Le "saint homme de Tours" et la dévotion à la sainte Face - Hélène Lannier - E-Book

Le "saint homme de Tours" et la dévotion à la sainte Face E-Book

Hélène Lannier

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Beschreibung

"Le saint homme de Tours" ou le Vénérable Léon Papin-Dupont. Vous ne le connaissez pas encore ? Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la sainte Face avait lu sa biographie, saint Pierre-Julien Eymard disait de lui à des Tourangeaux "Quel homme vous avez là ! Quel saint !" et le saint Curé d'Ars lui avait donné rendez-vous au Ciel. Dans un premier temps, vous ferez connaissance avec ce chrétien exemplaire qui a marqué les catholiques de son époque par sa dévotion à la sainte Face. La réparation était le mobile de toutes ses actions. Homme de foi, âme eucharistique rayonnante d'amour pour son Dieu, il n'en était pas moins dévoué envers son prochain. "Parler de Dieu ou se taire" était sa devise. Dans une deuxième partie, vous serez initié à la dévotion réparatrice à la sainte Face, d'une brûlante actualité, en découvrant les prières de réparation composées par Soeur Marie de Saint-Pierre, carmélite de Tours et diffusées par le Vénérable Monsieur Dupont. "Dieu seul."

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Veröffentlichungsjahr: 2021

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REMERCIEMENTS

Ce petit ouvrage écrit en hommage au Vénérable Monsieur Dupont est dédié à la sainte Face de Jésus cachée dans la sainte Eucharistie, à ses saintes plaies et à Notre-Dame du très saint Rosaire et des Sept-Douleurs. A eux la gloire, l’amour et la reconnaissance pour l’éternité. Puissent Jésus et Marie accorder par l’entremise de la prière confiante du « saint homme de Tours » la joie du bonheur éternel à chaque lecteur qui aura en mains ce livre, quel qu’il soit.

Merci à mon mari qui m’a soutenue et encouragée à achever ce travail, supportant patiemment les longues heures passées sur mon ordinateur, les courtes nuits ainsi que les nombreuses escapades à l’oratoire de la sainte Face. Merci pour ses photos, son aide précieuse pour la mise en page de cet opuscule ainsi que ses relectures critiques.

Merci à mes parents, sans lesquels je n’aurais jamais pu en arriver là, à bien des égards.

Merci à mon frère Florent pour son cliché de la basilique Saint-Martin ainsi qu’à mes amies Élisabeth Adam et Marie Beauvais pour leurs encouragements.

Ce travail n’aurait jamais vu le jour sans Hedwige de l’Espinay qui m’a fait découvrir la vie de sœur Marie de Saint-Pierre il y a quelques années et de là m’a permis de connaître le Vénérable Monsieur Dupont. Un grand merci à elle !...

Merci à Sylvain Desbois qui m’a donné sans le vouloir l’idée d’écrire sur le serviteur de Dieu par l’envoi d’un texto en janvier 2019... C’est encore lui qui a accepté de redonner vie aux cantiques de la sainte Face du 19e siècle, en les mettant en musique d’après les airs indiqués dans l’ouvrage Association de prières contre le blasphème, les imprécations et la profanation des jours de dimanche et de fête.

Merci à Monsieur l’Abbé Knittel qui s’est charitablement proposé de m’aider aux relectures et aux multiples corrections de la première version de ce livre et pour ses photos de l’église des Trois-Ilets. Par suite du départ de notre cher prêtre alsacien pour la Martinique, merci à Monsieur l’abbé Philippe Bourrat qui a procédé à une première relecture et aux corrections mais aussi à Monsieur l’abbé Loïc Verschuur qui a patiemment relu et corrigé jusqu’à obtention de la version finale.

Merci aux Carmélites d’Eynesse pour leurs prières.

Merci au Père Christian-Marie Donet, recteur de l’oratoire de la sainte Face, d’avoir aimablement répondu à mes questions et de m’avoir fait découvrir le Père Gaëtan Catanoso.

Merci à la personne dévouée à l’accueil de l’oratoire de la sainte Face pour ses renseignements précieux et sa gentillesse depuis toutes ces années, notamment pour les visites de la chambre du « saint homme de Tours » et pour m’avoir fait connaître la sœur Marie-Pierina et sa médaille.

Longue et sainte vie au collège Léon Papin-Dupont, à ses professeurs et à ses élèves, sous le regard de la sainte Face et le patronage du « saint homme de Tours ».

TABLE DES MATIÈRES

BIOGRAPHIE DU SAINT HOMME DE TOURS

Des premières années en Martinique à l’arrivée à Tours. (17971834)

Les années du pèlerin à Tours

Un père exemplaire

Une âme intérieure tournée vers Dieu

Une âme d’apôtre

Une âme de réparation

Sœur Marie de Saint-Pierre

L’œuvre de l’adoration nocturne

L’œuvre de Saint-Martin

L’œuvre de la sainte Face

Dernières croix sur le chemin de l’éternité

Après la mort du « saint homme de Tours »

INITIATION A LA DEVOTION DE LA SAINTE FACE

Promesses de Notre-Seigneur à ceux qui honoreront sa sainte Face

Prières de réparation à la sainte Face

La flèche d’or

Vingt-quatre adorations pour réparer les blasphèmes qui se font pendant les 24 heures du jour.

