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La poésie comme l'expression artistique d'une multitude de sentiments profonds.
Transversale de courts recueils portant en commun le projet de capter l’oreille par des échos peut-être singuliers, de nourrir l’oeil d’images peut-être magiques, d’inspirer peut-être des rêves fantasques, transfuges de l’inconscient…
Ample tribut payé à la pataphysique, au sensualisme, sans oublier la dérision voire l’invective…
Aux antipodes de l’angélisme, une poésie polymorphe, jubilatoire, volontiers baroque, sachant parfois aussi, au service de l’image, se dépouiller jusqu’au prosaïsme.
Laissez-vous transporter par la plume de Georges Richardot, poète d'une certaine forme de l’existence physique et métaphysique.
EXTRAIT DE
Nuit Blanche
Sous la lune
Luit
Une flaque blanche :
C’est l’amertume
D’un Pierrot éconduit
Qui pleurait
Colombine.
Accroupie
Dans l’ombre
La couventine
Le guettait.
Ventre nu
Elle patine
Ses émois incompris.
Au bord
D’un Mont de Vénus
Un oiseau d’or
S’est posé
Il picore
Un phallus
Nécrosé.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Né il y a quelques lustres (sic) à Épinal (Vosges),
Georges Richardot est aujourd’hui établi à Vence (Alpes-Maritimes). Il fut guidé dans ses débuts par Raymond Queneau (poésie et roman).
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Le Chercheur de coquillages
Georges Richardot
Le Chercheur de coquillages
Un visage blafard
Dans l’automne
Qui tombe
Des feuilles mortes
Ses yeux brillent
Verts
Une rivière coule
Dans quel pays ?
Derrière
Un arbre mort
Se dissimule
La tiède étreinte
De cette danseuse
D’hiver
Le printemps pointe
Entre ses lèvres
Oui mais que faire ?
Que faire ?
Sinon s’étendre
Et puis mourir
Dans quel pays ?
Dans quel pays ?
Le grand voilier
Est blanc tout blanc
Je vois il voit
Le mât les voiles
Le vent
Le pont du grand voilier désert
À nos pieds
Éparpillés des débris
Un œil ton œil
Et on marche sur tes dents
Je balaie il balaie le pont avec tes cils
Et tes sourcils
J’éponge il éponge
Le sang des dernières rixes
Avec poissés encore blonds
Tes beaux tes longs cheveux
Notre amour est-il donc mort ?
Notre amour est-il donc mort chérie ?
Jetons l’ancre aux Caraïbes
Chérie
Jetons l’ancre aux Caraïbes
Larguons l’attirail
Les faux-semblants de la beauté
Et laissons face à face
L’effarante
L’éclatante vérité de nos squelettes !
Captive
Des reflets du feu
Endormie nue
Foulant
Les cantiques d’hiver
Sa main
A quitté les jouets
Son cadeau est là
D’être apprêtée
Cheveux étalés
Lèvres pâlies
Pauvres enfants perdus
Quand éclate le mot Noël
C’est notre amour
Qu’il faut renaître
Les longs après-midi
Tels des miroirs ternis
Sont plats et froids
Les longs après-midi
Sont pleins
De fantômateux
Silences hydrophiles
L’ennui est de robe blanche
Souillée de mousse
L’amour n’est plus
Que languides désirs fatigués
Fatigués et sales
L’ennui est de robe blanche
Souillée de mousse
On est blessé à vif
L’ennui est une chevelure terne
Qu’on a envie de tordre
On a envie
D’être sauvage avec lenteur
On a envie
D’être sauvage et morne
On est blessé à vif
L’amour n’est plus
L’amour n’est plus
Que meurtre inaccompli
Et morne contrition
Tes yeux
Panthères tapies
Jungle
Des corps nus
Senteurs opiacées
Moiteur d’été
Torride
Sur leurs calices
Renversés
Corolles
D’été flétri
Barcarolle
Languide
À son fil
Dérivent
S’assoupissant
Tout désir
Tout assouvissement
Voiliers
De l’automne
Dérivent
Vers la torpeur
De tes lèvres
S’assoupissant
Assouvie
La langueur
Carnassière
De tes yeux…
Panthère repue
Que fais-tu là petit soldat ?
Que fais-tu là ?
Je berce ma peine mon capitaine.
Je berce ma peine.
Sais-tu qu’il faut mourir petit soldat ?
Sais-tu qu’il faut mourir ?
Pourquoi n’iriez-vous pas vous-même
Mon capitaine ?
Pourquoi n’iriez-vous pas vous-même ?
Moi j’ai à faire vous voyez bien.
Moi j’ai à faire mon capitaine.
Et qu’as-tu donc de si urgent à faire
Petit soldat ?
De si urgent à faire ?
J’ai à bercer ma peine mon capitaine.
Vous voyez bien mon capitaine.
Bercer ma peine.
