Humour dans l'amour - Madeleine Delbrêl - E-Book

Humour dans l'amour E-Book

Madeleine Delbrêl

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Beschreibung

Un recueil de textes variés écrits par une grande figure du catholicisme

Ce nouvel ouvrage met à la disposition du public des textes d’un genre différent : des méditations poétiques, des hommages, des sketchs et chansons, des poèmes de circonstance. Ces textes pleins de fantaisie ont une place majeure dans la vie et l’œuvre de Madeleine qui y médite souvent le quotidien en vers libres, pleins d’images et d’humour. Le lecteur entre ainsi dans une prière simple et profonde. Les noëls, du même style, témoignent de sa mystique de l’Incarnation. Ce volume est un hommage à l’humour légendaire de cette grande figure.

Pensées et poèmes se mêlent dans cet ouvrage inédit et plein de fantaisie.

EXTRAIT

Il fait chaud.
Tout colle sur nous.
Nous collons à tout.
Nous avons du mal à tout faire.
Le travail n’avance pas.
La pensée ne démarre pas.
Les soupirs suivent les soupirs.
On constate, chaque quart d’heure, que l’orage n’a pas
éclaté,
n’éclatera pas ce soir,
n’éclatera vraisemblablement jamais.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Poète, assistante sociale et mystique, Madeleine Delbrêl (1904-1964) est considérée par beaucoup comme une des figures spirituelles majeures du XXe siècle. Par ses engagements sociaux à Ivry (94), son témoignage de vie évangélique et communautaire en milieu déchristianisé, et par l'ampleur de ses écrits aux accents pionniers, elle atteint, petit à petit, un large public sensible à la vérité et à la pureté de sa vie et de sa parole. Sa cause de béatification a été introduite à Rome.

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AVANT-PROPOS

Les Œuvres complètes de Madeleine Delbrêl ont commencé à paraître en mars 2004, année du centenaire de sa naissance. Les deux premiers tomes, formés des volumes 1 et 2 de la Correspondance, ont conduit jusqu’à l’année 1952 incluse.

Il a semblé opportun d’arrêter provisoirement la publication des trois à cinq volumes restants de la Correspondance pour les raisons suivantes. D’une part, le comité d’édition souhaite diffuser largement et rapidement le pan de l’œuvre de Madeleine balisé par les méditations poétiques du présent tome et par Alcide prévu pour le tome suivant. Tous ces textes, dont la moitié au moins est restée inédite, forment en effet le cœur de l’écriture de Madeleine Delbrêl. D’autre part, la publication de la suite de la correspondance bénéficiera de quelques années supplémentaires de recherches.

Fidèle à la démarche annoncée dans l’avant-propos du premier tome, l’équipe responsable de ces publications présente les textes par genres littéraires.

Ce tome III des Œuvres complètes s’ouvre avec les méditations poétiques. Publiées en partie par Madeleine elle-même, puis, après sa mort, en 1966, en 1968, et en 1973, ce sont probablement ses textes les plus connus. Certains d’entre eux ont constitué la matière d’un spectacle, inauguré en janvier 2004, qui continue à se produire selon la demande.

L’une de ces méditations, appelée « Humour dans l’amour » a servi de titre et d’emblème à ce livre.

Car amour et humour se retrouvent dans toutes les pièces qui suivent, regroupées par genres littéraires. Ceux-ci sont assez nombreux : les méditations poétiques, les textes écrits pour célébrer Noël, les prières, les poèmes tardifs, les poèmes et chansons de circonstances qui viennent sous sa plume souvent en fonction de l’actualité, les poèmes pour les jeunes, les brèves réflexions, les textes à parfum biographique, les histoires burlesques, enfin toute une série de petits écrits d’hommages, de remerciements, de vœux.

Chaque genre littéraire est présenté par une introduction. D’autre part, les circonstances de la rédaction d’un texte particulier sont précisées chaque fois qu’il en est besoin.