Les litanies de la Sainte Face

Les cent offrandes de Notre-Seigneur Jésus-Christ à son divin Père

Exercice de la réparation

Cantique en l’honneur de la sainte Face de Notre-Seigneur, en réparation des blasphèmes

Prières de la sœur Marie de saint-Pierre pour combattre le communisme.

Prière de la sœur Marie de saint-Pierre pour l’Église

Rosaire en l’honneur de la sainte Face

Chemin de la Croix

Louanges de la sainte Face

Consécration de soi-même à Notre-Seigneur en présence de la sainte Face

Acte d’amour à Notre-Seigneur en présence de la sainte Face

ANNEXES

Le « petit évangile »

La médaille de Saint Benoît

L’Archiconfrérie de Notre-Dame des Victoires

L’Archiconfrérie de la sainte Agonie

BIBLIOGRAPHIE

AVANT-PROPOS

L’abbé Janvier, premier supérieur de l’oratoire de la sainte Face, en achevant en 1879 la Vie de M. Dupont, son contemporain, ne fit qu’obéir à la demande de l’archevêque de Tours, Monseigneur Charles-Théodore Colet. Son ouvrage incontournable en deux tomes, est le fruit d’un travail considérable de synthèse à partir des témoignages écrits de centaines de personnes, de très nombreuses lettres de Monsieur Dupont, des abondants certificats de miracles liés à la dévotion à la sainte Face de Tours. A ce prêtre tourangeau qui a côtoyé pendant 35 ans le serviteur de Dieu, nous devons également une Vie de la bienheureuse Jeanne-Marie Maillé et une Vie de la sœur Saint-Pierre. Il est juste de rendre ici hommage à son travail et de saluer sa mémoire1. Sa Vie de M. Dupont n’est malheureusement plus rééditée, ce qui explique l’édition du présent ouvrage.

Le lecteur y découvrira une petite biographie lui présentant le serviteur de Dieu, surnommé de son vivant « le saint homme de Tours. » Nous gardons les guillemets car l’Église n’a pas encore canonisé le pieux martiniquais. Il s’agit d’un résumé de sa vie basé principalement sur la Vie de M. Dupont de l’abbé Janvier. Il se propose de donner l’essentiel des informations et ce, sans aucune prétention littéraire. Le saint Homme de Tours, première biographie du serviteur de Dieu, écrite par son ami Léon Aubineau, a été également très utile pour apporter quelques informations et éclairages sur certains points. N’oublions pas non plus l’ouvrage de L. Baudiment, M. Dupont, « Le saint homme de Tours ». Écrit par le supérieur du grand séminaire de Tours, il est paru en 1937. Plus concis que l’œuvre volumineuse de l’abbé Janvier, on y trouve une vie ponctuée de citations du serviteur de Dieu, des photographies intéressantes et des informations précieuses sur les débuts de l’oratoire de la sainte Face. Que le lecteur comprenne bien que le résumé de la vie de Monsieur Dupont qu’il tient dans ses mains est bien petit, comparé à la biographie de 1000 pages de l’abbé Janvier, ou encore à l’ouvrage de Baudiment, dépassant les 300 pages et que s’il est passionné sur le sujet, il devra s’y référer afin d’y trouver des récits circonstanciés, des explications détaillées, de vrais passages littéraires ainsi qu’une réflexion construite.

Pour retracer la vie de la pieuse carmélite de Tours, il aura fallu recourir à la Vie de la Sœur Saint-Pierre de l’abbé Janvier ainsi qu’à la Vie de la sœur Marie de Saint-Pierre de la Sainte-Famille, religieuse carmélite du monastère de Tours d'après ses écrits et autres documents authentiques, écrite par les moines de Solesmes. Ces quatre ouvrages cités représentent les sources principales. D’autres sources ont été utilisées et sont consignées dans la rubrique Bibliographie à la fin de ce livre.

A la suite de la petite vie du « saint homme de Tours », dans une partie intitulée Initiation à la dévotion de la sainte Face, le lecteur sera incité à la dévotion à la sainte Face et découvrira quelques prières de réparation, révélées à la sœur Marie de Saint-Pierre ou composées par elle et propagées par Monsieur Dupont lui-même. Ces oraisons sont tirées du livre Association de prières contre le blasphème, les imprécations et la profanation des jours de dimanche et de fête et de la Vie de la sœur Saint-Pierre de l’abbé Janvier.

Cette dévotion à la sainte Face n’est pas nouvelle, ayant été adoptée déjà par saint Augustin, saint Bernard, sainte Gertrude et sainte Mechtilde, nous indique le doyen du chapitre de l’église métropolitaine de Tours2. Elle a été donnée à la fois en merveilleux moyen de réparation et en source de grâces sans nombre, comme en attestent les nombreux prodiges opérés dans le salon du saint homme de Tours.

Que cette découverte de la vie du Vénérable Monsieur Dupont vous fasse progresser, cher lecteur, sur la route de votre pèlerinage vers l’éternité, sous le regard de la sainte Face du Sauveur.

