Le Maître du jeu - Alissa P. - E-Book

Le Maître du jeu E-Book

Alissa P.

0,0

  • Herausgeber: Ô Plaisir
  • Kategorie: Erotik
  • Sprache: Französisch
  • Veröffentlichungsjahr: 2023
Beschreibung

Et si une rencontre était capable de vous faire sentir vivante ?
Elena se sent vide depuis quelque temps. Son quotidien lui laisse un goût amer, tous les jours, et sa vie parfaite représente un cauchemar à ses yeux.
Pour fuir sa réalité, elle se perd à El Paraíso, une salle de jeu où elle se laisse aller tout en prenant garde de ne pas sombrer dans les méandres du jeu.
Cependant, ce soir-là, en faisant la rencontre d’un nouveau joueur qui ne semble pas inconnu aux employés de la salle, elle sent son corps vibrer. Des vibrations qu’elle n’avait pas ressenties depuis longtemps.
Maestro pourrait bien représenter à ses yeux ce qu’elle désire être et ce qu’elle n’assume pas.
Se laissera-t-elle tenter par ses placements et ses propositions ?
Entre tensions et luxure, Elena acceptera-t-elle ce que lui réclame tout son être ? Ou continuera-t-elle de représenter l’idéal que tous attendent d’elle, oubliant ainsi son propre bonheur qui lui paraît pourtant à portée de main, telle une partie de cartes dont elle seule est le Maître ?
Elena sera-t-elle la Maîtresse de sa vie ?


À PROPOS DE L'AUTEURE

Alissa P. est une Juriste-Écrivain ayant fait voyager sa plume de la rigueur à l’évasion. Auteure de Desirs avoués aux éditions Ô'Plaisir, son imagination vogue à travers plusieurs genres d’écrits depuis 2021, année où elle a commencé à publier sur Wattpad. Entre romances à l’eau de rose et romances érotiques, elle écrit ce qui lui vient à l’esprit. Elle écrivait à 8 ans. Elle écrit aujourd’hui pour faire rêver les lecteurs. Son souhait ? Faire sortir de sa tête toutes les idées qui ne demandent qu’à prendre vie. « On a parfois besoin de rêver pour s’évader… Hors du Temps ! »

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 197

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Alissa P.

Le Maître du jeu

Une histoire érotique

Éditions Ô Plaisir !

AVERTISSEMENT

« LES JEUX D’ARGENT ET DE HASARD PEUVENT ÊTRE DANGEREUX: PERTES D’ARGENT, CONFLITS FAMILIAUX, ADDICTION… 

RETROUVEZ NOS CONSEILS SUR JOUEURS-INFO-SERVICE.FR (0974751313 — APPEL NON SURTAXÉ) ».

Ce récit est une œuvre de pure fiction. Par conséquent, toute ressemblance avec des situations réelles ou avec des personnes existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite.

Attention, ce livre est une histoire érotique contenant des scènes de sexes explicites.

REMERCIEMENTS

Je remercie de nouveau mes lecteurs et ceux qui se laisseront tenter par cette histoire.

J’espère qu’elle vous permettra de vous évader.

Chapitre1

Mexique, Acapulco.

Octobre…

Je marche sur mes hauts talons aiguilles de douze centimètres en vernis noir et à la semelle rouge vif. Un pied devant l’autre, avec sensualité. Ma jupe crayon noire fendue sur le côté épouse divinement mon corps et mon top écarlate à col bardot fait ressortir ma poitrine ainsi que mon collier en or.

Mes cheveux ébène sont impeccablement plaqués sur le devant et une longue queue de cheval haute remue au rythme de mes hanches.

Dans ma main droite, je tiens ma pochette écrue qui fait ressortir la couleur bordeaux de mes ongles.

J’arrive devant un gigantesque bâtiment de deux étages dont la façade en pierres blanches et aux grandes fenêtres à carreaux est chic.

