Falassami, l’enfant de Djambala - Pierre Gbolo - E-Book

Falassami, l’enfant de Djambala E-Book

Pierre Gbolo

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Beschreibung

Falassami, confié par sa mère à ses grands-parents maternels, est scolarisé par son grand-père, puis revient vivre avec les siens à Djambala. Il est témoin d’actes d’incivilité, d’impunité dans cette ville, et il remarque que certaines personnes se comportent comme des caméléons pour échapper aux sanctions, même quand elles sont prises en flagrant délit. Quel est le mystère derrière cette impunité ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Pierre Gbolo a grandi dans le quartier Djambala. Tout au long de sa vie, il s’est interrogé sur les actes d’incivilité et l’impunité qui persistent en ce lieu et ailleurs. "Falassami, l’enfant de Djambala" est le résultat de cette réflexion.

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Pierre Gbolo

Falassami, l’enfant de Djambala

© Lys Bleu Éditions – Pierre Gbolo

ISBN : 979-10-422-1534-7

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Falassami Bitoun

Nous sommes sur la grande nationale qui vient de Bangui et qui va jusqu’au Cameroun. À la dernière rue que l’on dépasse avant d’arriver au grand carrefour où se dresse une grande croix.

De cette grande croix, si vous continuez tout droit, vous arrivez à la cathédrale de Sainte-Anne, là résident les religieuses, les prêtres, et l’évêque. Si vous tournez à gauche, cette route vous mène jusqu’au Cameroun et au Gabon.

Au fond de la rue dont je vous parlais, d’un côté des hommes étaient assis dans la cour, ils discutaient. De l’autre côté, dans une petite case, des femmes étaient regroupées autour d’une jeune fille de dix-sept ans. C’était le matin, le soleil commence à se lever. De l’extérieur on entendait une femme crier :

— Issi, issi, ce qui voulait dire pousse pousse.

Quelques minutes après, une autre femme sort de la case.

— C’est un garçon.

Un vieillard que l’on appelle dans le quartier Zounou, ce qui veut dire le monde, ouvre les bras en disant : « Qu’il entre dans le monde de l’impunité ». Pendant que les femmes s’occupaient de Lucie, la jeune maman, et de son enfant, Wessambo, le grand-père envoie les gens acheter une dame-jeanne de mbako, c’est de l’alcool de maïs, un alcool local de douze degrés environ, pour fêter l’arrivée de son petit-fils. On appela ce petit garçon qui vient de naître en l’an 1952 : Falassami Bitoun.

Quatre mois après l’accouchement, Lucie décide de rentrer chez elle, au quartier Djambala, parce que son mari, qui était parti au chantier chercher du diamant, allait bientôt revenir. Elle voulait être chez elle, pour le recevoir et lui préparer à manger. Elle voulait surtout qu’il voie son fils.

Sa grande sœur, Vivienne, l’accompagne. Elle était mariée, mais elle n’avait pas d’enfant. Lorsque Frédéric, le mari de Lucie, est revenu du chantier, Vivienne retourne chez elle, au quartier de la SEITA. Cette entreprise s’occupe de la culture du tabac. Elle donnait du travail aux habitants des villages environnants, et aux jeunes qui, pendant l’été, venaient trier les feuilles de tabac pour avoir un peu d’argent pendant les grandes vacances.

Comme Frédéric ne trouvait jamais le bon carat de diamant qui les rendrait riches, ils vivaient de la vente des produits de leur champ et de la vente de mbako que Lucie préparait. Lorsque Lucie apportait son fils pour travailler au champ, elle le mettait dans un boulé, une sorte de grande assiette creuse en aluminium pour le protéger de mille-pattes et d’autres petites bestioles.

Toutes les cinq minutes, elle venait le voir. Très inquiète, et estimant que son enfant n’était pas en sécurité, elle décide d’aller confier son fils à ses parents au quartier Rosine. Le petit Falassami grandissait avec ses tantes, oncles, cousins, cousines et d’autres jeunes de son âge.

L’homme qui culbute le buffle

Les années passaient, Falassami grandissait. Un après-midi, il voit son grand-père revenir de son campement qui se trouve à cinquante kilomètres de Berbérati. Ce campement se situe à dix kilomètres environ d’une rivière appelée mboumbè. Celui-ci vivait de la culture du tabac. Il pratiquait aussi la chasse, la pêche. On y accède en passant par de petits chemins de brousse en traversant des rivières et des marais.

