Mesrine, Jacques… Mesrine - Pascal Dague - E-Book

Mesrine, Jacques… Mesrine E-Book

Pascal Dague

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Beschreibung

Dès ses premiers méfaits, Jacques Mesrine avait manifesté un sens aigu de la mise en scène et du beau geste, sans doute un crime lui semblait-il imparfait si ne s’y marquait pas, de quelque manière que ce fût, le mépris dans lequel il tenait sa victime et la police…
Admiré par certains, craint ou haï par d’autres… L’ennemi public n° 1. L’homme le plus recherché de France : Jacques Mesrine ne laissait personne indifférent. Son nom résonne toujours, riche en significations, en émotions et en interrogations. Ce « gangster, braqueur de banques », aux exploits spectaculaires et à la morale de justicier était devenu de son vivant et est toujours, au-delà de sa mort, une figure emblématique de l’insoumission, de la rébellion, voire de la liberté en action. C’est à ce gangster aux multiples facettes, suscitant encore de nos jours de la fascination, que Pascal Dague consacre son passionnant nouveau récit au rythme haletant.

 À PROPOS DE L'AUTEUR

La « plume » de Pascal Dague, caresse le papier comme la feuille de rose excite par ordonnance la page blanche. Cela vous étonne ? D'aucuns pensent sûrement qu’il fut un homme insensible et froid, l’auteur est tout le contraire… Pour preuve le prix d'Excellence reçu en octobre 2020 par Bibliotheca Universalis et Horizon Littéraire Contemporain, dû au chantre d'amour de ses textes. Depuis plus de quarante ans, Pascal Dague cultive cette dichotomie entre la raison et la passion dans le seul but de découvrir la vérité ; de tout homme qui se cherche. Et revendique que quelque part, l'écrivain est un flic, un flic sentimental qui traque l'information jusqu'à satisfaire sa curiosité. Rien n'est simple, rien n'est écrit d'avance, la liberté se sculpte avec le temps. Faut-il encore le prendre pour lui donner toute son importance.

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Seitenzahl: 110

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Pascal DAGUE

MESRINE

JACQUES… MESRINE

–  PASCAL DAGUE –

PRÉLUDE

Mercredi 31 octobre 1979.

« Bonjour, mon amour.

Il est certain que si tu écoutes cette cassette, ma petite Sylvied’amour, c’est que je ne suis plus. Simple souvenir de ma voix.Simple souvenir de nous deux. Tu te souviens comme nous étionsheureux ! Mais oui, ma puce, ton mari est mort... abattu par lespoliciers ! Mais ça, nous le savions déjà. Nous savions que ça pouvaitarriver un jour. Tu te rappelles, je te le disais. Et maintenant, tu esseule. Seule avec ta peine, seule avec ta souffrance. Une chose, monange, il faut vivre, tu sais. Cette grande peine qui te fait si mal aucœur, tu t’imagines que tout est fini pour toi. Non, vis ! Vis commeje te le disais et puis c’est tout. Vis avec nos souvenirs. Mais net’emprisonne pas dans nos souvenirs. Oh ! Bien sûr, cette cassette jel’ai faite avant. Tu étais partie faire des commissions. Je ne savaispas que le destin pouvait se terminer comme ça ! Mais enfin, je medisais peut-être qu’un jour ça m’arriverait. Et je voulais que tugardes quelque chose de moi. Écoute cette musique...

Tu te rappelles à l’époque où nous l’écoutions chez   nous ? C’était lamusique de Midnight Express. Et rappelle-toi ce film qui nous avaitfait tant souffrir, par sa vision d’horreurs ! C’est peut-être ce quim’aurait attendu, à une échelle un peu plus petite. Mais une fincomme ça ! Je pense qu’un homme préfère la mort sous les ballespolicières que de crever comme un chien dans un trou de basse-fosse.Une seule chose est certaine, mon petit chat, c’est l’amour que tum’as apporté. C’était quelque chose de merveilleux ! Car à 43 ans,pardon 42 plutôt, d’aimer comme ça ! Aimer comme j’t’ai aimée,c’est impensable. Tu m’as tout amené. Tu m’as tout donné de toi.Vingt-quatre heures par jour, tu étais avec moi. Ça a été unecommunion, notre amour... Alors, si les larmes te viennent auxyeux, comprends une chose, nous avons vécu ça. Et, bien des gensn’ont jamais connu l’amour. Ma fin, c’était une chose presqueinévitable. On ne peut pas, tu sais ma chérie, quand un homme vitpar les armes, le vol, la violence et le crime, c’est très rarement qu’ilmeurt dans son lit. Et puis, en fin de compte, ma mort n’est pas plusstupide que si j’étais mort au volant d’une voiture, ou chez Usinor,en travaillant pour un patron. Que les flics m’aient assassiné ou pas,face à un type comme moi, y a pas tellement de cadeaux à faire. J’n’enfais pas non plus de mon côté. Donc... La haine, ça ne sert à rien del’avoir, ce qu’il faut, c’est que tu te souviennes de nous. Quand tufaisais une tapisserie, quand tu me préparais de bons p’tits plats,quand tu t’habillais et que... je te disais que tu es belle. Quand tumettais ton beau collier, ton beau collier Cartier ! Quand ons’émerveillait devant des choses qui nous plaisaient. Qu’on jouaitavec le merveilleux p’tit chien, c’est ça la vie. Tu sais, la mort, en finde compte, ça n’existe pas. La mort, c’est dans le cœur des hommes.Si tu ne te souviens plus de quelqu’un, la personne est morte ! Maistoi, toi tu penses à moi, alors je crois que je suis toujours vivant.Vivant en toi et pour longtemps ! C’est pour ça, ma chérie, je te ledemande, ne t’emprisonne pas dans ta souffrance, revis.

