La Saga des Limousins - Tome 17 - Yves Aubard - E-Book

La Saga des Limousins - Tome 17 E-Book

Yves Aubard

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Beschreibung

Ce dix-septième tome de la Saga des Limousins, Dieu le veut se déroule entre les années 1095 et 1099.

Le pape Urbain a lancé son appel et de tous les coins de l’Europe les fidèles vont se mettre en route vers la terre Sainte. Pierre l’Ermite mènera la croisade des pauvres à sa perte à Cevitot. Les barons Chrétiens partent à leur tour : Hugues de Vermandois, Godefroy de Bouillon, Raymond de Toulouse et Bohémond de Tarente seront les principaux chefs de la croisade. Les descendants de Lou Ier seront de ces grandes épopées. Sous le commandement de Lou II, ils constitueront même un corps d’armée indépendant, petit par le nombre, mais vigoureux au combat.

Puisque Dieu le veut, ils iront. Plongez-vous dans cette folle aventure que sont les croisades et découvrez les raisons qui se cachent derrière cette guerre «sainte».

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né en 1957, Yves Aubard est professeur de gynécologie au CHU de Limoges. Dans ce nouvel ouvrage, il nous emmène du nord au sud de l'Europe pour vivre les grands événements de cette période: la première « guerre sainte» en Espagne et la fondation d'un nouveau royaume d'Angleterre. Ses héros limousins seront encore sur tous les fronts ...

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La Saga des Limousins Tome 17 : Dieu le veut (1095-1099) (de Clermont à Antioche)

© 2020 – La Geste – 79260 La Crèche

Tous droits réservés pour tous pays

Yves AUBARDLa Saga des LimousinsTome 17 : Dieu le veut (1095-1099) (de Clermont à Antioche)

Livres du même auteur, déjà parus chez Geste Éditions

Dans la série « La Saga des Limousins »

– Tome 1 : Le Seigneur de Châlus, du Limousin au Périgord –octobre 2012

– Tome 2 : L’An Mil, de Rome en Anjou – mars 2013

– Tome 3 : Les Grands Voyages, de Salerne aux Vikings – septembre 2013

– Tome 4 : Le Roi Robert, de la Bourgogne à Jérusalem – mars 2014

– Tome 5 : Racines et honneurs, de Barcelone à Ispahan – septembre 2014

– Tome 6 : Troisième Génération, de Sens à Dreux – mars 2015

– Tome 7 : Le Roi Henri, de la Normandie à Châlus – septembre 2015

– Tome 8 : La Main de Fer, de Bretagne en Hongrie – mars 2016

– Tome 9 : Du Bâtard au Duc, de Val-ès-Dunes à Kiev – octobre 2016

– Tome 10 : Le grand schisme, de Rome à Constantinople – mars 2017

– Tome 11 : Régences, de Germanie et Francie – octobre 2017

– Tome 12 : Du Duc au Roi, de Barbastro à Hastings – mars 2018

– Tome 13 : Les brodeuses, de Cantorbéry à Bayeux – octobre 2018

– Tome 14 : L’enfant loup, de Canossa à Pampelune – mars 2019

– Tome 15 : La geste du Guiscard, d’Apulie en Thrace – octobre 2019

– Tome 16 : Philippe et Bertrade, de Clermont à Antioche – juin 2020

Hors-série « Saga des Limousins »

– Le Sang et la Pierre – mars 2017

– Ambroise Paré, chirurgien des rois et roi des chirurgiens – mars 2019

Dans la série « 7 »

– 7 opus 1 – mars 2016

– 7 opus 2 – mars 2017

– 7 opus 3 – avril 2019

Résumés des tomes précédents

Tome 1 : Le Seigneur de Châlus

En l’an 968, sous le règne du roi Lothaire, Tristan, le forgeron du village de Châlus, en Limousin, trouve en forêt un enfant abandonné âgé de deux ans environ, qu’il fait baptiser du nom de Lou par Ignace, le curé du village. Lou grandit dans le foyer de Tristan et Gilberte, et son père l’initie au travail de la forge. Lou épouse Mathilde, jeune guérisseuse du village. Ils auront trois enfants, Eudes, Jean et Isabelle. Lou sauve la vie de son seigneur, le vicomte Guy de Limoges. Guy l’anoblit pour le remercier et lui confie le fief de Châlus avec mission de le fortifier. Peu après le miracle des Ardents à Limoges, les Périgourdins assiègent, sans succès, Lou dans son fief. Le vicomte Guy et ses Limousins décident de mener campagne en Périgord pour punir leurs belliqueux voisins. Boson le Bel, le chef périgourdin, s’est réfugié dans le château de Commarque, au sudest de ses terres. L’armée limousine met le siège devant cette forteresse et finira par la prendre après moult péripéties, rétablissant Boson le Vieux, le comte légitime du Périgord, dans ses prérogatives.

Tome 2 : L’An mil

Grimoald, l’évêque d’Angoulême, dérobe les présents faits au mariage de Will (un compagnon d’armes de Lou) et Jeanne. Il est démasqué par Lou et ses fils, et il est emmené prisonnier à Limoges. Lou et toute sa famille accompagnent Guy qui va à Rome, accompagné de Grimoald, pour le faire juger par le pape Sylvestre. Jean devient un élève du pape. Il se lie d’amitié avec Avicenne et tombe amoureux d’Anne. Mais Sylvestre meurt, Jean et Anne doivent quitter Rome et rentrent en Limousin. À Limoges, Foulques Nerra, le comte d’Anjou, demande à Guy la main de sa fille Hermine. Eudes et Hermine découvrent qu’ils s’aiment. Foulques Nerra a organisé un grand tournoi pour fêter son mariage avec Hermine. Les joutes sont sanglantes. Foulques tente de faire assassiner Lou et sa famille, tandis que Jean utilise les terreurs nocturnes du comte d’Anjou pour le faire renoncer à la main d’Hermine. Eudes et Hermine s’aiment, mais un fils de seigneur ne peut demander la main d’une fille de vicomte. Jean n’ose déclarer sa flamme à Anne, qui se lasse et décide de quitter Limoges pour aller servir le duc d’Aquitaine. Ainsi les deux fils de Lou ont des chagrins d’amour. Jean, très déprimé, décide de partir pour étudier lamédecine à Salerne.

Tome 3 : Les Grands Voyages

Jean arrive à Salerne. Il y obtiendra son diplôme de médecin et deviendra l’amant de Christine, un magister de l’école. Il apprend que Christine est enceinte de lui peu de temps avant d’être incarcéré à Naples car il a tué Étarus, un autre magister de l’école, pour venger la mort d’un ami. Pendant ce temps-là, en France, Eudes s’illustre dans les tournois, et Guy accepte de lui donner la main d’Hermine. Lou et ses enfants décident d’aller porter secours à Jean, ils parviennent à le libérer par la ruse ainsi que son compagnon de prison : Knut, le fils du roi du Danemark. Les Limousins rentrent à Châlus. Guy décide de marier son fils Adémar à Sénégonde du Périgord, et Jean retrouve Anne, à laquelle il déclare son amour. Ce sont donc trois mariages, avec celui d’Eudes, qui sont célébrés à Limoges. Peu après, Emma, Mathilde et Isabelle sont enlevées par des Vikings. Lou, ses fils et quelques compagnons partent pour libérer les femmes enlevées. Ils y parviendront mais devront voyager jusqu’au mythique Vinland. Isabelle y trouvera un époux viking, Bjarni, et Anne donnera naissance à Jason après une opération miraculeuse. Lou et ses compagnons regagnent ensuite le Limousin. Eudes découvre qu’Hermine a mis au monde sa fille Adalmode. Jean reçoit un courrier de Christine lui annonçant la naissance de leur enfant, Trotula.