Dans chaque groupe de textes, on trouvera en tête ceux pour lesquels on n’a pas de date ou qu’aucun élément textuel ne permet de dater, puis les textes suivent selon l’ordre chronologique, reflet partiel de l’évolution de Madeleine.

Pour la présentation matérielle de cette édition, les passages à la ligne qui scandent la pensée de Madeleine et qui figurent dans les manuscrits autographes sont respectés le plus finement possible. Quelques facsimilés permettront au lecteur de juger sur pièce de ce problème difficile. Quant aux différents types de retraits dont Madeleine n’a pas fait un usage très systématique, bien qu’elle les ait multipliés comme par exemple dans le « Noël des pauvres », ils ont été légèrement ajustés pour faciliter la lecture.

D’autres fac-similés sont des reproductions de dessins de Madeleine elle-même. Ces dessins, présents sur les manuscrits, ne peuvent que rendre l’auteur encore plus présent.

Les notations op. cit. se rapportent à la liste bibliographique présentée en tête de l’ouvrage.

Comme pour le précédent tome, a été offerte au lecteur la chronologie abrégée de la vie de Madeleine Delbrêl qu’Agnès Spycket a mise au point. À la fin, on trouvera un index des noms propres, suivi d’une table des matières.

Pour cet ouvrage, les remerciements font mémoire des travaux de Christine de Boismarmin et de Guitemie Galmiche. Les relectures de Suzanne Perrin et de Francette Rodary, membres des Équipes, les conseils vigilants du Père Jean Guéguen, oblat de Marie-Immaculée et du Père Claude Wiener, prêtre de la Mission de France, les indications biographiques données par la famille de Madeleine (famille Mocquet-Junière) nous ont évité nombre d’inexactitudes voire d’erreurs. Sœur Colette Moron, dominicaine, a assuré la saisie d’après les manuscrits. L’Association des amis de Madeleine Delbrêl apporte un soutien indispensable à la pour-suite de l’édition et à ceux qui y travaillent. Enfin que soient remerciées de façon très particulière les éditions Nouvelle Cité.

Gilles François, prêtre du diocèse de Créteil, Cécile Moncontié, au service des archives de Madeleine Delbrêl, Bernard Pitaud, prêtre de Saint-Sulpice, sont les coresponsables de cette édition et forment avec Suzanne Perrin, Agnès Spycket et Henri-Louis Roche le comité d’édition.

CHRONOLOGIE ABRÉGÉE DE LA VIE DE MADELEINE DELBRÊL

par Agnès Spycket

1904 (24 oct.) : Naissance à Mussidan (Dordogne) de Madeleine Delbrêl, fille de Jules et de Lucile, née Junière. Jules, entré aux chemins de fer Paris-Orléans, sera successivement en poste à Lorient, à Nantes et à Bordeaux ; chef de gare à Châteauroux (1911), puis à Mont-luçon (1913-1916).

1915 : Première communion de Madeleine, à Mont-luçon. Santé fragile qui nécessite des leçons particulières. Toute sa vie, elle souffrira d’une mauvaise santé qu’elle négligera trop souvent.

1916 : Jules Delbrêl est nommé chef de gare à Paris-Denfert en septembre. La famille s’installe 3 place Denfert-Rochereau, Paris XIV e. Madeleine (12 ans) étudie le piano et écrit des poèmes depuis 1914.

1920-1921 : Études littéraires et de philosophie à la Sorbonne. Études de dessin et de peinture en atelier rue de la Grande-Chaumière. Madeleine se définit « strictement athée ».

1922-1923 : Rencontre de Jean Maydieu pour lequel elle a une forte inclination, mais qui entrera chez les dominicains en 1925. Elle écrit Dieu est mort… vive la mort (voir les trois versions de ce texte, pp. 29-42 du tome I).

1924 : « Conversion violente ». Son père devient aveugle et doit cesser son activité. La famille s’installe 78 place Saint-Jacques, Paris XIV e, près de l’église Saint-Dominique. Dépression d’une année, soignée dans une maison de santé de la vallée de Chevreuse.

