Étude sur le travail - Ligaran - E-Book

Étude sur le travail E-Book

Ligaran

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Extrait : "Je me suis proposé de constater par la double et parallèle étude des faits et des sentiments, des idées et des résultats acquis, la marche en avant des sociétés modernes et particulièrement la nôtre, dans les voies du travail et de la production, sur le terrain de la liberté et de l'esprit chrétien. Au point où en est venue la question de l'organisation actuelle du travail, en présence des exagérations que l'on y a mêlées, des erreurs par lesquelles on l'a dénaturée."

À PROPOS DES ÉDITIONS Ligaran :

Les éditions Ligaran proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :

• Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
• Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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AU TRAVAIL

HONNÊTE ET PERSÉVÉRANT

AUX PATRONS, CHEFS, INGÉNIEURS

UN DE LEURS DOYENS

AUX OUVRIERS

UN AMI SINCÈRE et qui n’a jamais été leur flatteur

Résumé et Conclusions

Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté.

S. Luc, ch. II, v. 14.

Toutes les belles et vraies pensées sur le travail chrétiennes.

Mandement de Pérouse, de Mgr PECCI aujourd’hui LÉON XIII.

Je me suis proposé de constater par la double et parallèle étude des faits et des sentiments, des idées et des résultats acquis, la marche en avant des sociétés modernes et particulièrement de la nôtre, dans les voies du travail et de la production, sur le terrain de la liberté et de l’esprit chrétien.

Au point où en est venue la question de l’organisation actuelle du travail, en présence des exagérations que l’on y a mêlées, des erreurs par lesquelles on l’a dénaturée et, il faut bien le dire, de l’ignorance, de l’incertitude, de l’hésitation si grandes encore qui règnent sur ces matières, même parmi les personnes éclairées, le programme que je me suis tracé paraissait le plus propre à conduire à des conclusions sensées et pratiques, puisqu’il se bornait à consulter les faits, l’expérience, le bon sens.

Pour rester fidèle à ce programme, j’ai écarté de cette Étude tout esprit de système et d’utopie ; je n’y ai recommandé, parce que je n’y croyais pas, aucun plan offrant un remède à tous les maux, ni aucune panacée universelle. Il ne m’était pas difficile de faire ce sacrifice, si c’en est un, et de me renfermer dans ce cadre, bien qu’il semble étroit. Les rêveries socialistes ou révolutionnaires sur le travail excluent invariablement, soit la liberté, soit la charité, souvent toutes les deux ensemble, et la liberté et la charité sont les deux fondements de l’organisation actuelle du travail et de ses progrès.

Définition du travail

Le travail, ce signe visible des desseins de Dieu sur nous, cette obligation et ce frein, cette force et cette joie, cette fatigue et cette leçon, ce grand bienfait, en un mot, est l’objet de ce livre, dont le meilleur résumé est dans cette définition.

Oui, pour tout être humain, le travail est une obligation ; il est un frein par lui-même et nous prépare, – c’est une de ses vertus, – à mieux comprendre et à désirer le frein bien autrement puissant et pénétrant de la religion ; il est une fatigue salutaire et une leçon de tous les jours ; il est une force comme l’accomplissement du devoir normal, et comme tel enfin, il est une joie, la joie de se sentir utile, et de devoir son existence et celle de sa famille à ses bras, à son intelligence, à soi-même.

Et c’est parce que le travail s’élève à ces hauteurs et qu’il est un des éléments considérables de l’organisme social, que les quatre premiers chapitres de cette Étude sont consacrés à l’esprit chrétien, à la famille, à la propriété, à l’héritage, l’esprit chrétien qui est le guide, la famille qui est le soutien, la propriété qui est la récompense, l’héritage qui est la sanction.

Ainsi, l’homme est sur la terre pour travailler ; par son intelligence ou par sa force, il doit obéissance et tribut à cette loi générale, universelle, qui est de tous les temps et de tous les pays.