Dans le courant
Limpide
De ses yeux
Paressaient
De lents voiliers
Au septième coup
De minuit
J’ai dénoué
Ses longs cheveux
Essuyé ses lèvres
Contemplé
Se flétrissant
Son sourire
Observé
Se délitant l’amour
Soulevé
Encore tiède
Reposé
Tiède encore
Chacune
De ses mains
Épongé le dernier
Embrun
De ses lèvres
Corné
La page enluminée
Du livre de vie
Au douzième coup
De minuit
Sans autres mots
En fin de ligne
En fin de vague
S’est refermé
Le livre bateau mort
Un soldat sur une route
Seul. Pour un soldat
C’est rare de marcher
Seul sur une route
Fusil sur l’épaule
S’en va
Le long des prés et il fait beau
Fusil sur l’épaule
Un soldat seul et il fait beau
Un soldat gisant
Écoutez : son cœur bat encore
Dort
Dort dans les prés
Et il rêve
Rêve
Qu’une silhouette en robe rouge
Se penche
Lui ferme les yeux
Et qu’il est mort
Il dort
Il dort
C’est rare un soldat qui sourit mort
JE T’AIME PERSONNE1
Je t’aime soleil
Je t’aime l’éveil
Un creux d’oreille
Une nuque de miel
Je t’aime Personne
Je t’aime Personne
Je t’aime oiseau
Je t’aime ruisseau
Un jour nouveau
Frisson de l’eau
Je t’aime Personne
Je t’aime Personne
Je t’aime ma brune
Je t’aime chacune
Un goût d’écume
Au clair de lune
Je t’aime Personne
Je t’aime Personne
Je t’aime raisin
Je t’aime essaim
Le fruit des seins
La grappe des reins
Je t’aime Personne
Je t’aime Personne
Je t’aime Adieu !
Je t’aime C’est mieux !
Pourquoi bon Dieu
Tout est si vieux ?
Je t’aime Personne
Je t’aime Personne
Je t’aime toutes
Je t’aime Écoute
Le long de ma route
Quoi qu’il en coûte
Je t’aime Personne
Je t’aime Personne
Je t’aime maldonne
Je t’aime démone
Bonjour Personne
Je t’aime Pardonne
Je t’aime Personne
TU ES
Jeune droite
Outre
À contour de femme
Embrasée
D’irradiante
Verticalité
TU ES
Dressée
Statue calme
Au sourire
Compliqué
Plantée sur
D’initiatiques
Intemporalités
TU ES
Sereine déité
En instance
De soleil
Marchandant
Des gestes
Stellaires
À force
De terrienne
Compacité
TU ES
Caverne ébène
Outre oblongue
De vin lourd
Et de musc
Offerte à étancher
La marée fauve
Des désirs
Divinement païenne
Ordonnançant
Tes propres mythologies
AMOURS SONT MORTES
Tes yeux jouaient à me masquer
L’aveu que j’y traquais
– T’en souvient-il ? –
Cherchant aurore entre tes cils.
Je sus forcer tes interdits
Alors tu fus si belle
– Invoquant le ciel –
Qu’un oiseau d’or en descendit.
Mais les aurores se sont lassées
J’eus beau fermer la porte
– Ne meurs encore ! –
Mais l’oiseau d’or nous a laissés.
Pourquoi faut-il que tout s’en aille ?
Seul est resté ton corps.
Amours sont mortes
Amours sont mortes
Et j’attends là les funérailles !
TABLEAU
La lune était un œil crevé
De profil de masque noir oublié
En équilibre sur l’horizon
L’autre lune était
La lune.
À l’aplomb du monde on voyait
Un monticule ou fosse commune
Et en poignard dans la terre
La croix
Une croix avec un nœud le long du bois.
Derrière on croit
Qu’un mystère invisible et lourd se cachait
Noir hanté de gestes écorchés
Et laids.
La nuit était de velours
Par endroits
Avec tout droit
Ce soldat assis sous un casque pointu.
Il était mort
Ou un épouvantail
Ou bien il dort.
Sa musette était pleine
Des yeux de toi
Épaupiérés
Tout étonnés.
Tes cils étaient de bois
Et on entend ta voix.
Tes jambes étaient des jambes
La lune la lune.
Ton corps était un poisson mort.
Et le reflet de lune est là
Qui dort au coin du bois.
La question silence
ALCHIMIE
Contempler le noir
Revient à lueur voir
Révéler tel mot
Sous couvert du silence
À inventer la voix
Écouter l’obscur
Scruter un visage,
Vers un second soi
Tendre la main
À force de la nuit
Aider à naître
Le jour nouveau
Outrepassant
Le reconnaître
L’aube esquisse
La vierge mort
L’enfant hâtant
Immobile
La négation
De l’homme
N’aura régné
Que royauté
Si précaire
Tant qu’enfin
Rayonnera solitaire…
La pourpre envolée
LA QUESTION SILENCE
Outrepassant l’arche d’obscure clarté
Vers l’innombrable désert lançant
Les mots d’usage
La question silence je la pose…
La réponse de la voix silence
Qui est censé la donner ?
Holà vous autres
Les mots silence vous les galvaudez !
Toi-même n’en finiras-tu donc jamais
Avec les fadaises ?
La question silence je la pose
La réponse qui l’attend ?
Qui l’entend ?