Tome 4 : Le Roi Robert

Lou et ses enfants font la connaissance de Robert II, le roi de France. Ce dernier propose à Jean, Anne, Isabelle, Eudes et Bjarni de rentrer à son service. Les jeunes gens acceptent. De leur côté, Guy, Lou, Mathilde, Raoul de Couhé et Aline de Bruzac partent en pèlerinage à Jérusalem. Sur leur route, ils sont incarcérés à Mâcon par l’évêque Brunon de Roussy. Eudes, Isabelle, Jean et Bjarni parviendront à les libérer. Les pèlerins reprennent leur route vers Jérusalem. Ils assistent au massacre des Bulgares par le basileus à la bataille de la Passe de Kleidion. En France, grâce à Eudes et Bjarni, la ville de Sens tombe et Dijon ouvre ses portes au roi, qui prend ainsi possession du duché de Bourgogne. Hermine a accouché à Limoges de Guy-Lou, son second enfant. Jean, Eudes, Anne et Bjarni partent en Italie pour assister au sacre de l’empereur germanique Henri II et ils poussent jusqu’à Salerne. Pendant ce temps, les pèlerins ont visité Jérusalem et ils sont repartis par la mer. Ils font une halte à Salerne, ce qui leur permet d’aider Eudes, Bjarni et Jean à repousser une attaque sarrazine. Puis tout le monde rentre en France. Foulques Nerra remporte la victoire de Pontleroy sur Eudes de Blois, mais il échoue à prendre la ville de Tours. Tandis qu’Isabelle met au monde un garçon, Lou-Leif, le roi Robert fait couronner Hugues, son fils aîné, à Compiègne.

Tome 5 : Racines et honneurs

Ignace donne un indice à Lou qui lui permet de retrouver ses origines : le seigneur de Châlus est un descendant des comtes de Barcelone. Pour retrouver ses racines, Lou se rend en Catalogne avec Mathilde, Eudes et Robert de Ruffec. Lou aide la comtesse de Barcelone à repousser une attaque des Sarrazins et découvre qu’il a une sœur, Clémence, qui va épouser Robert de Ruffec. Lou renonce à revendiquer des droits en Catalogne et il rentre dans son fief de Châlus. Adémar de Chabannes et les moines de Limoges prétendent que saint Martial fut contemporain du Christ et serait donc le treizième apôtre. Le roi Robert condamne au bûcher des hérétiques à Orléans. Les enfants de Lou, accompagnés de

Bjarni et Nénad, décident d’aller libérer Avicenne qui est emprisonné à Hamadhan, en Perse. En route, ils croiseront l’empereur Henri II, Étienne, le roi de Hongrie, et Basile II, l’empereur de Constantinople. Jean découvre la formule du feu grégeois, ce qui permet de prendre la ville d’Hamadhan et de libérer Avicenne. Le roi Robert récompense ses fidèles dès leur retour en France : Isabelle et Bjarni se voient attribuer le comté de Dreux, Eudes et Hermine, celui de Sens, tandis que Jean et Anne sont faits seigneurs de Noisy. Hugues, le fils aîné du roi, meurt du « mal du côté », au grand désespoir de Jean. La mort frappe également l’empereur Henri II, le pape Grégoire VII, l’empereur Basile II et le vicomte Guy de Limoges. Jean parvient à découvrir la manière de soigner le mal du côté et guérit ainsi Lou-Leif qui en était atteint.

Tome 6 : Troisième Génération

Les enfants de Lou sont menacés de toutes parts : Isabelle et Bjarni sont emprisonnés à Rouen par Richard III, le nouveau duc de Normandie, Jean est enlevé par Eudes de Blois qui veut lui faire avouer la formule du feu grégeois et Eudes est assiégé à Sens par ce même Eudes de Blois. Lou et ses vieux compagnons décident d’aller porter secours aux enfants, car le roi Robert dispose de peu de moyens. Tandis que Jean s’enfuit tout seul, il rejoint la troupe de Lou et, ensemble, ils parviendront à libérer Isabelle et Bjarni et à mettre en déroute les armées d’Eudes de Blois qui faisait le siège de Sens. Jason et Adalmode participeront largement à ces succès. Jason va suivre les traces de son père : il part faire des études de médecine à Salerne. Il y tombe amoureux d’Abella, jeune étudiante italienne, et il sauve Trotula, sa demi-soeur, d’un « faux germe de la trompe ». En France, Adalmode succombe au charme d’Aurèle, un jeune novice, qui renonce à ses vœux pour elle. Il y aura à nouveau un triple mariage à Châlus : Jason épouse Abella, Trotula épouse Gariopontus (un collègue salernitain) et Adalmode épouse Aurèle. Les enfants du roi Robert se révoltent contre leur père, Eudes et Bjarni les ramèneront dans le droit chemin, mais le roi est las de toutes ces querelles familiales et rend son âme à Dieu à Melun.

Tome 7 : Le Roi Henri

Henri, dès son avènement, est menacé par une coalition menée par sa mère, Clémence d’Arles, qui veut mettre la couronne de France sur la tête de Robert, son second fils. Isabelle, Bjarni, Eudes, Jean et Jason décident d’aider le jeune roi et, avec l’appui des Normands, ils remportent une victoire décisive à Villeneuve-Saint-Georges. Cependant, Bjarni et Isabelle décident de ne plus servir Henri qui s’est montré injuste envers ceux qui ont sauvé sa couronne. La reine Clémence meurt à Melun, un an après son époux. Johan, le prince de Salerne, envoie à Paris des assassins pour tuer Jason et enlever Abella. Jean sauvera son fils et ce dernier devra aller jusqu’en Italie pour retrouver son épouse. Robert le Magnifique part en pèlerinage à Jérusalem avec Bjarni, mais seul le Viking reviendra de ce périple. Ainsi, Guillaume le Bâtard se retrouve duc de Normandie à l’âge de huit ans. Lou-Leif devient son garde du corps. Bjarni finit par retrouver Eudes de Blois dans un duel et le tue. Tandis que Lou et toute la famille passent la Noël à Châlus, ils sont assiégés par une « milice de Dieu », menée par un moine fanatique et Lisois d’Amboise. Guy-Lou et Lou-Leif tomberont amoureux de deux soeurs jumelles, Hélène et Élise. Le seigneur de Châlus montrera qu’il a de la ressource et les assiégés mettront leurs ennemis en déroute. Lou est gravement blessé lors du siège et demande à son fils Jean de ne pas le soigner. Mais c’est sans compter sur Jason et Abella qui tireront le seigneur de Châlus des griffes de la mort.