« Dieu seul. »

1 Voir M. L’abbé Janvier, Notice biographique, Abbé Poule, Tours, Paul Bousrez,1888. Consultable sur la bibliothèque numérique de la BNF : gallica.bnf.fr

2 Abbé Janvier, Manuel de l’archiconfrérie de la sainte Face, p. 96. On peut rajouter également Thérésa-Héléna Higginson (1844-1905), la pieuse institutrice anglaise qui fut initiée à la dévotion à la sainte Face, Temple de la divine Sagesse. Voir : Thérésa-Héléna Higginson ou la vie merveilleuse d’une institutrice libre anglaise, par Lady Cecil Kerr, traduit de l’anglais par l’abbé V. Billé, éditions Saint Michel.

BIOGRAPHIE DU SAINT HOMME DE TOURS

DES PREMIERES ANNEES EN MARTINIQUE A L’ARRIVEE A TOURS. (1797-1834)

Le 24 janvier 1797 naît en Martinique, Léon Papin-Dupont, fils de Nicolas-Léon Papin-Dupont, qui appartenait à une famille de gentilshommes originaire de Bretagne, et de Marie-Louise-Philippine Gaigneron-Jolimont de Marolles, une riche créole martiniquaise, issue d’une noble et ancienne famille de France métropolitaine. Il est ondoyé le jour de sa naissance. Le 6 mars 1797, on procède aux cérémonies complémentaires du baptême à l’église de Saint-Laurent du Lamentin.

Quatre années plus tard, en 1801, la mère du petit Léon donne naissance à son frère Théobald. Malheureusement la joie de la famille sera de courte durée car, en 1803, Monsieur Nicolas-Léon Papin-Dupont meurt à Brest. La jeune veuve a seulement 22 ans. Elle se remariera plus tard avec Monsieur d’Arnaud, membre du conseil général de Martinique et Chevalier de la Légion d’honneur.

En 1809, à 12 ans, le petit Léon fait sa première communion : « Je ne savais pas alors, dit-il, ce que c’était que les consolations divines ; mais ce que je sais c’est que je versai un torrent de larmes, et mon cœur fut inondé de joie.3 »

Il est placé pendant deux ans dans une institution libre aux États-Unis en raison des guerres napoléoniennes qui ravagent l’Europe. Il est scolarisé de 1811 à 1815 en France, au collège de Pontlevoy, non loin du château de Chissay (situé à quelques kilomètres du château de Chenonceau), qu’habitait son oncle maternel, le comte Gaigneron de Marolles. Il y passe ses vacances avec son frère, ses cousins et une jeune créole, mademoiselle d’Audiffredi en pension à Tours chez les Ursulines. Elle deviendra plus tard sa femme.

D’un tempérament vif et gai, il est également d’une grande ténacité de caractère : il eut le pouce écrasé en ne voulant pas céder à son cousin, qui jouait avec lui sur les grilles du portail du château de Chissay. Son pouce restera difforme toute sa vie.

En 1818, il commence à Paris des études de droit. Il fréquente la haute société aristocratique, est présent aux salons, aux bals, menant grand train avec son cabriolet et ses chevaux. Sa vie est mondaine. On le surnommait « le marquis des égards. »

En 1820, a lieu sa conversion. Le petit savoyard de 12 ans, un ancien ramoneur, qui s’occupait de son cheval et de son cabriolet, arrive un jour en retard à son travail. Il invoque l’excuse d’une réunion de catéchisme pour préparer sa première communion. Monsieur Dupont veut vérifier ses allégations et rencontre le catéchiste en question, Monsieur Bordier. C’est au fil d’une conversation qu’il a plus tard avec ce fervent chrétien qu’il recevra un choc salutaire qui le fera rompre avec sa vie tiède et mondaine.

Sous l’impulsion du même Monsieur Bordier, Monsieur Dupont va rejoindre en 1820 la congrégation de la sainte Vierge à Paris, dédiée à l’instruction des jeunes gens et à l’apostolat auprès des malades et des mourants. Il y rencontre le Père Ronsin, Jésuite, dévot au Sacré-Cœur et répandant partout en France de nombreux feuillets de prières au sujet de cette dévotion. Le jeune Martiniquais lui devra sans doute son attachement au Sacré-Cœur et sa façon d’agir par la diffusion de petits feuillets.

A cette époque se rattache l’épisode de la charité de la librairie. « Voici ce qu’a raconté, en 1856, un libraire catholique de Paris qui en fut témoin : j’ai connu M. Dupont, dit-il, depuis 1821, et voici dans quelle circonstance. Je me trouvais à une réunion de créanciers pour la mise en faillite d’un pauvre père de famille, marchand papetier, obligé de suspendre ses paiements faute de quinze cents francs. M. Dupont arrive dans le magasin pour y faire quelque emplette. L’air triste des visages frappe le nouveau venu ; il en demande la cause. Sur la réponse qui lui est faite, il dit aussitôt, faisant un geste vers la rue : ‘Prenez mon cheval et mon tilbury, vendez et payez.’ Et certes, continue le narrateur, il avait un beau cheval, car c’était un élégant du jour. Cet acte spontané de charité fit sensation sur ceux qui étaient présents ; la faillite ne fut pas déclarée et le pauvre marchand se remit à flot.4 »

En 1821, à l’issue de ses études de droit, Monsieur Dupont devient à 24 ans conseiller auditeur à la cour royale de la Martinique. Avant même d’y revenir, il avait pensé se présenter au séminaire de Saint-Sulpice mais sa mère, sa famille et ses amis s’y opposèrent.