À ceux qui trouvent que les choses de ce monde sont mal faites, on est en droit de demander de quoi ils rempliraient la vie humaine s’ils en ôtaient le travail, par quoi ils remplaceraient cette épreuve salutaire et féconde, cet enseignement viril et fortifiant.

Le travail est pour l’homme un des plus sûrs moyens de se connaître lui-même, de prendre pour ainsi dire sa mesure, et d’arriver à cette estime honnête de soi, à ce légitime contentement qui est le fondement d’un des sentiments les plus préservateurs de la nature humaine, la dignité du caractère.

Loi et nécessité du travail

Le travail est d’ordre divin.

« Croissez et multipliez ; remplissez la terre et vous l’assujettissez, » dit la Genèse.

Tel est le champ offert à l’activité humaine ; vaste champ, fécond, inépuisable ; mais ce bienfait n’est pas sans conditions.

« Vous ne tirerez de la terre de quoi vous nourrir qu’après beaucoup de travail. » (Genèse.)

Le travail ! voilà donc la loi et la nécessité ; il faut se nourrir et nourrir sa femme et ses enfants ; il faut relever de soi-même dans cette tâche, la première de toutes ; c’est le devoir et c’est l’honneur du mari et du père.

C’est ce mari, c’est ce père qui a été chanté dans les Psaumes de David.

Le Nouveau Testament a rendu le même hommage au travail. Jésus, les apôtres étaient des ouvriers ; saint Paul, ce confectionneur de tentes, est, pour ainsi dire, le législateur du travail.

« Que celui qui dérobait ne dérobe plus ; mais qu’il s’occupe en travaillant de ses mains à quelque ouvrage bon et utile, pour avoir de quoi donner à ceux qui sont dans l’indigence.

Nous vous conjurons de vous étudier à vivre en paix, de vous appliquer chacun à ce que vous avez à faire ; de travailler de vos mains, comme nous vous l’avons ordonné.

Nous n’avons mangé gratuitement le pain de personne, mais nous avons travaillé jour et nuit avec peine et fatigue, pour n’être à charge à aucun de vous. »

L’Église a toujours gardé ces grandes leçons ; elle y a toujours conformé sa conduite et ses enseignements. Le travail et les travailleurs n’ont pas cessé d’être pour elle l’objet d’une affection particulière, d’un respect qui ne s’est pas démenti. Des textes nombreux des Pères et des écrivains religieux nous en fourniraient mille preuves. Est-il besoin de les rechercher en présence des mandements dus au cardinal-archevêque de Pérouse, Mgr Pecci, aujourd’hui Léon XIII, mandements où le travail est loué et béni par le Saint-Père en termes si éloquents.

Rien de semblable n’existe dans les religions de Mahomet, de Confucius, de Bouddha.

Le travail au point de vue social

Considérons maintenant le travail au point de vue rationnel et social.

L’homme est doué de trois sortes de facultés : celles de l’âme, celles de l’esprit, celles du corps. Il les reçoit très diverses et très inégales, non seulement entre elles, mais comparativement avec celles d’autrui.

Le philosophe qui ne veut juger des choses que selon ce qu’il appelle les lumières de la raison, le croyant, le penseur, religieux ou non, sont d’accord sur ce point fondamental de l’inégalité native des hommes entre eux dans l’ordre triple de leurs facultés.

De cette inégalité primordiale découlent, comme conséquence inéludable, la variété des travaux, l’inégalité des situations et des conditions.

Ces inégalités sont le fait d’une volonté supérieure à la nôtre, et qui sait mieux que nous à quelle fin elle a mis l’homme sur la terre. Mais les sociétés humaines ne doivent rien faire pour aggraver ces inégalités ; c’est pour elles une obligation absolue et chrétienne d’assurer à tous leurs membres l’égalité devant la loi, et la liberté du travail.

La liberté du travail

Les sociétés anciennes, les Juifs, les Grecs, les Romains, ont tous connu et pratiqué l’esclavage ; elles ont toujours et en même temps gardé une part, souvent importante, au travail libre ; toutefois l’on peut dire avec vérité qu’elles ont vécu du travail servile, et l’on peut ajouter avec certitude qu’elles en sont mortes.

