Le Démon de la cinquantaine - Rémy Lasource - E-Book

Le Démon de la cinquantaine E-Book

Rémy Lasource

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Beschreibung

Paul, en pleine crise d'alcoolisme, fait la rencontre d'une femme aux appétits redoutables...

Paul, cadre narcissique et misogyne traine dans des bordels clandestins, mais lorsqu'il voit son ami mourir d'une overdose il glisse dans l'alcoolisme. Alors qu'il touche le fond, sa fille lui propose de prendre des vacances dans un vignoble en Touraine.
Là-bas, sa rencontre avec Macha, une féministe magnétique au caractère et aux appétits affirmés va lui rendre l'innocence qu'il avait perdue. L'amour de soi retrouvé, ainsi que les soins initiatiques prodigués par un étrange rebouteux lui donneront le courage d'affronter ses erreurs et sa culpabilité. La sexualité et la vie au grand air lui rendront sa légèreté de vivre, et lui feront réaliser que pour retrouver une grande santé la gourmandise est une vertu.

Un roman érotique où se mêlent liberté, initiations sexuelles et découverte de la passion libérée.

EXTRAIT

Je coupe la fleur. L'air grossit, le vent s'ébroue autour de nous et le bois semble habité par l'arrivée d'un nouveau dieu. Il fait chaud. Quand je me retourne victorieux pour montrer ma fleur, Macha s'est déshabillée et m'attend debout toute nue. J'en peux plus, assis j'ouvre ma bouche sur son sexe tandis qu'elle pose sa main sur mon crâne. Les arbres ont changé de voix avec l'arrivée de l'orage. J'ai la bouche pleine d'onguents parfumés, quand Macha se tourne pour poser ses mains contre la paroi rocheuse. Elle se cambre et m'offre alors une croupe merveilleuse, digne d'une entrée au paradis.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Après avoir fait des études de droit Rémy Lasource est devenu fonctionnaire. Il a travaillé quelques années en banlieue nord de Paris au contact des policiers et des magistrats, et vit aujourd’hui en limousin. Edité chez Ex Æquo pour ce onzième ouvrage, il est jury du prix Zadig de la nouvelle policière.

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Table des matières

Résumé

Le démon de la cinquantaine

Du même Auteur

Résumé

Paul, cadre narcissique et misogyne traine dans des bordels clandestins, mais lorsqu'il voit son ami mourir d'une overdose il glisse dans l'alcoolisme. Alors qu'il touche le fond, sa fille lui propose de prendre des vacances dans un vignoble en Touraine.

Là-bas, sa rencontre avec Macha, une féministe magnétique au caractère et aux appétits affirmés va lui rendre l'innocence qu'il avait perdue. L'amour de soi retrouvé, ainsi que les soins initiatiques prodigués par un étrange rebouteux lui donneront le courage d'affronter ses erreurs et sa culpabilité. La sexualité et la vie au grand air lui rendront sa légèreté de vivre, et lui feront réaliser que pour retrouver une grande santé la gourmandise est une vertu.

Je coupe la fleur. L'air grossit, le vent s'ébroue autour de nous et le bois semble habité par l'arrivée d'un nouveau dieu. Il fait chaud. Quand je me retourne victorieux pour montrer ma fleur, Macha s'est déshabillée et m'attend debout toute nue. J'en peux plus, assis j'ouvre ma bouche sur son sexe tandis qu'elle pose sa main sur mon crâne. Les arbres ont changé de voix avec l'arrivée de l'orage. J'ai la bouche pleine d'onguents parfumés, quand Macha se tourne pour poser ses mains contre la paroi rocheuse. Elle se cambre et m'offre alors une croupe merveilleuse, digne d'une entrée au paradis.

Rémy Lasource

Le démon de la cinquantaine

Roman érotique

ISBN : 9782378734725

Collection Blanche : 2416-4259

ISSN : 2416-4259

Dépôt légal : février 2019

©Illustration de couverture Louis Mariage pour Ex Æquo

© 2019 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de

traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays.

Toute modification interdite.

Éditions Ex Æquo

6 rue des Sybilles

88370 Plombières les Bains

www.editions-exaequo.com

Quelque part sur une autoroute déserte

Elle roule en Harley Davidson

Ses longs cheveux flottant dans le vent

Neil Young Unknown legend

Ô mon âme, j’ai dissipé ta petite pudeur et ta vertu des recoins, et je t’ai convaincue de tenir debout, toute nue, sous les yeux du soleil.

Avec cette tempête qu’on nomme «esprit», j’ai soufflé sur ta mer houleuse ; j’en ai chassé toute nuée, j’ai égorgé cet égorgeur qu’on nomme «péché».

