Muse - Lou Valérie Vernet - E-Book

Muse E-Book

Lou Valérie Vernet

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Beschreibung

Tout laisser tomber. ce que l'on avait à faire, ce qu'on faisait. Tout donner là l'autre, Prendre le temps d'être avec lui. Cinq minutes ou une heure, Complètement là. S'apercevoir que cet autre n'était que soi, Qui attendait qu'on le prenne dans ses bras.

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Seitenzahl: 111

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Aux heures indues, Et à tous les insomniaques !

Ne prenez pas la vie au sérieux. De toute façon, vous n’en sortirez pas vivant.Bernard Le Bouyer de Fontenelle

Sommaire

Prodrome

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En t’attendant

Prodrome

Aux pires cauchemars, les grands remèdes.

Que vous soyez en plein burn-out, sous la pluie, coincé dans un embouteillage, tributaire d’une grève, le moral à zéro, désespéré d’avoir manqué une fois encore la chance de votre vie, ce florilège de pensées est pour vous.

D’habitude, les auteurs croient donner à lire ce qu’ils ont écrit de meilleur.

Moi je suis certaine de vous offrir le pire.

Oui, je l’ai fait exprès.

Non je ne vous déteste pas. Bien au contraire.

Après lecture, vous devriez même retrouver une belle estime de vous.

Avec un neurone, zéro empathie et une bonne dose d’humour noir, l’idée de vous débarrasser de cet opus en l’offrant à votre pire ennemi devrait soulager votre pesanteur.

Aussi, bon vol en « absurdie » et à bientôt le plaisir de surfer un jour ensemble, bien au-dessus du pied de la lettre…

1

Avoir pour seule amie une poubelle. Sur qui je puisse taper, à qui je puisse tout donner. Des feuilles froissées, des crachats écœurés. Qui saurait tout ce que je n’ai pas dit et que j’ai mal écrit. Une poubelle de deuils à l’appétit féroce. Qui obligerait à la décharge de mon ventre trop plein. Qui se satisferait du mauvais et de mes pires ennemis. Sans âme et sans reproche, une poubelle haute et lourde. Qui jamais ne déborderait, ni ne tomberait. Fidèle à mes injures. Inviolable et secrète.

Une poubelle à démons, aux anges déchus. Criblée, saccagée, désincarnée. Muette et digne. Fière de son savoir. Insatiable. Pleine de mon passé, digéré, consommé. Qui n’attendrait que ça, de me voir soulagée. Riant à mes nouvelles peurs tout en les mâchant goulument.

Une poubelle que j’aimerais et qui m’aimerait. Parce qu’elle, elle saurait, pendant que moi, j’oublierais.

2

Je ne suis que peau de chagrin Dans un trou d’air.

3

L’amour est une série de clichés.

On prend les femmes pour des sirènes alors évidemment ça finit en queue de poisson.

On les prend pour des fées, elles nous transforment en clochard.

On les prend pour des princesses et on tombe de cheval.

Tant qu’on n’en a pas fait le tour, on essaye. Encore et encore. Des petites morts empilées les unes sur les autres et parfois même les unes dans les autres. Des histoires qu’on se raconte.

Il était une fois…

4

Je suis là, je choisis, j’hésite.

Je voudrais faire plaisir.

Ca ou ça ou plutôt ça ?

Aime, aime pas ?

Vert, bleu, marron ?

Lu, pas lu ?

Je déambule. Une galerie, dix magasins. Vingt minutes, des heures, une journée.

Rien n’est assez bien. Elle est trop bien.

Alors comme j’ai peur de déplaire, je n’achète rien.

Le soir au rendez-vous, j’ai les mains vides.

Le cœur ardent mais les mains vides.

Et que croyez-vous qu’elle va voir ?

5

Quand vous serez au bord de la fin, Ouvrez enfin les yeux.

6

Mon frigo a le ventre sec.

De l’air refroidit en boucle son vide abyssal.

Une bouteille d’eau attend d’être bue.

Seule, sur la première tablette.

Aucun aliment n’est venu le souiller. Mon frigo est comme je l’ai acheté. Blanc, neuf, sans trace et sans odeur.

Et pourtant, il a faim.

Je le sais.

D’être ouvert, rempli, vidé, consommé, sali, usé, pillé. Il a faim de choix, de couleurs et d’envies. De fruits frais, de beurre à tartiner, de jus à partager, de viandes à frire, de petits plats à mitonner, de bouteilles à déboucher.

Il a faim de toutes ces mains qui le fouilleraient, à qui il pourrait offrir. Faim de bruit et de rires. Quand la porte s’ouvre et que la vie lui parvient. Dans la cuisine, la table serait dressée. Une jolie nappe, de la belle argenterie. Le parfum d’une rose. Un soir d’été ou un matin d’hiver. Des lumières allumées, une musique distillée.

