ils nous laissaient repartir.
Heureusement, j’avais déjà acquis le respect de mes compagnons lorsque je devins femme. Je pus ainsi obtenir une certaine intimité qui me permettait de protéger mon secret. Les muscles que j’avais développés cachaient assez bien mes rondeurs féminines et ma poitrine n'avait guère poussé ; on ne pouvait la deviner sous mes vêtements amples et épais. Enfin, mes compagnons ne pouvaient pas voir ce qu’ils n’avaient en aucun cas envie d’apprendre. Pour eux, j'étais Luca, si certaines de mes habitudes leur semblaient singulières, comme une pudeur qu'ils jugeaient excessive ; j'étais un marin compétent et courageux et cela leur suffisait. Il était donc assez facile de leur cacher ma véritable nature. D'autre part, je ne voulais pas leur paraître trop singulière et de ce fait leur paraître suspecte et intrigante. J’adoptais leur manière de parler, de fumer ou de boire. J'évitais en toute chose, sauf dans l'art de naviguer, de me distinguer. Je voulais être un des leurs, je grandissais, je devenais toujours plus fort et bientôt, je pourrais les accompagner à terre pendant les escales. La première fois, ce fut Barcelone. Je ne savais pas ce qui m'y attendait. C'était la première fois que j'allais en Espagne. Nous apportions du vin d’Italie. Notre chargement était très attendu, on le vendit avec un fort bénéfice ; alors, nous fûmes très généreusement rétribués. Les marins décidèrent tous d’emmener Luca, assez âgé maintenant pour faire de lui un homme véritable. Il était temps que je sorte de l'enfance. J’étais flattée de cette considération, mais inquiète de ce qui allait se passer. Nous descendîmes en ville dans un assez bel établissement. Le vin coulait à flot et il y avait des filles accortes et assez débraillées pour distraire les marins. Je me montrais très timide et réservée. Mes compagnons pensèrent que c’était parce que j’étais encore innocent et décrétèrent qu’il était à présent, temps que je devienne un homme. Une des filles, qui s’appelait Paloma fut appelée. Elle s’était avec autorité assise sur mes genoux. Je n'osai dire un mot Son visage ovale encadrait des yeux noirs qui me semblaient me regarder avec désir. Ses lèvres pulpeuses s’approchèrent des miennes. Je fus incapable de leur résister. Je savais ce que l'on attendait de moi, je l’embrassai sous les applaudissements de mes compagnons. Pourtant, je ne parvenais pas à me détendre, la peur d’être découverte me tenaillait désormais. Il fallait que je convainque Paloma. Sinon, mes compagnons allaient connaître mon secret, ils m'abandonneraient à Barcelone et pour survivre, je devrais peut-être tout comme Paloma, vendre mon corps aux marins de passage. Pendant que j'essayais de trouver le moyen de me sortir de ce piège, elle se montrait toujours plus tendre. Ses baisers devenaient passionnés, elle caressait mes jambes et mes flancs. Elle se leva, prit ma main pour que je la suive. Mes compagnons m’encourageaient. Je n’en menais pas large.