Elle a des seins magnifiques. Ils remplissent mes mains, même si je suis saoul je sais qu’il s’agit de seins splendides, je les ai bien regardés, bien désirés, et puis à présent rien qu’en les prenant délicatement, aussi tendrement que possible vu mon degré d’alcool, je me rends compte par le toucher que j’ai une magnifique poitrine plantureuse pour jouer, et que ça vaut bien la bouteille de Clicquot que j’ai payée il y a une heure, et je voudrais dire à cette gamine qu’elle a une paire de loches à faire bander un eunuque, mais voilà je ne me rappelle plus son prénom, parce qu’elle rit tout le temps et parce qu’elle ne parle pas bien le français, mais en l’abordant j’ai été brillant, avec mon costume et mon American Express en lui disant que son pays, la Roumanie, m’avait fait faire des cauchemars quand j’étais petit, à cause des Carpates et des femmes vampires qui m’impressionnaient avec leur beauté dangereuse, avec leur goût du sang à vouloir nous sucer nous les petits garçons, ce à quoi elle a ri en bougeant ostensiblement son décolleté pour faire naître le désir obscène qui me possède jusqu’au bout des doigts.

La musique est moins forte ici en backroom, atténuée qu’elle est par les lourds rideaux pourpres, et aussi par ma cuite qui fait tambouriner mon sang dans mon crâne devenu trop petit. Je sue et dois impérativement penser à autre chose qu’à ces splendides seins qui ne demandent qu’à être dans mes paumes. Oh bon sang, ces larges tétines tendres dans ma main et tout le reste lourd et ferme, débordant de mes doigts, c’est le pied, quelque chose comme l’extase, et cette gamine qui ne doit pas avoir vingt ans a un corps de déesse. Putain ! L’Union européenne a du bon rien que pour nous faire découvrir nos cousines de l’Est, on peut en profiter jusque dans des petites préfectures de région sans quoi ces hôtesses de l’amour auraient été condamnées à être des paysannes, et pas des filles magnifiques et parfumées, tous seins dehors, avec un directeur de banque comme moi, la cinquantaine classe, et je dois vraiment penser à autre chose sinon mon émotion fera rompre mon barrage mental, et là ce sera le raz de marée dans mon caleçon.

La musique envoie des beats assourdissants, provoquant des cris de joie féminins dans la boîte à côté, et les basses retentissent jusque dans mon corps. Je suis assis, et elle à califourchon sur moi ; je cesse de téter goulûment chaque sein et fais lever ma cousine de Roumanie pour entreprendre de déboutonner le jean et de le descendre avec le string, pour découvrir un joli sexe, finement rasé, que j’honore de ma langue. Un son industriel bombarde des battements sourds dont les vibrations m’assomment, tuant toute finesse, cherchant presque à m’aliéner. « Machine » ma chérie pose ses mains sur mon fauteuil pour m’offrir sa croupe en levrette et je me lève en posant mes mains aux commandes de ses fesses ; elle a un cul magnifique, et une euphorie s’empare de moi le temps d’enfiler ma capote, je baigne dans le bonheur et quand je la pénètre je me retiens de jouir. La musique ressemble à une machine de production industrielle dont les coups d’acier créent un rythme apocalyptique, qui me perturbe. Au bout d’un moment, à cause de la fatigue de la journée et puis de cette musique qui m’empêche de profiter des gémissements de ma compagne je n’arrive plus à trouver d’érotisme, j’ai même le cafard. Pour pas débander sans avoir joui, je sors mon sexe de celui de ma Roumaine et la flatte d’une tape sur les fesses. Elle se tourne vers moi, et je vois son regard vide, mais poli, s’éclairer subitement à la vue du sachet que je lui tends. Elle s’assoit sur le fauteuil et je suis en érection aux portes de ses lèvres. Je répands la cocaïne le long de mon pénis et aussi sur ma toison pubienne blanchie, mais bien tondue, impeccable comme ma coiffure. « Machine » ma chérie a un regain d’intérêt pour mon sexe couvert de poudre. Elle me fixe bouche ouverte prête à n’importe quoi, comme un zombie à qui on va rendre la vie. Avec l’alcool je me prends pour une divinité et elle pour ma prêtresse. Elle m’adore, moi. Alors elle renifle mon pénis avec avidité, et passe sa langue partout où il reste de la coke. Elle a un moment d’absence, de félicité grâce à moi et elle engloutit mon sexe au fond de sa bouche. Je suis aux anges, ou plutôt je suis Dieu avec son ange et je lui donne la vie. J’en oublie ma fatigue et cette musique, je suis dans sa bouche et je malaxe ses seins. Elle est splendide, et je retrouve tout le sens de ma soirée. Son regard bleu dans mes yeux elle m’offre une longue éjaculation en cascade sur ses seins laiteux, et je suis heureux de l’avoir droguée rien que pour voir les lumières d’émerveillement dans son regard face à mon orgasme, qui jaillit triomphant comme un feu d’artifice sonnant la fin du spectacle pour ma petite droguée. J’ai toujours aimé m’approcher d’un dieu.

