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Un récit sur la maladie sans tabou et riche d'enseignement.
En France, 650 000 personnes sont atteintes de schizophrénie, 2 millions d'une maladie psychique et plus de 5 millions sont directement impactées par les troubles psychiques d'un proche.
Les familles des malades psychiques, empoisonnées par la culpabilité, ont besoin d’être entendues. « Osez en parler ! » Voilà le message que j’ai eu envie de faire passer en écrivant ce livre. Un message d’espoir pour dire que vous avez le droit à la vie, à une belle vie.
Ce témoignage est là pour partager une expérience. Nous pouvons tous faire quelque chose de cette souffrance, la maladie psychique d’un frère ou d’une sœur est un deuil qui peut vous emmener ailleurs.
Un témoignage poignant et nécessaire pour briser le silence autour des maladies psychiques.
EXTRAIT
Les hospitalisations s’enchaînent, sans que jamais les médecins ne donnent à mes parents un diagnostic précis ; diagnostic qu’ils n’ont pas envie d’entendre .
Mon frère, comme beaucoup de personnes schizophrènes, a de multiples difficultés à assumer la vie quotidienne, et surtout ses émois psychiques. Il n’arrive pas à faire le tri entre ses perceptions et la réalité, à hiérarchiser ses sentiments et ses pensées ; il ressent beaucoup d’angoisse, qu’il projette sur moi et mes parents. J’essaie de me protéger des crises de mon frère, de m’extirper de son incohérence. Vivre au quotidien avec une personne qui délire et souffre d’hallucinations est très éprouvant et notre écart d’âge et sa position d’aîné me renvoient constamment à la réalité de ses délires.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Didier Meillerand est journaliste et producteur d'émissions de radio et de télévision. Ces dernières années, il présente
À but non lucratif sur BFM Business. Il a travaillé pour RTL et pour RCF.
Il crée aujourd'hui l'association Psychodon pour lutter contre le tabou qui pèse sur la maladie psychique. Son premier livre,
La poire en bois, va dans le même sens.
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Veröffentlichungsjahr: 2017
LA POIRE EN BOIS
Grandir avec un frère schizophrène
Comment expliquer le silence qui entoure les maladies mentales, alors qu’elles touchent en France un si grand nombre de personnes, quatre pour cent de la population.
Devant une situation d’une telle ampleur, d’habitude on agit, on mobilise, on s’organise comme c’est le cas notamment pour le cancer ou le sida.
Rien de tel pour la bipolarité, rien de tel pour les dépressions sévères, rien de tel pour la schizophrénie, une maladie qui a emporté ma sœur Lætitia, et dont est atteint Alain, le frère de Didier Meillerand, comme près de 600 000 personnes en France.
Entre pudeur et tabou, la schizophrénie reste une maladie recouverte d’un voile fait de peur, d’idées fausses et de non-dits.
Maladie mal connue du grand public, source de fantasmes, alors qu’elle se soigne et que dans la plupart des cas, on peut vivre avec, si elle est dépistée tôt et bien prise en charge.
Maladie de la culpabilité, du déni parfois, y compris pour la famille et l’entourage qui pourtant ne se sentiraient pas responsables d’avoir un parent ou un enfant atteint par une autre maladie.
Maladie qui brise le lien avec les autres, transformant radicalement la personnalité, ce qui fait l’essence de l’être. Souffrance des malades mais aussi de leurs proches qui doivent apprendre à recréer une relation avec ceux qu’ils aiment.
Maladie difficile à prendre en charge, car le malade n’est le plus souvent pas conscient de l’être et refuse alors de se soigner.
Mais maladie où l’espoir demeure, tant les progrès sont possibles dans le dépistage, la prise en charge, la qualité des traitements et les formules d’accompagnement.
Dans ce livre plein de tendresse et de franchise, Didier Meillerand met les mots sur les choses. Il raconte le désarroi et la souffrance des familles, souvent livrées à elles-mêmes, alors qu’elles jouent un rôle central dans la relation avec le malade. Il décrit aussi comment à côtoyer son frère il a appris une façon différente de voir la vie, un apprentissage d’une relation nouvelle à l’autre, non plus seulement rationnelle mais faite d’attention et d’écoute.
Le témoignage personnel de Didier Meillerand est un appel à se mobiliser pour enfin apporter une réponse collective à la hauteur de l’enjeu.
Philippe d’Ornano, Président de Sisley
J’ai rencontré Didier Meillerand alors que je travaillais comme psychologue au siège national de l’Unafam. Le retrouver des années plus tard autour de ce texte fort, courageux et précis m’a profondément touchée, comme me touche la confiance qu’il me fait en m’invitant à introduire cet ouvrage.
Pour comprendre la portée de son texte, il faut le placer dans le contexte de la psychiatrie contemporaine. Celle-ci est marquée par le basculement d’une partie importante de la prise en charge vers les familles. Après des années de recours excessif aux institutions que l’on a appelé « le grand enfermement », le domicile familial est devenu progressivement le « lieu de relocalisation du patient psychiatrique ». Or ceci a profondément modifié la vie des familles. Autrefois considéré comme « cause du problème » de santé de leur proche, l’entourage familial est aujourd’hui perçu comme « solution » pour maintenir le malade dans son milieu. (Carpentier, 2001)1.