Dans son île natale, il continue ses œuvres de charité, tout en s’adonnant à la chasse, aux courses à cheval et aux soirées dansantes, ce qu’il regrettera par la suite. Il confie Laure de Bertheville, sa première filleule de Martinique5, orpheline, aux bons soins de la Sœur Madeleine-Sophie Barat qu’il avait rencontrée à Paris et avec laquelle il était resté en contact épistolaire6.

Le 18 novembre 1826, Monsieur Dupont perd son frère Théobald, d’une fièvre qui l’emportera en trois jours.

Quelques mois après, il épouse Caroline d’Audiffredi, le 9 mai 1827, à l’église des Trois-Ilets.

Figure 1. L’église des Trois-Ilets, en Martinique, où s’est marié le Vénérable Monsieur Dupont. Photos © Monsieur l’Abbé Benoît Knittel.

Cinq ans plus tard, le 4 octobre 18327, naît son unique fille, Henriette8. Malheureusement le petit bébé va être séparé prématurément de sa mère : Madame Dupont meurt le 1er août 1833, probablement de la tuberculose. Monsieur Dupont en est si affecté qu’il tombe gravement malade et il s’en faudra de peu qu’il ne perde la vue. Sa femme, avant de mourir, lui avait fait promettre de confier l’éducation de la jeune Henriette aux Ursulines de Tours où elle-même avait été instruite dans sa jeunesse. Cette demande déterminera l’avenir du veuf martiniquais.

A la fin du mois de mai 1834, Monsieur Dupont quitte définitivement la Martinique pour Tours avec sa fille Henriette, sa mère Madame d’Arnaud et ses domestiques Adèle et Alfred. Il fait don de sa maison au diocèse, pour agrandir le séminaire qui la jouxtait. Il donne sa démission de ses fonctions de magistrat. Ses revenus seront assurés par les rentes de ses terres martiniquaises.9 Il a 37 ans.

3 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 1, p. 8.

4 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 1, p. 22-23.

5 Il aura 40 filleuls au cours de sa vie.

6 Elle sera canonisée par le Pape Pie XI en 1925.

7 L’abbé Janvier indique cette date du 4 octobre 1832 dans sa Vie de M. Dupont, tome 1, p. 33 mais pour Léon Aubineau, dans Le saint homme de Tours, p. 13, elle est née le 4 décembre 1832.

8 A son baptême, elle reçoit les prénoms de Marie-Caroline-Henriette.

9 Il connaîtra des années plus ou moins heureuses du point de vue financier en raison des aléas climatiques et d’autres problèmes (vols, incendies) affectant ses productions de rhum.

LES ANNEES DU PELERIN A TOURS

La devise de Monsieur Dupont était celle de sainte Scholastique : « Parler de Dieu ou se taire. »

UN PERE EXEMPLAIRE

Monsieur Dupont débarque à Bordeaux, puis se rend à Nantes chez son oncle, Monsieur de Beauchamp, qui lui accorde l’hospitalité. Sa mère et sa fille y demeureront plusieurs mois, le temps pour le serviteur de Dieu de trouver une demeure à Tours et de faire tous les préparatifs nécessaires pour l’emménagement.

Dans un premier temps, le pieux magistrat s’établit avec sa famille dans une maison de la rue de la Préfecture, mais au bout de deux ans il faudra déménager car la décision prise par la ville de Tours de percer une nouvelle voie, la rue Buffon, entraînera la démolition de la demeure. C’est alors que le fervent chrétien décide de louer une maison située au numéro 8 de la rue Saint-Étienne, l’actuelle rue Bernard-Palissy. Bien plus tard il l’achètera. C’est là qu’il va assumer ses responsabilités familiales et prendre soin de l’éducation de sa chère Henriette avec sa mère, Madame d’Arnaud, veuve depuis alors cinq années. Cette dernière s’empresse auprès de sa petite-fille avec tout l’amour d’une mère.

Respectant la promesse faite à sa femme, le fervent chrétien confie aux Ursulines l’éducation scolaire de sa fille. Intelligente et vive, celle-ci ne manque pas de figurer parmi les premières de sa classe. Toutefois sa santé est fragile, aussi le « saint homme de Tours » est-il satisfait de la faire vivre sous le doux climat de la Touraine et de pouvoir compter sur les compétences du réputé docteur Bretonneau, qu’il connaissait déjà par ailleurs. Par suite d’une recommandation médicale, il emmène sa fille prendre des bains de mer durant l’été à Saint-Servan de 1843 à 184610 tout en lui faisant découvrir une région de foi dans ses églises, ses ordres religieux, ses pèlerinages.