1926 : Ses poèmes reçoivent le prix Sully Prudhomme de l’Académie française. « Épuisement complet » (cf. lettre de l’automne 1926 à Louise Salonne).

Elle rencontre l’abbé Lorenzo, aumônier scout, qui lui propose d’être cheftaine de louveteaux.

1927 : Elle édite ses poèmes en un volume, La Route.

Elle renonce au Carmel pour raisons familiales et décide de travailler pour Dieu dans le monde.

1928-1929 : Mise au repos pour trois mois dans une maison de soins à Chevreuse. Problèmes de santé de sa famille et d’elle-même jusqu’au début 1930.

1931 : Entrée à l’École d’infirmières des Peupliers.

1932 : Élaboration du directoire de la « Charité de Jésus » (cf. lettre du 21 décembre 1936 à une demoiselle inconnue et lettre du 19 janvier 1939 à Louise Salonne).

Diplôme simple de l’École des Peupliers. Entrée à l’École pratique de service social, boulevard du Montparnasse.

1933 (sept.) : Premier voyage à Rome, où est décidée l’installation de la première équipe à Ivry. Madeleine souffre beaucoup de l’estomac.

(oct.) : Engagement dans la « Charité de Jésus » avec Suzanne Lacloche et Hélène Manuel à Saint-Jean-Baptiste d’Ivry pour vivre l’Évangile et au service de la paroisse. Installation dans l’enceinte paroissiale, 207 route de Choisy.

1934 : L’abbé Lorenzo est nommé curé d’Ivry. Premier examen de l’École pratique de service social, mention Très Bien.

Colonie de vacances. Santé déplorable.

1935 (avril) : Installation 11 rue Raspail à Ivry.

1936 : Après des années de mésentente, les époux Delbrêl se séparent. Jules s’installe à Mussidan et Mme Delbrêl à Paris. Madeleine continue à veiller sur eux.

Deuxième examen de l’École pratique de service social, mention Très Bien.

1937 : Brevet de capacité professionnelle d’assistante de service social. Sa thèse, Ampleur et dépen-dance du service social, est publiée chez Bloud et Gay.

1938-1939 : Causeries à des publics divers.

1939 (sept.) : Madeleine est nommée assistante sociale à la mairie d’Ivry.

1940 : La municipalité communiste est destituée. Madeleine est nommée Déléguée technique chargée de la coordination des services sociaux à Ivry, mais le « petit personnel » communiste étant resté en place, elle travaille avec eux et aide les familles de ceux qui sont inquiétés.

1941 : Entrée au Service Social de la région parisienne (jusqu’au 1er octobre 1945). Embauche au Secours National.

(été) : Madeleine accompagne sa mère à Lisieux où elle rencontre le P. Augros, supérieur du futur séminaire de la Mission de France qui, elle, vient d’être fondée.

1942 : Participation à des colloques à Lisieux, au séminaire de la Mission de France, mais refus d’y implanter une Équipe.

1943 : Année importante pour les orientations de la « Charité ». L’Équipe comprend Christine de Boismarmin, Louise Brunot, Germaine Gérôme, Marie-Aimée Jouvenet, Raymonde Kanel, Suzanne Lacloche, Hélène Manuel, Paulette Penchenier, Suzanne Perrin, Andrée Saussac, Marthe Sauvageot, Andrée Voillot. Installation à Cerisiers (Yonne) de Marthe Sauvageot et Suzanne Lacloche et à Vernon (Eure) de Christine, Paulette et Suzanne Perrin jusqu’à la Libération en 1945.

1944 : La mairie d’Ivry est reprise par les communistes. Madeleine travaille avec des « grands types du Parti » et ressent la tentation du marxisme, latente depuis son installation à Ivry.

1945 : Début de collaboration avec Venise Gosnat, adjoint au maire d’Ivry.

1945-1946 : Nombreuses méditations poétiques.

1946 (1er oct.) : Madeleine démissionne du service social de la mairie pour raison de santé et pour s’occuper davantage des Équipes.