Ça vaut le coup de faire du fric pour vivre ça. Maintenant que j’ai joui je me réveille de ma torpeur comme si je dégrisais. C’est ça, je reviens à moi. En observant ma compagne, je pense qu’elle pourrait être ma fille, mais je chasse aussitôt cette pensée déprimante. Je préfère sourire à machine ma chérie, que je ne veux plus nommer ainsi pour un problème de conscience, et tendrement je lui masse ses seins avec mon sperme tiède. Je cherche un peu de coke au fond du sachet, mais elle qui a tout sniffé s’affale sur le dos et commence à se caresser. Je prends plaisir à la voir s’abandonner, et je reluque son corps merveilleux, il faudra que je la réserve à l’avenir. Elle jouit rapidement. Je lui sers une coupe de champagne que je verse dans sa bouche ouverte et elle éclate de rire. Le champagne coule sur son cou jusque sur ses seins pour se mêler à mon sperme. Elle caresse sa poitrine l’air ingénu, mélange ma semence à l’alcool pour la goûter et rit idiotement. Je lui rajoute cent euros de pourboire en plus de la passe que j’ai payée d’avance.

— Tu es vraiment un bon coup, ma chérie, t’es merveilleuse.

Et je l’embrasse. Si j’avais vingt ans, je la baiserais encore et à cru contre le mur.

Elle remue de satisfaction et glousse pour mon plus grand plaisir. On termine le champagne. Ma chérie qui est défoncée accuse un mauvais rush à cause de ma coke qui doit être de mauvaise qualité, et j’observe impuissant sa descente en témoin lucide. J’aurais presque honte de moi. En la regardant à la dérobée, je déteste l’air triste qu’elle dissimule mal derrière son air poli de petite fille bien élevée. Je vide mon verre, mais ce visage qui cache une âme brisée s’impose à moi. Elle est enchaînée à quoi ? À la laisse de la cocaïne que j’ai su si bien tirer à moi. Heureusement, je n’y ai pas touché.

C’est là que déboule « Doudou Sénégal », le nom de scène du copain et patron de cette boîte bordel. Il surgit tout nu avec sa bite en érection grosse comme une queue de chien, deux fois plus grosse que la mienne et qui tangue de gauche à droite à chacun de ses pas. Je me demande mentalement combien il lui faut de sang pour ériger ce monument de guerre. Il me tape dans le dos et me presse inquiet « viens mon Paulo, c’est Michel, viens tout de suite, suis-moi ! ». Je remarque que son pénis est bizarre, qu’il a comme des grumeaux autour. « Lève-toi Paulo, allez presse, c’est Michel qui ne va pas bien, viens, allez ! Suis-moi, putain !»

Je me lève sans regarder machine ma chérie que j’avais décidé de ne plus nommer ainsi mentalement, mais elle n’a qu’à pas tirer cette gueule de déprimée si elle veut qu’on la respecte, fais chier, j’arrive même plus à considérer les jeunes avec humanité. La bite de doudou tangue à gauche puis à droite quand il marche, comme un gouvernail qui commande des culs de géantes vers l’orgasme. Je comprends ce que j’ai vu tandis qu’il me conduit dans un couloir mal éclairé. Sa bite est couverte de grumeaux parce qu’elle est pleine de merde, ce que je n’avais pas compris parce que doudou est noir, mais il me prend l’épaule et me fait rentrer dans une petite pièce qui pue. Là par terre gît Michel sur le ventre, mon ami et Directeur Général, avec un filet de merde sur la cuisse. Mon DG a des petits plaisirs dont je ne partage pas toujours la finesse. Doudou halète inquiet « je vais devoir appeler les secours, fais quelque chose ou les flics vont débarquer », et pendant qu’il me confie ça, il essuie son appendice avec une lingette pour bébé, et je pense à un boucher qui essuierait son couteau après une éventration.