Il a faim d’être plein à défaut d’être deux.

7

Il y a dans chaque cœur d’enfant une mer de larmes, un océan de souvenirs, des torrents de violence. Des flots de regrets en pluie de rancunes aux affluents du pardon. Des mots à la suite, tourbillon d’émotions, maux de tête détestables, maelstrom indigeste. Inextricable, inexpugnable. De cris en échos de silence, la sentence flagellée, le devenir fou, l’appel du vide et le saut transcendé. Le corps de guingois, les épaules rentrées, l’estomac comprimé. Une voûte abyssale et la colonne en zigzag. Ramper, marcher, manger, dormir. Au mieux c’est grandir. Plusieurs fois c’est vomir. La douleur est veule, se répand et salit. Le corps lâche, se révolte et implore. La mer le recouvre, le noyé se débat. L’eau ravale, mouille et sale. Les pleurs reniflent, l’air efface et sèche le vent qui échoue au ventre des diarrhées. Le sable plein la bouche, l’enfant tait l’exaction. Sa dette n’a pas de prix, elle dure la vie. Si mourir c’est payer, reste à attendre le jour. Le temps rallonge, épuise, amenuise. L’usure effiloche, ne tient plus qu’à un fil. Il y a dans chaque cœur d’enfant la vie qu’on arrache à la mère. La houle du souvenir, le ressac persistant. Les crustacés de la justice qui exigent le paiement. L’enfant a trop d’amour mais pas assez d’argent. La mer pétrit la vague, l’océan se déchaîne. Si apprendre à nager c‘est fuir, le voyage sera long. Il faut encore amarrer et ne plus échouer. La terre est un asile, le fou peut s’arrêter. La mer l’a rejeté. Aujourd’hui c’est un fait.

8

Au vent qui s’ébroue L’herbe morte Se redresse.

9

Il faut avoir le courage de sa colère.

Le courage et sa couleur.

Rouge comme le vin ou comme le sang

La vie n’est qu’une vengeance.

Sur la naissance.

Le premier cri, la première peur.

La suite n’est qu’une erreur.

J’ai pris l’arme et puis j’ai bu.

J’ai trinqué et j’ai tiré.

Evidemment, ça aurait pu mal tourner.

Je crois que j’ai fait mal. Pas assez. Si peu.

Il faut avoir le courage de sa colère.

Le courage et son pardon. Indulgence et gentillesse. Si je n’avais pas crié, je ne serais pas née.

Alors je n’aurais pas tué.

Père ou mère, il fallait voir. J’ai pas choisi. Pas fait le tri. Eux s’en sont tirés. Moi je suis enfermée. Pas eu le courage de bien viser. Ils m’ont ratée.

J’ai fait pareil.

10

Il y a des femmes qui font rêver à l’amour, à qui l’on pourrait tout concéder, chez qui on voudrait tout déposer.

Des femmes pour qui les mots doux, les fleurs et la passion ont été inventés.

Des femmes qui restent longtemps à hanter le cœur d’autres femmes.

Des femmes dont on sait très bien qu’elles partiront avant d’avoir usé la gamme des sentiments.

Des femmes qu’on chassera pourtant pour un rayon de soleil afin de ne pas souffrir le manque et les doutes. Parce qu’il faut vivre et croire que le meilleur viendra.

Des femmes dont on s’échappera, l’espoir sauf et le rêve possible.

Des femmes, des femmes, des femmes….

11

Je n’aime pas la nuit,

C’est moche.

La lune est fourbe,

Les étoiles illusoires.

On n’y voit rien la nuit.

Ça efface les pas,

Les visages,

Et les sens.

Ça ronge les cœurs solitaires,

La nuit.

12

Le rire de l’enfant Dans ma main Rebondit…

13

Tant pis. Si je meurs demain. Tant pis.

Je n’aurai pas assez aimé, j’aurai perdu du temps. J’aurai vécu pour rien. Avec tous mes chagrins.

Tant pis.

Il est trop tard maintenant. Je lui ai juste dit que je voulais vivre avec lui.

Cette vie au moins !

Pour les autres, toutes les suivantes, on verrait. Mais celle-là. On y était presque. C’est quoi une vie dans le flux de toutes les autres ? On m’a traitée de folle. J’aurais bien aimé. Je ne serais pas là à regretter.

Tant mieux. S’il meurt demain. Tant mieux. Il n’avait qu’à m’écouter. Je ne voulais pas que ma dernière pensée soit pour ce que je n’ai pas fait. J’ai pris l’arme et j’ai tiré.

Une fois, il est tombé. Deux fois, moi à côté C’est bien. Si on meurt ensemble.

C’est bien.

