Volage à l'italienne - Claudia Sani - E-Book

Volage à l'italienne E-Book

Claudia Sani

0,0

Beschreibung

« Pourquoi tant de haine ? D’indifférence ? Pourquoi vivre une relation avec quelqu’un d’autre est-il si compliqué ? Doit-elle toujours finir mal ? Suis-je la seule à ressentir cela ? Suis-je si différente que les autres ne me comprennent pas ? Suis-je unique à vouloir aimer, à tomber amoureuse de plusieurs personnes ? Ai-je le droit de succomber au plaisir, sans penser aux conséquences ? Ai-je le droit de vivre mes rêves ? » 

À PROPOS DE L'AUTEURE

D’origine italienne, Claudia Sani a quitté son sud natal pour s’installer à Lyon. Mère célibataire, elle se sent bien accueillie dans cette nouvelle vie, et pourtant, cette sensation d’être une étrangère dans son propre pays la poursuit. Elle mettra cent jours à s’adapter au climat, et des années à se sentir vraiment chez elle. Ces émotions vécues dans la solitude lui inspirent l’histoire d’Iris, femme dans un monde masculin, étrangère dans le monde lyonnais.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 213

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Volage à l’italienne

Chapitre 1

- Pourquoi on doit aller à Lyon, maman ? demanda Elisa. 

- Ma puce, on a déjà parlé de cela, je crois, répondit Iris. 

- Oui, mais ça me saoule, répondit sa fille, tout ça parce que tu as décidé que tu n’aimais plus ton travail à Saint-Nazaire, que tu voulais changer, que tu n’aimes plus papa, alors on n’a pas le choix. 

- D’abord, ce n’est pas que je ne l’aime plus. C’est votre papa, et je l’aimerai toujours. 

Iris vit couler une larme sur chacune des joues de sa fille. Elle détourna la tête et se concentra sur la route pour ne pas succomber elle aussi. Cela faisait six mois que Joseph et elle étaient séparés. Et elle disait vrai. D’ailleurs, elle avait toujours essayé de dire la vérité à ses enfants. Mais voilà, Joseph et elle étaient arrivés au bout de leur histoire. Enfin, elle le croyait, même si elle avait du mal à se l’avouer.  Ils ne se comprenaient plus, passaient leur temps à se chamailler, et n’avaient plus de désir l’un pour l’autre. Cela faisait longtemps qu’Iris le savait, mais elle refusait de voir la réalité en face. C’était difficile de tout casser, tout lâcher, partir. Mais maintenant, c’était chose faite, le poids lourd avait quitté son cœur, qui avait retrouvé la paix. 

- Ce n’est pas vrai, si tu l’aimais encore, tu ne l’aurais pas quitté. 

Elisa avait un air à la fois triste et buté, et sa mère en était vraiment désolée. 

- Je suis désolée pour vous ma chérie, mais c’est plus compliqué que cela. 

- C’est toujours trop compliqué, hurla Elisa, tu crois qu’on ne comprend rien peut-être ? La seule chose que je comprends moi, c’est que tu es juste une égoïste et que tu ne penses qu’à toi. T’en as rien à foutre de tes enfants. Et Léon qui va grandir sans son père, ça ne te fait rien, ça non plus ? 

- Si, ça me blesse, répondit Iris, comme tes paroles. 

Elisa se radoucit et regarda sa mère. Sa jolie maman. Elle était mince, de taille moyenne, avec un visage aux traits fins et des grands yeux bleus. Un grain de beauté, sur la tempe lui donnait une caractéristique charmante. Elisa aussi était mignonne, avec son visage rond, ses beaux yeux noisette, et ses bouclettes. Mais sa maman avait un physique magnétique, c’était incontestable. Et son corps était encore souple, après deux grossesses, et à 35 ans sonnés. 

- Pardon maman, mais ce que je dis je le pense. Je suis triste d’être séparée de papa. 

- Oui, je le sais, répondit la jeune femme, mais ce n’est pas exclu que ton père nous rejoigne un jour. Il pourra trouver un travail dans la région et un appartement dans le même coin. 