Tome 8 : La Main de Fer

Lou doit restaurer Châlus et reconstruire son église. Il fait appel à un bâtisseur limougeaud. Il en profite pour améliorer l’ancestrale araire de ses paysans. Guy-Lou et Lou-Leif se marient avec Hélène et Élise. Bjarni, aidé de Jason et Jean, dévie le Couesnon, petit fleuve frontalier entre Bretagne et Normandie, de manière à ce que le Mont-Saint-Michel devienne normand. Alain III, le duc de Bretagne, menace d’envahir la Normandie, Isabelle et Brunehilde vont négocier avec lui. Le duc tente d’abuser de Brunehilde qui doit l’empoisonner pour ne pas être violentée. En Germanie, l’empereur Henri envoie Guy-Lou espionner le roi Samuel Aba de Hongrie, qui martyrise les Chrétiens sur ses terres. Les Germains iront ensuite destituer ce roi païen pour remettre sur le trône le très chrétien Pierre Orseolo. Édouard, le cousin du jeune duc Guillaume, est sacré roi d’Angleterre. Guillaume nomme Lou-Leif connétable de Normandie. En France, la reine Mathilde de Frise et sa fille meurent de la diphtérie. Guy est atteint par ce mal, mais Jean et Jason le sauvent en réalisant une trachéotomie. Après une dernière campagne en Gascogne, Lou rentre à Châlus, il souffre depuis plusieurs mois d’angine de poitrine qui l’oppresse comme « une main de fer ». Lou fait un infarctus lors d’une partie de pêche dans la Tardoire et il décède au pied de son château. Mathilde décède à son tour quelques semaines plus tard.

Tome 9 : Du bâtard au duc

Les barons normands complotent contre le jeune Guillaume, lui reprochant sa bâtardise. Bjarni décide d’aller raisonner les rebelles mais il tombe dans une embuscade et est empoisonné sur ordre des conjurés. Golet, le bouffon de Guillaume, avertit son maître qu’une troupe d’assassins veut lui faire un sort à Valogne. Guillaume échappe à cette attaque. Le jeune duc fait alliance avec le roi Henri pour affronter ses ennemis à la bataille de Val-es-Dune. Il remporte la victoire et les descendants du seigneur de Châlus font justice des meurtriers de Bjarni. Isabelle est envoyée en délégation pour convaincre Mathilde de Flandre d’épouser Guillaume, et Anne de Kiev d’épouser le roi Henri. Ces deux missions sont couronnées de succès et se solderont par des mariages. Brunehilde trouve l’homme de son coeur en Russie en la personne d’Igor, le frère de la reine Anne. Adémar devient novice à Cluny. Tibelle devient moniale et conseillère du pape Léon, tandis que Guy-Lou sera le garde du corps du souverain pontife. Hermine décède d’une pneumopathie à Sens. Jean a convoqué Trotula, Jason et Abella pour leur faire part de la grande œuvre de sa vie : il a décrit l’anatomie humaine à l’aide de dissections qu’il a menées clandestinement sur des cadavres, un moine allemand illustrant ses descriptions. Les trois jeunes sont enthousiasmés par ce travail, ils décident néanmoins de tenir secrètes ces découvertes qui pourraient valoir une condamnation à mort à Jean et à son dessinateur. Jean décède, épuisé par le labeur qu’il mène depuis des années.

Tome 10 : Le grand schisme

Jason et Abella vont assister deux grandes dames lors de leur accouchement. La duchesse Mathilde de Normandie et la reine Anne de France donneront des héritiers mâles à leur époux. Le jeune Lou II est devenu le meilleur écuyer d’Aquitaine, il est adoubé chevalier et tombe amoureux de Sybille, une Châlusienne. Le comte d’Anjou, Geoffroy-Martel, a enlevé Eudes pour régler son vieux contentieux avec les descendants du seigneur de Châlus. La famille ira délivrer Eudes de sa prison angevine, mais lors de son évasion ce dernier est blessé, il rend son âme à Dieu dans les bras de Lou II, son petit-fils. Entre le duc de Normandie et le roi de France, la situation s’envenime. Isabelle et ses enfants aideront le jeune duc à vaincre Henri, pourtant allié à Geoffroy-Martel, à la bataille de Mortemer. Henri s’en prend à Isabelle qu’il emprisonne à Paris, mais la famille veille, la comtesse de Dreux sera rapidement libérée. À Rome, le pape Léon tente d’épurer l’Église de ses vices les plus notoires. Cela ne se fait pas sans heurts, il est vaincu à Civitate et retenu prisonnier par les Normands d’Italie, tandis que ses émissaires prononcent la rupture avec le patriarche de Constantinople, c’est le grand schisme. Tibelle et Adémar rétablissent cependant les relations entre les Églises de Rome et de Constantinople, tandis que Guy-Lou obtient la libération du pape. Cependant Léon IX ne se remet pas de sa capture, il meurt en rentrant à Rome. Son successeur, Victor, est choisi par l’empereur Henri III. Pour clore ce volume, les trois enfants d’Adalmode et Aurèle : Mathilde, Emma et Lou, se marieront à Châlus, cédant à la tradition familiale des triples mariages.

Tome 11 : Régences

L’empereur de Germanie, Henri III, meurt brutalement, son fils, le futur Henri IV, n’a que six ans. Une régence dirigée par Agnès d’Aquitaine, l’épouse du défunt, débute en Germanie. Golet s’éprend d’Hermine, la fille aînée de Guy-Lou et Hélène. Il est anobli par Guillaume qui le nomme seigneur de Gisors. Le roi de France, Henri Ier, s’allie avec Geoffroy Martel d’Anjou, pour attaquer Guillaume de Normandie. Ce dernier remporte une victoire sur ses ennemis à Varaville. Igor et Bjarni II accompagnent Edgar l’Exilé, qui est de retour en Angleterre. Bjarni tombe amoureux de la sœur de lady Godiva, Roxana. Cette dernière part en Écosse, accompagner Duncan Canmore, qui veut venger la mort de son père. Bjarni l’accompagne pour la protéger, ils sont bientôt rejoints par Igor. Bjarni demande la main de Roxana sur le champ de bataille à Lumphanan. Le roi de France, dépressif depuis ses défaites contre les Normands, meurt à son tour, laissant lui aussi un fils de six ans et une régence à la tête de son royaume. Pendant ce temps-là, à Châlus, Sybille est devenue maître verrier. Lou de son côté sert Guillaume VII d’Aquitaine, mais le duc décède d’une dysenterie. De dépit, le Châlusien fracturera le nez du comte d’Anjou, une vieille tradition familiale. Le petit Lou III, le fils de Lou II et Sybille, tombe dans la Vienne, dans les bras d’Anne, sa grand-tante. Alors que cette dernière se noie, l’enfant est emporté par les flots dans son berceau et recueilli par des loups qui vont l’élever. À Limoges, les clunisiens s’installent à l’abbaye Saint-Martial, Adémar, le frère de Tibelle, est le premier abbé venu de la célèbre institution bourguignonne.