1947-1950 : Intense activité des Équipes : en 1949, Hélène Manuel, Monique Joubert et Suzanne Perrin partent pour Herserange, dans le bassin minier de Longwy.

1950 : Rencontre de Jean Durand, en demi-retraite de son poste de professeur à l’École Centrale, qui aidera Madeleine sur tous les plans et en particulier dans ses difficultés familiales.

1951 (août) : Libération, par le Président Vincent Auriol, de Miguel Grant, ancien FTP, injustement emprisonné, défendu par Madeleine depuis 1949 et pour lequel elle avait demandé une audience au Président de la République en juillet.

1952 : Deuxième pèlerinage à Rome, d’une journée de prière à Saint-Pierre pour l’unité de l’Église. Madeleine fait connaissance avec le P. Guéguen. (déc.)

(déc.) : Lettre de Mgr Feltin au sujet de la « Charité de Jésus », demandant à voir Madeleine à son retour de Rome.

1953 (jan.) : Rédaction d’un placet pour les Rosenberg, porté par un avocat à Rome (ils seront exécutés le 20 juin).

(été) : Troisième pèlerinage à Rome lors de la crise des prêtres-ouvriers. Plusieurs rencontres avec Mgr Veuillot (en poste à la Curie romaine). Audience semi-privée de Pie XII à Castel Gandolfo.

(automne) : Notes et lettres à propos de la Mission de France et de l’expérience des prêtres-ouvriers dont l’arrêt a été décrété par Rome.

1954 (juin) : Première conférence à des curés de Paris sur le marxisme, sous l’autorité du cardinal Feltin, de Mgr Veuillot et de Mgr Lallier (dont Madeleine avait fait la connaissance par le scoutisme).

(oct.) : Quatrième pèlerinage à Rome. Rappelée auprès de sa mère au bout de deux jours.

1955 : Grande activité de réflexion sur le marxisme, exposés et Mémoire. Audience auprès du cardinal Feltin qui l’encourage à continuer.

(3 juin) : Mort de sa mère.

(été) : Cinquième pèlerinage à Rome. Mgr Veuillot communique le « Mémoire sur le marxisme » au P. Paul Philippe o.p.

(18 sept.) : Mort de son père. Très mauvais état de santé de Madeleine.

1956 : Madeleine met en forme ses notes sur le marxisme pour en faire un livre, tout en faisant des exposés en province. Sa santé est toujours aussi mauvaise. Son mémoire, approuvé par le cardinal Feltin, est emporté à Rome par le P. Guéguen.

(oct.-nov.) : Sixième pèlerinage à Rome. Mgr Veuillot et le P. Paul Philippe donnent leur accord pour la publication.

1957 (février) : Septième pèlerinage à Rome pour discuter de la 4e partie du livre avec Mgr Veuillot.

Révision sans trêve des quatre parties et des annexes, jusqu’en mars. Le livre s’appellera Ville marxiste, terre de mission. Les premiers exemplaires d’auteur sont envoyés en septembre.

1958 : Mort du P. Lorenzo.

Huitième pèlerinage à Rome. Audience générale de Pie XII.

Élaboration de la charte de la « Charité de Jésus », par Mgr Veuillot, et décision de renoncer au rattachement à un institut séculier, envisagé depuis deux ans.

(été) : Neuvième pèlerinage à Rome. Première pensée pour l’Afrique noire.

1959 : Dixième pèlerinage à Rome. Mgr Veuillot est nommé évêque d’Angers.

1960 (mars) : Madeleine refuse de s’associer à l’accueil de Khrouchtchev à la Mairie d’Ivry.

1960-1961 : Conférences sur le marxisme dans divers milieux.

1961 (nov.) Départ pour Abidjan de Suzanne Perrin et Guitemie Galmiche.

Voyage en Pologne.

1962 : Madeleine est sollicitée pour un travail sur les athéismes contemporains par un ancien évêque de Tananarive, en vue du Concile.