- J’ai peur maman, souffla Elisa. 

- Tu as peur de quoi, ma belle ? Demanda sa maman. 

- J’avais des copines, une maîtresse, là-bas, je ne connais personne. 

- Moi non plus, Elisa, répondit Iris. Mais nous sommes fortes, intelligentes et l’on va s’y faire, tous les trois. 

Iris regarda dans son rétro et contempla quelques secondes son adorable fils, Léon.  Blond comme son père et sa sœur, il avait un visage tout rond, auréolé de jolies bouclettes, et des petites fossettes dans le creux des joues. Mais pour l’heure, il dormait paisiblement, seule âme tranquille dans cette voiture. Enfin, elle espérait qu’il était tranquille. Elle avait trouvé ce poste dans une grande entreprise automobile de Lyon, mieux payé, et du même coup, elle s’éloignait de sa famille, non sans un certain soulagement. Depuis sa séparation, elle sentait le poids de la culpabilité, que lui faisaient ressentir ses parents et beaux-parents. Ils étaient distants, et à chaque fois à deux doigts de lui reprocher sa nouvelle vie et ce qu’elle entrainait. Mais c’était terminé, elle tirait un trait sur son ancienne existence et se lançait à l’aventure, écrivant à la plume, une nouvelle histoire sur la page blanche qu’elle avait choisie. Dans cette entreprise, elle y entrainait ses deux seuls amours, et à trois, ils allaient trouver leur équilibre, c’était certain. 

Pour se donner une contenance, Iris éleva le volume de la radio. C’était une chanson qu’elle aimait bien, et elle se mit à chanter à tue-tête, bientôt, rejointe par sa fille. Le couplet était un peu dur, mais le refrain était connu par cœur, et elles ne s’en privèrent pas, alternant leurs deux voix : 

« Could you find a way to let me down slowly?

A little sympathy, I hope you can show me

If you wanna go then I'll be so lonely

If you're leaving baby let me down slowly

Let me down, down

Let me down, down

Let me down, let me down

Down, let me down, down

Let me down

If you wanna go then I'll be so lonely

If you're leaving baby let me down slowly »

- Hum, c’était trop bon, crut bon de rajouter Iris. 

Elisa retourna dans sa bouderie, mais n’ajouta rien. Léon commençait à bouger un peu, il faudrait bientôt s’arrêter, même s’il avait encore des couches, pour se dégourdir les jambes et éventuellement prendre un café pour Iris. 

- Tout est prêt dans l’appart ? 

- Oui, depuis deux mois, je suis en train de nous préparer un petit endroit bien cocooning, tu vas voir ! Déclara Iris, sûre d’elle. 

- Il est grand l’appart, je n’ai pas bien vu sur les photos, c’est dur de se projeter. 

- Oui, c’est sûr, mais 100 m2 vont suffire, j’en suis sûre. Vous aurez chacun votre chambre à l’étage, comme je te l’ai déjà dit. 

- Et tu ne m’as pas encore parlé de la tienne ? demanda Elisa, curieuse. 

- Et bien, elle est en bas, au fond, derrière le salon et la cuisine. 

- Maman, j’ai besoin que tu me le dises, mais… As-tu trouvé quelqu’un d’autre pour remplacer papa ? 

- Elisa, d’abord, jamais je ne remplacerai ton père, je te le jure… 

Et ensuite, non, je n’ai personne d’autre dans ma vie. 

Iris replaça vite son attention sur la route mais elle avait eu le temps de voir sa fille lever les yeux au ciel, puis manifester un peu de soulagement. Elle savait bien ce qu’elle pensait. Mais personne ne l’empêcherait de vivre sa vie et d’autres aventures. Trente-cinq ans, ce n’était pas si vieux. Iris savait qu’elle plairait encore. Mais pour l’instant, elle n’y pensait pas trop. Et après deux grossesses, elle se demandait si elle pouvait encore avoir du désir. Les fois où elle avait couché avec son mari n’avaient guère été satisfaisantes. Elle ne ressentait pas grand chose, son désir, et ses pulsions avaient disparu au profit de la vieillesse, des cheveux blancs et des soucis. Pour les cheveux blancs, ça allait encore. La jeune femme devait en avoir cinq tout au plus, bien cachés sous sa chevelure brune corbeau. Et pour l’instant, elle se disait même qu’elle ne supporterait pas de les voir ces cheveux vieillissants et les cacherait rapidement grâce un bon ton sur ton. 