Le grand-père de Falassami est accueilli par sa seconde femme restée à Rosine pour garder les enfants. Aussitôt on lui sort sa chaise longue, il s’y allonge.

On lui apporte une bouteille de castelvin contenant du premier mbako, il se relève, se met assis, il se met à boire le mbako en discutant avec d’autres hommes de son âge qui sont venus lui rendre visite. Falassami qui était assis à côté de son grand-père se lève, il veut aller rejoindre ses camarades. Son grand-père le retient. Il va se mettre debout derrière la chaise longue de son grand-père.

Tout en buvant leur mbako, les vieux discutent des affaires du quartier. Dans la discussion, un vieux interpelle le grand-père de Falassami.

— Dis-moi Wessambo, il paraît que tu as culbuté et fait fuir un buffle ?
— Qui t’a raconté une telle ânerie ?
— La nouvelle vient du village dans lequel tu as ton campement.
— Ces gens-là feraient mieux de venir se renseigner auprès de moi, au lieu de diffuser de fausses informations.
— Les gens disent que tu as attrapé les cornes du buffle et que tu l’as mis au sol. Dis-nous quel pouvoir tu as ?
— Vous êtes sérieux ? Vous m’avez vu ? Vous avez tous vu un buffle, est-ce que moi, je peux attraper un buffle par les cornes et le mettre au sol ? En un tour de tête il m’aurait jeté en l’air et attendre tranquillement que je vienne tomber sur ses cornes et me tuer.

Je vais vous dire ce qui s’est passé. J’aiquitté le village pour aller à mon campement, sur mon chemin j’ai rencontré trois personnes qui couraient en me disant : il y a un buffle, il y a un buffle.

Je pensais qu’ils étaient poursuivis par un buffle blessé. J’ai continué mon chemin. Quelques mètres plus loin, je vois un buffle qui se dresse devant moi, sur mon chemin. Je m’arrête, je le fixe du regard, je prends ma machette, je la pose au sol, je prends ma sagaie, je la pose au sol, au moment où je voulais prendre mon fusil, je vois le buffle reculer et rentrer dans la brousse. Je ramasse ma machette et ma flèche et continue tranquillement mon chemin jusqu’au campement.

— Il paraît que tu vis tout seul dans ton campement de l’autre côté de la rivière, dit un autre vieux.
— Nous sommes deux. Le premier jour, lorsque je construisais mon campement, Bina, qui habitait de l’autre côté de la rivière, est venu me rencontrer, il m’a demandé si je voulais qu’il vienne vivre avec moi, je lui ai dit oui. Je ne vis pas tout seul au campement, il y a plusieurs personnes qui ont leur champ de tabac autour de moi, mais nous sommes séparés d’environ cinq kilomètres les uns des autres pour mieux construire notre hangar.

Les enfants sont grands, mes deux femmes vivent avec moi. De temps en temps, l’une d’entre elles vient voir les enfants, elle ramène les gibiers, ou les poissons secs pour les vendre. Je ne vis pas que de la culture de tabac, je fais aussi la pêche, la chasse.

Falassami écoutait son grand-père avec beaucoup d’attention. Alors que les vieux discutaient encore, Falassami va s’amuser avec ses camarades, son grand-père le laisse partir.

La sœur Bosco

Le lendemain matin, Falassami se réveille. Il s’amuse tout seul dans la cour, il s’ennuie. Les autres enfants sont partis à l’école Sainte-Anne. Vers douze heures trente, les enfants reviennent de l’école. Le grand-père de Falassami appelle un de ses fils.

— Vous n’avez pas inscrit Falassami à l’école ?

Tous ses enfants se mettent à rire. Il entre dans une grande colère.

— Vous golez moi, golez moi, golez moi, pourquoi ? C’est moi qui aîné vous ? C’est vous qui aîné moi ?

Il voulait dire : « Pourquoi vous vous moquez de moi ? Qui est le chef de famille ? C’est vous ou c’est moi ? »

Se rendant compte que son petit-fils n’était pas inscrit à l’école, vers quatorze heures, il le prend par la main. Ensemble, ils vont à l’école maternelle de Sainte-Anne, qui se trouve à quelques mètres après l’école primaire.