En France, le virage vers l’ambulatoire, valable pour toute la médecine, est confirmé en psychiatrie par des orientations récentes. Ainsi le rapport Laforcade2 préconise que « le centre de gravité du dispositif de soins devienne (doit devenir) le domicile, l’hôpital l’exception ».
D’ailleurs, depuis que la Loi3 a introduit la possibilité de « soins sans consentement à domicile », il est possible que de jeunes frères et sœurs cohabitent avec leur proche malade alors que celui-ci est considéré comme potentiellement menaçant pour lui-même ou pour autrui. Se creuse un clivage entre le traitement de cette question dans la sphère sociale et le traitement de cette question dans la sphère intime et familiale : à l’extérieur la pathologie mentale est perçue comme menaçante, au domicile elle serait banale et sans effet.
Pour autant, s’agissant d’une pathologie qui met en tension le rapport entre soi et le monde extérieur et qui est marquée par le fait que le patient ne reconnaît pas toujours ses troubles, le déplacement des prises en charge sous le toit familial nécessite des aménagements spécifiques.
Le texte de Didier Meillerand déroule, à travers les yeux d’un enfant assistant à l’émergence des troubles jusqu’aux questionnements d’un adulte sur son rôle dans la prise en charge au long cours de son frère, toutes les facettes de l’accompagnement d’une personne malade par sa famille. En ce sens il sort du silence ceux dont le mouvement de désinstitutionalisation n’a pas tenu compte et que le Dr Marsh4 a qualifiés « d’oubliés de la psychiatrie » : enfants, adolescents ou jeunes adultes confrontés à l’expression de la souffrance psychotique au moment où ils sont eux-mêmes en pleine construction identitaire.
En 2003, j’avais mené une recherche-action portant sur 600 frères et sœurs de personnes atteintes de troubles psychotiques5 qui avait permis de mettre en évidence l’importance des retentissements des troubles sur les frères et sœurs de patients :
45 % disaient alors éprouver un sentiment de danger, ce sentiment restant constant quel que soit l’âge (l’âge des répondants s’étendait de 10 ans à 79 ans) ;
54 % estimaient que la maladie de leur frère ou sœur avait des répercussions sur leur propre santé. Les résultats montraient un impact plus important (61 %) pour les frères et sœurs âgés de 10 à 21 ans souvent concernés par la situation de cohabitation dans le domicile familial lors de l’émergence de la maladie.
Didier Meillerand décrit cette expérience vécue par de nombreux frères et sœurs de patients et son témoignage fait écho à ce qui m’a été confié dans mon travail de clinicienne « […] suis-je normal ? Je fais tout pour ne pas attirer l’attention, je suis en permanence en alerte, j’ai l’impression que le désordre peut arriver de n’importe où, je me sens en danger. »
Son livre est avant tout une histoire de frères, c’est-à-dire une histoire où depuis le début il est question d’identité, car dès le plus jeune âge se met en place dans les fratries un jeu d’identification et de différenciation réciproque. Un frère n’est jamais radicalement autre, ni jamais radicalement identique, il existe une zone de frôlement constante qu’il va falloir apprivoiser quand la maladie y fait effraction. La force de ce témoignage est d’inviter les frères et sœurs des personnes atteintes de schizophrénie, mais peut-être aussi plus largement tout un chacun, à accepter que l’étrangeté de son frère renvoie à ce qu’il en est de l’étrangeté en soi-même. En ne fuyant pas ce questionnement, le lien fraternel qui aurait pu se rompre est finalement préservé.
Ce travail d’élaboration qu’accomplissent dans le silence et souvent seuls de nombreux frères et sœurs de patients schizophrènes trouve ici une très belle illustration dans l’explication que Didier Meillerand donne du choix de son métier de journaliste de radio, où il retrouve une connivence avec son frère dans l’écoute des voix.
Cette recherche de connivence, au-delà de l’étrangeté des troubles, est une position fraternelle qui ouvre sur la citoyenneté. Car dit Maisondieu : « Celui qui paraît fou est celui qui n’est pas perçu par les autres comme leur semblable en humanité. Infréquentable, parce que non reconnu comme pair, il est imaginairement chassé de la famille humaine et cesse par conséquent d’être un frère. » Dans son livre, Didier Meillerand part de l’expérience intime de la relation fraternelle pour l’ouvrir à la fraternité comme valeur citoyenne. Je partage fondamentalement son idée et j’invite le lecteur à saisir l’occasion de développer en France un regard fraternel sur les personnes atteintes de schizophrénie.
Hélène Davtian-ValckePsychologue clinicienne PhD(Maisondieu, 2003)
1 Carpentier, N., 2001, Le long voyage des familles : la relation entre la psychiatrie et la famille au cours du xxe siècle. Sciences sociales et santé, Vol 19 N°1 p 79-106.
2 Laforcade, M., 2016, Rapport relatif à la santé mentale, Ministère des Affaires sociales et de la santé.
3 Loi N° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.
4 Marsh D.T., 1992, Siblings : Forgotten family members. University of Pittsburg at Greensburq.
5 Unafam : Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques.
Mon frère Alain a 58 ans. Quand je le regarde, je vois les quelques marques de l’âge, des cheveux déjà blancs, des lunettes, un petit peu d’embonpoint. Il est schizophrène et parfois j’ai envie de lui dire : « bouge-toi », « arrête de faire le con », « sois normal, fais un effort ».