Très tôt, le jeune veuf se réserve le soin d’éveiller l’âme de sa fille aux réalités spirituelles et de la faire grandir dans l’amour de Dieu et des choses du Ciel. Voilà ce qu’il pouvait écrire sur sa fille âgée de sept ans : « Henriette promet beaucoup, comme on dit ordinairement ; elle laisse percer des dispositions peu communes, elle est d’une vivacité sans égale et comprend tout. Nous ferons tout ce qui dépendra de nous pour lui donner les plus sérieux principes de religion. La pauvre enfant répondra, j’espère, aux désirs que je forme de la voir marcher dans les voies sûres de la perfection évangélique. Il est difficile, je pense, de s’assurer de son salut en dehors d’une pareille ligne. J’ai déjà peur pour elle des dangers du monde. Le Bon Dieu viendra à mon secours, j’en ai la confiance11. »

Monsieur Dupont s’attache à parler de Dieu et à faire connaître à sa fille l’exemple de nombreux saints. On peut en trouver un témoignage dans une lettre écrite par Henriette elle-même, âgée alors de neuf ans à une amie : « … J’aime surtout bien les lettres qui parlent du Bon Dieu, je penserai à toi pour le Souvenez-vous ; je le dirai tous les matins après ma prière. Comme quand saint Scholastique parlait avec saint Benoît, son frère, il lui disait toujours : Il faut parler de Dieu ou se taire, car c’est bien mieux de parler de Dieu, ma chère Laure, je pense aussi que toi aussi tu aimes mieux parler de Dieu.

Papa m’a copié beaucoup des pensées des saints. »

Quelques années plus tard, Monsieur Dupont, soucieux du salut de son enfant, n’aura de cesse de demander aux destinataires de ses lettres des prières à son intention. Une religieuse témoigna qu’il lui avait confié un jour que « si, pour assurer le salut d’une enfant si chère, il eût fallu construire un monastère, il aurait été heureux d’en creuser lui-même les fondations et d’en porter toutes les pierres sur ses épaules12. »

10 C’est à cette occasion qu’il fera connaissance de la sœur Jeanne Jugan, fondatrice des Petites Sœurs des Pauvres.

11 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 1, p. 180.

12 Ibid., p. 188.

UNE AME INTERIEURE TOURNEE VERS DIEU

Tout juste arrivé à Tours, Monsieur Dupont va penser à la vie sacerdotale mais son confesseur et la supérieure des Ursulines à qui il s’était également ouvert, seront d’avis contraire. Pour eux, le jeune veuf ferait plus de bien en restant dans le monde.

L’ancien magistrat se rend à ces avis et décide dès lors de mener une vie spirituelle encore plus intense qu’auparavant. Sa journée commence par un lever matinal (vers 3 ou 4h du matin). Il s’adonne à l’oraison13, assiste à la messe ; longtemps il choisit d’aller à celle de 5h du matin dans la chapelle des Lazaristes ou celle de 6h au Carmel, qu’il sert souvent. Le dimanche toutefois, c’est à la cathédrale qu’il se rend.

De retour chez lui, il fait de pieuses lectures et s’occupe de sa correspondance. Il consacre son après-midi aux bonnes œuvres. Et même en cheminant pour se rendre à ses activités, il aura à cœur de rester en présence de Dieu, récitant quelque oraison jaculatoire, méditant sur une parole de l’évangile ou un texte liturgique du jour, ou encore offrant quelques Ave à la Mère de Dieu. Sa spiritualité ? C’est celle de l’esprit d’enfance, de l’humble confiance en Dieu. « Notre principale affaire, en toutes circonstances, dira-t-il, c’est de nous avancer dans le saint amour (de Dieu) et de tendre de toutes nos forces à acquérir la simplicité de l’enfance chrétienne. L’enfant ne fait rien, … il ne sait même pas qu’il ne fait rien, et cependant il vit dans une action continuelle dans les bras de sa mère. Ainsi devons-nous être tout perdus dans les bras de Dieu14. »

Mais pour vivre dans la confiance, il faut un grand esprit d’humilité. C’est en reconnaissant ses misères que le fervent chrétien prend conscience de sa dépendance et du besoin qu’il a de Dieu et de sa grâce. Pour acquérir cette humilité, cet esprit d’anéantissement, le fervent martiniquais avait ses moyens bien à lui :