Ils dépassent la cathédrale Sainte-Anne, traversent les bâtiments de l’école primaire situés de chaque côté de la rue, arrivent à l’école maternelle qui se situe au quartier Bellevue, non loin de l’école primaire.

Le grand-père de Falassami rencontre la sœur Bosco, religieuse et directrice de cet établissement. Il discute un moment avec elle. Falassami entend la sœur Bosco dire.

— Mais bien sûr, je le prends ce garçon.

La sœur Bosco est très grande et très grosse. Elle doit mesurer environ un mètre quatre-vingt. Elle s’avance vers le garçon. Va rejoindre tes petits camarades dans la classe. Falassami rentre dans la salle de classe. Elle salue le grand-père de Falassami.

Mboko péna nè ngaï

La femme qui passe en force

Quelques mois après, ce sont les vacances scolaires. Le grand-père de Falassami décide de l’emmener à son campement. Le matin ils prennent un car qui part à Ngamboula. Après cinquante kilomètres, ils descendent à Garé, le village de Bouya, la grand-mère maternelle de la maman de Falassami. Le grand-père de Falassami possède une case dans ce village. C’est là qu’il vient vendre ses feuilles de tabac à la compagnie de la Seita lorsque celle-ci fait la tournée annuelle pour acheter les feuilles de tabac aux paysans.

Le lendemain matin, au lever du soleil, le grand-père de Falassami et son petit-fils rentrent dans la forêt, Wessambo marche devant, Falassami le suit. Ils traversent des rivières sur un pont fait avec un tronc d’arbre. C’est la première fois que Falassami traverse une rivière en marchant sur un tronc d’arbre. Ils arrivent à une rivière qui s’appelle Mboko péna nè ngaï, en réalité chaque rivière traversée a un nom. Falassami n’a retenu que le nom de cette rivière qui est en réalité une sorte de mare boueuse, il faut faire très attention pour la traverser sinon on s’enfonce dans la boue. Le grand-père de Falassami a traversé cette marre depuis cinq minutes, il attend son petit-fils qui essaie de se souvenir où est-ce que son grand-père a mis le pied. Il n’y a pas de tronc d’arbre, il faut vraiment marcher dans cette mare. Falassami arrive enfin de l’autre côté de la rivière, son grand-père continue sa marche.

Falassami sent l’odeur de poissons frais que l’on est en train de préparer. Ils dépassent un premier campement, un second, il y a plusieurs petits campements séparés les uns des autres.

Le campement

Enfin le grand-père de Falassami s’arrête, il dit à son petit-fils :

— Voici mon champ de tabac.

En effet il a une grande plantation de tabac. Ils marchent quelques minutes. Le grand-père de Falassami a construit une grande case, d’un côté, et un très long hangar de l’autre pour y sécher les feuilles de tabac. Aussitôt les deux femmes du grand-père de Falassami viennent les accueillir.

— Falassami est un très bon marcheur. Je craignais qu’il ne s’embourbe en traversant mboko péna nè ngaï, mais non, il voyait là où je mettais les pieds, il m’imitait. Je n’ai même pas eu besoin de le porter, dit le grand-père de Falassami.

Falassami était content de retrouver ses deux grand-mères et son oncle Michel. Il se sentait moins seul. Aussitôt, on leur apporte un bon plat de biche séchée préparée avec des feuilles de manioc. Falassami, son oncle et son grand-père mangeaient ensemble dans la cour. Ses deux grand-mères mangeaient dans la case.

Après le repas, Michel, l’oncle de Falassami, lui montre la case, le hangar, les champs de sa mère, et de la seconde épouse de son père. Après, il va lui montrer le champ de tabac de son père. Il lui montre les autres campements. Une fois de retour à leur campement, les enfants des autres campements viennent faire la connaissance de Falassami.

— Viens, on va faire de la balançoire, dit un enfant.

Ensemble, ils vont à la rivière. Ils rentrent dans la forêt. Falassami ne voyait pas de balançoire. Son oncle lui dit que dans la forêt, les grosses lianes servent de balançoire.

