Fables et contes de Kabylie - Chérif Arbouz - E-Book

Fables et contes de Kabylie E-Book

Cherif Arbouz

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Beschreibung

Découvrez 20 fables et contes sur la culture du peuple kabyle, de la vie quotidienne à ses êtres fantastiques... il y en aura pour tous les gouts !

Fables et contes de Kabylie rassemble 20 brefs récits sélectionnés par le romancier et historien algérien Chérif Arbouz.
Pour connaître les origines d'un peuple, appréhender son histoire ou comprendre ses croyances, vous pouvez vous plonger dans de doctes grimoires, ou pour les plus téméraires, vous rendre sur le terrain et fouiller le sol… ou alors, découvrir les contes, fables et légendes qui, de génération en génération, traduisent l'essence de ce peuple dans des histoires fabuleuses.
C'est ce plaisant voyage auquel vous convie Chérif Arbouz avec ses Fables et contes de Kabylie. Souventes fois, le lecteur retrouvera un style ou des thèmes connus sous la plume de Jean de la Fontaine : des animaux qui raisonnent, des paysans riches du « trésor » qu'est leur terre ou des rats qui comparent leurs modes de vie. La Fontaine en Kabylie, le parallèle n'est-il pas audacieux ? Point du tout ! Comme le rappelle avec malice Chérif Arbouz, La Fontaine et les conteurs kabyles puisent à la source du fabuliste Ésope (VIIe - VIe siècle av. J.-C), premier auteur qui a fait de la fable un genre littéraire à part entière, connu en Kabylie dès le IIe siècle av. J.-C. D'autre part, ils s'inspirent d'histoires locales dont ils tirent une morale.
Alors, quelle est la morale de l'histoire ? Lisez, nous en parlerons ensuite !

Adaptations de récits antiques ou créations inédites, ces fables et contes en disent long sur la culture du peuple kabyle tout en partageant sa sagesse immémoriale avec hommes et femmes de toutes origines.

EXTRAIT

Un chacal avait repéré le nid d'une fauvette sur la plus haute branche d'un arbre, et il attendit que les oisillons qu'il contenait soient assez grands pour qu'ils soient bons à manger. Certes, il savait qu'accéder au nid était hors de sa portée, mais il avait son idée quant à la manière de s'y prendre pour satisfaire à son désir, et alors il patienta.
Lorsque qu'un matin, il jugea que le moment était venu de donner corps à son idée, il se rendit au pied de l'arbre où nichait la fauvette. Alors levant la tête il s'adressa à celle-ci, lui disant : « Lance-moi un de tes petits, sinon je m'élancerai jusqu'à ton nid et les mangerai tous. »
— Fais-le donc si tu sais voler, lui répondit narquoisement la fauvette.
— Pauvrette, tu te trompes en disant cela, car je sais le moyen de venir jusqu'à toi.
— Et quel est donc ce moyen ?
— J'ai en ma demeure une ceinture magique héritée de mon père, et dès que je m'en ceindrai la taille, je pourrai m'élever dans l'air jusqu'à hauteur de ton nid. Je vais donc de ce pas, aller chercher cette ceinture, et alors tu sauras que je ne mens pas.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né le 8 février 1930, Chérif Arbouz est originaire de Tizi Rached, Wilaya de Tizi Ouzou. Bachelier, il entre dans la vie active comme instituteur, tout en poursuivant ses études à la Faculté des Lettres d’Alger. Esprit curieux, Chérif Arbouz partage dans ses écrits ses passions, qui vont des traditions orales et légendes ancestrales de son pays aux recherches les plus avancées sur la cybernétique et le cerveau. Épopées médiévales, voyages cosmiques, aliens et robots sont autant de prétextes pour réfléchir à la nature de notre humanité, l’évolution des sciences avec comme toile de fond… l’éternité.

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Fables et contes de Kabylie

Chérif Arbouz

Avant-propos

Jusqu’à une époque relativement récente, la fable, le conte, les légendes de toutes sortes, transmis oralement de génération en génération, ancrèrent les Kabyles à un passé remontant à l’antiquité, et c’est précisément à un choix de ces productions que le présent ouvrage est consacré.