Aux alentours se trouve un espace privé afin que les voitures s’y garent.

Le terrain doit facilement faire un hectare; c’est un endroit reculé, près d’une forêt. Il n’y a rien autour – du moins, pas à ma connaissance.

La première fois que je suis venue ici, à El Paraíso – enseigne lumineuse placée en haut de la porte d’entrée noire à doubles battants –, j’ai eu du mal à me repérer malgré mon GPS.

Maintenant, je m’y rends les yeux fermés.

Un homme vêtu d’un costume noir m’ouvre la porte en me voyant arriver.

— Je te remercie, Luis.

— Je t’en prie, Bella.

Je lui lance un léger sourire avant de pénétrer dans le hall à la forme ronde, éclairé par un grand lustre en cristal. Les murs sont blancs. Le sol est un dallage en damier noir et blanc, il a un effet miroir tant il est brillant.

Il y a deux portes; une à gauche et une à droite, avec un imposant escalier au milieu. Chaque porte mène à une salle de jeu, de même que l’escalier qui dessert un long couloir présentant trois portes.

Je pousse celle à droite du hall, comme tous les soirs.

C’est une grande pièce à la lumière tamisée, bruyante et empestant l’argent. Seuls les quatre coins des jeux sont parfaitement illuminés par des spots encastrés dans le plafond aux rayons colorés. Cela donne un côté mystérieux à l’endroit.

Cette salle est devenue mon quotidien depuis déjà trois semaines. Ici, je me fais appeler laBella desconocida de Septiembre.

Chaque soir, sans faute, je me perds entre ces murs, à cette table où je viens de m’asseoir. Elle est pour le moment vide. Mais rapidement, quatre hommes viennent y prendre place. Je les connais tous, à force; du type chic en costume au type banal qui espère gagner la mise.

Ils me saluent et je fais de même, un sourire sur mes lèvres rouges dont l’arc de Cupidon ressort grâce à mon mat de marque.

— On commence? demandé-je à Ramiro, le croupier.

Il est chargé d’animer la table.

— Il manque un joueur.

Il désigne de la main la place en face de moi.

— Ce n’est rien, dis-je.

Ce n’est pas la première fois qu’il manque un joueur à la table.

Toutefois, au même moment, un homme imposant en costume noir apparaît en face de moi. J’ignore d’où il sort, je ne l’ai jamais vu.

Il avance vers la table de jeu.

Ses cheveux noirs sont aussi étincelants que les miens. Ils sont mi-courts et plaqués sur les côtés, texturisés et envoyés en arrière sur le dessus. Je dirais que le côté éclatant vient du gel qu’il a dû appliquer pour que tout cela tienne strictement. Il n’y a pas un seul cheveu qui dépasse. Son visage est fin et sa mâchoire légèrement carrée.

Plus il s’approche et plus je parviens à distinguer ses yeux en forme d’amande. Ils sont de couleur… Il n’est pas suffisamment proche.

Sa barbe de trois jours est bien taillée et séduisante, je le confesse.

J’expire un léger sourire en le fixant.

— Excusez-moi du retard.

Il s’assoit face à moi et bloque son regard sur ma personne.

Les autres joueurs le saluent, mais il ne prête pas attention à eux.

C’est la première fois que je le vois, son visage ne me dit rien. Ses yeux azur, que je distingue finalement, sont hypnotisants et son regard est dur. Ses sourcils attirent l’œil et surtout le trait dessiné sur le droit.

— Votre nom, dis-je.

— Mon nom? demande-t-il en arquant un sourcil.

— Ici, chaque personne a un surnom pour jouer.

Il place ses coudes sur la table de jeu et joint ses mains entre elles. Elles paraissent larges.

— Et quel est le vôtre, belle demoiselle?

— Bella.

— Eh bien, Bella, appelez-moi Maestro.

J’esquisse un rictus amusé et soutiens son regard.