Tome 12 : Du duc au roi

Un ermite prénommé Étienne va s’installer à Muret, dans les forêts au nord d’Ambazac, il y rencontre un enfant élevé par des loups, qu’il baptise Lupus. Bjarni devient comte de Mercie sous le nom d’Edwin. Le pape Alexandre prêche une guerre sainte, qu’il appelle « croisade », contre les Maures d’Espagne. Dans cette armée du Christ, on retrouve de nombreux membres de la famille du seigneur de Châlus, qui seront tous écœurés par le grand massacre perpétré par les Chrétiens à Barbastro. En portant secours à une Sarrazine, Ajiba, la fille de l’émir de Saragosse, Guy va en tomber amoureux et il finira par l’épouser, s’installant à la cour de son beau-père. À la mort du roi d’Angleterre, Édouard le Confesseur, le Saxon Harold s’empare de la couronne. Guillaume de Normandie s’estime lésé, car cette couronne lui avait été promise. Le jeune duc prépare minutieusement une invasion de l’Angleterre pour aller prendre son dû. Harold est attaqué par les Vikings du roi Harald de Norvège, qu’il va vaincre et tuer à la bataille de Stanford Bridge. Pendant ce temps-là, Guillaume a débarqué dans le sud de l’Angleterre, il s’installe à Hastings, un petit village côtier. Harold traverse le pays à marche forcée pour aller rejeter à la mer les envahisseurs normands. La bataille a lieu sur la colline de Senlac à quelques lieues d’Hastings. L’issue en est indécise, mais Lou parvient à tuer le roi Harold d’une flèche tirée avec un arc métallique à longue portée qu’il a confectionné. Igor, Lou-Leif, Guy-Lou et Lou parviennent à faire une brèche dans la terrible ligne des Housecarls saxons, ce qui permet aux Normands de remporter la bataille. Épuisés, Guillaume et ses compagnons se couchent et s’endorment à même le sol sur le champ de leurs exploits.

Tome 13 : Les brodeuses

Le lendemain de la bataille d’Hastings, Guillaume cherche le corps d’Harold et fait appel à Édith dite « au col-de-cygne », pour identifier le Saxon. Édith est ensuite assaillie par des soldats normands. Pierre, le fils de Lou-Leif, défend la jeune fille et l’emmène, jusqu’à Londres, où il va chercher refuge auprès de son frère, Bjarni, le comte de Mercie. Guillaume se fait sacrer roi d’Angleterre à Westminster, puis il rentre en Normandie. Il y aura à nouveau trois mariages dans la famille : Adalmode et Ulrich, Pierre et Édith, et Tristan qui épouse Clémence, une jeune servante. Ajiba, venue au mariage avec son mari Guy, est arrêtée à Paris. Il faudra toute la sagacité de Golet pour plaider la cause de la jeune fille et la faire libérer. En Limousin, l’abbé Adémar rénove l’église abbatiale de Saint-Martial. Gauvin, un des fils de Lou, devient apprenti tailleur de pierre. Guillaume doit rentrer en Angleterre car les Saxons se révoltent. Il y mène une campagne de représailles impitoyables. Isabeau a l’idée de faire une grande broderie qui représenterait tous les préparatifs puis la conquête de l’Angleterre. Odon accepte cette idée, John un moine anglais dessine la trame de la broderie, et les femmes de la famille se rendent à Cantorbéry pour broder ce que l’on appellera la tapisserie de Bayeux. John est tombé amoureux d’Isabeau, il renoncera à ses vœux de moine pour l’épouser. Aurèle rend visite à Étienne de Muret en plein hiver, il est victime d’une attaque, il rend son dernier souffle dans les bras d’un enfant sauvageon, élevé par des loups, qu’il reconnaît comme étant son petit-fils, Lou III, disparu en bas-âge. Vladimir et Ingrid conseillent au roi Philippe d’épouser Berthe de Hollande. Cette dernière arrive à Paris, mais elle est bien loin d’avoir la grâce d’Isabelle de Kiev, la reine précédente.

Tome 14 : L’enfant loup

En Limousin un enfant loup va rejoindre le giron familial et le monde des humains. Lupus ne va pas chômer dès son retour auprès de ses parents : il va participer activement à la capture du vicomte de Limoges rebelle à son suzerain, le duc Guillaume d’Aquitaine. Par ailleurs, ce dernier cherche un époux pour sa fille Clémence, mais Lupus, épris de la donzelle, va contrarier systématiquement tous ces beaux projets de mariage, participant au guet-apens d’un roi espagnol et sacrifiant au passage à la tradition familiale du « concassage de nez » des comtes d’Anjou. Pendant ce temps-là, Hildebrand, devenu pape, se fâche avec le roi de France et celui de Germanie, il ira même jusqu’à excommunier ce dernier. Pour obtenir la levée de cet anathème le Germain devra s’humilier devant le pape à Canossa. Odon, le frère de Guillaume le Conquérant, fait consacrer sa cathédrale à Bayeux en y exposant la broderie réalisée par les femmes de la famille. John, qui s’est particulièrement illustré lors de la confection de cette œuvre, est recruté par l’évêque de Tours qui fait refaire sa cathédrale et veut l’orner de peintures. Isabeau épouse John et elle apprendra le métier de plâtrier pour suivre son homme sur les chantiers. En Normandie, Guillaume se brouille avec son fils aîné, Robert Courteheuse, qu’il va assiéger dans la forteresse où le rejeton rebelle s’est réfugié. Le père et le fils s’affrontent les armes à la main et Guillaume ne doit d’avoir la vie sauve qu’à l’intervention de Lou-Leif. Robert s’enfuit, les deux hommes semblent irréconciliables.

Tome 15 : La Geste du Guiscard

Guillaume et son fils Courteheuse, fâchés à mort à la fin du précédent volume, vont se réconcilier pour un temps grâce à l’entremise de Golet et Brunehilde, le jeune prince allant guerroyer au nom de son père jusqu’en Écosse en compagnie d’Igor et Bjarni. En Aquitaine Lupus, en remplacement de son père indisponible, saura porter haut les couleurs de son duc lors du tournoi annuel organisé par Guillaume IX. En Germanie les margraves de l’empire se succèdent, toujours recrutés dans la famille des seigneurs de Châlus. Robert Guiscard va entreprendre la conquête de l’empire byzantin, il y parviendra presque, mais devant secourir le pape, il devra quitter le champ de bataille, et le basileus Alexis sauvera sa peau grâce notamment à Pierre. C’est finalement le Normand qui y laissera la sienne. À Rome le pape Grégoire s’estime responsable du sac de la cité éternelle réalisé par les hommes du Guiscard, il devra s’exiler, puis il décèdera, laissant la tiare à Victor, puis à Urbain. Ce dernier nous annoncera qu’il a une grande idée que nous ne connaîtrons que dans le volume à venir. Guillaume de son côté voit disparaître son épouse Mathilde, victime d’une épidémie de peste. Jason appelé au chevet de l’épouse du conquérant, sera lui aussi frappé par cette redoutable maladie, dont il comprendra l’origine. L’âge venant, l’embonpoint gagne le duc-roi Guillaume, qui mènera sa dernière campagne contre les Français dans le Vexin.

Tome 16 : Philippe et Bertrade

Humbauld, un nouvel évêque, est venu s’installer à Limoges, au grand dam du vicomte Adémar et de l’abbé du même nom. Cet Humbauld rançonne tout le diocèse et les Châlusiens devront venir lui faire entendre raison. Les fils du Conquérant se déchirent : Guillaume le Roux est devenu roi d’Angleterre, Robert Courteheuse a hérité du duché de Normandie et Henri d’une forte somme d’argent. Mais chacun lorgne sur la part des deux autres et Lou-Leif, Igor, Brunehilde, Bjarni et Golet tentent d’éviter qu’ils ne s’entre-tuent. L’abbé Hugues de Cluny veut reconstruire son abbatiale. Ainsi Gauvin, Sybille, John et Isabeau vont-ils participer à la construction de la plus grande église de la Chrétienté. Yves est nommé évêque de Chartres par le pape. Le roi Philippe répudie Berthe, son épouse, et il fait enlever Bertrade de Montfort, l’épouse de Foulques le Réchin. Le roi épouse Bertrade, ce qui lui attire les foudres d’Yves, dont il prend très mal les remontrances et qu’il fait emprisonner par Hugues du Puiset. Tandis que le pape excommunie Philippe, les descendants du seigneur de Châlus font échapper Yves de sa prison. Le basileus Alexis remporte une grande victoire sur les Petchenègues à la bataille de Lebounion. En ce qui concerne la famille, nous verrons Mahaut tomber enceinte, Ethan tomber amoureux et Igor et Lou-Leif tomber lors d’un ultime combat. Les médecins de la famille, quant à eux, font encore une découverte de grande importance pour les femmes en couches. Le pape Urbain révèle au monde sa « grande idée » : libérer le Saint-Sépulcre de Jérusalem qui est aux mains des Infidèles. Il vient à Clermont pour prêcher sa croisade devant une foule enthousiaste. Puis il passe par Limoges où il démasque l’évêque imposteur. Enfin, sur la route de Limoges à Châlus, moult amoureux vont se déclarer.