Un enfant prend une grosse liane, il s’y accroche, les autres le poussent, la liane traverse toute la rivière et revient comme une balançoire. À tour de rôle, les enfants faisaient de la balançoire sans se disputer.

Après ils traversent la rivière, ils vont montrer le village situé de l’autre côté du campement, il y a un gros tronc d’arbre sur la rivière. Ils traversent la rivière, arrivent au village, après ils reviennent au campement. Ils vont se laver au bord de la rivière. Ils enlèvent leurs habits, ils rentrent dans la rivière, ils se lavent. Dès que le soleil commence à se coucher, chaque enfant regagne son campement.

Arrivés au campement, le grand-père de Falassami était assis sur sa chaise longue, il fumait sa pipe.

— Où étiez-vous ?

L’oncle de Falassami dit à son père : « Cet après-midi, j’ai montré notre campement et nos différents champs à mon neveu. Après je lui ai montré les autres campements, avec les autres enfants nous avons traversé la rivière, nous sommes allés lui montrer le village qui se trouve de l’autre côté de la rivière. Nous sommes allés nous laver à la rivière. »

— Nous avons fait de la balançoire, dit Falassami.

— Quoi ? Tu as fait faire de la balançoire à mon petit fils ? Tu es complètement malade. On vous a interdit de faire de la balançoire dans la forêt. Certains serpents venimeux se cachent entre les lianes, il y a aussi des serpents boa qui prennent la forme de lianes. Certaines lianes sont fragiles, elles peuvent se casser, vous pouvez tomber soit sur un vieux tronc d’arbre, soit dans la rivière, tu sais qu’il y a des crocodiles dans cette rivière, n’emmène plus mon petit-fils faire de la balançoire.

Lorsque le soleil est complètement couché, il appelle Falassami, son fils, ils vont derrière le campement. Le grand-père de Falassami avait tué une biche pour offrir à son petit-fils et lui montrer comment on dépèce un animal.

Derrière la case il y a un emplacement bien propre pour dépecer un gibier. Le grand-père de Falassami rentre dans un buisson, il ressort avec une biche. Il commence à la dépecer, tout en expliquant à son fils et à Falassami comment il faut enlever la peau, comment il faut l’éventrer sans toucher à la bile sinon une partie de l’animal serait immangeable.

Après avoir dépecé la biche, ils les apportent dans la case. La grand-mère de Falassami et sa coépouse se mettent à cuisiner. Quelques heures après, ils se mettent à manger. Le jeune garçon savourait cette délicieuse cuisine.

Pendant que la grand-mère de Falassami préparait une partie de la biche, le grand-père de Falassami et son fils se sont installés dans un coin de la grande case, ils ont préparé une braise ardente, et mis les quatre gigots de la biche sur la braise. C’était une sorte de barbecue. Pas de fumée. Cette partie de la biche, qui est destinée à la vente, ne doit pas sentir la fumée.

De grand matin, avant que le soleil ne soit trop brûlant, le grand-père va dans son champ de tabac. Il revient vers huit heures prendre le petit déjeuner. Au petit déjeuner, on donne la tête de la biche à Falassami, il se régalait. Après le petit déjeuner, le grand-père repart au champ. Lorsque tous les hommes sont partis dans leur champ, et que les femmes sont allées dans leur champ de manioc, d’arachides et d’autres plantes vivrières, les enfants des autres campements sont venus retrouver Falassami. Ensemble, l’oncle de Falassami et les autres enfants vont faire de la balançoire dans la forêt sur la rivière, la liane les emportait d’un côté et de l’autre de la rivière. Falassami n’a plus parlé de la balançoire à son grand-père. Il s’éclatait avec ses camarades.

Hala (gbèdimgbè)

Les fourmis magnans

Un après-midi, après le repas, le grand-père de Falassami demande à son petit-fils de l’accompagner en forêt. Il lui donne une machette, Falassami ne comprenait pas pourquoi son grand-père lui donne une machette, il la prend. Il le suit dans la forêt. Après quelques minutes de marche, il voit son grand-père faire des sauts rapides, il ne comprend pas. Il regarde au sol, il voit quelques petites fourmis rouges. Il imite son grand-père qui s’est arrêté quelques mètres plus loin pour l’attendre, il fait plusieurs petits sauts rapides. Lorsqu’il arrive à côté de son grand-père, celui-ci lui dit :

— Viens voir.