Le P. Loew accepte de décharger en partie Mgr Veuillot, nommé en 1961 archevêque-coadjuteur du cardinal Feltin, pour s’occuper des Équipes.

1963-1964 : Écrits et conférences sur l’athéisme.

1964 (13 oct.) : Mort subite de Madeleine.

1988 : Mgr Frétellière, évêque de Créteil, décide l’ouverture du procès de béatification de Madeleine Delbrêl.

1996 : Le procès est reconnu valide par Rome.

Madeleine Delbrêl est déclarée « Servante de Dieu ».

RÉFÉRENCES DES OUVRAGES CITÉS

La Route, éd. Alphonse Lemerre, Paris 1927, 144 p. Prix Sully Prudhomme de l’Académie française 1926.

Nous autres, gens des rues, textes missionnaires. Éd. du Seuil, Paris 1966, 336 p. Introduction de Jacques Loew, pp. 9-53. Postface de Louis Augros, pp. 321-328. Nouvelle édition, éd. du Seuil, Paris 1971, coll. « Livre de Vie » n° 107, 314 p. Introduction et postface inchangées.

La Joie de croire, éd. du Seuil, Paris 1968, 272 p. Préface de Jean Guéguen, pp. 7-24. Avant-propos de Guy Lafon, pp. 25-27. Nouvelle édition, éd. du Seuil, Paris 1995, coll. « Livre de Vie » n° 141, 282 p. Mêmes préface et avant-propos, notule en mémoire du cardinal Veuillot.

Communautés selon l’Évangile, éd. du Seuil, Paris 1973, 190 p. Avant-propos de Guy Lafon, pp. 7-23.

Alcide : Guide simple pour simples chrétiens, éd. du Seuil, Paris 1980. Coll. « Livre de Vie » n° 133, 126 p. (extrait de La Joie de croire).

Indivisible amour, pensées détachées inédites. Éd. du Centurion, Paris 1991, 140 p. Préface de Jacques Sommet, pp. 7-9. Introduction de Christine de Boismarmin, pp. 11-13. Notice biographique pp. 15-17.

Éblouie par Dieu, Correspondance, volume 1, 1910-1941 (Œuvres complètes, tome I). Éd. Nouvelle Cité, Montrouge 2004, 352 p. Chronologie abrégée par Agnès Spycket. Cahier photos de 16 pages. Édition préparée par Gilles François, Cécile Moncontié, Bernard Pitaud.

S’unir au Christ en plein monde, Correspondance, volume 2, 1942-1952 (Œuvres complètes, tome II). Éd. Nouvelle Cité, Montrouge 2004, 352 p. Chronologie abrégée par Agnès Spycket. Cahier photos de 16 pages. Édition préparée par Gilles François, Cécile Moncontié, Bernard Pitaud.

Christine de BOISMARMIN, Madeleine Delbrêl, Rues des villes chemins de Dieu, 1904-1964. Éd. Nouvelle Cité, Paris 1985, 208 p. Présentation de Jacques LOEW, pp. 7-10. Cahier photos de 8 pages. Nouvelle édition, éd. Nouvelle Cité, Montrouge 2004, 288 p.

IMÉDITATIONS POÉTIQUES

Dans les pages qui suivent, 24 textes ont été regroupés sous le titre générique de « Méditations poétiques ». Que faut-il entendre par là ? Le mot méditation évoque un texte qui est fruit de réflexion et d’oraison, et qui, par le fait même, donne à penser et à prier. Madeleine y prend appui sur la vie quotidienne où elle voit le lieu de la rencontre entre Dieu et l’homme. Elle donne ainsi à nos banalités quotidiennes une dimension d’éternité. Le mot poétique ne veut pas dire que tous ces textes seraient des poésies. On peut parler parfois, pour certains, de vers libres. Beaucoup sont écrits en prose. Cependant, pour l’écriture de toutes les méditations, Madeleine a utilisé une disposition qui lui est propre ; elle voulait ainsi inscrire dans chacun de ces textes un rythme particulier qui les apparente à la poésie, d’autant plus qu’elle emploie assez fréquemment l’alexandrin, ce qui donne un rythme spécifique à certaines pièces. Il faut remarquer aussi que toutes les méditations sont illuminées de l’intérieur par des images, ce qui permet à la pensée de s’inscrire facilement dans la mémoire. Ainsi l’obéissance chez Madeleine ne peut plus être dissociée du célèbre « Bal de l’obéissance ».