Arbre généalogique des descendants de Lou et Mathilde

Situation des personnages au début du tome 17

Le tour de France du pape

La grande idée avait été lancée à Clermont : les chrétiens d’Occident allaient rejoindre leurs frères d’Orient, les libérer du joug des Infidèles, et ensemble, ils iraient reconquérir Jérusalem. Le pape Urbain lui-même était surpris par le succès de son initiative. À Clermont il avait suscité une immense ferveur, les volontaires pour la croisade se comptaient déjà par milliers. À Limoges il avait encore rameuté les foules de toutes conditions : des vilains les plus pauvres jusqu’aux seigneurs les plus importants, des laïcs et des clercs, des hommes, des femmes, des enfants… tous voulaient partir, tous voulaient coudre sur leur épaule la croix blanche du pape, signe de leur engagement.

Urbain n’en avait cependant pas terminé avec la France : après Limoges il avait pris la route de Poitiers. Il voulait rencontrer les grands feudataires du royaume, pour les convaincre de prendre la croix, à défaut de voir le roi, qu’il avait excommunié suite à son mariage avec Bertrade et qui boudait dans son palais parisien de la Cité. Le premier de ces grands barons de Francie, sur la liste du pape, était Guillaume d’Aquitaine.

Lou, le seigneur de Châlus et sénéchal d’Aquitaine, s’était, quant à lui, attardé en famille dans son fief. Il faut dire que des nouvelles, bonnes et mauvaises, étaient arrivées à Chabrol. Au rang des bonnes, les nombreuses promesses de mariage qui avaient été échangées sur la route entre Limoges et Châlus, même si aucune de ces unions ne pouvait se concrétiser en Limousin. Si Édouard et Elvide, les enfants de Pierre, avaient trouvé leurs âmes sœurs en Marguerite et Ethelred, enfants du regretté roi Malcolm d’Écosse, il n’était pas question de s’épousailler en l’absence d’Edith, la femme de Pierre, restée à Constantinople auprès du basileus Alexis. Pour Ilde, la fille d’Ulrich et Sénégonde, le problème était le même. Dès qu’elle avait su que Zlatopolk n’était pas son cousin, elle avait échangé ses vœux avec le jeune Russe, mais elle ne saurait se marier sans l’accord et la présence de ses parents, restés en Germanie auprès de l’empereur Henri IV. Enfin Ethan avait obtenu de Zamora la permission d’aller demander sa main à son père Guy, mais ce dernier était à Toulouse, probablement à préparer son départ pour la croisade avec son maître, le comte Raymond de Saint-Gilles, premier grand baron du royaume à avoir fait serment de partir en Terre sainte.

Par contre, alors que l’on se réjouissait dans la perspective de ces heureux événements, une mauvaise nouvelle avait frappé la famille à Châlus. On savait que deux naissances avaient dû survenir en Normandie et on attendait avec quelque impatience les pigeons de Brunehilde. Le message était enfin arrivé ; le petit parchemin accroché à la patte du volatile informait la famille de la venue au monde d’une petite Béatrix et d’un jeune Richard, mais aussi du retour à Dieu de Mahaud, mère de ce dernier et sœur de Bjarni, Pierre et Isabeau. La nouvelle avait plongé la famille dans le désarroi. Isabeau avait décidé de rejoindre Élise, sa mère, à Falaise, pour l’aider à surmonter son chagrin, visiter son petit neveu orphelin, retrouver sa fille Alix, qui approchait les dix ans maintenant et lui présenter son frère nouveau-né, le petit Hugues.

C’est ainsi que deux convois quittèrent Châlus en ce début d’année 1095. Le premier vers le Nord était dirigé par Lou, qui devait rejoindre son maître à Poitiers pour y recevoir dignement le pape. Le seigneur de Châlus emmenait à sa suite les Normands (Isabeau, John et Agnès), une partie de sa famille (Sybille, Lupus et Géraud), ainsi que Clémence, l’épouse de Lupus et leurs enfants Lou IV et Agnès. Enfin Tibelle, qui avait quelque peu déserté la compagnie du pape pour faire, elle aussi, un détour par Châlus, accompagnait Lou car elle devait bien se résoudre à rejoindre Urbain qui ne pouvait se passer trop longtemps de sa conseillère attitrée.

Le second convoi au départ de Châlus était commandé par Pierre et Eudes, emmenant avec eux tous les futurs mariés vers les terres du basileus. On avait prévu de traverser la Germanie pour y laisser au passage Eudes et Ilde, les enfants d’Ulrich, et présenter au margrave de Germanie Zlatopolk, son futur gendre. Ethan avait cependant réussi à convaincre Pierre que le chemin pour Constantinople devait passer par Toulouse, ce qui n’était pas la route la plus courte, mais le jeune Grec, fidèle à sa réputation d’habile négociateur, avait persuadé son monde qu’en ce mois de janvier, on éviterait ainsi les neiges des monts d’Auvergne.

Quant à Gauvin et Isabeau, les enfants artisans de Lou et Sybille, ils étaient restés en Limousin, auprès de l’abbé Adémar qui avait toujours quelque chose à améliorer dans son abbaye de Saint-Martial. Les talents de dessinatrice et de peintre de la jeune fille étaient désormais bien connus dans la région et un nouveau chantier l’attendait aux Salles-Lavauguyon, où de grandes fresques devaient orner la très célèbre et fort belle église Saint-Eutrope1.

Le duc Guillaume IX reçut le Souverain pontife avec faste : ce n’est pas tous les jours qu’un successeur de Saint-Pierre honorait de sa présence le grand duché d’Aquitaine ! Quand Lou et Lupus rejoignirent la cour du duc, Urbain était arrivé depuis trois jours à Poitiers et Guillaume avait déjà cousu sur son épaule la désormais célèbre petite croix blanche du pape.

– Comme tu le vois, Lou, j’ai fait serment de participer à la croisade, expliqua Guillaume à son sénéchal.

– Je le vois, monseigneur, assura ce dernier, sans faire preuve toutefois d’un immense enthousiasme.

– Eh bien ! mon ami, lança Urbain, il semblerait que tu sois le seul au royaume de Francie à ne pas partager le désir général de prendre la croix.

– Je la prendrai, assura Lou. Si mon maître est de la croisade, mon devoir est de l’accompagner.

– Je n’en attendais pas moins du noble sang des seigneurs de Châlus, répondit Urbain, très satisfait de cette nouvelle recrue.

Tibelle, qui assistait à cet entretien, ne dit rien. Mais au sortir de la réunion elle alpagua Lou et ses deux fils :

– J’ai le net sentiment que tu ne prends la croix que par devoir envers ton maître, assura la moniale.

