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L’histoire commence dans les temps reculés où régnaient les génies de la terre et des eaux. Le géant Eochaid a indiqué aux compagnons du roi Habis un emplacement pour bâtir leur ville. En échange, ils devront respecter la fontaine sacrée. De nos jours, à Angers, un homme disparaît, on découvre une source souterraine … Étienne en cherche la raison, mais s’agit-il d’une banale nappe d’eau, ou de la source sacrée qui lui vaudra la vengeance du géant réveillé du fond des âges ? A-t-il rêvé, ou les légendes continuent-elles à vivre parmi nous ?
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Seitenzahl: 88
Veröffentlichungsjahr: 2016
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« Puis un des sept anges qui tenaient les sept coupes vint, et il m’adressa la parole, en disant : Viens, je te montrerai le jugement de la grande prostituée qui est assise sur les grandes eaux ».
La Bible, Apocalypse de Saint Jean, chapitre 17 verset 1.
PROLOGUE
ANDRÉ.
ÉTIENNE.
MICHEL.
PIERRE.
JULIE.
UNE JOURNÉE ORDINAIRE.
LE TROU DE L’ENFER.
LE TEXTE D’ÉTIENNE D***.
UNE LETTRE.
VERDICT.
Le jeune homme cherchait depuis plusieurs jours. Ses compagnons, las de le voir errer apparemment sans but, se risquaient de temps en temps à lui poser une question : « Maître, où allons-nous ? Que cherches-tu ? » Mais Habis secouait la tête, il cherchait un lieu inconnu, un personnage dont personne n’avait entendu parler et dont la seule évocation remplissait les hommes d’épouvante.
Le jeune Habis était devenu le roi des Cunètes après avoir échappé aux tentatives d’assassinat de son grand-père Gargorix, car il était né de l’inconduite de sa mère. Depuis, il se rendait compte que son peuple ne pouvait subsister longtemps en se nourrissant des produits de la chasse et de la cueillette, et qu’il fallait trouver un lieu propice à faire venir les plantes que d’autres peuples cultivaient.
Là-bas, il y avait un fleuve, mais qui charriait des montagnes de sable, ses berges étaient comme habitées par un démon souterrain. On ne voulait l’approcher, on parlait à voix basse de gens qui s’étaient engloutis dans les berges, on interdisait aux enfants de s’en approcher. Et, quand il était rassasié, l’eau disparaissait sous le sable qui restait agité de remous.
Et Habis, qui avait été élevé en Irlande quand sa mère avait voulu le soustraire à la colère de Gargorix, avait appris là-bas qu’il y avait des dieux de la terre, des arbres et des rivières, il avait entendu parler du géant Eochaid, le grand druide, qui avait dans sa jeunesse été invité à creuser un puits qui avait permis de fertiliser toute une plaine. Ce géant qui commandait à la nature, c’était lui qu’il fallait aux Cunètes, il pouvait leur creuser un autre puits, faire venir une rivière, au moins trouver la source qui leur permettrait de bâtir une fontaine.
Mais les compagnons de Habis hésitaient : Eochaid était peut-être appelé « le dieu bon », mais il avait une réputation de rustre, de glouton, c’était un être qui n’était jamais rassasié. De plus, il traversait régulièrement le fleuve aux sables mouvants, est-ce que ce ne serait pas lui qui ordonnait de prendre des hommes en sacrifice ? Il nourrissait le fleuve en lui apportant des proies, peut-être. Et l’on disait qu’il déracinait des chênes dont il faisait des massues, se déplaçait toujours avec un grand chaudron. Habis répondait que le chaudron était l’objet qui nourrissait tout un village et non celui où un ogre faisait cuire des enfants. Quant à savoir comment il traversait le fleuve, et pourquoi, on l’apprendrait en temps voulu.