Très peu de ces textes portent une date précise. Plusieurs ne sont même pas datés. On sait cependant que beaucoup ont été écrits entre 1945 et 1950. Pourquoi Madeleine a-t-elle utilisé à cette époque d’après guerre, cette forme d’écriture ? Il est difficile de le dire. Après des années de tension, a-t-elle ainsi libéré des énergies spirituelles intensément vécues mais qui avaient eu peu l’occasion de s’exprimer ? A-t-elle éprouvé le besoin de retrouver d’une autre manière la veine poétique qu’elle avait exploitée durant sa jeunesse ? D’autre part, nous savons qu’en raison de la nécessité économique dans laquelle on se trouvait parfois à la rue Raspail, Madeleine a proposé quelques textes à des revues en vue d’en recevoir un peu d’argent. De fait, plusieurs de ces méditations ont été publiées dans des revues ; cela ne veut pas dire qu’elle les a écrites seulement dans cet objectif ; et les trois motifs ne s’excluent pas mutuellement.

La plupart des Méditations poétiques ont déjà été publiées dans Nous autres gens des rues et dans La Joie de croire. Certaines cependant étaient jusqu’ici inédites. C’est la première fois que tous ces textes, qui appartiennent au même genre littéraire, sont rassemblés.

L’absence d’indication de datation correspond aux années 1945-1950.

Humour dans l’Amour

Ce texte a été écrit en 1946. Madeleine ne s’est jamais prise au sérieux (sa correspondance en particulier en témoigne), mais elle a fait de la conscience de ses faiblesses, de ses limites, un ressort de sa vie spirituelle. C’est lorsqu’elle les accueille avec humour que Dieu lui donne sa joie et sa liberté.

Publié dans La Joie de croire, 1re éd. pp. 69-70, 2e éd. pp. 81-83. et dans Alcide, pp. 73-75.

Quand on sait ce que nous sommes, il serait ridicule, vraiment, de n’avoir pas dans notre amour, un peu d’humour. Car nous sommes d’assez comiques personnages.

Mais mal disposés à rire de notre propre bouffonnerie.

Seigneur, je vous aime plus que tout… en général… mais tellement plus que vous, dans cette petite minute qui passe,

une cigarette anglaise… ou même gauloise !

Seigneur, je vous donne ma vie, toute ma vie… mais pas ce tout petit morceau de vie, ces trois minutes où je n’ai tellement pas envie d’aller travailler.

Seigneur, vous gagner la ville, et la France et l’univers, me consumer pour votre règne… mais… mais ne pas écouter cette insupportable créature qui me raconte pour la centième fois ses minuscules ennuis.

Oui, nous sommes des héros de comédie bouffe et de cette comédie, il serait normal que le premier public soit nous.

Mais là n’est pas le bout de l’histoire.

Quand on a découvert cet impayable comique, quand on est parti d’un grand éclat de rire en récapitulant la farce de sa vie, on est tenté de s’abandonner, sans plus,

à une carrière de clown pour laquelle après tout on semble assez doué.

On serait volontiers tenté de penser que cela n’a pas grande importance

et qu’à côté

des sublimes,

des forts,

des saints,

il y a place

pour des pitres et des guignols et qu’ils ne gênent guère Dieu.

Ce n’est certes pas très exaltant, mais ce n’est pas non plus très fatiguant et c’est encore un avantage.

C’est alors qu’il nous faut souvenir

que Dieu ne nous a pas créés pour de l’humour

mais pour cet amour éternel et terrible

dont il aime tout ce qu’il crée depuis toujours.