— Pouvons-nous enfin commencer à jouer, Maestro?

— C’est à la belle de décider.

— Ramiro, lance.

Celui-ci sort son jeu de cartes de sa poche et les déploie sur la table en arc de cercle.

— Vérifiez.

Cinquante-deux cartes: nous pouvons commencer. Une fois que nous lui faisons signe que tout est bon, Ramiro les mélange habilement.

J’observe le jeu, mais je sens un regard sur ma personne. Je jette rapidement un coup d’œil face à moi: cet homme mystérieux ne me quitte pas du regard. Cela m’interpelle, mais je ne perds pas le jeu des yeux pour autant.

Ramiro sort un cache-carte de sa poche. Il le tient entre son index et son majeur, et nous le montre des deux côtés avant de le glisser promptement sous la dernière carte pour procéder à la donne: la distribution.

Les cartes sont distribuées et le jeu commence.

Je ne suis pas une professionnelle, je m’amuse simplement. En revanche, cette salle de jeu, elle, est professionnelle. Ce n’est pas de l’arnaque. Manuela me l’a bien dit.

— Tu veux jouer dans les règles de l’art? Va à cette adresse.

Je souhaitais juste oublier mon quotidien et me vider la tête. Parier de l’argent et laisser le hasard prendre le dessus. M’éloigner des obligations de l’entreprise où je travaille. Juste… m’évader et n’avoir aucun contrôle; tout le contraire de ce que m’impose mon travail. Car plus rien ne sait susciter la moindre émotion en moi.

Depuis peu, je suis comme perdue et vide. J’ai essayé pas mal de choses: les soirées, l’alcool ou encore la cigarette. Et je sais bien que c’est mal, que cela n’arrange rien, que cela peut devenir un abîme… pourtant, j’espérais. Mais rien n’a fonctionné. Tout m’a agacée.

Rien ne me fait sourire, frémir. Je ressens toujours ce vide… Ce manque d’émotion, de sensation. C’est si lourd et étouffant…

J’ai pourtant tout pour être heureuse. Un appartement à mon nom, un travail où j’ai un poste important, un petit ami depuis déjà un an, mais… oh, ce dernier point, je ne l’ai plus. J’ai rompu avec lui il y a de ça un mois. Je n’arrivais plus à ressentir le moindre sentiment pour lui. Il souhaitait que l’on se voie et ça m’agaçait. Alors après un an de couple, j’ai décidé de rompre, pour lui comme pour moi. Il ne le voulait pas, mais je ne lui ai pas laissé le choix.

Je ne suis pas heureuse et je le sens. Comment? Il m’arrive de verser des larmes en regardant dans le vide, en pensant à ma vie.

Je suis si vide que plus rien ne me touche. L’apathie est devenue une partie de moi.

J’ai tout, mais je n’en profite pas car il me manque quelque chose.

Il n’y a pas d’explication à tout cela, je crois. J’ai simplement besoin de sortir de ce quotidien parfait qui m’oppresse et ne me ressemble plus. Tout m’ennuie dedans. Tout m’agace!

J’ai donc cherché cette chose qui me permettrait de bouleverser mon quotidien et j’ai demandé conseil à Manuela, une collègue qui est également mon amie depuis cinq ans déjà. Il me fallait quelque chose pour une fois: ne rien contrôler, me laisser aller. Quelque chose pour oublier ce quotidien trop lourd. Et j’ai trouvé ce lieu.

Ici, je suis une femme qui aime jouer. Une femme qui laisse le hasard décider. Je n’ai pas de décisions cruciales à prendre ou de personnes à écouter, c’est mon point de vue; je mise, je joue, je paye ou je reçois. Point.

Je me sens libre. Je ne parie jamais l’argent que je n’ai pas. Je ne cherche pas les problèmes. Je ne cherche pas la richesse, je veux juste m’évader.