Nous montâmes un petit escalier. J’étais abattue, car j’ignorais comment me sortir de ce piège. Paloma me fit entrer dans une petite chambre assez propre qu’elle ferma à clef. J’avais le cœur battant. Je préférais mettre fin au supplice et je lui avouai immédiatement qui j’étais. Paloma ne put s’empêcher de rire ce qui me troubla davantage encore. Elle prit mes mains et m’embrassa avec autorité. Je ne l’avais pas surprise, assise sur mes genoux, elle avait bien senti la féminité de mon corps. Après une longue minute, elle me déclara qu'elle voulait bien garder mon secret à condition que je me laisse faire, et que je lui obéisse. J’acceptai en hochant la tête silencieusement. Elle me prit par la main et m’amena en face d’un miroir. Elle contempla mes cheveux courts, ma peau dorée par le soleil, mes yeux noisette, ma bouche fine que je mordillais inquiète. Elle posa quelques baisers sur ma nuque. Elle défit alors un à un chacun de mes vêtements. J'étais tendue, je me voyais dans le miroir la courtisane dérouler la bande qui entourait ma poitrine. En me dénudant, elle ne cessait de m’embrasser, d'explorer mon corps de ses doigts légers. Je frissonnais, j’avais la bouche sèche et le souffle de plus en plus court. Jamais je n'avais ressenti le frémissement de ma chair avec autant d'intensité auparavant, jamais, je ne m’étais sentie aussi sensible et fragile. Mes petits seins se dressaient sous chacune de ses mains qui me rendaient plus prête et humide. Quand je fus nue, elle me poussa sur le lit et me dit de l'attendre. Elle se déshabilla doucement me laissant admirer sa peau cuivrée, sa poitrine lourde et ferme. Ensuite, elle sortit d’une armoire un objet qui ressemblait à un phallus en ivoire que l’on pouvait attacher à sa taille par un système de ceintures qui permettrait de le maintenir. J'avais les yeux écarquillés, car je n'avais jamais imaginé une chose semblable. Elle le posa à côté de nous sur le lit. Je tremblais de peur et d’anticipation, cet objet était sans nul doute destiné à me prendre, à me posséder aussi complètement que possible. Puis je sentis ses mains qui me découvraient, couraient le long de mon corps et en prenaient possession faisant s'échapper de ma gorge des soupirs languissants. Ses gestes provoquaient des sensations que j’avais toujours voulu ignorer. Ma peau rougissait sous ses caresses, elle devenait toujours plus sensible. Peu à peu des émotions de plus en plus délicieuses m’envahissaient me rendant toujours plus assoiffée de plaisir. Ma respiration était devenue rauque et irrégulière. Chaque contact me faisait maintenant gémir sans que je puisse me retenir. Par chaque gémissement, je me livrais davantage. Je me cambrais, je me donnais de plus en plus entièrement. Je sentais ma fente devenir encore plus humide et ouverte sous ses caresses expertes. Au bout d'un moment, je perdis la notion de l’espace et du temps. J’étais offerte tremblante, jamais, je n'avais été aussi soumise. Chacun de ses attouchements me faisait crier, me cabrait pour lui permettre de s’emparer de moi encore davantage. Puis le plaisir, tout à coup ; me submergea me laissant de longues minutes hors de moi et secouée de spasmes.
Pourtant, Paloma commençait à peine à m'initier aux plaisirs d'Éros. Elle fixa à sa taille l’olisbos qu’elle avait préparé, me dit qu’elle avait promis à mes compagnons de me dépuceler et qu’elle allait le faire maintenant. Je frémis comprenant ce que cela impliquerait. Elle me demanda tout d'abord d'employer ma bouche pour humecter l'objet en ivoire. J'obéis avec une docilité qui me fit honte. Puis, elle se plaça contre moi, me dominant de toute sa taille. L’instrument glissa en moi avec facilité, la sensation était nouvelle, mais agréable. Ensuite, il rencontra la fine barrière de chair prévue par la nature. Sous le regard perçant de Paloma, je me sentis comme une proie acculée, incapable de détourner mes yeux ; d'un coup de reins, elle me prit complètement. Je