Au moins, on ne sera pas séparé.

14

Je veux partir. Loin. Ailleurs. Partir comme on voyage. La folie devant, les doutes derrière. La première fois que j'ai voyagé, c'était à dos de livres. Les mots m'avaient ouvert la voie, j'ai suivi les lignes. Et j'ai aimé. La respiration des virgules, le repos des points, l'essentielle interrogation, la folle exclamation. J'ai aimé à outrance, dans l'absolu, la passion, la servitude. J'ai aimé à vouloir écrire aussi. Le voyage des autres ne me satisfaisait plus, il me laissait à quai, ne comblait plus mes manques. Mais comment voyager seule quand on ne l'a jamais fait ? Comment créer le partir, quand on est encore amarrée ? Qui étais-je pour ainsi vouloir créer ? Dieu est créateur, je n'étais pas Dieu, je ne pouvais pas créer. Alors j'ai copié. Les bons mots de l'un, les maximes de l'autre. Comme ils ne me satisfaisaient pas non plus, j'en ai changé le sens, le rythme et puis l'idée. Ecrire c'est ne pas savoir dire. C'est s'être trop tu. Qu'avais-je à dire qui ne soit déjà révélé ? Mes premiers accents m'ont fait pleurer. Ils étaient aigus, n'en finissaient pas de hurler. Les graves devenaient solennels, pour ne pas dire ennuyeux. Les circonflexes m'ont sauvée, leurs chapeaux m'abritaient. Alors les mots sont devenus mes amis et les verbes ont fini par se conjuguer. Au passé d'abord, dans l'espoir d'un futur ensuite, dans le plaisir du présent enfin. Maintenant il me suffit de les écrire pour jouir. Jouir de les voir prendre vie. Grâce à moi, puis malgré moi, presque en dehors de moi, presque plus fort que moi. Ils sont un voyage, de l'intérieur vers l'extérieur, de moi à vous, de moi pour vous. Ils sont mes ailleurs, ce qui n'est pas si loin.

15

Il faut toujours remplacer un souvenir Par un projet.

16

Y a des tas de trucs qui peuvent me passer dessus sans que ça me touche. Le vent, la pluie, les saisons, je suis imperméable. La colère, les coups, les blessures, je suis inébranlable. La mort, l’abandon, le rejet, là encore je suis imbattable.

Mais le rire, la liesse, le bonheur. Que le diable m’en préserve. Ces choses-là ne font pas que passer. Quand elles ont trouvé où pourrir, elles prennent tout leur temps. Elles te rentrent dedans, illusoires et oniriques. Assidues aux mensonges, fidèles au sacrilège. Elles te boivent jusqu’à la lie, pleines d’espoirs et de facéties. Les yeux dans les yeux, une main tendre sur la joue, l’autre en serment sur le cœur, elles jurent qu’elles ne partiront pas.

Et c’est vrai !

Leur souvenir reste gravé.

17

Demain c’est promis, je commence à t’aimer. J’apprends à être heureux. Je redeviens gentil.

Et même si je peux, j’oublie qu’il pleut dans ma vie.

Demain ou après-demain. A l’aube.

Avant que le mal ne me réveille et que la douleur m’insupporte.

Avant que le jour n’éclate au soleil et ne grille mes derniers rêves.

Quand j’aurai l’habitude de mes tourments. Que je les aurai nommés, rangés, listés. Qu’ils auront leur place dans un tiroir.

Et que ce tiroir sera fermé.

Quand le bruit aura cessé.

J’ai le cœur si gros qu’il se cogne effrontément. Boum, boum, boum, geint-il à l’usure du destin.

Qu’on me sorte de là. J’étouffe, je suffoque.

On m’asphyxie.

Je n’ai pas fini de pleurer. J’empeste le souvenir. Humide et salin. Les pieds dans la tourbe.

Hier est plus présent que demain.

Les jours ne sont plus à l’heure.

A l’aiguille des secondes, l’éternité s’est figée. Voilà pourtant que le vent se lève. Il tourbillonne mais n’emporte rien.

Je suis coincé, serti dans le temps.

Il y a tant de nuits à faire mourir.

Et si peu d’envie.

18

J’aurais pour toi tous les silences Si je pensais que ça serve à quelque chose Aussi je bruis, en t’attendant.

19

J’ai le cœur à l’échafaud suspendu au cou d’une belle comme un vulgaire collier de plomb.

Elle me balade sans grâce ni retenue et je me cogne à son indifférence.

Griffé du sceau du souvenir voilà que je saigne.

Des larmes, jaune vermillon, extraites du pus de la douleur.

20

L’humanité ne sera jamais qu’un brouillon, Une ébauche passive de nos envies Comme un piteux coup de crayon Sur le grand livre de la Vie.

21