- Si jamais ma situation devait changer, je vous le dirai, à toi et ton frère, ne t’inquiète pas. Bon, il est 15h30. On devrait arriver vers 19h, d’après le GPS. Ca vous dit un Burger King ? 

- Maman, c’est gras. 

- Oui, je sais, ma puce, mais je n’ai pas trop le temps de cuisiner là ! 

- Ouaiiiiis ! Hurla Léon, de son siège installé à l’arrière de la CLIO. 

- Bon, au moins un qui est content, répondit Iris. 

- Non, mais moi aussi, je suis contente, c’est bon, répliqua Elisa. 

- Alors, ca va ! On va prendre un apéro coca à notre nouvelle vie ! 

- Et maman, j’ai quand même hâte de voir un peu la tête de mon nouveau collège ! 

- Heu, pas ce soir, là ma belle ! répondit Iris. On a toute la fin de la semaine pour ça. La rentrée pour les 6èmes, c’est lundi, dans dix jours. 

- Oui, je sais, ronchonna Elisa. J’ai trop peur. 

- De toute façon, à Saint-Nazaire ou ici, tu aurais été nouvelle, alors ? 

- Ca, tu me l’as déjà dit. Mais, quand même, j’aurais au moins eu Lilou. 

- Je le sais, Elisa ! Je te promets que l’on retournera à Saint-Nazare à toutes les vacances. 

- Et je vais lui téléphoner souvent ! 

- Euh, oui, d’accord, mais tu vas aussi travailler, hein ? 

- Maman ! Descends ! Réclama Léon

- La prochaine aire, on s’arrête, mon cœur ! 

- Maman ! cria Léon

- Oui, tiens bon, mon chouchou. On arrive. 

Là, on était bien d’accord, Léon était réveillé, c’était la fin de la tranquillité ! « Ah, faites des gosses ! » Comme disait son père ! Mais Iris se disait que malgré les complications d’une fratrie, elle était fière de ses enfants. Sa fille était mature, cultivée et douée, et son chouchou était si craquant. Il avait les yeux sombres, comme des billes de mercure. Si il se disait que l’on voyait la malice ou l’intelligence à la vigueur du regard, il ne faisait aucun doute que celui de Léon n’en manquait pas. Mais pour l’heure, il était vraiment temps de s’arrêter et Iris mit son clignotant afin de virer à droite, sur l’aire de repos qui s’approchait. La zone était pleine de voitures, de poids lourds et Iris souffla de découragement, juste avant de trouver une place presque devant la station essence.

 – Allez, on va vite aux toilettes, et on continue la route. 

Aussitôt dégagé de sa ceinture, Léon bondit hors de la voiture et fonça vers la porte automatique, suivi aussitôt par sa mère et sa sœur qui éclatèrent de rire. – Il est trop chou, avec ses petites pattes, dit Elisa. 

- Tu étais pareille ma belle, répondit Iris, avec un clin d’œil. 

Le temps qu’elles replacent leur regard devant elles et Léon apparut avec un casque de guerrier sur la tête. 

- Chapeau, dit-il. 