Falassami se rapproche de son grand-père, il lui montre une colonie de fourmis magnans qui traverse le chemin.

— Tout à l’heure, ces fourmis étaient sur notre passage. Si tu ne passes pas en courant, elles vont rentrer dans tes habits, elles vont t’envahir. Dans ces conditions, soit tu te déshabilles complètement pour les écraser toutes, ou bien s’il y a une rivière non loin de toi, va vite te jeter dans l’eau. Ces fourmis, nous les appelons hala ou gbèdemgbè, c’est-à-dire tueuses de biches.

Ils continuent leur chemin. Quelques mètres plus loin, le grand-père de Falassami s’arrête, il lui montre un trou, il y a un tronc d’arbre retenu par une liane. Il dit à son petit-fils :

— C’est un piège, c’est pour attraper de gros gibier. Lorsqu’un animal tombe dans le trou, le tronc d’arbre s’abat sur lui, l’étouffe, l’écrase, je n’ai plus qu’à attendre qu’il soit complètement mort pour appeler du renfort afin de le sortir du piège. Ce piège s’appelle dou.

Ne me demandez pas comment ce piège s’appelle en français, je ne le sais pas. Après le grand-père de Falassami lui dit qu’il était l’heure de rentrer au campement. Il demande à Falassami de se mettre devant lui.

Sur le chemin de retour, le grand-père de Falassami indique un autre chemin à son petit-fils. Il y avait une grosse liane sur le chemin. Falassami voulait soulever la liane avec sa main.

— Touche pas la liane. Coupe-la avec ta machette.

D’un grand coup sec, le grand-père de Falassami coupe la liane.

— En forêt, si tu vois une liane ne la touche pas. Donne d’abord un coup de machette sur la liane. Si tu n’as pas de machette, tu prends un gros morceau de bois et tu tapes sur la liane. Si c’est un serpent boa tu verras la liane se déplacer lentement, si c’est un petit serpent, il tombera au sol et prendra la fuite. S’il n’y a rien, alors tu peux attraper la liane, la soulever et passer en dessous.

Le grand-père de Falassami se met devant son petit-fils. Arrivés au campement, il laisse son petit-fils, prend sa gibecière, il retourne en forêt. Il revient vers dix-sept heures, il appelle sa seconde femme, il lui donne sa gibecière, elle vide le contenu dans une grosse marmite. Il y avait plein de poissons.

La seconde femme du grand-père de Falassami, sa première femme, la grand-mère de Falassami et son fils Michel se mettent à enlever les cailles et à vider les poissons.

Falassami voulait les aider. Eux ne voulaient pas. Alors il se met à les observer. Comme pour la biche, une grande partie des poissons est réservée à la conservation. On les plaça sur cette braise ardente qui ne s’éteignait jamais.

Les poissons et les gibiers séchaient lentement. Lorsque le grand-père de Falassami constate que chaque gibier et chaque poisson est bien sec, il l’enlève du dessus de la braise, il le met soit dans le panier à gibiers, soit dans le panier à poissons, en prenant soin de les conserver par catégorie de poissons ou de gibiers.

Falassami était fasciné par la manière dont son grand-père s’organisait. Le matin, il allait au champ de tabac, l’après-midi, il allait à la chasse, le soir, avant la tombée de la nuit, il allait à la pêche, la nuit, avant de se coucher, il vérifiait l’état de conservation des gibiers et des poissons. Il veillait à ce que la fumée ne sorte pas de cette braise.

Le retour à Berbérati

Falassami commençait à s’intéresser à la vie au campement, lorsqu’un soir, une femme d’un mètre quatre-vingt arrive au campement. Falassami court vers elle, c’est maman Vivienne, la grande sœur de sa mère. Vivienne, Michel, et la maman de Falassami sont les enfants de la première femme du grand-père de Falassami.

Vivienne est venue prendre un panier dans lequel le grand-père de Falassami a mis différents gibiers et poissons secs destinés à la vente. C’est la mère de Falassami qui vendait ces gibiers et poissons à Djambala. Lorsque son père, sa mère, ou la seconde femme de son père venait à Berbérati, elle leur donnait tout l’argent de la vente. Il y avait une parfaite organisation, une confiance réciproque dans cette famille. Le lendemain matin, après le petit déjeuner, Vivienne dit à son neveu :

— Viens, je te ramène à Berbérati.