Je viens de perdre. Cet homme, Maestro, a raflé la mise. Il affiche un sourire malin en coin.

— Qui continue?

— Moi, dis-je.

— Déterminée.

Deux autres joueurs font savoir qu’ils restent.

— On continue, lance Maestro.

Je regarde Ramiro mélanger les cartes avec rapidité, mais habileté. Il sait y faire. Aucune carte ne se retourne et n’est visible, et la carte de coupe empêche cela.

Une distribution, des placements et je viens de perdre de nouveau face à cet homme qui nous abat tous.

Mais vous savez quoi? Je viens de miser à nouveau. Le jeu est prenant. J’ai le sentiment qu’il s’y connaît plus qu’il ne le laisse paraître. Ses gestes sont sûrs, pourtant ses regards sont hésitants. Une technique contre ses adversaires?

Vingt-trois heures cinquante-sept: le jeu se termine.

Je viens de perdre face à lui, mais cette partie aura été saisissante et excitante, entre ses regards énigmatiques et sa main gagnante.

— Bella, vous venez de perdre mille deux cents pesos. Comment souhaitez-vous payer?

— En espèces.

Ramiro pose devant moi une feuille sur laquelle est inscrite la somme que je dois à Maestro. Je tends la main gauche et Ramiro y place un stylo noir.

Tout en soutenant le regard de cet homme, j’appose ma signature.

Le paiement en espèces est rapide et mon identité reste inconnue aux yeux des autres joueurs. De plus, je ne risque rien en marchant avec des billets sur moi: les employés assurent la sécurité dans le bâtiment et aux abords de celui-ci.

Le papier signé, j’attrape ma pochette sur la table de jeu et compte discrètement mes billets. J’ai le compte. Je les fais glisser jusqu’à lui.

— Mille deux cents pesos pour le Maestro.

— C’est très aimable à vous, Bella.

Je lâche un sourire et ferme ma pochette.

— Tu vas au bar? me questionne Ramiro en récupérant la feuille.

— Pas ce soir.

— Quel dommage, répond en riant cet homme dont les iris ne m’ont pas quittée une seule seconde de toute la soirée.

— Et pourquoi cela serait-il fâcheux?

— Je vous aurais offert un verre.

— Un whisky ?

— Mmh. Une femme qui boit du whisky.

Il est ténébreux. Son côté mystérieux pique ma curiosité.

— Vous m’accompagnez donc? demande-t-il.

Je saisis ma pochette et me lève.

— Avec plaisir. Ramiro, deux whiskys.

— Je préviens Osvaldo.

— Puisque vous semblez tout connaître en ce lieu, je vous suis, Bella.

Nous marchons pour nous diriger à une table, non loin du comptoir. Je m’assois dans l’un des fauteuils au style scandinave de couleur bleu paon. Il prend place en face de moi et déboutonne le bouton de sa veste à l’aide de son pouce et de son index.

Ce geste est… inexplicablement fascinant.

Je croise les jambes et regarde autour de moi en envoyant les cheveux de ma queue de cheval en arrière.

— Bella… Depuis quand venez-vous ici?

— Un petit moment. Et vous, Maestro?

— C’est la première fois.

— Pour une première fois, vous êtes doué.

— On me le dit souvent.

Son regard… Il me fait frémir. Il est si imperturbable et sérieux, avec cette pointe de je-ne-sais-quoi qui se reflète dans ses rares sourires en coin.

Et face à cela, je sens mes poils se hérisser légèrement, tout en ressentant de la curiosité… Lorsqu’il me fixe et me sourit, je suis prise de frémissements.

— Eh voilà, deux whiskys.

— Je te remercie, Osvald, dis-je.

Un clin d’œil et il retourne derrière le bar.

— Vous connaissez tout le monde, ici? me demande-t-il.

Je prends mon verre de whisky et le penche un peu à droite, à gauche et sur le devant, avant de le porter à mes lèvres. J’en prends une petite gorgée et le recule.