Les textes qui prouvent l’existence du travail libre à côté de l’esclavage, et dès les plus anciens temps, sont nombreux et formels. La Bible, Hésiode, Homère, les historiens, les poètes ne laissent aucun doute à cet égard.

Les modernes, obéissant à l’inspiration chrétienne, ont développé les éléments de travail libre que l’antiquité leur avait légués. En même temps, l’esclavage allait s’affaiblissant, se transformant, dans plusieurs contrées, en servage qui s’éteignait à son tour, du moins en Europe, où l’émancipation accordée par Alexandre II aux paysans russes a définitivement assuré à toute la chrétienté l’honneur et le bienfait du travail libre.

Le travail libre ne s’est pas établi ni développé chez nous sans efforts. En face de la féodalité, des privilèges de la force, de l’incohérence et de la faiblesse de la législation et de l’administration, les travailleurs ont dû chercher des moyens de résistance, et ils les ont trouvés dans les corporations, les associations de métier ; le travail et le capital étaient plus forts ainsi contre les exactions et les abus de la puissance. C’est par les corporations que l’industrie et le commerce ont pu vivre et prospérer, des premiers temps de notre histoire jusqu’au dix-huitième siècle, et l’origine du Tiers État est là.

Mais le progrès des lumières, des mœurs, de la législation avait effacé le souvenir du bienfait primitif ; on ne voyait plus dans les corporations que leurs privilèges, leurs monopoles, leurs réglementations excessives, l’étouffement de l’esprit d’invention et de l’initiative individuelle. En industrie comme en politique, on voulait la liberté, on la voulait même démesurément, révolutionnairement ; la monarchie et les corps de métier furent emportés par la même tempête.

Depuis 1791, la France possède la liberté du travail, et il en est de même dans tous les États parvenus à un degré supérieur de civilisation ; les travailleurs y jouissent de la liberté d’eux-mêmes. Ils n’ont à subir ni monopoles, ni privilèges. Ils emploient leur intelligence, leurs capitaux, leurs bras où et comme il leur plaît, choisissant leur profession, la quittant, passant à une autre, selon leur volonté.

Ce régime libre du travail a produit les développements sans précédents dont nous sommes témoins aujourd’hui ; jamais le travail n’a été plus abondant et plus honoré ; jamais l’esprit d’invention n’a été plus ingénieux et plus fécond. Jamais le capital ne s’est formé plus abondamment, ni employé plus utilement. Cette révolution est surtout l’œuvre de notre dix-neuvième siècle.

Mais s’ensuit-il que ce régime soit achevé et complet ? Voyons-nous qu’il ait réuni tous les suffrages, conquis toutes les adhésions, qu’il satisfasse à toutes les prétentions légitimes, qu’il procure avec certitude le travail dans le présent, la sécurité dans l’avenir ? Comment, s’il en était ainsi, serions-nous témoins de troubles si profonds dans le monde du travail ? Je ne parle pas des excès de langage et d’aspiration des meneurs de la démagogie ; mais si un certain nombre d’ouvriers les suit, est-ce sans raison ? Dans ces griefs outrés, n’y a-t-il pas une part de vérité ?

Pour répondre à cette question sans illusion et sans utopie, il faut pénétrer dans l’étude du régime actuel du travail, dont les deux facteurs principaux sont le capital et le salaire.

Le capital

Le mot CAPITAL a plusieurs acceptions.

L’usage le plus général applique ce mot à l’or, à l’argent, à la monnaie métallique comme à la monnaie de papier, en un mot au numéraire faisant l’office principal de l’échange et de la circulation, dans la production et le commerce, et dans les diverses relations des hommes entre eux.

Le capital ainsi considéré a, dans l’économie sociale, le même rôle que le sang dans l’économie humaine. Suspendez la circulation du sang et vous causez la mort ; suspendez la circulation du capital et vous causez la ruine générale.

La seconde acception, plus étendue que la première, comprend dans le mot capital, la propriété mobilière sous ses nombreuses et diverses formes.