La Vérité sur Rocambole - Pierre Alexis Ponson du Terrail - E-Book

La Vérité sur Rocambole E-Book

Pierre-Alexis Ponson du Terrail

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Beschreibung

Résumé de l'histoire dans le synopsis des aventures de Rocambole.

Das E-Book La Vérité sur Rocambole wird angeboten von Books on Demand und wurde mit folgenden Begriffen kategorisiert:
littérature française, Classique, AVENTURES, roman policier, Mystères

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Seitenzahl: 132

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Pierre Alexis Ponson du Terrail

LA VÉRITÉ SUR ROCAMBOLE

Dernière partie du Dernier mot de Rocambole

La Petite Presse – 21 août 1866 au 8 août 1867350 épisodes

E. Dentu La Vérité sur Rocambole

(1 volume) 1867

 

 

 

Table des matières

 

I

II

III

IV

V

VI

VII

VIII

IX

X

XI

XII

XIII

XIV

XV

XVI

XVII

XVIII

XIX

XX

XXI

XXII

XXIII

XXIV

Mentions légales

I

Mes chers lecteurs,

Ceci n’est point un roman. C’est une confidence que je vous fais et qui me procure le plaisir de causer avec vous, plaisir rare, hélas ! pour un romancier.

Nous étions trois, un soir, il y a dix ou douze ans de cela, dans un cabinet du pavillon d’Armenonville, au bois de Boulogne ; – c’est-à-dire mon ami Gustave Claudin, Bergerette et moi.

Vous connaissez tous le spirituel journaliste, le causeur aimable et intarissable qu’on appelle Gustave Claudin.

Quand je vous aurai dit que Bergerette avait vingt ans, des dents éblouissantes et un de ces rires de franc aloi qui vont si bien à la jeunesse, vous la connaîtrez aussi bien que nous.

Claudin, qui n’était pas alors chevalier de la Légion d’honneur, rédacteur d’un grave journal et un personnage quasi-officiel comme aujourd’hui, s’était embarqué, en lissant sa moustache noire, dans une de ces théories paradoxales dont il emportera le secret avec lui.

Bergerette roulait dans ses doigts mignons des boulettes de mie de pain et les lui jetait au nez.

Quant à moi, en dépit du feu d’artifice de Claudin et des éclats de rire de Bergerette, j’étais sombre comme le traître d’un mélodrame, au quatrième acte, veille de son châtiment.

M. Delamarre – de la maison Delamarre, Martin Didier et Ce – ancien garde-du-corps, ancien régent de la Banque de France, et pour lors directeur du journal la Patrie, m’avait fait venir le matin, et m’avait dit :

– La politique est au calme absolu, la cour d’assises chôme : nous n’avons ni une petite guerre, ni un joli procès criminel à mettre sous la dent de la Patrie, et voici le renouvellement d’octobre qui approche. Faites-moi donc une de ces grandes machines qu’on met à cheval sur deux trimestres et qui retiennent l’abonné inconstant, en amusant sa femme et ses filles.

Cela pouvait se traduire ainsi :

– Confectionnez-moi, je vous prie, un petit roman de cent feuilletons ; donnez-moi le titre demain, et nous commencerons dans huit jours.

Voilà pourquoi j’étais sombre.

– Mon bon ami, me dit Claudin, la chose est pourtant bien simple. Refais quelqu’un de ces romans qui ont eu un succès étourdissant, il y a une dizaine d’années.

– Tu en parles à ton aise !

– Monte-Cristo, par exemple !

– Avec Dumas pour collaborateur, alors ?

– Les Mystères de Paris, si tu veux.

– Je ne sais pas un mot d’argot.

– Tu l’apprendras…

– Où et comment ?

Le garçon qui nous servait, entra sur ces derniers mots.

Ce garçon a droit à une silhouette de deux lignes.

C’était un homme de cinquante ans, un peu obèse, aux cheveux crépus et blancs, à la démarche majestueuse. S’il avait eu une clef dernière le dos, on l’eût pris pour un chambellan.

Ce mot argot lui produisit un certain effet ; jusque-là il nous avait servis avec d’autant plus d’empressement que nous étions à peu près seuls au pavillon, et que Bergerette, qui était bonne fille, faisait monter la carte avec une aimable complaisance.

Mais à ce mot d’argot, sa figure, épanouie jusque-là, se rembrunit.

Il nous regarda avec défiance, nous servit avec distraction, et il fallut le sonner plusieurs fois pour obtenir une assiette.