— Oui.

— Séduisant, lâche-t-il en portant à son tour son verre à ses lèvres fines, mais très attirantes.

Il le recule rapidement.

— Pourquoi venir jouer dans cette salle? me demande-t-il.

— Et pourquoi pas?

— Vous êtes une belle femme.

— Et?

— Vous êtes typiquement le genre de femme à avoir une vie parfaite.

— Et vous, à aimer gagner de l’argent. Vous êtes donc au bon endroit.

Il sourit; un sourire révélant sa dentition parfaite et éclatante.

— Des enfants? questionne-t-il.

— Non, et vous?

— Un mari?

— Et vous?

— J’aime les femmes.

Il le fait exprès.

— Les belles femmes, dit-il en insistant sur le deuxième mot.

— Je vois.

— Je répète ma question, Bella. Pourquoi venir jouer?

— Et vous?

— Mmh. Pour devenir plus riche que je ne le suis déjà.

Je ris.

— Un magnifique rire.

Nos regards semblent se défier, mais ils ne font en réalité que se dévisager.

— Et vous, Bella? Pourquoi venir jouer?

— Pour me sentir vivre.

— Intéressant. Vous sentez-vous morte en dehors de cette salle?

Face à sa question, je prends conscience que j’ai un peu trop parlé.

C’est la première fois que j’accepte de prendre un verre avec un homme – avec quelqu’un tout court. Ce visage que je montre ici, je ne le montre pas à l’extérieur.

En dehors de tout cela, je suis une femme sage qui gagne convenablement sa vie et c’est cela qui m’ennuie. Ici, je suis Bella. L’inconnue qui perd ou gagne, mais qui paye toujours.

Ici, je peux être cette partie de moi qui me fait vibrer à moitié. Mais cela, personne ne le sait.

— Je vais y aller, dis-je.

Je me lève, mais une main retient mon poignet.

— Je peux vous offrir de l’adrénaline, si cela vous intéresse. Assez pour que vous vous sentiez en vie.

Je tourne prestement la tête vers lui. Sa main est chaude… Je ressens de nouveau ce frémissement.

— De l’adrénaline?

— Il y a un hôtel pas très loin, murmure-t-il.

— Je ne couche pas dès le premier soir.

— Alors, à demain?

— Je suis déjà prise, dis-je en récupérant mon poignet.

— Pas assez, puisque vous vous sentez morte.

Je le fixe une dernière fois avant de me détourner de lui.

— À demain, Bella, crie-t-il.

Je ne me retourne pas et me dirige vers la porte menant au vestibule.

Chapitre2

Je me réveille assommée. Je n’ai pas arrêté de rêver de cet homme…

Mon portable sonne. Je tends le bras vers ma table de nuit et le saisis pour éteindre l’alarme.

Sept heures. Je dois me préparer.

J’habite dans un appartement qui possède une magnifique vue sur la mer d’Acapulco, au loin.

En quittant ma salle de bain, j’enfile un jean bleu et une chemise blanche. Je me fais un chignon et mets mes talons compensés; tout le contraste d’hier soir, et c’est ce que j’aime lorsque la nuit tombe. J’aime être cette femme que personne ne reconnaît et que moi-même, avant ces quelques semaines, je ne connaissais pas.

Je bois un café et quitte mon appartement, mon sac à main noir sur l’épaule.

Sur le chemin, je ne pense qu’à une chose: Maestro.

Je me sens vide, mais j’ai cette brumeuse sensation de plein lorsque je songe à cet homme. Je m’imagine gagner contre lui et sourire en me vantant intérieurement. Ou bien je l’imagine gagner et m’inviter de nouveau. Pourquoi? Parce que j’ai apprécié les regards que cet homme posait sur moi. Étrangement, grâce à cela, ma matinée ne me paraît pas fade.