Les deux femmes rirent de plus belle et se dépêchèrent d’aller se soulager pour reprendre la route. Iris ne voulait finalement pas prendre un café car elle avait un peu peur de ne pas dormir ensuite. La route se poursuivit dans le plus grand calme, chacun perdu dans ses pensées, et écoutant la musique à tue-tête. Iris aimait bien la fréquence Jazz Radio, M radio et Cherie FM. La radio Hit West lui manquait un peu, mais comme elle n’existait que dans l’Ouest, elle aurait le plaisir de la retrouver pendant les vacances. L’autoroute se déroulait tranquillement. La dernière heure, entre Clermont - Ferrand et Lyon n’était pas la plus passionnante. Mais tout le monde était plutôt pressé, et l’on arriva bientôt en vue de la pancarte de Saint-Genis-Laval, un Burger King bien chaud à l’arrière.  Iris était un peu stressée de voir comment allaient réagir ses enfants en débarquant dans leur nouvelle maison. Ils allèrent se garer dans le parking souterrain, puis ensemble, ils montèrent dans l’appartement. On ne pouvait pas dire qu’il était beau, dans un immeuble très moderne, mais il était propre, en duplex, tout blanc, et Iris avait fait un effort de rangement, par respect pour les siens. Anxieuse, celle-ci scrutait les regards de ses petits. Léon fit le tour du rez-de-chaussée en un instant, et parut charmé. Le sourire d’Elisa était plus timide mais Iris se sentit rassuré, et posa les bras sur les épaules de sa fille. 

- Allez ma belle, ça le faire le faire, d’accord ?

Elisa planta un bisou sur la joue de sa mère puis alla s’installer autour de la table du salon et commença à déballer le Burger King. 

- Il est où Léon ? demanda Iris.

Elle entendait bien un petit bruit, près de l’escalier. Mais c’est à moitié exaspérée qu’elle découvrit Léon, sous une marche, en train d’enlever sa couche, souillée. 

- Raaaaa ! Mais ce n’est pas possible celui-là ! Allez, vite, on va se nettoyer puis on va manger, parce que ça va vraiment être froid. 

Finalement, à Saint-Nazaire ou à Lyon, la vie n’était pas si différente. On vivait au rythme des bêtises de Léon, tout simplement. 

Chapitre 2

Lundi soir. Elisa et Léon étaient couchés. Ouf. 

Iris se servit un bon verre de rouge, dans un ballon Ikéa et se posa sur son canapé en simili noir. Elle se sentait fatiguée nerveusement. Le week-end s’était bien passé, les enfants étaient calmes et semblaient s’adapter. Maintenant, ce n’était que le début. Il restait encore une semaine avant la rentrée et il fallait tout préparer. Elisa se sentait motivée et en même temps, elle avait un peu peur. Il fallait d’abord trouver un assistant maternel pour Léon. 

Au mois d’avril, elle en avait contacté deux, de Saint-Nazaire. Un homme et une femme. 

La femme, Sylvia, lui avait été conseillée par la directrice du collège d’Elisa, qu’elle avait eu au téléphone. Elle lui avait donc appelé, aussitôt. 

- Allo. 

- Bonjour, je m’appelle Iris. A partir de septembre, je vais déménager sur Lyon et je suis à la recherche d’une assistante maternelle. 

- Bonjour madame, oui, vous avez de la chance. Il me reste une place. 

- Vous avez combien d’enfants en garde ? 

- Alors, j’ai un garçon de six mois et une fille de 1 an. Quel âge a le vôtre ? 

- Léon a deux ans, du mois de janvier. Il lui reste un an avec une assistante maternelle, avant de rentrer à l’école. 

- Oui, alors, ça irait au niveau de l’âge. Et vous faites quoi comme travail ? 

- Je suis responsable logistique dans une entreprise. Je travaille 47 semaines par an. 

- D’accord, au niveau des horaires ? 

- Euh, je déposerai Léon vers 8h00. Et je viendrai le chercher vers 17h30. 

- Très bien. Voulez-vous que l’on se voie ? 

- Et bien, j’ai votre numéro. Je vous recontacte d’ici peu. Merci madame, à bientôt. 

- Au revoir madame. 