Au dessert il disparut.

À cette époque-là, une circulaire ministérielle avait défendu l’argot au théâtre.

Claudin me dit :

– C’est quelque censeur destitué qui a échangé ses ciseaux contre une serviette.

Un autre garçon nous apporta le café et nous ne pensâmes plus au premier.

Il pleuvait un peu, une de ces pluies fines, serrées, comme le mois d’octobre en apporte sous son aile brumeuse.

– Qu’allons-nous faire de notre soirée ? demanda Bergerette. Je voudrais aller quelque part.

– Il pleut…

– Et les voitures ?

– Tu sais que la nôtre est découverte, d’ailleurs c’est une pluie d’orage, attendons.

– Un petit lansquenet ? dit Claudin.

– À trois ?

– Dame !

Le bruit d’une voiture se fit entendre, et je m’approchai de la fenêtre.

C’était un joli fiacre amenant cinq personnes, et ces cinq personnes étaient des amis à nous que la pluie avait surpris dans le bois.

– Venez donc jouer au lansquenet ! leur criai-je.

Mon appel fut entendu, et un quart d’heure après nous étions installés autour d’une table recouverte d’un tapis bleu.

Tout le monde a joué au lansquenet ; tout le monde connaît ce jeu bizarre, fantasque et plein des écarts les plus monstrueux.

Il y a presque toujours pendant toute une taille et souvent durant une soirée entière, une carte qui sort plus souvent que les autres.

Tantôt c’est un as qui fait invariablement gagner le banquier ; tantôt c’est une dame qui lui porte éternellement malheur.

Ce soir-là, il y eut une carte qui se représenta tant et si souvent que celui qui l’avait contre lui considérait son argent comme perdu, même avant que le coup fût joué.

Cette carte enguignonnée n’était autre que le valet de cœur.

Galuchet, comme on l’appelait, faisait perdre tout le monde.

À minuit, on jouait encore.

Nous demandâmes du champagne et des cigares.

Ce fut le garçon qui nous avait servis à table qui se présenta au coup de sonnette.

Il avait perdu sa physionomie défiante, et son sourire, un peu majestueux, épanouissait de nouveau ses lèvres.

La partie continuait.

La main était à Bergerette.

– Vous allez voir, dit-elle, que je ne crains pas Galuchet.

La première carte qu’elle tourna fut un valet de cœur ; la seconde un autre valet de cœur.

– Un refait ! s’écria-t-on.

– Un autre refait ! dit-elle.

À notre grande stupéfaction, elle avait amené deux autres valets de cœur.

Personne n’osait plus tenir.

– C’est de l’argent sûr, cependant, dit la pécheresse en souriant, il n’y a plus de valets de cœur.

On tint le coup.

Un troisième refait de valets de cœur arriva.

En ce moment le garçon à cheveux blancs franchissait le seuil du petit salon, portant un immense plateau de verres et de bouteilles.

– Les valets de cœur ont une chance d’enfer ! s’écria Claudin.

Soudain le garçon jeta un cri et le plateau tomba bruyamment sur le parquet.

Et le garçon épouvanté prit la fuite en murmurant :

– Les valets de cœur ! les valets de cœur ! toujours les valets de cœur !…

Le bruit des verres cassés avait fait monter la maîtresse de l’établissement et le maître d’hôtel, que le garçon à cheveux blancs avait failli renverser dans l’escalier, tant sa fuite était précipitée.

– Je vous avais pourtant bien recommandé, dit la belle madame Leblond à son maître d’hôtel, de renvoyer cet homme : vous savez qu’il est fou !

II

Cet esclandre amena, comme on le pense bien, explications sur explications.

Le maître d’hôtel et les autres garçons de l’établissement eurent chacun leur petite version.

Le maître d’hôtel nous dit :

– Cet homme est venu ici, il y a huit jours, demander de l’ouvrage.

« Il avait de bonnes façons, nous l’avons pris, et pendant les deux premiers jours, il a très-bien fait son service.

« Le soir du second jour, il nous a demandé la permission d’aller à Paris.

« Il devait revenir par le dernier train du chemin de fer.

« À minuit, on ferme les grilles du Bois, et comme il n’était point rentré, nous avons pensé qu’il avait couché à Paris.

« Mais le lendemain, à quatre heures, comme on attelait la jument au cabriolet dans lequel je vais à la halle, nous l’avons vu sortir de ce massif d’arbres qui est là en tirant sur le Jardin d’acclimatation : ses habits étaient en désordre, il était pâle, défait, et on voyait à la boue de ses chaussures qu’il avait erré toute la nuit.