Cependant une remarque est à faire concernant les fables rapportées, à savoir que si la plupart d’entre elles sont d’essence purement locale, d’autres résultent de très anciennes adaptations de fables d’Ésope.

Cet emprunt toutefois, aurait été ignoré si les fables qui en furent l’objet ne s’étaient pas retrouvées des siècles plus tard, parmi celles de La Fontaine, lequel les tenait lui-même d’on ne sait quels transcripteurs grecs ou latins de l’antiquité. Il faut en effet savoir qu’Ésope étant mort quelque six siècles avant l’ère chrétienne, ses fables furent d’abord transmises oralement durant plusieurs centaines d’années, avant de faire l’objet de versions écrites.

S’agissant des conteurs kabyles, la question se pose alors quant à la manière dont ceux-ci eurent connaissance d’au moins quelques-unes de ces fables, et pour le savoir il faut se référer à l’Histoire.

Environ deux siècles avant J.-C., le roi numide Massinissa avait délibérément ouvert son royaume à l’influence hellénique. Cette influence fut d’ailleurs telle, que Juba II, lointain successeur de Massinissa, eut recours à la langue grecque, dès lors qu’en plus de régner, il se distingua en tant qu’auteur d’annales historiques.

Ceci étant ainsi établi, ce qui en ressort fournit la réponse à la question posée ; mais à cela ne s’arrêtera pas notre propos. Il faut en effet considérer que la première fable du présent ouvrage découle du fait qu’à l’influence hellénique, succéda celle des Romains, l’ancien royaume numide étant devenu province romaine. Bien des traces témoignent encore de cette époque, outre celles très nombreuses de nature archéologique, et c’est précisément l’affabulation d’une de ces traces, qui ouvrira la voie à ce qui d’autre sera ensuite relaté.

L'auteur

Préliminaire

Le présent recueil de fables ou contes kabyles commence avec la relation d’une légende, celle-ci se rapportant à un fait historique transfiguré pour la circonstance. Aussi, pour bien saisir le sens précis que revêt cette transfiguration, il faut s’en remettre à l’événement-même dont elle s’inspire, événement dont la quintessence est la suivante.

Peu avant le début de l’ère chrétienne, Jules César comme chacun sait, institua le calendrier dit julien. Bien plus tard ce calendrier fit place à un autre plus exact, lequel toujours en vigueur sous le nom de calendrier grégorien, fut instauré par le pape Grégoire XIII en 1582.

Ce qui de particulier dans le passage d’un calendrier à un autre donna lieu à une affabulation, fut la constatation du fait que dans le nouveau calendrier, le mois de Janvier comporta 31 jours au lieu de 30 auparavant, et que par contre la durée du mois de Février passa de 29 à 28 jours.

Et maintenant place à la légende telle que celle-ci est contée, frayant ainsi la voie aux fables et contes qu’elle précède.

La mégère de Janvier

Jadis, beaucoup de vieilles gens mouraient durant l’hiver, en Janvier notamment, mois par excellence le plus meurtrier de par son froid particulièrement intense. Aussi, un certain jour, le dernier de ce terrible mois, une femme d’un âge très avancé s’acheminait vers sa demeure, au sortir d’une forêt où elle s’était pourvue d’une brassée de bois mort. Lorsqu’elle fut en passe d’atteindre son logis, et se voyant déjà assise auprès d’un bon feu, elle jubila, s’écriant « Maudit Janvier, demain tu ne seras plus, et moi je serai toujours là, malgré ton acharnement à vouloir m’ôter la vie. »

Ce propos cependant, n’était pas de ceux que l’implacable Janvier pouvait tolérer ; alors celui-ci, qui en ce temps-là comptait 30 jours, se tourna vers Février qui pour sa part en avait 29, et il lui dit :

« S’il te plaît cher ami, cède moi donc un jour, j’en aurai grand besoin demain pour faire passer de vie à trépas cette insolente mégère. »

Février complaisant, souscrivit volontiers à la demande de Janvier, sa durée devant dès lors se réduire à 28 jours, celle de son prédécesseur passant de 30 à 31.