– Effectivement, répondit Lou, cette idée d’aller batailler à l’autre bout de la terre ne m’enthousiasme guère, il y a bien assez de raisons de se faire étriper dans nos régions sans aller en chercher d’autres ailleurs.

– Certes, mais batailler contre les Infidèles pour libérer le Sépulcre est plus glorieux que de s’écharper entre Chrétiens pour quelques lopins de terre, plaida la moniale.

– Pour moi, ce n’est pas la religion qui décide de la valeur des gens, assura Lou. Je ne fais pas de distinction entre une crapule chrétienne ou sarrazine. Et je n’ai guère envie d’aller trucider des innocents sous prétexte qu’ils ne vénèrent pas le même Dieu que moi.

Tibelle ne trouva rien à ajouter à cela : ce mécréant de Lou avait raison, même si ses idées n’étaient guère dans l’air du temps au royaume de Francie.

– Je t’accompagnerai, intervint Lupus, je ne suis pas plus enthousiaste que toi, mais il faut bien quelqu’un pour veiller sur ta vieille carcasse.

– Et moi aussi, renchérit Géraud, pour veiller sur la vieille carcasse de Lupus.

– Non mon fils, répondit Lou à son plus jeune rejeton, si Lupus m’accompagne, il faut que tu restes. Nous devons laisser au moins un guerrier au pays, au cas où Sybille ou tes frères et sœurs seraient dans le besoin ; il n’y aura plus une épée pour les défendre si tu nous suis.

– Mais si tout le monde s’en va à la guerre, je vais m’ennuyer ferme, moi ! maugréa Géraud.

– J’ai un projet pour t’occuper, assura son père, je désire que tu fortifies notre village de Maulmont. Il se pourrait que des bandes de pillards profitent du départ de tous les combattants en Terre sainte pour ravager le pays. Notre bourg est opulent et ouvert à tous vents, il fera une proie tentante pour les maraudeurs.

– On pourrait bâtir une deuxième forteresse à Maulmont, approuva Lupus.

– Une simple enceinte en bois sera suffisante pour le moment, estima Lou, mais cela me donne une idée : nous pourrions créer une seconde seigneurie à Châlus, ainsi mes deux fils chevaliers auraient chacun son fief.

– Ma foi ! Géraud de Maulmont, ça sonne bien, assura le cadet, qu’en penses-tu Lou Lupus de Chabrol ?

– Je trouve que ça nous va à merveille, effectivement, acquiesça l’aîné.

– Doucement mes gaillards, vous devrez attendre que je sois mort pour accéder à vos titres, précisa Lou.

– Bah ! Nous ne sommes pas pressés, répondit Géraud, nous ne sommes pas de ces enfants qui dépouillent leur père de son vivant.

Après Guillaume d’Aquitaine, Urbain décida de visiter Foulques le Réchin à Angers. Il fut reçu avec de grands égards par le comte, mais ce dernier se déclara trop âgé pour prendre part à la croisade. Il incita cependant ses vassaux à partir en masse et il fut largement entendu. Tout le monde s’attendait à ce que Foulques se plaigne auprès du pape de l’enlèvement de son épouse par le roi de France, mais étrangement il n’en fit rien.

Tibelle donna une explication au Saint-Père le soir même :

– Foulques a préféré éviter le sujet, précisa la moniale, car l’une des accusations de Bertrade à son encontre n’est pas totalement dénuée de vérité, Foulques l’avait épousée alors qu’il était déjà marié de manière tout à fait régulière.

– Certes, je me souviens de l’affaire, répondit Urbain. Ces grands barons français n’en font décidément qu’à leur tête avec les sacrements du mariage !

– D’autre part, Votre Sainteté, j’ai reçu une lettre de mon neveu Yves de Chartres.

– Comment va cet évêque selon mon cœur ? s’enquit le pape.

– Il tient à nous signaler un événement d’importance : l’archevêque Raynald de Reims est mort.

– Celui qui était goutteux et qui avait argué de sa maladie pour ne pas venir à Clermont ? s’enquit le pape.

– Celui-là même, il semble qu’il n’ait pas exagéré ladite maladie, il en est mort le mois dernier. Les évêques de son archidiocèse lui ont nommé un successeur en la personne de Manassès de Châtillon.

– Au moins celui-là n’a pas été désigné par un laïc, se félicita Urbain. Est-il digne de sa charge ?

– D’après Yves, c’est un de vos fervents partisans et c’est à cause de cela qu’il est menacé par le roi Philippe, qui aurait bien nommé à Reims un féal totalement à sa botte.

– Par Jésus-Christ, il faut empêcher cela et soutenir ce Manassès ! s’exclama Urbain.

– Une lettre de votre part, confirmant sa nomination, serait la bienvenue. C’est précisément ce que demande Yves dans sa missive.

– Nous allons faire ce courrier immédiatement, déclara Urbain. Quand verrai-je Yves, pour le féliciter de ses actions ?

– Il n’a pu venir à Clermont, il était confiné à Chartres par le roi.

– Je vais me rapprocher de lui, ma prochaine étape est Tours, peut-être pourra-t-il s’y rendre.

– J’écris pour l’en informer, il trouvera bien un moyen pour nous rejoindre.

Avant son départ d’Angers, Urbain tint à assister à la dédicace de l’abbatiale Saint-Nicolas de l’abbaye de Montierneuf, où il eut l’occasion de rencontrer un des personnages les plus célèbres de la région. Cet ermite, dont la parole était réputée dans tout l’ouest du royaume pour sa verve, se nommait Robert d’Arbrissel et le pape lui demanda de prêcher la croisade lors de la dédicace de l’abbatiale. Son discours, enflammé, sidéra la foule des croyants et enchanta les oreilles du pape, qui s’enticha immédiatement de ce prédicateur et le missionna pour prêcher la croisade à travers le pays. Urbain voulut faire une dernière chose avant de quitter Angers : il demanda à Foulques de libérer son frère, Geoffroy le Barbu, qui se morfondait au fond d’une prison à Chinon. D’assez mauvaise grâce le Réchin libéra son aîné, devenu à demi-fou après plus de 28 ans de captivité, mais le remit en geôle dès que le pape eut quitté son fief2.

Le concile de Tours se déroula du 16 au 22 mars et comme l’avait espéré Tibelle, l’évêque Yves de Chartres réussit à tromper les hommes du roi Philippe pour se rendre à l’appel du pape.

– Ah ! mon cher Yves, viens dans mes bras, tu es mon plus fidèle évêque dans ce royaume, s’exclama Urbain dès qu’il aperçut le frère de Guy et Tristan.

Yves fut très ému de recevoir une telle marque d’amitié et une forte brassée du Souverain pontife, ce qui ne manqua pas de rendre jaloux les autres prélats du royaume qui assistèrent à cette scène.

– Comment as-tu fait pour déjouer la vigilance du roi ? s’enquit Tibelle.

– J’ai fait dire la grand-messe dominicale par Simon de Montfort, l’un de mes chanoines, qui avait revêtu pour la circonstance ma tenue des grands offices. Le temps que les hommes du roi s’en aperçoivent, j’avais déjà franchi les portes de la ville.

–Ce Montfort porte le même nom que l’excommuniée Bertrade, nota le pape.