« – Que faites-vous donc, lui dis-je, d’où venez-vous ? pourquoi n’êtes-vous pas rentré ?

« Il me regarda d’un air égaré :

« – J’ai eu peur, me dit-il.

« – Peur de quoi ?

« – Je suis sûr qu’ils sont sur mes traces.

« – Qui ?

« – Mes ennemis. C’est pour cela que je ne suis pas rentré. Je pensais que peut-être ils m’attendaient dans les environs.

« – Vous avez donc des ennemis ?

« Ses dents claquèrent, à cette question :

« – Dieu vous garde des valets de cœur ! me dit-il.

« Et il alla se réfugier dans l’office.

« De ce moment, j’ai bien vu qu’il était toqué. Mais nous sommes en automne, il vient moins de monde, et nos garçons nous quittent facilement. Ce qui fait, ajouta le maître d’hôtel que je n’ai pas renvoyé celui-là.

– Tiens, me dit Claudin à l’oreille, tu cherches des sujets de roman. En voilà un…

– Plaît-il ?

– Et un joli titre : les Valets de cœur.

Je ne répondis pas, occupé que j’étais à écouter la version du sommelier.

Celui-ci disait :

– Aventure couche en haut, tout à côté de moi. Il n’y a qu’une cloison assez mince qui sépare la mansarde qu’on lui a donnée, de celle où nous logions le chef et moi.

« Dès la première nuit qu’il a couché ici, nous l’avons entendu tourner, retourner, se relever, se recoucher, gémir, parler tout haut.

« Le chef est allé frapper à sa porte :

« – Est-ce que vous êtes malade, Aventure ? lui a-t-il dit.

« – Non, nous a-t-il répondu à travers la porte. Excusez-moi, je rêvais.

« La nuit suivante, il a recommencé son vacarme.

Ça nous a intrigués et nous avons percé un petit trou dans la cloison, puis nous sommes montés les premiers pour le voir se coucher.

« Il a commencé par verrouiller sa porte et donner deux tours de clef ; alors il a posé un revolver et un pistolet sur la chaise qui lui sert de table de nuit.

« D’abord il s’est endormi.

« Mais tout à coup il s’est éveillé en sursaut et s’est mis à pousser des cris :

« – Grâce ! disait-il, grâce ! ne me tuez pas… je ne dirai rien… je ne suis qu’un pauvre domestique… je n’ai pas d’argent… je ne sais pas où M. le duc serre ses valeurs… si je le savais, je vous le dirais… mais je ne le sais pas… grâce ! grâce ! Rocambole !

– Oh ! le bon nom ! s’écria Claudin.

– Un nom excellent, en effet, pensai-je, et que je retiens dès aujourd’hui.

– Mais qu’était-ce donc que ce Rocambole ? demanda Bergerette qui s’amusait à ce récit comme à la première scène d’un mélodrame.

– Je ne sais pas, répondit le sommelier. Tout ce que je puis vous dire, c’est que le lendemain, tandis que nous déjeunions, le chef lui demanda :

« – Comment va Rocambole ?

« Il laissa échapper son assiette, qui tomba sur le parquet avec son couteau, et prit la fuite après nous avoir regardés de travers.

La belle madame Leblond compléta le chapitre des dépositions.

– Cet homme est entré ici, dit-elle, en nous affirmant qu’il était cocher au besoin.

« Mon cocher était malade hier, et j’avais besoin d’aller à Paris.

« J’ai fait atteler, et cet homme est monté sur le siége.

« Il conduit sagement et très-bien. J’ai fait plusieurs courses dans Paris.

« Vers trois heures, en sortant d’une maison de la rue Rossini, je lui dis :

« – Menez-moi rue de la Pépinière. »

« Jusque-là, il avait été fort calme ; il est devenu tout pâle.

« – Jamais ! m’a-t-il répondu.

« – Comment, jamais ?

« – Vous me donneriez des millions que je ne passerais pas rue de la Pépinière.

« – Mais j’ai besoin d’y aller.

« – Ça ne me regarde pas. Je suis prêt à descendre du siége ; mais je n’irai pas par là… je ne veux pas être assassiné… Vous ne savez donc pas que c’était là qu’ils se réunissaient ?…

« – Qui ?

« – Les Valets de cœur !

« J’étais à sa discrétion ; car vous pensez bien que je ne pouvais pas me mettre moi-même sur le siége de mon coupé.