Une pieuse demoiselle venue de Lyon, que Mgr Dufêtre lui avait recommandée et avec qui il était en relation de piété, se plaignait un jour à lui, en conversation, de n’être pas assez détachée, assez morte à elle-même : « J’étais présente à l’entretien, nous dit une de ses amies, et voici ce que lui répondit Monsieur Dupont : ‘ Il y a un bon moyen d’obtenir cette mort : c’est de se considérer comme une personne que l’on porte en terre. On peut dire d’elle tout ce qu’on veut, du bien ou du mal, peu lui importe ; elle est insensible à tout, elle n’entend rien, ne répond rien. Faisons de même lorsque quelque chose nous blesse, que nous sentons la révolution se faire en nous ; disons : Peu m’importe qu’on dise, qu’on pense ce qu’on voudra de moi, je suis morte ! Alors on sent le calme se faire, on laisse passer, on se tait, et l’on répète avec vérité : Je suis morte. Ainsi, c’est convenu, nous sommes ici trois morts, nous allons nous mettre à genoux et dire trois De profondis.’ Depuis ce jour, dit celle qui nous raconte le fait, chaque fois que nous nous rencontrions, il nous abordait en nous demandant : ‘ Êtes-vous bien mortes ? ’ Oui ou non, il fallait toujours dire notre De profondis, ‘afin, disait-il, d’arriver à cette insensibilité, à cette indifférence d’un vrai mort.’ L’expérience de cette pratique nous prouva qu’elle était réellement bonne et efficace, car tant que nous l’employâmes, nous sentions notre âme se détacher, mourir à elle-même et à toutes les choses du monde 15. »

Dès son arrivée à Tours, Monsieur Dupont prend l’habitude de réciter fidèlement le bréviaire, comme les prêtres. Il médite quotidiennement son chapelet et porte le scapulaire. Il n’hésitera pas à entraîner les autres à adopter ces pieuses pratiques de dévotion mariale. Il fait également une visite au saint Sacrement chaque jour.

Après le repas du soir, avec le chanoine Pasquier, l’abbé Botrel, le marquis de Messay, le serviteur de Dieu fait son « chemin de Croix » en esprit de réparation, sur les sites des églises profanées ou en ruine de Tours, dont les vestiges de la basilique Saint-Martin et l’église Saint-Grégoire des Minimes. Le soir, il fait l’heure sainte et plusieurs heures d’oraison avant le coucher, sans oublier la pratique de la mortification.

Le pieux martiniquais veut se conduire en vrai chrétien, sans respect humain, osant assister à la messe aux premiers rangs dans la cathédrale de Tours, sa paroisse, et pas uniquement le dimanche, servir la messe, suivre le Saint-Sacrement à la Fête-Dieu, ce qui était jugé inouï à l’époque, étant donné son rang social. Il a un très grand amour pour l’Eucharistie qui ne fera que croître avec les années. Il communie presque tous les jours, ce qui se pratiquait très peu en ce temps-là. « Si je connaissais un endroit de la terre où l’on pût communier plusieurs fois par jour, je quitterais tout pour y aller demeurer16 » dira-t-il.

Il est également très attaché à la pratique de la communion spirituelle : « Pour conserver la ferveur dans le service de Dieu, il est à propos de faire souvent la communion spirituelle, disant avec les Saints qui la pratiquent : ‘ Mon Seigneur Jésus-Christ, venez en moi ; je vous désire et je m’attache à vous, demeurons ensemble toujours.’ Qu’il est consolant, en effet, de pouvoir, nuit et jour, même au milieu de nos occupations, demander à Notre-Seigneur de ne pas attendre l’heure de la communion sacramentelle pour se donner à nous17 ! »

Sa pensée ne quittait pas l’Eucharistie cachée dans le tabernacle des églises qu’il pouvait apercevoir en voyage. Ainsi témoigne une religieuse, Sœur François-Xavier de Sainte-Marie-des-Bois : « Chaque fois qu’il apercevait un clocher, il récitait en latin une prière de saint François d’Assise : ‘ Là et dans toutes les églises du monde, vous êtes présent, ô Jésus ! ’ Et puis son âme se fondait en pensant à l’amour de Notre-Seigneur18. »

Monsieur Dupont a également un grand amour pour le Sacré-Cœur de Jésus19 ainsi que pour ses saintes plaies, influencé en cela par les écrits de sainte Gertrude, ses Révélations et ses Insinuations de la divine Piété. Il y apprend également sa dévotion à la sainte Face. Il faisait siennes les salutations de la sainte adressées aux saintes plaies de Jésus et invitait les autres à les dire également20. Il était membre d’une confrérie du Sacré-Cœur établie dans sa paroisse, la cathédrale de Tours et ne manquait pas de faire l’heure sainte chaque soir en réparation ainsi que des pèlerinages à Paray-le-Monial.

Il est un trait propre au « saint homme de Tours » : l’amour de la Bible. « D’après les rencontres que j’ai faites dans la sainte Écriture, écrit-il, je reconnais bien que la parole de Dieu est une vraie manne et un pain fortifiant.21 » Il l’étudie chaque jour, à tel point qu’il finira par la connaître presque par cœur et en citera fréquemment des passages dans ses lettres et ses conversations. « Il est difficile de dire, écrit un ecclésiastique, combien sa conversation était pieuse et édifiante. Elle était nourrie de citations de la sainte Écriture. Il étudiait assidûment ce livre divin. S’agissait-il de quelque question particulière : ‘ Voyons, disait-il, ce qu’enseigne le Maître à ce sujet ! ’ Et il recourait à sa bible. C’était là son livre ordinaire, et il savait bien en appliquer les sentences à tous les états et à toutes les circonstances de la vie22. »

A partir du 29 mars 1865, Monsieur Dupont laisse une lampe allumée jour et nuit devant sa bible, par respect et par amour pour la parole de Dieu.