Iris, assise par terre sur le carrelage blanc de la maison de Saint-Nazaire avait raccroché, et s’était sentie dépitée. Sylvia avait une voix traînante et en même temps, elle parlait vite, en tout cas, en mâchant à moitié ses mots. Ce n’était pas possible. Comment avait-on  pu la lui conseiller ? Et bien, si les lyonnais étaient aussi charmants, ca promettait de bons moments. Bon, il faut dire que les lyonnais avaient une réputation bien connue, d’être froids, peu accueillants, qu’ils restaient entre eux. Mais Iris, en éternelle optimiste ne voulait pas trop y croire. 

A force de chercher sur Internet, elle avait trouvé la liste des assistants maternels de Oullins et Saint-Genis. En fait, il fallait que les mairies les envoient. Et chercher un assistant maternel, dans une liste, sans d’autre critère que le nom et l’adresse avait quand même quelque chose de risible. Ils n’avaient pas encore d’appartement, à cette époque, la seule chose qu’elle connaissait, c’était le collège de Elisa, à Saint-Genis-Laval. Alors Iris prit le seul critère qui lui vint à l’esprit et téléphona à l’un des deux seuls hommes de la liste. 

- Allo. 

- Bonjour monsieur. (« hum, la voix me plait mieux déjà »). Je m’appelle Iris. J’habite pour l’instant  Saint-Nazaire, dans le 44 et je cherche un assistant maternel pour mon fils qui aura deux ans et demi. 

- Bonjour madame, je ne suis pas spécialement en recherche mais pour une année, oui cela pourrait m’intéresser. 

- Vous avez d’autres enfants ? 

- Oui, j’ai une fille en périscolaire, et un bébé de neuf mois. Ils s’appellent Léana et Raphaël. Et votre enfant ? 

- Léon. 

- Hum, j’adore ce prénom, répondit l’homme, prénommé Cyril. 

« Et moi, j’adore votre voix », pensa très fort Iris. En fait, il avait un timbre doux, légèrement aigu, mais pas trop. Et il parlait avec des notes chantantes. Mais là, Iris devait redescendre sur terre. Elle faillit se donner une gifle pour se concentrer. 

- Merci beaucoup. Alors, je travaille sur 47 semaines de 8h00 à 17h30 environ. Et je les garde le mercredi. 

- Oh, mais c’est parfait ! Tout-à-fait ce qu’il me faut. Pourrait-on se rencontrer ? Vous venez sur Lyon, avant septembre ? 

- Oui, je commence à travailler un mois avant. On pourra se rencontrer fin août, avec les enfants. Mais en attendant, on peut se contacter par mail, si vous le voulez. 

- Oui, avec plaisir. Je vous envoie mon contact par sms. 

- Alors à bientôt Cyril. 

- A bientôt Iris. 

C’était évident qu’il n y avait pas photo entre les deux assistants maternels ! 

Et c’est ainsi que, pendant quelques temps, Iris et Cyril avaient commencé à communiquer par mail. Tous les détails avaient été donnés, elle pensait ne rien avoir oublié. Mais elle ne l’avait pas encore rencontré en vrai et appréhendait un peu. 

Plairait-il à Léon ? Cela se passerait-il bien avec un homme ? Pour Iris, c’était une bonne idée de se confronter à une figure paternelle, en cette période de changements. Mais encore une fois, elle transposait ses pensées et problèmes d’adultes sur son fils, de deux ans et demi, et n’était pas forcément sûre d’avoir raison. 

Avec son verre de Lanessan, Iris se remémorait ces moments passés depuis quelques mois et se forçait de ne pas anticiper la rencontre de demain avec Cyril. Il était temps d’aller se coucher. La meilleure manière de ne pas ruminer était bien de dormir. En plus, Iris avait cette chance de très bien dormir. Il était difficile pour elle de se coucher. Mais une fois au lit, elle s’endormait aussitôt et en dehors des potentiels pleurs de Léon, elle ne se réveillait que le lendemain matin, à 6h45. 

Cette nuit-là,  Iris n’eut guère de difficulté, elle était épuisée. Elle alla se réfugier dans la première chambre à droite, dans son grand lit blanc, pour s’abandonner dans les bras de Morphée !