« Je suis donc revenue ici ; seulement j’ai dit à Auguste de faire son compte à cet homme et de le renvoyer.

– C’est bien ce que j’ai fait, répondit le maître d’hôtel ; mais il s’est jeté à mes genoux en me disant que si je le renvoyais, il ne trouverait plus où se placer ; qu’il avait des ennemis mystérieux qui le poursuivaient partout.

– Mais enfin, interrompit un des joueurs, où est-il maintenant ?

– Il a pris sa course vers la porte Maillot, dit un des garçons.

– Oh ! dit Auguste, le maître d’hôtel, soyez tranquille, il reviendra.

– Je l’espère bien, murmurai-je.

On me regarda avec un certain étonnement.

– Hé ! hé ! dit Gaudin, voici le romancier qui s’éveille.

« Tu cherches un sujet, mon camarade, quærens quem devoret, hein ?

« En attendant, allons nous coucher, car il est près de minuit. »

Tandis qu’on attelait mon modeste phaéton, je pris à part le maître d’hôtel :

– Mon cher Auguste, lui dis-je, voulez-vous être aimable pour moi.

– Que dois-je faire, monsieur ?

– Quand cet homme reviendra, ne le bousculez pas, ne le grondez pas, n’ayez pas l’air de vous souvenir de ce qui s’est passé.

– Mais ? monsieur…

– Je tiens à le revoir, et je serai ici demain matin.

En effet, le lendemain, il faisait un temps superbe, et j’arrivais à huit heures du matin au pavillon d’Armenonville pour prendre le verre de madère des cavaliers.

Mais Aventure n’était pas revenu.

Pendant trois jours je déjeunai et je dînai à Armenonville.

On ne revit pas Aventure, et il ne revint pas chercher sa malle.

Cependant M. Delamarre (de la maison Delamarre, Martin Didier et Cie) ancien régent de la banque, ancien garde du corps, etc., me pressait pour avoir un titre.

– Eh bien ! lui répondis-je un matin, annoncez :

Le club des Valets de cœur.

Le soir, l’annonce parut dans la Patrie.

Le lendemain je reçus une singulière missive par la poste.

Papier grossier, enveloppe découpée à la main, cachetée avec de la cire à ficelle, écriture inégale et sans orthographe, tel était ce message.

On me disait :

« Si vous voulez des renseignements, on vous en donnera.

« Rocambole est au pré, à viocque. Nous n’avons plus peur de lui.

« Trouvez-vous demain soir à la barrière de la Villette, au coin de la rue de Flandres chez le père Bravard, marchand de vins.

« Un homme de la bande de Timoléon. »

Cette lettre m’intrigua plus encore que la singulière aventure du pavillon d’Armenonville.

Je la montrai à Bergerette.

– Je pense bien que tu n’iras pas, me dit-elle.

– Mais si, répondis-je. La Patrie avant tout.

Et le soir, en effet, je fis mes préparatifs pour cette excursion hors Paris.

III

J’étais au collége lors de l’apparition première des Mystères de Paris.

Ce n’était pas un succès, c’était un triomphe.

La curiosité publique n’avait peut-être jamais été surexcitée à un plus haut point, et nos jeunes imaginations étaient chauffées à blanc par le récit des malheurs de la Goualeuse et des exploits du Chourineur.

Mais ce n’est pas l’œuvre seulement qui intéressait alors ; c’était l’auteur aussi.

Eugène Süe vivait en dehors, comme on dit. Homme du monde, membre fondateur du Jokey-Club, il avait eu jusque-là une réputation de dandysme tellement établie, qu’on se demandait comment ce même homme, aristocrate avant tout, avait pu creuser, étudier, fouiller des types comme ceux du Maître d’école et de la Chouette, décrire l’Île des Ravageurs et le Tapis franc de l’Ogresse.

Je ne sais pas ce qu’on disait dans le monde, mais je puis vous raconter ce qu’on disait dans notre lycée, où le journal des Débats nous arrivait clandestinement chaque jour.

Quand venait le soir, disait-on, un grand et bel homme brun, au teint un peu coloré, à la barbe soignée, à la mise élégante et distinguée, arrivait en cabriolet rue de la Pépinière 98.

Il sortait du club où il avait dîné.

Le suisse ouvrait les deux battants de la porte cochère, le superbe trotteur faisait résonner sous ses pieds le pavé de la cour et venait s’arrêter au perron.

Alors le bel homme aux favoris bruns jetait les guides à un tigre