C’est alors qu’il nous faut l’accepter, cet amour

non plus pour en être le partenaire splendide et

magnanime

mais le bénéficiaire

imbécile

sans charme

sans fidélité fondamentale.

Et dans cette aventure de la miséricorde

il nous est demandé

de donner jusqu’à la corde ce que nous pouvons,

il nous est demandé de rire quand ce don est raté,

sordide, impur,

mais il nous est demandé aussi

de nous émerveiller avec des larmes de reconnaissance

et de joie,

devant cet inépuisable trésor

qui du cœur de Dieu coule en nous.

À ce carrefour du rire et de la joie s’installera notre

paix inconfusible !

Bal de l’Obéissance

Probablement écrite en 1946, cette méditation est un des textes les plus célèbres de Madeleine. Elle y exprime une fois de plus l’allégresse, la légèreté, la spontanéité, qui animent la vie spirituelle de celui qui s’abandonne entre les mains de Dieu. Madeleine s’y révèle comme quelqu’un qui a une pratique éprouvée de la danse. On sait que, dans sa jeunesse, elle aimait beaucoup danser. Elle a utilisé ailleurs le thème de la danse, par exemple dans le texte célèbre : « Dieu est mort, vive la mort », publié dans ses trois versions dans le tome I des Œuvres Complètes, pp. 30-42 : « Autrefois des gens ont dit : nous dansons sur un volcan. Oui je danse, mais je sais que c’est sur un volcan. »

Publié dans la revue La Vie spirituelle, mensuel, tome 81, n° 343, août-septembre 1949, pp. 195-197.

Nous autres gens des rues, 1re éd. pp. 89-92, 2e éd. pp. 81-83.

« Nous avons joué de la flûte et vous n’avez pas dansé »

C’est le 14 juillet.

Tout le monde va danser.

Partout, depuis des mois, des années, le monde danse.

Plus on y meurt, plus on y danse.

Vagues de guerre, vagues de bal.

Il y a vraiment beaucoup de bruit.

Les gens sérieux sont couchés,

les religieux récitent les matines de St Henri, Roi,

et moi je pense

à un autre roi

au Roi David qui dansait devant l’Arche.

Car s’il y a beaucoup de saintes gens qui n’aiment pas la danse il y a eu beaucoup de saints qui ont eu besoin de danser

tant ils étaient joyeux de vivre :

Ste Thérèse avec ses castagnettes,

St Jean de la Croix avec un enfant Jésus dans les bras

et St François, devant le Pape.

Si nous étions contents de vous, Seigneur,

nous ne pourrions pas résister

à ce besoin de danser qui déferle sur le monde,

et nous arriverions à deviner

quelle danse il vous plaît de nous faire danser

en épousant les pas de votre Providence.

Car je pense que vous en avez peut-être assez

des gens qui toujours parlent de vous servir avec un

ton de capitaines,

de vous connaître avec des airs de professeurs,

de vous atteindre avec des règles de sport,

de vous aimer comme on s’aime dans un vieux ménage.

Un jour où vous aviez envie un peu d’autre chose vous avez inventé St François et vous en avez fait votre jongleur.

À nous de nous laisser inventer

pour être des gens joyeux qui dansent leur vie avec vous.

Pour être un bon danseur, avec vous comme ailleurs,

il ne faut pas savoir où cela mène.

Il faut vous suivre

être allègre

être léger

et surtout ne pas être raide.

Il ne faut pas vous demander d’explications

sur les pas qu’il vous plaît de faire

il faut être comme un prolongement

agile et vivant de vous,

et recevoir par vous la transmission du rythme de l’orchestre.

Il ne faut pas vouloir à tout prix avancer

mais accepter de tourner, d’aller de côté.

Il faut savoir s’arrêter et glisser au lieu de marcher.

Et cela ne serait que des pas imbéciles

si la musique n’en faisait une harmonie.

Mais nous, nous oublions la musique de votre esprit, et nous faisons de notre vie un exercice de gymnastique ;