A 8h12, Léon débarqua en courant dans la chambre et se réfugia dans les bras de sa mère. Iris devina qu’Elisa l’avait enlevé de son lit car il avait encore le lit à barreaux des bébés. En même temps, ça allait car même s’il était plutôt grand pour son âge, il était tout maigre. Il ne prenait donc pas trop de place dans un lit. Et il avait cette habitude de se pelotonner en fœtus dans un coin, dans son lit ou pour l’instant dans les bras de sa maman. 

- Ca va mon chou ? 

- Oui, ca va. 

- On va voir nounou aujourd’hui ? 

- Non, pas nounou, répondit Léon. 

- Bon, on va prendre le petit dej ? demanda Iris. 

- Oui. 

Et Léon sortit brusquement du lit. Iris était dégoûtée. Elle lui avait proposé de manger et avait bien vu que ça l’intéressait plus qu’elle, et d’un coup, sa délicieuse petite odeur de bébé, si particulière, si agréable, avait disparu avec lui. Bon, en même temps, c’était de sa faute. Elle aurait du en profiter au lieu de perler. 

Et maintenant, il fallait se lever… Dur, dur…

- Salut, maman, apparut une perruque de bouclettes, près de la porte. 

- Bonjour ma puce, répondit Iris. 

Un petit bisou sur la joue suffisait entre elle. C’était le début de l’adolescence. Même si cela n’empêchait pas Elisa de venir se blottir dans les bras de sa maman dans quelques moments privilégiés. 

- Allez, on va manger ? 

- Tu veux que je t’aide, maman ? 

- Avec plaisir, ma belle. 

Ils s’attablèrent tous les trois, autour de céréales bio au chocolat, du lait d’avoine et du jus d’orange sanguine. Elisa préférait le jus de fruit exotique, mais Iris n’en avait pas acheté assez. On trouverait bien le moment de faire des courses dans la journée. Pour l’heure, c’était le rendez-vous avec Cyril qui la préoccupait.

Après une douche rapide, et un habillage encore plus rapide, ils se dépêchèrent d’aller au garage, pour prendre la voiture. Ce qui était bien fin août à Lyon, c’est qu’il faisait tellement chaud qu’il n y avait pas besoin de beaucoup s’habiller. Iris avait juste un pantacourt noir, des baskets blanches et un débardeur rouge brique. La tenue parfaite, qui ne prend pas la tête ! 

- C’est bon, tout le monde est attaché ? 

Et Iris sortit tant bien que mal du garage. Les garages étaient vraiment serrés dans ce parking, un de ces jours, elle allait défoncer la voiture. La route jusqu’à Oullins n’était vraiment pas longue. Il suffisait juste de descendre la rue. Oullins n’était finalement qu’un couloir, entre Saint-Genis-Laval, petit village entre ville et campagne et Lyon, la grosse métropole. 

Cyril habitait une jolie maison en bordure d’une rue, en face d’un collège public. Comme beaucoup d’habitants de Lyon, il avait aménagé une pelouse en plastique dans son jardin devant l’entrée. Iris trouvait cela vraiment étrange. Son petit cœur d’écolo reçut un pincement léger à cette vue. Mais il fallait bien s’adapter. Et oublier ses convictions, le temps d’une adaptation. 

Cyril ouvrit la porte et les accueillit en haut de son hall d’entrée, charmant et souriant. 

Il n’était pas très grand, assez mince. La première chose qu’Iris vit c’était ses mains. Il avait des très jolies mains. Elles étaient fines, légèrement bronzées, élégantes. Ses yeux étaient bleus et pétillants. Il était chauve, mais avait une moustache très travaillée, parfaitement découpée sur les côtés et qui finissait en pointe. 

- Bonjour Hercule Poirot. 

C’était quitte ou double. Cyril éclata de rire. 

- Bonjour Isabelle. Je suis ravi de vous rencontrer. Bonjour Léon, bonjour Elisa, c’est cela ? 

- Oui, bonjour monsieur, répondit Elisa. 