ressentis une légère douleur, qui s’estompa vite parce qu'un nouveau plaisir s'emparait peu à peu de moi. Je perdais toute volonté propre, alors qu'elle me possédait. Paloma réveillait en moi des désirs enfouis depuis longtemps. Elle me parcourait, se rendant maîtresse de chacune de mes sensations et je me donnais à elle, criant mon bonheur, certaine d’atteindre à nouveau le plaisir. Mon second orgasme arracha presque mon âme de mon corps. Je me sentis transportée dans ses bras. Mon émotion dût être contagieuse, car Paloma explosa de plaisir quasiment en même temps que moi. Je n'eus que peu de temps pour me laisser aller dans ses bras. En effet, après avoir à peine repris son souffle ; elle me demanda de me retourner et de lui présenter mon postérieur. Devant prendre une position si indécente et soumise, je rougissais de honte. Je frémis en sentant sa main s'abattre sur mes fesses. Après quelques claques, elle put entendre mes plaintes déchirantes. Alors, elle m'annonça que cette fois-ci, elle allait me prendre comme l’esclave que j’étais devenue. Je compris très vite ce qu'elle avait voulu dire. Je sentis l’olisbos s’appuyer contre un autre passage plus secret et plus honteux. Petit à petit, ma résistance cédait devant sa pression. Bientôt, par là aussi, je lui appartenais. La sensation désagréable au début devenait, malgré moi, à la fois douce et intense. La honte se mêlait au plaisir le renforçant peu à peu. Je faisais mon possible pour résister, pour ne pas céder, pour ne pas consentir à l'humiliation. Mais, malgré mes efforts, au bout de quelques minutes, je criais parvenue une fois encore aux frontières de l’orgasme. Parce que j’avais essayé de le retenir, il fut sauvage et dévastateur. Paloma me contemplait avec plaisir, désormais, j'étais devenue sa chose. Après cela, comme nous restions dans les bras l’une de l’autre, elle me dit qu’elle allait garder mon secret comme j’avais été une bonne fille. Si je voulais qu’elle le garde encore, il me faudrait lui rendre visite à chacune de mes escales barcelonaises. Je promis. Ainsi, pendant plusieurs années, dans le secret de la chambre de Paloma, je redeviendrais Isabella, la jolie petite esclave de Paloma.
L'escale de Barcelone me marquerait de nombreuses années, chaque fois que le Port catalan serait en vue, je frémirais, d’excitation de crainte et d'anticipation. Lorsque le bateau serait amarré ; je sentirais l'humidité envahir de nouveau mon entrejambe. Alors, comme à chaque fois, je retournerais docilement voir Paloma. Elle me demanderait tout d’abord de me mettre nue et à genoux devant elle. Je retirerais en tremblant mes vêtements de marin. J’obéirais sans discuter, sans lever les yeux, enchaînée à chacune de ses paroles par mon désir sauvage. Puis je devrais la servir. J’apprendrais à préparer le chocolat, le café, à recoudre ses vêtements. Je passerais tout le temps de mon escale avec elle, devenue sa petite esclave. Elle seule découvrirait à quel point j'étais faite pour toutes les humiliations qu'elle m'infligeait. Elle remarquerait mon corps tendu, implorant la moindre caresse, prêt à être outragé encore et encore. Quand elle me verrait suffisamment excitée et prête ; elle me prendrait directement avec l’olisbos. Elle prendrait me bouche, ma fente trempée ainsi que le plus étroit de mes orifices. Elle me ferait jouir ou bien me refuserait tout plaisir jusqu'à ce que je la supplie. Elle me prêterait à ses servantes et aussi, à certaines de ses amies et de ses clientes. Moi, j'obéirais à tout, je supporterais tout, espérant des plaisirs toujours plus forts. Je lui serais entièrement soumise.
Cependant, ce soir-là, c'était ma première fois et pour mes compagnons, j’étais toujours Luca. Je reçus avec humilité leurs applaudissements en sortant de la chambre de Paloma. Elle leur dit qu’elle était contente de moi et que je ne les avais pas déshonorés. Le retour au navire fut joyeux et j’acceptais de bonne grâce leurs quolibets amicaux.