Le serviteur de Dieu a une très grande dévotion envers la sainte Vierge. Il apprendra très rapidement l’existence des apparitions de la rue du Bac en 1830, de la Salette en 1846, de Lourdes en 1858 et de Pontmain en 1871, grâce à des membres de sa famille ou de prêtres de sa connaissance qui se sont rendus sur les lieux pour lui rendre compte des faits. Il accueille la médaille miraculeuse avec amour, se rend à la Salette et interroge lui-même les enfants. Il sera marqué toute sa vie par la Vierge en larmes de la célèbre apparition et son message. Par la suite, il n’aura de cesse de donner de l’eau de la Salette à ceux qu’il rencontre sur son chemin, en particulier des personnes éloignées de Dieu. Son amour pour la Mère de Jésus et son désir de réparation lui feront solliciter en 1857 de Monseigneur Guibert alors évêque de Tours, la constitution de la confrérie réparatrice de Notre-Dame réconciliatrice érigée dans la chapelle de la Purification à Tours et rattachée à la confrérie de Notre-Dame de la Salette. Il honore avec beaucoup de dévotion la Vierge Marie en fleurissant chez lui sa statue, sous le vocable de Notre-Dame de Bon-Espoir. En tant que membre de l’Archiconfrérie de la sainte Agonie23, il honore son Cœur immaculé affligé de douleurs, inséparable du Cœur de son Fils agonisant.

Monsieur Dupont parle de lui en se nommant « le pèlerin, » tant il aimait les pèlerinages : à la Salette, à Paray-le-Monial, en Touraine, spécialement sur les sites où est passé saint Martin, dont il a contribué à relancer la dévotion, comme Marmoutier et Candes. Pour lui un pèlerinage est une œuvre de prière et de pénitence. Il laisse une riche aumône à chaque sanctuaire visité et aide de son mieux les prélats à rétablir certains lieux de pèlerinage en Touraine comme par exemple celui de Notre-Dame des Eaux à la Membrolle, que l’on faisait autrefois en période de sécheresse, Notre-Dame du Prompt Secours près de la Ville-aux-Dames, ou encore Notre-Dame de Beautertre à Mouzay.

Ce fervent chrétien a ses saints de prédilection : saint Joseph, qu’il invoquait pour demander la grâce d’une sainte mort pour lui et pour les autres ; son saint patron ; saint Martin pour lequel nous verrons plus loin concrètement les preuves de son attachement ; saint Antoine de Padoue, qu’il conseillait d’invoquer pour la conversion des pécheurs et pour obtenir des amis. Mais pas seulement, comme nous allons le voir.

Un jour, une religieuse avec qui Monsieur Dupont avait cheminé dans une voiture publique avait perdu sa valise. Elle devait partir très tôt le lendemain matin. Le serviteur de Dieu la rassura, lui conseilla de prier saint Antoine pour retrouver la malle, et s’engagea à faire de même avant de saluer la sœur devant les bâtiments de sa communauté. Le soir, les religieuses avaient pris soin de fermer le lourd portail et tous les locaux. Le lendemain, à cinq heures du matin, quelle ne fut pas la surprise de la portière de retrouver la valise dans la cour intérieure fermée alors que tout était verrouillé et que personne n’avait sonné ni ouvert pendant la nuit24 ! …

L’ancien magistrat aimait beaucoup saint François d’Assise, en raison de ses stigmates, lui rappelant sa dévotion tant aimée au Sacré Cœur de Jésus et aux saintes plaies, et de sa prière dite « la Bénédiction de saint François », qu’il portait dévotement sur lui et répandait partout ; c’est que la sainte Face y était mentionnée deux fois : « Que le Seigneur te bénisse et te garde, Que le Seigneur te montre sa Face et qu’Il ait pitié de toi, Que le Seigneur tourne sa Face vers toi et te donne la paix25. »

Très pieux, il visite annuellement l’église Notre-Dame de la Riche à Tours pour y gagner l’indulgence de la Portioncule26. Le Christ Lui-même l’avait accordée à saint François d’Assise. Le pape Honorius III l’a confirmée à perpétuité, « à partir des premières vêpres de la fête de saint Pierre aux liens, jusqu’au soir du jour suivant, deuxième d’août27. »

Monsieur Dupont était également dévot envers saint François de Paule, un des protecteurs de la ville de Tours : il se rendait chaque année sur son tombeau pour y prier le jour de sa fête, le 2 avril et c’est lui qui fit remplacer la simple croix de bois par une en fer ouvragé28.

Le serviteur de Dieu était très attaché à sainte Thérèse d’Avila dont il suivait les conseils pour l’oraison. Il portait sur lui une image de la sainte et « la petite lettre de sainte Thérèse » dont voici le contenu : « Que rien ne te trouble, Que rien ne t’épouvante ; Tout passe ; Dieu ne change point ; La patience tout obtient ; Qui possède Dieu rien ne lui manque ; Dieu seul suffit29. »

Pour finir, sainte Gertrude évoquée plus haut et sainte Marie-Madeleine auront ses suffrages ainsi que sainte Philomène, qu’affectionnait tant le saint Curé d’Ars.