– C’est son frère, Votre Sainteté et il est tout aussi dévoué à la cause de Dieu que sa sœur lui est hostile. Je dois d’ailleurs vous parler de lui, car pour une fois je suis d’accord avec le roi Philippe, qui veut faire de ce Simon son chancelier en lui donnant la charge d’évêque de Paris.

– Je ne souscrirai à aucune nomination faite par le roi excommunié, assura le pape.

– Justement, Simon a refusé cette charge qu’il souhaite n’obtenir que de vous, reprit Yves, je crois qu’il serait juste que vous le confirmiez dans ce titre.

– Ne va-t-il pas soutenir le roi contre nous ? se demanda Urbain.

– Je ne pense pas, Simon a un esprit pur, il n’entrera dans les manigances ni du roi, ni de sa sœur.

– Je dois réfléchir à cette question, je suis moins sûr que toi de la droiture des hommes.

Ainsi Yves n’obtint pas ce qu’il voulait du pape pour le frère de Bertrade.

Malgré l’insistance et les suppliques de nombreux prélats, plus ou moins à la solde du roi, Urbain renouvela l’excommunication de Philippe lors du concile de Tours, fulminant contre ceux qui entretiendraient encore quelque rapport avec le souverain excommunié. Cette diatribe s’adressait surtout à Richer de Sens, dont aucun suffragant, à l’exception d’Yves de Chartres, ne s’était rendu au concile.

Après Tours, Urbain poursuivit sa folle course à travers la France : il célébra les fêtes pascales à Saintes, puis gagna Bordeaux, où il consacra au passage la nouvelle cathédrale. Ensuite il décida de se rendre à Toulouse, dans le fief de son premier fidèle, le comte Raymond de Saint-Gilles. Il y procéda à la consécration de la basilique Saint-Sernin, admirant les splendides fresques qu’avaient laissées là John et Isabeau.

À Toulouse, Tibelle fut très heureuse de retrouver Guy, Ajiba, Youssef et Ali. Les deux enfants du couple avaient définitivement renoncé à leurs noms arabes, ainsi parlait-on désormais de Joseph et Alexandre.

– Zamora n’est pas avec vous ? s’enquit la moniale.

– J’ai vu arriver chez moi, expliqua Guy, un Grec qui a demandé la main de ma fille un lundi, qui l’a épousée le mardi et qui est reparti pour Constantinople le mercredi.

– Je pense que Pierre a dû presser un peu Ethan, en conclut Tibelle, riant de la mine contrite de Guy.

– En effet, précisa Ajiba, les Byzantins de la famille étaient pressés de regagner leurs terres, il faut dire que Pierre a également deux enfants à y marier.

– Vous n’avez pas eu le temps de bien connaître ce Grec, mais je puis vous garantir que c’est un jeune homme des plus méritants.

– Oh, tu n’as pas besoin de plaider sa cause, assura Guy, il a très bien su le faire lui-même. Si j’en crois ce qu’il m’a dit, Zamora sera traitée comme une princesse, elle vivra dans un palais, aura une centaine d’esclaves à son service dont le premier sera son mari qui sera à ses petits soins du matin au soir.

– Pour une fois, je crois qu’il n’a rien exagéré, estima Tibelle en riant de plus belle.

Puis la moniale revint à des considérations plus sérieuses.

– Ton maître sera l’un des grands chefs de la croisade, si j’en crois le serment qu’il a prêté au pape.

– Oui, et Raymond n’est pas homme à renier sa parole.

– Seras-tu de cette aventure ?

– J’en serai, bien malgré moi, déplora Guy.

– Tu es tout aussi enthousiaste que ton cousin Lou, nota la moniale. Tes enfants seront-ils du voyage ?

– Uniquement Joseph, précisa Guy. Je souhaite qu’Alexandre reste auprès d’Ajiba, pour le cas où quelqu’un se souviendrait malencontreusement des origines de mon épouse. Mon fils veillera sur sa mère.

– Décidément, tu n’es pas le cousin de Lou pour rien : il a organisé les choses exactement comme toi, Lupus l’accompagnera et Géraud gardera le fief.

– Je me demande ce que vont faire les Normands, déclara Guy.

– La grande chance des Sarrazins, c’est qu’Igor et Lou-Leif ne soient plus de ce monde, ils auraient ravagé l’Anatolie à eux deux.

– Bjarni est-il entré au service de l’un des fils du Conquérant ? demanda Guy.

– Aux dernières nouvelles, il n’était entiché ni du roi Guillaume, ni du duc Robert, seul Henri trouvait grâce à ses yeux.

– Il ne sera donc pas obligé, comme nous, de suivre un maître, assura le conseiller du comte de Toulouse, il aura au moins le choix.

– Tout comme Ulrich, Vladimir et Tarik, estima Tibelle. Il est peu probable que le roi Philippe et l’empereur Henri suivent l’appel du pape : étant tous deux excommuniés, ils ne sauraient prendre la croix.

– Je crois qu’ils en seront ravis tous les deux, estima Guy, ils ne font preuve ni l’un ni l’autre d’une grande ferveur religieuse.

Après avoir confirmé Raymond de Saint-Gilles comme chef militaire de la croisade, Urbain poursuivit son périple par Carcassonne, Saint-Pons-de-Thomières et Maguelone, avant d’arriver à Montpellier. C’est là qu’il reçut un courrier du roi, qui se voulait conciliant.

Il faut dire qu’à Paris, Philippe rongeait son frein. Le Saint-Père était devenu l’homme le plus adulé au royaume de Francie et l’anathème qu’il avait renouvelé contre le roi avait rendu ce dernier, au contraire, très impopulaire.

– Majesté, il ne faut pas laisser le pape repartir de votre pays sans avoir tenté un rapprochement, avait dit Vladimir à son maître peu après le concile de Tours.

– Cet Urbain a retourné mes sujets contre moi, maugréa le roi, je devrais l’emprisonner tant qu’il est à ma portée.

– Sa popularité est telle, depuis l’appel à la croisade, qu’il pourrait y avoir une révolte en sa faveur si vous faisiez cela, estima Vladimir.

Le roi réfléchit un instant à ce que disait son cousin et il admit que le gaillard était dans le vrai : ses sujets s’étaient entichés du Souverain pontife au-delà de toute raison.

– Je vais lui écrire une lettre pour lui proposer un arrangement, déclara Philippe.

C’est Anne qui rédigea la missive et en révéla la teneur aux Parisiens de la famille lors d’un repas qu’ils prenaient en commun à Noisy.

– Urbain ne répondra même pas à ce courrier, estima Vladimir. Philippe doit aller plus loin : il doit faire sa soumission à Urbain et accepter l’idée de se séparer de Bertrade.

– Je pense qu’il n’a toujours pas pris cette décision, déclara Tristan.

– Vous m’aviez décrit le roi comme un coureur de jupons, mais il fait preuve d’une certaine fidélité à Bertrade, nota Marie qui, en tant que fiancée de Jean, participait à ce repas de famille.

– Fidélité toute relative, expliqua Anne. On voit bien que tu ne le côtoies pas toute la journée, tu saurais qu’il faut rester à bonne distance. Comme disait tante Ingrid, je n’ai jamais vu un homme pourvu d’autant de mains.

– Sa fidélité doit beaucoup à la vigilance de Bertrade, confirma Jean, elle le surveille de près.

– Même si le roi ne veut pas la répudier, il ferait bien de dire le contraire au pape, suggéra Vladimir, et d’éloigner un certain temps sa maîtresse.