Les petites lampes tamisées ne m’aident pas à tout analyser, et une mauvaise appréhension me gagne. Je me sens soudain vieux et fatigué. Je m’accroupis et reçois une décharge de stress. Michel est trop froid pour quelqu’un évanoui. Mon cœur s’emballe, « Allume ! » je commande à Doudou, et le néon du plafonnier envoie une lumière sale. Michel est couché dans son sperme et son cul est plein d’excréments. Les yeux de mon ami sont ouverts, et son nez a de la coke autour des narines. Il est immobile et je comprends tout. Il ne respire plus. Il est trop froid.

Tout s’accélère pour moi parce que je veux croire en la vie ; machinalement je retourne mon ami sur le dos et pratique un semblant de massage cardiaque avec mes deux mains posées sur le milieu de sa poitrine que j’enfonce de tout mon poids en rythme et violemment. Je poursuis concentré en silence, rien que mon souffle, je sue, c’est un effort, faire revenir Michel à la vie vaut bien un effort violent de ma part, et j’enfonce mes deux paumes comme on me l’a enseigné sans faire de bouche-à-bouche parce que je n’ai pas le temps et qu’on m’a appris récemment que cela ne se pratiquait plus, qu’il fallait redémarrer impérativement la pompe et appuyer, appuyer, appuyer. En vain. Je suis essoufflé. Je ne veux pas y croire, je refuse cet état de fait. Ma volonté est d’airain et je commande au monde autour. Je reprends mon massage avec plus d’énergie, plus de rythme et plus de volonté. Pas de réaction. Je suis en nage. Je finis par donner des coups de marteau avec mon poing droit au niveau du cœur. En vain. Je me relève dans un vertige, ce doit être ma tension artérielle qui m’autorise moins à m’accroupir longtemps surtout quand la fatigue et les excès sont là, et avec une gueule abasourdie je regarde Doudou, mais aucun son sort de ma bouche, lui me dit qu’il va appeler les secours, mais moi dans cette chambre trop petite ça ne va vraiment plus très bien tout d’un coup, et puis l’odeur de merde et de sperme envahit mon corps que je ne commande plus en même temps qu’une vague de nausée fleurit depuis mon ventre pour faire trembler mes épaules et mes poignets, je suis faible, si faible que dans un effort je tends une main vers l’épaule de mon copain quand le monde devient tout blanc autour de moi.

Je reviens aux claques de Doudou. Je veux rester évanoui, il n’y a que du repos à être sans connaissance. Encore une claque. J’ouvre les yeux. Il n’y avait aucune tension dans ma nuit, mais me revoici parmi les vivants au chevet de mon ami mort. Je suis en nage, constellé de gouttes de sueur sur tout mon corps. Est-ce que je ne devrais pas mourir finalement ? Je m’assois pour revenir à moi. Je me sens vide et inutile. J’ai un goût amer dans la bouche, mon existence me semble nauséeuse. Doudou semble très bien analyser ce qui se passe et garde son sang-froid. Il me conseille de quitter l’établissement avant l’arrivée des secours, en me fixant.

— Impossible. Sa femme sait qu’on allait se retrouver ici après le boulot, dis-je.

Je tiens ma tête avec la main. Je reprends des couleurs, c’est ce que me dit doudou en proie à un petit instant de panique en ce qui me concerne. Mais il se ressaisit et planifie tout comme un pro de la nuit.

— Je dirai que t’es parti, mais que Michel est resté pour faire la fête. Paulo faut te tirer, je vais détruire aux chiottes tes derniers sachets de coke. Au pire tu seras entendu comme témoin demain, mais si on te met la main dessus, avec ce que t’as apporté ce soir, t’es bon pour les flics.

Je me lève encore tremblant et aux portes d’un nouvel évanouissement. Doudou me tient par l’épaule en essayant de détendre l’atmosphère « reprends-toi, tu sais que ça arrive, Michel était peut-être malade, en tout cas il est mort comme il voulait parce qu’il me criait oui oui quand c’est arrivé ». Je ne réponds rien. Il faut que je réalise. Mais Doudou poursuit dans un humour raté « et puis ça libère son poste, tu seras DG mon Paulo ». J’ai envie de le frapper. J’essaie de fermer mon poing, mais là je suis toujours sous le choc. Doudou, très dynamique, récupère ma veste de costume, chasse d’un geste de la main la Roumaine qui attend avec son âme brisée, puis il me conduit par une sortie de secours hors de l’établissement en me remettant à un agent de sécurité. Il veut m’éloigner des emmerdes qui arrivent en tornade dans son établissement. Dehors le ciel est bouché par les nuages et les réverbères lui offrent un halo orangé. La rue est mouillée et j’évite de marcher dans une flaque du trottoir. Je cherche des étoiles ou la lune dans un réflexe sans espoir. J’ai terriblement froid. Je me tourne toujours muet vers Doudou qui attendait mon attention pour parler.