Ils trouvèrent à l’orée d’un bois un petit hameau groupé autour d’un puits. Les maisons semblaient désertes, ils s’approchèrent. Une femme sortit d’une maison et leur proposa de l’eau, ils acceptèrent et s’assirent sur des pierres autour du puits. Elle leur dit s’appeler Godig, les autres habitants étaient dans les bois, les hommes chassant, les enfants ramassant des glands dont on faisait de la farine.
Des glands ? Il y a des chênes par ici, alors, dit Habis. La femme eut l’air étonnée, mais un des compagnons lui dit en riant qu’il pensait que le géant Eochaid avait déraciné tous les chênes. Godig sursauta et se fâcha. Eochaid était un géant protecteur, s’il déracinait un chêne c’était pour que les hommes s’en nourrissent, en fassent des maisons, des coffres, et pour apporter les glands à ceux qui en manquaient. Et aussi pour leur ouvrir des passages permettant d’aller aux endroits où ils pratiquaient la chasse et la cueillette. Habis la pressa de questions, le voyaient-ils ? Comment se manifestait-il ? La femme secoua la tête. Il ne fallait pas appeler Eochaid, il venait quand bon lui semblait, tout simplement. Mais aussi, quand les hommes avaient besoin de lui, il le savait, il venait.
Godig attira Habis à l’écart et lui montra un petit tertre un peu plus loin. Derrière il y avait une caverne, avec une source, et c’était là que le géant Eochaid venait après avoir traversé le fleuve aux sables maléfiques pour s’accoupler avec les filles de la fontaine Godeline. Elle connaissait cette histoire car, lorsqu’elle était née, sa mère avait ressenti les premières douleurs de l’enfantement aux pieds de cette colline, et c’était pourquoi on l’avait appelée Godig.
Habis se rendit avec ses compagnons auprès du tertre où ils trouvèrent la source. Mais un gros orage éclata. Plusieurs des compagnons se réfugièrent dans la caverne, d’autres sous les arbres. Habis les rappela, les arbres attiraient le feu du ciel, et la caverne était celle où Eochaid forniquait avec les filles de la fontaine, il ne fallait pas profaner ce lieu.
Certains de ses compagnons lui obéirent, mais d’autres tinrent à rester dans la caverne. L’orage ne dura pas, mais la source se mit à grossir, jaillit en filets d’abord minces puis de plus en plus épais comme des tentacules, entraînant les malheureux qui avaient voulu violer l’antre d’Eochaid. Habis vit de loin ses compagnons tournoyer, prisonniers d’un torrent violent qui grossissait, s’épaississait même, semblait-il. En même temps, il aperçut les rives du fleuve aux sables qui se rapprochaient et engloutissaient les profanateurs. Eochaid commandait à la terre, aux sables et aux cours d’eau.
Au matin, le temps était clair et doux. Un peu plus loin, ils virent une rivière, qui coulait régulièrement, et l’herbe était verte et grasse. Remerciant Eochaid, ils décidèrent de venir chercher leur peuple pour s’y établir.
Habis décida que l’on pouvait indiquer à la nature ce qu’elle devait faire pousser, il apprit à son peuple à labourer la terre et à semer le blé. D’autres habitants arrivèrent d’autres tribus, ils les accueillirent, la rivière leur restait fidèle, ne manquant jamais d’eau.
Le tertre et la caverne demeurèrent inviolés, nul n’avait plus désormais le droit d’y pénétrer. Les nuits d’orage, le vent y soufflait, et on entendait le chant des filles de la fontaine. On disait qu’Eochaid prenait du bon temps, il fallait se réjouir avec lui.