Je te le demande de toute la force de mon cœur. Et qui sait, on seretrouvera peut-être un jour. Où ça ? Mais en enfer, mon ange. J’ysuis bien, entre parenthèses. Toi qui as toujours froid, je peux tegarantir qu’ici... Super ! Et puis en enfer, on rigole drôlement. Il n’ya que des gens qui s’emmerdaient pas sur Terre, qui y sontactuellement. Ah ! Tu sais, on rigole. Je rigole d’être mort. Parce quela mort, à la finale, c’est rien. C’est rien pour celui qui a su vivre.Ceux qui ont raté leur vie, en fin de compte, ce sont des morts-vivants ! Moi, ma vie, bon... Criminellement, on ne peut pas direqu’une vie soit réussie. Mais sentimentalement, ma vie n’a pas étéun échec, puisque je t’ai connue, rencontrée et aimée. Tous cessouvenirs fous, mon bébé, et l’amour, c’était si bon ensemble. Onpeut dire que nous nous donnions. C’était beau, c’était simple, pasde complications. Rien n’était faux, tout était vrai chez nous. Alors,à la finale, tu sais, mon p’tit chat... Oh ! Bien sûr, certainespersonnes pourraient dire qu’il y a d’autres façons de vivre, mais jen’avais plus tellement le choix non plus. Et à la finale, j’ai assuméma criminalité jusqu’au bout. Et je considère que ce n’est pas si malque ça, d’aller jusqu’au bout. Et c’est ce qu’il faut dans la vie, j’aimepas les gens qui reculent. Trop de gens reculent. Tu sais, simplementde voir la détention en France, dans les QHS (quartiers de hautesécurité). Quand j’ai vu réellement qu’on créait ça, non pouremprisonner l’homme, mais pour le détruire moralement,totalement, une serviette... Un torchon !

Il fallait que l’homme s’abaisse devant ces messieurs. Au moins, je suis mort les armes à la main, même si peut-être, et ça je n’en sais rien, je n’ai pas eu le temps de m’en servir. Parce que même si les policiers m’ont tué avant que j’aie eu le temps de mettre la main sur mon révolver, il faut te dire une chose, si j’avais eu le temps de mettre la main dessus, je m’en serais servi. Peut-être que j’ai mis la main dessus, et que je m’en suis servi. Puisque cette cassette est prémonitoire, je ne peux quand même pas envisager ce qui m’est arrivé, ou ce qui m’arrivera. La seule chose que je sais, c’est que si tu écoutes cette cassette, c’est que je suis dans une prison d’où on ne s’évade pas ! En fin de compte, Alain Peyrefitte a trouvé le moyen, la seule prison d’où l’on ne s’évade pas : c’est un cercueil ! Mon plus beau cimetière, et ce n’est pas péjoratif ce que je vais dire, ma plus belle cellule, c’est ton cœur ! Et j’y suis bien. Et je tiens à y rester. Aussi longtemps que tu penseras à moi. Et que tu m’aimeras. De toute façon, ma chérie, tu le sais, aucun couple ne termine totalement sa vie ensemble. Il y en a toujours un qui s’en va avant l’autre...