Au bureau, Manuela me demande si tout se passe bien à la salle de jeu. Je lui fais savoir que oui, sans rentrer dans les détails – tout va surtout bien depuis hier soir, mais je me garde de lui raconter cela.

Personne, pas même elle, ne sait qui je suis là-bas. Elle m’a conseillé cette salle car elle y allait à un moment, après s’être fait plaquer. À présent, c’est mon tour et j’aime cette seconde identité que personne ne connaît et que je me suis découverte.

La journée passe si lentement que j’ai envie de m’enfuir de ce lieu.

Ils me félicitent tous d’avoir obtenu un contrat de pub avec une grande entreprise, mais je me fous royalement de ce soi-disant « exploit ». Ce quotidien m’étouffe et tous les jours depuis trois semaines, je n’attends qu’une chose: que la nuit tombe.

Dix-huit heures: je respire! Je quitte rapidement le bureau pour rentrer me préparer.

Ce soir, je veux jouer contre lui. Que je gagne ou que je perde, je veux simplement frissonner comme la veille.

*****

C’est en minijupe bordeaux imitation cuir et avec un top noir à colV comportant des lacets noués au niveau de mon ventre que je pénètre dans la salle.

Mes longs cheveux noirs ondulent librement jusqu’en bas de mon dos et sur mes épaules.

À ma grande surprise, cet homme est assis à la même place qu’hier. J’humecte mes lèvres pour ne pas abîmer mon rouge à lèvres mat et je m’avance vers lui.

Ramiro n’est pas là.

— Puis-je m’asseoir ou dois-je retourner à ma vie typiquement parfaite?

Maestro lâche un rictus qui le rend séduisant.

— Bonsoir, Bella. Je n’attendais que vous.

Sa voix me fait presque trembler. Je m’assois et regarde autour de moi.

— Où est Ramiro?

— Il ne va pas tarder.

Je hoche la tête.

En moins de rien, des joueurs que je connais s’approchent de la table. Je les salue.

Comme la veille, Maestro ne les regarde pas. Ses yeux semblent se concentrer sur moi, ce qui ne me dérange pas.

Ramiro finit par arriver et le jeu commence.

Je mise.

J’ai le sentiment que c’est un deux-deux: Maestro et moi, alors qu’il y a d’autres joueurs présents. Toutefois, les regards et les sourires que nous nous lançons me font oublier que nous ne sommes pas aussi seuls que me l’indique mon champ de vision.

— On continue? demande-t-il en me fixant.

Pour toute réponse, je mise de nouveau, et plus qu’au début. J’aime ce sourire qui se dessine sur ses lèvres, face à mon geste.

Minuit et douze minutes: le jeu se termine.

Les autres joueurs ont déjà payé, c’est à mon tour.

— Deux mille cent quarante pesos, dit-il.

Je signe le document que Ramiro m’a tendu. J’ouvre ma pochette pour en sortir quelques billets et les glisse jusqu’à Maestro, qui les prend dans la paume de sa main.

— Je vous remercie, Bella. Accepteriez-vous que je vous invite à boire un whisky ?

Mon point faible dans ma période de ras-le-bol, bien que je n’en abuse pas.

Il glisse les billets dans la poche intérieure de sa veste de costume.

— J’accepte volontiers, Maestro.

Il se lève, je fais de même et Ramiro demande à Osvaldo d’envoyer deux whiskys.

Maestro se place à mes côtés.

— Quelle table pour vos beaux yeux?

Je tourne la tête vers lui.

— Mes beaux yeux?

Il se courbe et détaille mon regard.

— Vos yeux aussi flamboyants qu’un joueur ayant gagné le gros lot. Décidez où vous voulez que nous nous assoyions, Bella.

Le gros lot, c’est cette salle de jeu où je peux être Bella, une femme que je ne suis pas dans mon quotidien fade. Paradoxalement, c’est grâce à mon quotidien fade que je peux me permettre d’être ici; grâce à un compte au vert et à ce vide que je ressens.