Falassami va saluer la seconde épouse de son grand-père, son oncle Michel, sa grand-mère maternelle, et son grand-père qui lui dit :

— L’année prochaine, tu reviendras.

Malheureusement, le jeune Falassami ne reviendra jamais au campement. Falassami et sa tante prennent le chemin du retour. Ils quittent le campement. Sur son chemin, il dit au revoir à ses camarades qui sont venus le voir pour aller jouer. Ils commencent par traverser cette fameuse boue de rivière appelée mboko péna nè ngaï.

Après deux heures de marche, ils arrivent à Garé, ils traversent la route, Vivienne dépose le panier qu’elle porte devant la concession de Bouya, sa grand-mère maternelle.

Aussitôt on leur prépare de quoi manger. Après avoir fini de manger, ils attendent la première occasion à destination de Berbérati. Quelques minutes après, ils entendent au loin, un ronflement de moteur, Vivienne va se placer de l’autre côté de la route. Elle aperçoit une fourgonnette au loin, elle agite son bras. Arrivé à son niveau, le chauffeur s’arrête, Vivienne lui demande s’il pouvait les conduire jusqu’à Berbérati. Celui-ci lui dit combien elle doit payer en lui disant que le garçon montait gratuitement. Les cousins de Vivienne aident les deux motor-boy à mettre le panier sur la fourgonnette. Les motor-boy sont des apprentis chauffeurs. Ils assistent le chauffeur pendant le voyage, ils réparent des pneus crevés, ou d’autres petites réparations.

Après avoir vu que le panier est bien attaché et recouvert par une bâche, Vivienne monte dans la fourgonnette, Falassami s’assied à côté d’elle. Après, le chauffeur démarre sa fourgonnette. Après une heure de route, le chauffeur arrive à Berbérati. Il arrête son véhicule sur la voie, juste à quelques mètres de la case du grand-père de Falassami. Vivienne descend, prend son neveu, le met au sol, les motor-boy lui descendent son panier de gibiers. Aussitôt, les sœurs et frères de Vivienne qui étaient dans la concession, et qui l’ont vu descendre de la fourgonnette, viennent à sa rencontre. L’un des frères porte le panier.

Après avoir mangé, Vivienne ouvre le panier, donne à ses frères et sœurs les gibiers que leur père leur a envoyés. Cela étant, elle se lève, porte le panier et va au quartier Djambala pour remettre à sa sœur Lucie, son colis, et le panier de gibiers que celle-ci doit vendre. Falassami veut accompagner sa tante à Djambala, il veut voir sa mère.

Ensemble, ils vont à Djambala. Le jeune garçon ne marchait pas très vite. Sa tante marchait à son rythme. Après quarante-cinq minutes de marche, ils arrivent chez Lucie. Celle-ci l’aide à descendre le panier. Elle discute pendant quelques minutes avec sa grande sœur. Falassami restait accroché à sa mère. Vivienne ouvre le panier, elle donne à sa sœur le colis que leur père lui a envoyé. Elle va le mettre dans la case, elle revient, elle veut porter le panier de gibiers secs, sa grande sœur refuse.

— Si tu veux aller vendre les gibiers au marché, c’est moi qui porte le panier, toi, occupe-toi de ton fils.

Lucie ferme la porte de la case, tous les trois, ils vont au marché de Djambala. Ce marché est animé du matin jusqu’au soir vers dix-huit heures. Lorsqu’ils arrivent au marché, Vivienne pose le panier au sol. Aussitôt, des femmes encerclent Lucie, sa grande sœur, et le petit Falassami. En moins d’une demi-heure, Lucie a vendu tous les gibiers et poissons secs. En même temps elle a payé au percepteur du marché, la taxe de vente sur le marché. Vivienne en profite pour acheter du sel et du savon. Lucie achète quelques beignets à son fils, et une cartouche de cigarettes pour le mari de sa grande sœur. Arrivés à la case, Vivienne dit à sa sœur qu’elle veut rentrer chez elle. Lucie refuse. Elle demande à sa sœur de passer la nuit avec elle, et qu’elle rentrera demain matin. Vivienne n’insiste pas. Elle accepte de rester avec sa sœur. Elles se mettent à cuisiner. Pendant que le repas cuisait, Lucie va acheter du mbako pour l’offrir à sa grande sœur. Elle revient quelques minutes après avec deux bouteilles de Bière Mocaf dans lesquelles il y avait du mbako. Vivienne était contente parce qu’elle avait ces deux bouteilles pour elle toute seule. Sa sœur ne boit pas de mbako. Elles passèrent la moitié de la nuit à discuter.