Et c’est terrible quand on s’aime ! La vraie souffrance, c’est à ce moment-là qu’on la ressent. Alors, pense à nous, c’est tout. Moi, je sais que j’ai vécu ce que peu d’hommes arrivent à vivre. C’est-à-dire un amour complet. Quant à la criminalité, bien, j’avais fait un choix. Et face à la société, dès l’instant où je suis mort, je ne suis plus coupable de rien. Et à la finale, je vais rester un exemple, un mauvais exemple !? C’est ça qui est terrible. Certains vont faire de moi un héros, alors qu’il n’y a pas de héros dans la criminalité. Il n’y a que des hommes qui sont marginaux, qui n’acceptent pas les lois. Parce que les lois sont faites pour les riches et les forts. Hein, on en sait quelque chose. Moi, j’ai choisi d’être aisé par le crime. En m’attaquant presque toujours aux « nantis » et aux riches. Mais j’étais plus riche qu’eux parce que j’avais l’amour en plus. L’amour et je pense le courage, de mes opinions et, de ce que j’avais décidé d’être, c’est terrible, mon ange. Écoute cette musique... Midnight, écoute-la (il monte le volume).

J’aimerais danser avec toi. Mais non, d’où je suis, je ne peux pas, ma chérie, y a trop de marches à descendre. Et tu vois, je vais te dire une chose, si je demandais une permission de sortie, impossible. L’enfer. J’aime bien ces théories complètement stupides que la religion impose aux hommes. Y a pas d’enfer, pas de paradis. Le paradis, c’est sur Terre, ou l’enfer, c’est sur Terre qu’on le vit. Il n’y a pas d’autre monde. Il y a seulement une autre manière de vivre. L’esprit ne meurt pas, de toute façon. La preuve, c’est que tu penses à moi. Écoute (le volume monte encore).

Tu t’imagines quand on était en Sicile, et que tu dansais. Tu étais sensuelle à mort, qu’est-ce que c’était beau ! Rien qu’à écouter cette musique, j’t’imagine, une vraie princesse. C’est vrai que tu étais belle, tu le savais aussi. Hein ! Avec tes beaux yeux de biche, tu avais une vraie petite gueule d’amour. Sauvage, un peu (il danse sur la musique). Ça donne pas envie de danser, bébé, hein ? Tu t’imagines, tu es dans mes bras (il chante). Eh, dis donc, bébé. Peut-être que tu écoutes cette cassette et que j’suis pas mort du tout. Peut-être que, manque de chance pour moi, les policiers m’ont repris vivant. Et tu l’écoutes quand même, hein ? En te disant : “Je le préfère en prison et vivant !”,.

Mais, tu sais sincèrement, si j’suis en prison, je ne suis pas content. Parce que moi, j’préfèrerais autre chose. Écoute cette musique (de nouveau plus forte). Écoute-la jusqu’au bout. C’est vrai que tu étais disco... très disco. Tu te souviens en Angleterre... (il chante et danse).

Dis, mon ange, j’espère quand même que tu vas danser maintenant. Il serait temps...

Ton veuvage ne va pas durer toute ta vie. Tu te souviens quand je te disais ça, tu piquais de drôles de colères. C’est moi qui avais raison et tu le sais. Ce n’est pas parce qu’un homme meurt que la vie doit s’arrêter. Premièrement, tu as ta fille, notre fille, pardon. Alors tu sais... et puis... tu as le p’tit chien. Je ne prononce pas son nom. En enregistrant cette cassette, on ne sait jamais, si elle tombait dans de mauvaises mains avant, je n’ai pas envie que son nom soit prononcé ».

L’enregistrement s’arrête net.

« Il n’y a pas de héros dans la criminalité » – Je n’ai aucune admiration pour un personnage violent et sans pitié, pourtant, en écoutant cette cassette, on peut se dire que le bonhomme ne manquait pas de sagacité. Et lui qui s’est toujours montré fair-play avec les policiers qui le pourchassaient, je crois qu’il n’aurait pas aimé ce brouillamini dont certains ont entouré sa mort. De ce point de vue, Jacques Mesrine était un beau mec – à l’ancienne : je suis un voyou, vous êtes des poulets, mais on est des hommes… Et c’est le premier qui tirera qui aura raison ! Alors, je me dis que derrière la pire des crapules, il peut encore exister un peu de tendresse, de douceur, voire d’amour. Et qu’il n’y a pas de bêtes humaines.

CHAPITRE 1

JEUNESSE ET GUERRE D’ALGÉRIE

Jacques Mesrine est né le 28 décembre 1936, à Clichy, dans la banlieue nord de Paris. Il était le second enfant d’une famille modeste. Son père ressemblait étonnamment à Gary Cooper. Sa mère, quant à elle, était bouleversante de sensualité. Pierre et Monique, ses parents, s’étaient rencontrés dans l’atelier d’une grande firme de broderie de luxe pour laquelle ils travaillaient tous les deux comme dessinateurs. À la naissance de Jacques, ils emménagèrent dans un deux-pièces, cuisine, salle de bains.