– Tu deviens aussi malhonnête que ton maître, mon ami, fit remarquer Clémence.

– En politique, un mensonge n’est pas une malhonnêteté, expliqua Vladimir, c’est même la manière la plus courante de s’exprimer.

Le fils d’Igor donna ce bon conseil à Philippe et ce dernier fit un nouveau courrier au pape, dans lequel il affirmait se soumettre à sa volonté et répudier Bertrade.

Le pape reçut ce message alors qu’il était à Nîmes, s’apprêtant à quitter le royaume de France pour rejoindre l’Italie par la Bourgogne.

1. Cette église fut achevée vers l’année 1075, les fresques, que l’on peut encore voir aujourd’hui, sont parmi les plus belles peintures connues de l’époque romane.

2. Geoffroy le Barbu mourra l’année suivante.

Conflits familiaux

La branche normande de la famille des descendants du seigneur Lou de Châlus s’était rassemblée à Brionne, dans la forteresse dont avait hérité Brunehilde à la mort de son époux Igor. Outre la maîtresse des lieux, il y avait là Élise, Ingrid, ainsi qu’Isabeau et John, récemment rentrés du Limousin. Tout ce monde s’occupait d’une brochette d’enfants : Alix et Hugues, Almodis et Béatrix et le petit Richard.

Tarik faisait des allers-retours fréquents entre Paris et Brionne pour voir son épouse et ses rejetons. Bjarni, Roxana et Cyrielle demeuraient dans la forteresse de Falaise et eux aussi se rendaient régulièrement à Brionne pour visiter le reste de la famille. Un jour où tous étaient rassemblés autour d’un bon souper, Ingrid lança la conversation :

– Savez-vous que ce Pierre l’Ermite, qui prêche la croisade à travers le pays, est de passage non loin d’ici ? déclara l’épouse de Tarik. On l’a vu en Berry, dans l’Orléanais et il doit gagner la Champagne.

– Il paraît qu’il entraîne les foules à sa suite, ajouta Roxana, c’est extraordinaire.

– Je ne vois pas ce qu’il y a d’extraordinaire à rameuter tous les gueux du royaume, bougonna Bjarni, que cet engouement subit pour la croisade irritait quelque peu.

– On dit que Dieu s’exprime par la bouche de ce prédicateur, affirma Cyrielle avec véhémence.

À vingt-cinq ans, la fille de Bjarni et Roxana avait hérité de toute la fougue de sa mère, qui avait déjà participé, à cet âge-là, à la bataille de Lumphanan. Depuis que Robin était parti en Germanie poursuivre son éducation militaire auprès du margrave Ulrich, Bjarni avait bien du mal à faire la loi dans son foyer avec ces deux dames aussi passionnées l’une que l’autre.

– Si nous allions voir ça, proposa Brunehilde. Ce qui se passe en ce moment est assez étonnant, ce n’est pas tous les jours qu’on entend la voix de Dieu sortir du gosier d’un prédicateur.

– La voix de votre Dieu m’inquiète quelque peu, intervint Tarik : je suis obligé de m’habiller à la mode chrétienne pour cacher mes origines, car tout le monde veut massacrer du Sarrazin au royaume de Francie, par les temps qui courent.

– Il n’est pas question de massacrer quiconque, oncle Tarik, expliqua Cyrielle, les Chrétiens veulent juste aller libérer leurs frères qui vivent près du Saint-Sépulcre de Jérusalem.

– Il y aura forcément bataille, déclara Bjarni, les Turcs et les Arabes ne vont pas rendre Jérusalem aux Chrétiens sans broncher.

– Ce qui est magnifique, assura Roxana, c’est cette ferveur populaire.

– Je la trouve plutôt effrayante, moi, cette ferveur, estima Tarik.

– Je ne sais si elle est magnifique ou effrayante, mais en tout cas elle est des plus étonnantes, persista Brunehilde, et je veux aller voir ça.

– Tu as raison, mère, renchérit Ingrid, j’irai avec toi voir ce Pierre l’Ermite.

– Et nous aussi, conclurent Roxana et Cyrielle.

Tarik et Bjarni échangèrent un regard dépité. Quand les femmes de la famille avaient décidé quelque chose, il était vain de vouloir les en dissuader, tous deux le savaient bien.

Élise quant à elle n’avait pas pris part à la conversation, les turbulences de ce monde ne l’intéressaient plus guère. La perte de Lou-Leif, son époux, puis de sa fille Mahaut, l’avait détachée petit à petit des contingences du quotidien. Son seul centre d’intérêt était désormais l’éducation du petit Richard, dont le père était inconnu et la mère décédée, cela remplissait toute sa vie. John et Isabeau n’avaient pas non plus manifesté d’intérêt particulier pour cette croisade. Ils avaient beaucoup voyagé de chantier en chantier ces dernières années et ils aspiraient à un peu de sédentarité auprès de leurs enfants, les grands mouvements de foules ne les intéressaient guère.

C’est ainsi que Brunehilde, Ingrid, Roxana et Cyrielle se rendirent à Poissy, ville où il était prévu que Pierre l’Ermite fasse un grand prêche. Elles avaient été rejointes par Clotilde, la fille de Golet et Hermine, qui trouvait, elle aussi, admirable l’idée de cette croisade.

Des milliers de personnes avaient afflué là. Pierre l’Ermite était monté sur une charrette, au milieu d’un grand pré, et la foule se pressait autour de lui. Les cinq femmes s’approchèrent autant qu’elles le purent, mais elles étaient tout de même assez loin du prédicateur et elles n’entendirent que quelques bribes de son discours, sans arrêt interrompu par les acclamations de la foule en délire.

– Ce Pierre fascine les gens, constata Brunehilde, on n’entend rien de ce qu’il raconte, mais ça n’a guère d’importance, tout le monde est en transe.

– Il suscite l’espoir chez tous ces miséreux, nota Ingrid, le rêve d’un ailleurs meilleur que leur triste quotidien.

Cyrielle et Clotilde, les plus jeunes et alertes, réussirent à se rapprocher du prédicateur en se faufilant à travers la foule. Ce furent elles, dans la soirée, qui rapportèrent à leurs aînées ce qui avait été dit par le moine.

– Frère Pierre assure qu’il ne faut pas attendre les barons pour partir, les premiers arrivés seront les favoris de Dieu, annonça la fille de Golet.

– Il me paraît bien imprudent de partir sans quelque escorte, estima Brunehilde. Bjarni n’a pas tort, il est peu probable que les Turcs voient arriver tout ce monde sur leur terre sans rien dire.

– Certains seigneurs seront de ce voyage, précisa Cyrielle, j’ai rencontré Gauthier Sans-Avoir3, un chevalier local, qui a juré d’accompagner frère Pierre.

Clotilde et Cyrielle échangèrent un regard puis, de concert, elles tirèrent chacune de leur bliaud un morceau de tissu. Leurs trois aînées ouvrirent de grands yeux quand elles s’aperçurent que ces morceaux de tissu avaient la forme de deux petites croix.

– Nous avons fait serment de partir, lança Cyrielle en fixant sa mère avec un air de défi.

– Ton père va sûrement t’étrangler pour ça, assura Roxana.

– Tu sauras plaider ma cause, décréta la jeune fille. Il est bien tombé amoureux de toi parce que tu partais à la guerre !

– Non, il est tombé amoureux de moi avant et il l’est resté malgré mon départ à la bataille, rectifia la Saxonne.