Le lendemain matin, Vivienne demande à sa sœur si son neveu peut aller passer une journée chez elle, avant de le ramener à Rosine. Lucie dit à sa grande sœur qu’elle peut garder son neveu autant de jours qu’elle voudra.

Vivienne salue sa sœur, elle et son neveu retournent au quartier de la Seita. Vivienne passe d’abord par Rosine, elle va dire à ses frères et sœurs qu’elle est revenue de Djambala et qu’elle va garder son neveu pendant un jour.

Après Vivienne et son neveu prennent la direction du quartier de la Seita. On appelle ainsi ce quartier parce que l’entreprise qui embauche des travailleurs pour la culture, et le tri des feuilles sèches de tabac est implantée dans ce quartier.

Lorsque Falassami et sa tante arrivent au quartier de la Seita, son mari était encore en train de travailler. La case de Vivienne se trouve de l’autre côté de la route, juste en face de l’entreprise Seita. De sa concession, elle peut voir son mari revenir du travail. Elle se met à cuisiner en l’attendant. Vers treize heures, le mari de Vivienne rejoint sa femme. Ils se saluent, il salue Falassami. Vivienne sort l’autre bouteille de mbako que sa sœur lui a offerte hier soir. Elle n’avait pas tout bu. Elle a préféré garder la seconde bouteille pour son mari.

— Tiens. C’est Lucie qui t’envoie cette bouteille, et la cartouche de cigarettes.

Il était ravi. Il ouvre la bouteille de mbako, il verse le contenu dans deux verres, il donne un verre à sa femme et prend le tien, ils boivent tranquillement. Après Vivienne leur apporte à manger. Elle mange avec une voisine qui était venue lui rendre visite juste à l’heure du repas.

L’après-midi, après avoir fait une petite sieste, le mari de la tante de Falassami lui fait visiter l’entreprise de la Seita. Ils entrent dans la concession, il lui montre la maison du Directeur, et celles des différents cadres. Il lui montre le grand bâtiment dans lequel les gens viennent triller les feuilles de tabac pour les préparer à l’expédition. Le bâtiment était fermé.

Après cette visite, ils rentrent chez eux.

La tante de Falassami qui était partie au champ pour chercher des feuilles de manioc arrive avec du fagot et des feuilles de manioc.

— Pendant que tu te reposais, je suis allée au champ pour cueillir des feuilles de manioc pour la cuisine de ce soir.

— Moi, j’ai montré la maison du directeur, les maisons de ses adjoints, le grand bâtiment où les travailleurs trient les feuilles de tabac à ton neveu. Je lui ai montré le garage et les camions de la compagnie. Nous venons à peine d’arriver.

— Il ne s’est pas ennuyé mon neveu. Tu as bien fait de l’occuper.

La tante de Falassami se met à cuisiner. Son mari discutait avec quelques voisins qui sont venus lui rendre visite. Ils racontaient ce qu’ils ont fait dans la journée. Falassami était assis sous la véranda, il regardait passer les voitures, les camions, et les piétons. Quelques heures après, à la tombée de la nuit, la tante de Falassami vient déposer une grande assiette creuse de manioc et une autre grande assiette creuse de gibier préparé avec des feuilles de manioc. Elle demande à son neveu de venir manger avec elle. À la fin du repas, lorsque les visiteurs sont partis, le mari de la tante de Falassami demande à sa femme :

— Pourquoi tu n’as pas voulu que ton neveu mange avec nous ?
— Tu as vu tous ces adultes ? Mon neveu ne mangera pas à sa faim, je préfère qu’il vienne manger avec moi à son rythme.

Après ils vont se coucher. Le lendemain matin, Vivienne ramène son neveu à Rosine. Falassami y passa le reste de ses vacances.