Enfin, le « saint homme de Tours » conservera toute sa vie une grande dévotion envers les anges, de saint Michel, chef de la milice céleste à son ange gardien. L’abbé Janvier rapporte à ce sujet plusieurs histoires, dont le récit d’un ami proche du serviteur de Dieu qui cheminait avec lui à Tours, dans la rue des Ursulines. Un moment, « en face de la petite rue qui descend des cloîtres en suivant le jardin de l’archevêché (Porte Rouline)30, » l’ami voit le pieux Martiniquais ôter son chapeau comme pour saluer quelqu’un alors qu’il n’y avait personne. Intrigué, il lui en demande la raison. C’est alors que l’ancien magistrat lui confie qu’un jour, en se promenant en ce lieu tout en feuilletant un livre sur la dévotion aux anges gardiens, il aperçoit un homme de la campagne, plutôt bien habillé et aisé en apparence. Monsieur Dupont venait tout juste de lire ces mots : « Toutes les fois qu’une bonne pensée nous était inspirée, il fallait bien se garder de la négliger, parce que c’était faire injure à son bon ange31. » En voyant le passant, il lui vint l’idée de lui donner l’aumône. Dans un premier temps, il rejeta cette pensée qui semblait illogique, tant le promeneur était bien vêtu et semblait ne pas en avoir besoin. Pourtant, l’idée se représentant à son esprit avec insistance, il se résolut à donner une pièce au brave homme. « Mais, » dit le fervent chrétien à son ami qui l’interrogeait, « je m’attendais si peu à un bon accueil de sa part, que je craignais plutôt de recevoir un coup de son bâton et me tenais tout prêt à me rejeter en arrière pour l’esquiver. Jugez de mon étonnement ! L’étranger, au contraire, s’arrête tout surpris. Il me raconte qu’il habite à une extrémité du département, qu’il a perdu sa bourse, ne connaît personne à Tours et est on ne peut plus embarrassé pour satisfaire sa faim et retourner chez lui. – Mais comment, demande-t-il, pouvezvous savoir l’embarras où je me trouve32 ? » Et le serviteur de Dieu lui fit connaître le passage qu’il venait de lire. Il lui donna l’argent nécessaire pour le sortir d’affaire, et sur les réserves du brave fermier qui ne voulait accepter son aide qu’à titre de prêt, il lui demanda de donner l’équivalent de la dépense aux pauvres. « Depuis lors, je ne manque jamais de saluer mon bon ange quand je passe ici33 », conclut Monsieur Dupont en s’adressant à son ami.

Cette âme de prière, attachée à Dieu, à ses anges et à ses saints, n’oublie pas son prochain. Elle sollicite son Sauveur pour la conversion des pécheurs, pour le soulagement et la délivrance des âmes du purgatoire, mais également pour toutes les intentions qu’on lui confie. Et dans sa vie, combien d’âmes vont le solliciter pour obtenir par ses prières une guérison, une lumière, une conversion ou encore tant d’autres grâces !...

SUR LE CHEMIN DE LA PERFECTION PAR LA PENITENCE

On peut noter dans la vie du serviteur de Dieu plusieurs événements qui seront comme autant d’étapes lui permettant de gravir les échelons de la sainteté. Après sa conversion en 1820, la mort de sa femme le 1er août 1833, l’ancien magistrat réalise l’importance de la pénitence le 22 juillet 1837, à l’occasion de la fête de sainte Marie-Madeleine. Après la Communion et en regardant une image de sainte Thérèse, il reçoit une grâce intérieure, ce dont il témoignera lui-même : « J’avais quarante ans. Peu de temps après, lisant la vie de cette grande sainte34 je tombai sur cette pensée : ‘Je déclare que je n’ai commencé à comprendre les choses du salut que du jour où je me déterminai à ne point avoir d’égards pour mon corps.’ » C’est le « jour où je compris la nécessité de vivre dans la voie de la pénitence35. »

Il décide de porter un cilice, et on retrouvera une discipline de fer après sa mort.

Cette vie intérieure intense faite de prières, de méditations, de pieuses lectures et nourrie fréquemment par les sacrements, sera l’âme de son apostolat auprès de son prochain.

Figure 2. Sainte Marie-Madeleine en prière. Image tirée du livre Association de prières contre le blasphème, les imprécations et la profanation des jours de dimanche et de fête, Tours, Mame, 1856.

13 A ce sujet, l’Abbé Janvier dans sa Vie de M. Dupont (tome 1, p. 483) nous apprend que son livre favori était un livre du Père Avancin : La vie et la doctrine de Notre Seigneur, d’après les quatre évangélistes.

14 L. Baudiment, M. Dupont, p. 213-214.

15 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 2, p. 350-351.

16 Monsieur Dupont dans L. Baudiment, M. Dupont, 1937, p. 92.

17 Le petit jardin céleste, pensée n°313, p. 96.

18 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 2, p. 376.

19 Il faisait partie de la confrérie du Sacré-Cœur de Tours.

20 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 2, p. 395.

21 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 1, p. 475.

22 Abbé Janvier, Vie de M. Dupont, tome 1, p. 480.

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