Le lys du silence qui le cueille ?
Le calice du silence qui le tend ?
À le redresser
Qui daignera s’employer ?
Toi ? Lui ?
Ne sera-ce pas la Tierce
La Tierce qui attend ?
Orage grenade entrebâille l’écarlate. Enclos instaure le sang étroit de mythologiques accolades. En instance de mortification stagne l’altière lourdeur mamelle.
Native aux sources circulaires couronnant la terre des eaux. Ceinture à dessein relâchée délimitant l’océan. Défi de réduire toute unicité.
Agenouillé on s’émerveillera d’un vulnérable bouclier de ce qui en des temps effacés fut qualifié de chimère.Oasis hantée où inaccompli le voyageur restaure des rumeurs de volcan.
Aventuré jusqu’où vainement le fleuve même entraîne ses tumultueux silences.
Divisant des taillis d’antique profondeur d’indicibles gémellités insultent l’exactitude du ciel.
Ciboire dressé
Rayonnant…
Orfèvrerie
Renversée
Maculant
L’autel déserté
Orpaillerie
De piètre et bel
Assouvissement
Ciboire renversé
Souillant
D’écarlate
Intemporalité
L’autel
Désaffecté
Orfèvrerie
De piètre
De piètre et las
Assoupissement
Regard de chair
Rien qu’affleurée
Aveu voilé
D’atermoiement reclus
Bouche qui forcement
Dure
Des lèvres entrecloses
Pantelante
De mirifique
Retenue
Dérive de négation
Enfin tue
Parcimonieuse main
Composement
Patientant
Un corps à partager
Plainte de source
Juste éveillée
Coûteuse rapine
De pâles épanchements
Bouche qui creusement
Obstine
Un corps
Jamais encore
De sa vie
Sa propre vie
Inassouvi
Ciel étiré soufflant des frémissures rauques. Plantées sur le bleu transversal des mers du sud nous découvrons les grottes inviolées.
Derrière, des arbustes glacés de branches fragiles animales. Caresses éblouies et
Mordus une tache de sang. Visage jade…
À même la grève délassant nos corps lavés. Des nuages délaient leurs bouffonnes redondances. Rebelles aux vaines ostentations les mutants aux tempes étroites dressent les panneaux d’invisible. À l’orient un soleil rond gros lourd éclipse les tentatives de bébés-astéroïdes s’essayant à disqualifier nos préhistoires.
Sel eau acide… La parade de somptueux poissons dorés circonscrit l’accomplissement des rituels. Plus démesuré que serait l’univers ton corps d’un suintement continu fertilise la main baguée de résipiscence.
Des yeux vitres opaques. Par-delà survivent des myriades d’or de feu. Épave marine. Vivantes pâleurs de corail. Indéfiniment fécondée par d’androgynes adulations d’algues. Obstinant les gestes pérennes les vastes poignées de vapeur des océans chargent de voiles. L’horizon se peuple d’ailes translucides. Impavides des monstres ventrus renouent les filigranes…
Femme Aphrodite d’elle-même enlacée
Incessamment rejointe par la surenchère des vagues
Citadelle de fragrances
Autour d’un visage
Piscine de marbre blanc
Où noie ta langue
Poisson agile
Captif
Évadé par tes lèvres
Dont saigne le corail
Saigne
Citadelle immobile
Cernée de cent et une
Processionnelles
Transhumances
Dés lors pétrifiées par
L’imminence
D’une prodigue
Autant qu’initiatique
Célébration des corps
RECHERCHE D’UN VISAGE
Les yeux
Dis les yeux
S’il est vrai que les yeux…
Dis la main
La main
Pas même un visage
Dis le front
Un visage opiniâtre
Accordant ses rides
Un front faisant front
La bouche
La bouche quant à elle
Soupire sourire
Dis les yeux
S’il est vrai
Qu’une main
Deux fois bâillonne
Son compte de lèvres
Dis le nez
La bouche
Quant à elle
Soupire sourire
En vérité
Que dire d’un nez ?
D’un menton ?
Que dire d’un visage ?
Une image ?
Qui passe lasse ?
Grimace
Sourire soupire
S’il est vrai
Que chacun soupèse,
Analyse
Le rien, le tout
Que tout destin se nourrit
De ce tout, de ce rien
Et c’est tout !
Homme arrimé en chauve-souris cognant aux murs décharné Sous la peur braconnière à grand-force se déployant Solitude cabossant son crâne d’os poreux Liquéfiant les rideaux écarlates rétifs à s’écarter
Traquer le fruit de sang né de l’inflexible reflux d’eau pure Partir de sa taille paléontologique Au cœur de la ville désertée emplir de grandiloquents silences Tentation de justesse réprimée de réinvestir les sentes idolâtres d’un mirage de femmes-licornes à éperonsde vent…
Enchantées
Écartelées
Eau claire de supplice Scruter refermé autour de la flamme dans un enchevêtrement pléthorique d’index et de majeurs Synthétiser l’Homme Jusqu’à cette simpliste carcasse d’os de chair de sang
En-dedans de lui-même crucifié
Paume sans main repliée sur l’ultime