- Allez-y, entrez, je vous en prie. 

- Merci. 

- Si vous le souhaitez, on va aller dans le jardin. Vous voulez un verre d’eau ? 

- Avec plaisir. 

L’intérieur de la maison était super moderne. Et très propre. Iris avait hâte de découvrir qui était la fée du logis, mais elle était vraiment impressionnée. 

Il fallait grimper un escalier en bois dans le salon pour accéder au jardin. On accédait alors à une terrasse en hauteur, qui surplombait le jardin naturel, cette fois-ci. Il n’était pas très grand, mais il y avait largement de quoi faire un barbecue, mettre des jeux d’enfants ….

Iris s’assit sur une chaise et Cyril proposa aux enfants de descendre dans le jardin. 

- Vous pouvez descendre, il y a une sécurité dans l’escalier. Vous allez voir, dans le jardin, il y a une tortue. Elle se promène tranquillement et  suit les petits occupants. Attention à ce qu’elle ne vous morde pas ! 

- C’est vraiment très joli, chez vous, essaya Iris, timidement. 

- Oui, on a de la chance. La vie à Oullins est plutôt agréable. On est près de Lyon. On vit dans une petite ville. On a pleins d’avantages. 

- Oui, je m’en aperçois petit à petit. Mais j’avoue que j’ai encore un peu de mal à m’adapter. 

- C’est normal, vous venez d’arriver. On dit qu’il faut cent jours pour s’adapter, non ?

- Hum, bravo ! 

Cyril eut un sourire énigmatique qui plut à Iris. 

- J’ai commencé votre contrat ! Voilà, Léon Cassetti, c’est bien cela ? 

- Oui, je vais y jeter un coup d’œil et je le complèterai. Puis, je vous le rends très vite ! 

- Ca marche. Il est comment ce petit ange ? 

- Franchement, il est facile. Il a un rythme calme, il joue tranquillement. Vous ne devriez pas avoir de mal. 

- J’en suis sûr. Alors, on peut faire deux heures d’adaptation cette semaine. Ca irait ? Il est grand. Oui, on va faire cela. On va commencer vendredi. Et lundi, c’est le grand démarrage. 

- J’ai confiance, ca va bien se passer. 

L’échange se déroulait tranquillement. Cyril lui paraissait un peu froid, mais c’était normal pour une première rencontre. Il était assez charismatique et Iris ne se méfia pas. Comme à chaque fois, elle se sentait en totale confiance avec la personne. C’était un défaut qu’Iris n’apprendrait sans doute jamais à contrôler ou dépasser, mais elle se donnait corps et âme dans une relation, pensant que la personne en face pensait comme elle. Et l’avenir lui montrerait sans doute encore combien elle avait tort. En tout cas, pour l’instant, elle se sentait loin de cette préoccupation, elle se disait juste que Léon serait bien ici, à Oullins. 

Chapitre 3

Cela faisait deux semaines qu’Iris avait commencé son travail à Irigny, dans l’usine automobile. Elle était chargée de l’amélioration continue, dans les usines de fabrication, dans les différents sites européens. Pour éviter les déplacements, elle travaillait de son ordinateur, suivait les rapports des chefs d’atelier, et se renseignait ou réfléchissait pour trouver des solutions à apporter aux diverses entreprises. Son travail était intéressant et plutôt bien payé, mais elle sentait déjà qu’elle était une goutte d’eau dans un océan, et se demandait si son travail de chef de projet à Saint-Nazaire ne lui plaisait pas davantage. Mais elle prenait ce qu’elle devait prendre et les horaires lui allant bien, elle en profitait pour passer du temps avec ses loulous. 

A 18h, elle arriva devant chez Cyril. Elle sonna à la grille d’entrée mais à ce moment précis entendit un « Iris » dans son dos. 

En se retournant, elle vit son petit Léon marchant tranquillement aux côtés de Cyril, et arrivant dans sa direction. 

- Nous sommes allés nous promener en ville. Léon avait besoin de bouger un peu. Il marche bien, hein ?