— Je te tiendrai au courant. Je dirai que t’as quitté la boîte à minuit. Tiens-toi à cette version. Tu me remercieras plus tard. Allez va, je dois avertir les pompiers maintenant.

Je lui fais un signe de la main et me rends à ma voiture. Je suis incapable de raisonner et l’image du cadavre de Michel défile dans mon crâne, suivie de celle de mon pénis, que je couvre de cocaïne face à la mine désespérée et ébahie de la Roumaine qui attendait que je la drogue, et tout ça se mélange, sexe drogue et mort. Dans la voiture je réalise qu’un bloc invisible est sur mes épaules avec cette impression : j’ai commis une faute qui a entraîné quelque chose d’irrémédiable. De quoi est-ce que je me sens coupable ? J’accélère pour rentrer sur un périphérique auréolé de la lumière cyclopéenne des réverbères. Les nuages ont bouché la ville. Je cherche un coin de nuit avec son étoile, en vain. Une vague d’angoisse m’envahit, putain rien qu’un bout de ciel sans nuages, je ne demande pas grand-chose. Je roule malgré mes vertiges. Depuis mon divorce d’avec Karine j’ai gagné en assurance, je me suis réalisé. Je suis devenu le cadre sup flamboyant. Mon ex m’a juste dit, la dernière fois que je l’ai vue, « va te faire mettre ». Au volant de mon Audi, je ris aux larmes malgré moi ; Michel, ça ne lui a pas réussi. J’ai rien à me reprocher, je suis innocent dans cette connerie. Il faut que je fasse un truc pour me changer les idées. J’ai demandé à ma fille Lucie de me traduire ce que voulait dire sa mère par cette phrase imagée, et j’ai pas été déçu du voyage. Je revois distinctement l’explication de texte de ma fille « t’as vu à quel point t’es imbu de ta personne et égoïste ? Tu penses qu’au fric et à tes sorties. T’es un vrai connard, papa ». Ce doit être à cause de ces accusations de femelles que j’ai un mauvais remords qui plane au-dessus de ma conscience. Michel était marié. On était amis depuis plus de quinze ans. C’est moi qui l’ai entraîné à notre cinquantaine dans des sorties entre mecs. Enfin je ne l’ai pas forcé non plus.

Chez moi, tandis que mes vertiges ne me quittent pas, j’allume une chaîne info avec l’espoir de trouver un débat qui me force à ne pas me retrouver seul, mais voilà, j’arrive pas à m’extirper de mes remords. L’œil au fond de la tombe. Un cachet d’anxiolytique plus tard je regarde les mêmes images de guerres et de catastrophes en boucle, sous-titrées de scandales politiques qui défilent en bas de mon écran géant, jusqu’à mon plongeon dans un sommeil artificiel.

***

Le lendemain je suis auditionné comme témoin sur la mort de Michel. Je me tiens à la version arrêtée par « Doudou Sénégal » pour m’éviter des emmerdes professionnelles.

— Je suis parti vers minuit, Michel faisait la fête. Si je suis au courant de ses pratiques sexuelles ? Oui, je le suis. Si je suis au courant de sa prise de cocaïne, non pas vraiment, en tout cas ce devait être qu’occasionnel, parce que Michel était un collègue modèle, sous pression d’accord, mais un travailleur et pas un junkie.

Le flic ne me croit pas un instant, je sais mentir dans un univers de banquier, mais ça ne prend pas sur lui. Il me sourit poliment, mais s’en fout aussi. Je lui demande si ça arrive, il me répond « oui, ça arrive pas souvent, mais parfois, une overdose de CC avec une grosse sodomie, ça donne un arrêt cardiaque ; la CC n’est pas une anesthésie. »

Je repense à la Roumaine qui s’est sentie mal après sa prise de coke. Elle est jeune et en bonne santé, mais Michel, combien il en a sniffé, avant de se faire défoncer ? La poudre c’est moi qui l’avais apportée. Je crois que de là vient mon sentiment de culpabilité. Un coup de chance que Doudou ait tout détruit et soit muet, parce que sinon c’est la prison pour moi.

C’est à partir de la mort de mon ami que je me bourre d’anxiolytiques. Je passe son enterrement dans une brume pharmaceutique. Même les bises éplorées de sa veuve je ne m’en rappelle qu’au creux d’un brouillard. À la sortie de la messe, Doudou est complètement effondré. Il aurait dû essayer comme moi les médicaments. Il me confie entre deux hoquets de larmes « ma bite elle ne peut conduire qu’au paradis », et là, au paroxysme de sa confession ridicule je console Doudou qui sanglote au creux de mes bras.