J'ai eu plusieurs occasions de revoir Gênes, à chaque fois, c'était une joie teintée de nostalgie. Je fus rassurée d'apprendre que mon père et mes frères n’avaient pas été trop affectés de ma disparition. Seule ma zia qui savait où j’étais en était malheureuse. Je ne pouvais pas me montrer dans la rue des Forgerons, mais je lui fis porter un message. Nous nous retrouvâmes au Port où comme autrefois, elle me reprochait ma trop longue absence, puis comme autrefois encore, je lui donnais les présents que j’avais prévus pour elle et comme autrefois ceci se termina par des embrassades et des larmes. Ma zia allait se marier. Elle en était heureuse alors, je l'étais aussi pour elle. Elle serait remplacée à la maison par une cousine de la campagne. Son futur mari était, lui aussi, forgeron, un ami de papa qui était un homme bon et généreux. Je me réjouissais de cette nouvelle et me sentais moins coupable d’avoir, il y a quelques années, abandonnée ma chère Zia. Je passais beaucoup de temps sur le Port ; on m'y connaissait désormais fort bien et parfois, des capitaines ou bien des armateurs me proposaient de m’engager sur leurs navires. Je refusais me sentant heureuse parmi mes compagnons et aussi parce que je voulais leur être loyale. Un jour, cependant, on m’offrit un poste de quartier-maître sur un petit brigantin. C'était une promotion inespérée étant donné mon jeune âge. J’en parlais à mon officier. Il m’aimait beaucoup, mais il me dit de ne pas hésiter. Je devais saisir ma chance. Il était important que je progresse puisque je pouvais le faire. Enfin, le capitaine me décida en me promettant que j’aurais toujours ma place sur son navire si je souhaitais revenir. Je me présentais alors au pont du Phénix. L'armateur qui était bien connu sur le port de Gênes avait recruté pour son navire un nouveau quartiermaître et un nouveau capitaine. Je fus accueillie par un lieutenant affable : Tomazzo Scozzi. Ma bonne réputation me précédait. Il me fit faire le tour du navire, me fit l’éloge de ses hommes qui étaient disciplinés et valeureux. Ils accepteraient mon autorité si je leur prouvais ma compétence. J’étais résolue à le faire. On attendait l’arrivée du nouveau capitaine. Il fallait que le navire soit propre et en mesure de prendre la mer sur son ordre. Nous chargeâmes la cargaison de vin au fond de la cale. Nous vérifiâmes les voiles dont je fis recoudre chacune des mini-déchirures que je remarquais. J’ordonnais ensuite qu’on lave le pont pour qu’il soit d’une propreté parfaite. Ainsi quand notre nouveau capitaine se présenta, tout était en ordre.
Le capitaine Alfredo Posmo impressionnait par son apparence sévère et renfrognée. Il se savait bel homme ; la taille haute, ses cheveux gris impeccablement coupés, encore assez mince pour son âge musclé. Son regard gris n'admettait aucune réplique. Toute son apparence reflétait sa rigueur et sa sévérité. Il inspecta soigneusement le navire, vérifiant chaque détail. À ma grande surprise, il semblait s’énerver de ne rien trouver à redire. À la fin cependant, il constata un léger défaut dans la manière dont on avait noué une amarre. Il demanda qui avait fait cela. Au bout de quelques minutes d’un silence gêné, un de nos vieux matelots leva la main pour protéger le reste de l’équipage. Il fut consigné sur le navire jusqu’au départ qui aurait lieu le lendemain. Puis le capitaine, sans mot dire, s’enferma dans sa cabine. Nous restâmes à nous regarder surpris et choqué d’un tel comportement qu’il fallait peut-être attribuer à une fatigue excessive. Les jours suivants, nous réaliserions bien vite que nous nous étions trompés. Malgré tous nos efforts, il n’y avait pas moyen de protéger les matelots et les mousses des punitions qui pleuvaient. Le capitaine, cependant, n’était pas stupide. Il appuyait son autorité tyrannique sur quelques marins dont il avait immédiatement perçu le caractère sournois et violent. Il avait su flatter ceux-là et les acheter par ses bonnes grâces. Au contraire, avec les autres marins, il n’hésitait pas à user de châtiments corporels. Les coups s'abattaient sur des corps bien trop expérimentés pour les subir sans régir. Au bout de quelques jours à peine, une atmosphère délétère régnait sur le Phénix. Les marins étaient désemparés. Malgré tout, nous atteignîmes l’île de Rhodes qui était notre destination sans encombre. Plusieurs d'entre eux restèrent sur le navire sur lequel ils étaient consignés. Pour l'instant, ils avaient jugé qu'il fallait supporter ce tyran sans trop se plaindre, mais il ne perdait rien pour attendre.