Je détourne la tête et regarde les tables. Celle de la veille est libre.

— Celle-ci.

— J’espérais que vous la choisiriez. Après vous, Bella.

Je ne me fais pas prier. Je m’assois dans l’un des fauteuils.

— Êtes-vous une femme d’affaires? me demande-t-il en se calant dans son fauteuil, le regard braqué sur moi.

Comme la veille, il déboutonne sa veste. Hypnotisant, vraiment.

— Qu’est-ce qui vous fait dire cela?

— Vous misez comme si l’argent n’était rien à vos yeux.

— Il n’est rien à mes yeux.

S’il l’était, je ne me sentirais pas si vide dans ma vie parfaite.

Je touche un très bon salaire et mes économies sont bien placées. Par chance, je ne perds pas toujours. Lorsque je gagne, je récupère ce que j’ai perdu.

— Mmh. Gagnez-vous souvent? interroge-t-il.

— Cela dépend.

— Aimez-vous le poker?

— Ça me plaît, et vous?

— Énormément. C’est…

— Excusez-moi, vos deux whiskys, dit Osvaldo en les posant sur la table.

— Je te remercie, Osvald.

— Le plaisir est pour moi, Bella.

Il s’éloigne.

— Osvald? questionne Maestro. Mmh, un surnom. Hier, je pensais que c’était une méprise de votre part.

Il affiche un sourire en coin et saisit son verre de whisky du bout des doigts.

— Je suis un homme très jaloux, Bella, dit-il en le portant à ses lèvres.

— Jaloux? En quoi cela me concerne-t-il?

Il dépose son verre et me regarde d’un air sérieux.

— Acceptez de passer une nuit avec moi.

Il insiste. Je ne me suis jamais donnée sur un coup de tête et ça ne commencera pas aujourd’hui.

— J’aimerais vous faire vivre, Bella. J’adorerais que vos belles lèvres gémissent mon prénom.

J’avale ma gorgée de whisky de travers, pose ma main au niveau de ma poitrine – dont le rythme cardiaque devient soudainement effréné – et tente de ne pas m’étouffer.

— Oubliez cela, dis-je.

— Avez-vous peur de devenir avide, Bella?

Il est sûr de lui.

— Je suis avide d’une seule chose: ma liberté de mouvement.

— Je peux vous enseigner de nouveaux mouvements.

Il se penche vers moi, sa tête au-dessus de la table, et chuchote:

— Votre corps nu vaguant sous le mien au rythme de mes va-et-vient.

Ses pupilles étincellent à ses paroles. Et étrangement, j’imagine cet homme au-dessus de moi.

Arriverait-il à me faire ressentir ce que je ne parviens plus à ressentir? Avec mon ex, je n’avais plus aucun plaisir. Je n’ai plus aucun plaisir, d’ailleurs; sauf celui de venir jouer ici. Et il est vrai que ce soir, ce plaisir a été davantage… présent, rien qu’en pensant au fait que Maestro serait ici. Mais c’est simplement parce qu’il pimente le jeu avec son air mystérieux.

— Cela ira, merci.

Je bois mon verre d’un coup et le dépose.

— Un autre?

— Je vais…

— Ne partez pas tout de suite. Ne jouez pas à Cendrillon avec moi, Bella.

Je souris face à son allusion.

— Que voulez-vous?

— Puisque vous refusez pour le moment de passer une nuit avec moi, je pourrais vous apprendre un autre jeu que le poker. Qu’en dites-vous?

— Un autre jeu? Lequel?

Il vide son verre en une gorgée très sexy, sa gorge faisant des mouvements plus que séduisants, et se lève. Il boutonne sa veste.

— Venez avec moi, que je vous montre.

Il me tend la main et je pose la mienne dessus. Il l’emprisonne avec la sienne et m’entraî