André H*** n’osait plus rentrer chez lui. Pourtant le crépuscule commençait à descendre et déjà la Maine se couvrait de brumeuses volutes automnales. Il savait qu’il lui suffisait de quelques minutes pour gagner la place Molière et parvenir à l’extrémité de la rue Plantagenêt où il demeurait. Mais la crainte conduisit ses pas dans la rue Baudrière, aux nombreuses maisons du dix-huitième siècle, qui monte vers la cathédrale. Arrivé au coin de la rue Saint-Laud, près du centre commercial, il remarqua que les lampadaires s’allumaient, que les rues commençaient à se désertifier. Il aspira une grande bouffée d’air humide, indifférent à tout ce qui vivait encore autour de lui. Un gamin sur une planche à roulettes le heurta, car il venait de s’arrêter brutalement au milieu de la rue. Ils s’excusèrent simultanément. André aurait souhaité que ses jambes deviennent paralysées, il regretta de n’être pas tombé, pour qu’on l’emmène dans un quelconque hôpital, loin, très loin de chez lui. Il aurait fallu que le tram passe, qu’il tombe devant, qu’il soit bousculé, cela aurait fait venir des gens, on se serait occupé de lui.
Mais à présent, il savait qu’il lui faudrait rentrer. À moins qu’il ne décide de s’arrêter un moment dans un café, afin de reculer l’échéance. Ce qu’il fit. Le bistrot allait bientôt fermer, mais on voulut bien lui servir un café qu’il but lentement. Il savait que chaque goutte avalée le rapprochait de l’inéluctable moment où il lui faudrait introduire sa clé dans la serrure de la porte de sa maison. Un bref moment, sa main trembla et il eut envie de pleurer comme un enfant. Le glouglou grotesque que fit une bière pression en tombant dans un verre le fit sursauter.
Son regard se posa sur sa tasse désespérément vide. Il paya avec un gros billet, souhaitant que le serveur mette longtemps avant de trouver de la monnaie. Celle-ci rendue, trop vite à son gré, il mit encore un temps infini, mais qui lui parut d’une intense brièveté, comme si le temps s’était resserré, à mettre ses gants, son chapeau, à ajuster sa canne dans la paume de sa main. Au sortir du café, la fraîcheur nocturne l’entoura, menaçante.
Bien qu’il eût marché le plus lentement possible, il se trouva bientôt face à la porte de bois sombre de sa demeure, ultime rempart entre la vie réelle et ce qu’il croyait l’attendre derrière, tapi au plus profond de la maison.
Peut-être la serrure serait-elle bloquée ? Mais le mécanisme tourna sans un bruit, n’éveillant nul écho dans le vestibule. Lorsque la porte se fut refermée sur la rue, une peur de glace figea l’homme, empêchant sa main de trouver le commutateur électrique. Il songea que, s’il avait la certitude qu’on pouvait le croire … mais à quoi bon ? Il savait qu’il devrait lutter seul.
Au prix d’un effort qui le fit transpirer, il réussit à allumer le lustre qui dispensa une lumière blafarde. Il poussa un soupir de soulagement lorsque son ouïe ne perçut que le vide. Pas de bruit, pas de sonnerie de téléphone. Il se pouvait qu’il dîne tranquille.
Sauf si son imagination le tourmentait à nouveau. Mais était-ce seulement de l’imagination ?
Étienne D*** remit les papiers dans l’épais dossier et le referma. Un moment, il eut envie de le ranger, mais préféra le laisser sur son bureau. Il s’agissait tout de même de Maître André H***, son ancien professeur à la faculté de droit, dont l’étude de notaire était bien connue dans la région angevine. Il s’était adressé à lui, son assureur, Étienne pouvait y prêter un peu plus d’attention. S’il s’était agi d’une autre personne, il eût mis les déclarations de son client sur le compte d’hallucinations, d’affabulations infantiles. Mais non, il connaissait Maître H*** qui avait les pieds sur terre, et sa demande d’expertise touchant à des infiltrations d’eau était tout à fait légitime. Une maison ancienne, proche de la Maine, cela pouvait arriver.
Mais là où il ne le suivait plus, c’était au sujet de ses déclarations touchant à des bruits la nuit, et une impression qu’il y avait quelque chose qui bougeait dans sa cave … il lui avait conseillé de faire venir une entreprise de dératisation, lui avait fourni une adresse …