Le jour suivant donc, à la même heure et dans les mêmes circonstances que la veille, la pauvre femme vit se déchaîner sur sa chétive personne, tout ce que Janvier, bien que parvenu à son terme, pouvait mobiliser de neige, de grêle et de vent glacial. Rentrée chez elle, la malheureuse n’eut même pas la force d’allumer un feu pour se réchauffer, puis elle mourut bien avant qu’il fût minuit, instant dès après lequel Février entra en lice.

Le chêne et le roitelet

Un jeune roitelet, premier éclos d'une couvée, quitta le nid de ses parents dès qu'il sut voler. Pour sa première journée de liberté, il s'offrit d'abord le plaisir d'aller ici ou là, au gré de sa fantaisie, puis la faim le prenant, il se mit en quête de chenilles, papillons et autres menus insectes. Tout allait à merveille, et le soir venu, il choisit pour gîte la plus haute branche d'un chêne. Lorsqu'au matin il s'apprêta à reprendre son vol, il s'adressa au roi des forêts. « Arbre mon ami, lui dit-il, merci de m'avoir abrité, et surtout excuse-moi d'avoir cette nuit, pesé sur toi de tout mon poids. »

— Mais que me dis-tu là ? répondit le chêne quelque peu outré ; si tu ne m'avais parlé, je n'aurais même pas su qu'une de mes innombrables branches t'avait servi de perchoir. Passe encore s'il s'agissait de singes turbulents venus cueillir les glands que je produis, ou mieux encore d'une panthère choisissant telle ou telle de mes grosses fourches pour s'y reposer. Mais qu'à cela ne tienne, et à l'avenir, reviens quand tu voudras, car en aucun cas tu ne me dérangeras.

— Merci grand arbre de cette leçon, répondit l'oiselet plein de confusion, et pardonne mon inconvenance dont la seule cause est mon ignorance.

Le jeune roitelet prit alors son vol et cessa de se prendre pour ce qu'il n'était pas.

La galette mouchetée

Un rustre avait une femme si paresseuse, qu'elle ne cuisait le pain du ménage qu'une fois par semaine, abandonnant celui-ci aux innombrables mouches, que la saleté des lieux attirait. Le mari à la longue s'habitua si bien à ce pain, parsemé des chiures que les mouches y déposaient, qu'il finit par l'apprécier. Puis vint le jour où le destin fit de lui un veuf, ce après quoi il se remaria. Sa seconde épouse, au contraire de la première, tenait propre la maison, faisait bonne cuisine, et chaque jour elle apprêtait ce qu'il fallait de pain. Cependant, lorsque pour la première fois le manant y goûta, il exhala un profond soupir et murmura tout bas : « Adieu les bonnes galettes mouchetées d'autrefois. »

À partir de ce jour, il eut à se plier à de nouvelles habitudes, de bonnes s'entend. Mais ce ne fut guère facile tant les anciennes, des plus détestables, avaient non seulement façonné ses goûts, mais modelé son esprit quant à la manière d'apprécier toute chose.

Le rat des champs et le rat de maison

Un rat, de l'espèce de ceux qui séjournent dans les maisons, à titre permanent, sortit un jour de sa demeure pour en visiter les parages. Allant ainsi le nez au vent, le hasard fit qu'il rencontra un autre rat, qui lui, vivait dans les champs. Tous deux alors se flairèrent l'un l'autre, et d'emblée ils sympathisèrent. Quoique de même race, ils différaient cependant, l'un étant gros et gras et l'autre famélique. Aussi, dès l'abord, le premier demanda au second la raison de sa maigreur.

— C'est que, répondit le rat des champs, les conditions de mon existence sont difficiles, surtout en hiver comme à présent, où la faim et le froid ont fait de moi ce que tu vois.

— S'il en est ainsi, répondit le rat de maison, pourquoi ne viendrais-tu pas vivre avec moi jusqu'à la belle saison ? Tu n'aurais qu'avantage à cela, je te l'assure.

— Et qu'y gagnerais-je ce faisant ?

— Le manger et le boire surtout, qui te seraient en permanence assurés. Et considère aussi que tu passerais tout le reste de l'hiver à l'abri du froid et des intempéries. Cependant, pour que tu puisses mieux en juger, je t'invite à partager mon dîner. Reviens donc ici ce soir, je viendrai t'y chercher.