Les chroniques policières de Biscarrosse - Tome 2 - Rémy Lasource - E-Book

Les chroniques policières de Biscarrosse - Tome 2 E-Book

Rémy Lasource

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Beschreibung

Bienvenue à Bisca !

Ancien policier de banlieue parisienne, Arnaud est tombé amoureux des paysages des Landes. Après avoir aidé Max, un petit dealer à sortir du trafic, il est tombé amoureux de sa mère, Claire, avec qui il vit désormais. Ensemble ils ont trouvé leur équilibre jusqu'à l'arrivée de la saison estivale et la venue de nouveaux trafiquants parisiens.
Quand un jeune fait une overdose, Max demande à Arnaud d'agir alors que Claire s'y oppose fermement. Arnaud pensait en avoir terminé avec la police quand Max devient la victime de violences. L'ancien capitaine doit alors faire face à des choix : protéger ceux qu'il aime ou tenir la promesse qu'il a faite.
Avec les fortes houles, les bancs de sable des plages de l'Atlantique se déplacent et la marée creuse des baïnes, des retenues d'eau où se nichent des courants latéraux violents et dangereux, parfois mortels. Arnaud sait que s'il reprend du service, ce sera officieusement et qu'il devra nager en pleine baïne.

Ce roman est la suite de Ressacs sur Bisca Beach mais peut se lire indépendamment.

Baïnes à Biscarosse, un thriller mêlant amour et poésie qui dresse le portrait d'un policier attachant aux mœurs de shérif, inadapté à la vie d'aujourd'hui.

EXTRAIT

Je libère mon bras de la main de Max, et je m’approche, c’est trop tard, ils viennent de franchir la ligne. Je marche d’un pas décidé et ils m’ont vu, je les regarde fixement, patiemment, en m’approchant. Ils comprennent que je ne baisse pas les yeux, que j’ai compris et que j’arrive. Ils viennent de comprendre que je suis flic à mon comportement, ils doivent me croire en vacances, et ils décident de se barrer vers leur nouvelle Mercedes aux vitres fumées. J’en relève la plaque, et monte dans la vieille voiture qui me sert tous les jours. Max me fait des signes de la main, mais je l’ignore. C’est trop tard.

A PROPOS DE L'AUTEUR

Avec son écriture à la fois incisive et poétique, tendre et féline, Remy Lasource nous entraîne dans un monde magique, car tellement réel. Sous sa plume, les Landes sèment leurs essences pour mieux nous ensorceler. Les personnages à qui il donne (ou redonne) vie tissent avec sincérité la toile d’une histoire où se mélangent les senteurs de l’amour, de la passion, de la tolérance mais aussi parfois de la violence ou de la haine. Attachants à souhait, chacun des protagonistes, quelle que soit la couleur de son rôle, entraine le lecteur dans des aventures rythmées par une mélodie océanique dont seules les Landes ont le secret.

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Table des matières

Résumé

Baïnes

Préface

Résumé

Ancien policier de banlieue parisienne, Arnaud est tombé amoureux des paysages des Landes. Après avoir aidé Max, un petit dealer à sortir du trafic, il est tombé amoureux de sa mère, Claire, avec qui il vit désormais. Ensemble ils ont trouvé leur équilibre jusqu'à l'arrivée de la saison estivale et la venue de nouveaux trafiquants parisiens.

Quand un jeune fait une overdose, Max demande à Arnaud d'agir alors que Claire s'y oppose fermement. Arnaud pensait en avoir terminé avec la police quand Max devient la victime de violences. L'ancien capitaine doit alors faire face à des choix : protéger ceux qu'il aime ou tenir la promesse qu'il a faite.

Avec les fortes houles, les bancs de sable des plages de l'Atlantique se déplacent et la marée creuse des baïnes, des retenues d'eau où se nichent des courants latéraux violents et dangereux, parfois mortels. Arnaud sait que s'il reprend du service, ce sera officieusement et qu'il devra nager en pleine baïne.

Baïne à Biscarrosse, un thriller mêlant amour et poésie dresse le portrait d'un policier attachant aux mœurs de shérif, inadapté à la vie d'aujourd'hui. Ce roman est la suite de ressacs sur bisca beach mais peut se lire indépendamment.

Après ses études de droit, Rémy Lasource est devenu fonctionnaire. Il a travaillé quelques années en banlieue nord de Paris au contact des policiers et des magistrats. Il vit aujourd’hui en limousin. Son univers littéraire se partage entre le fantastique et le thriller.

Rémy Lasource

Baïnes

à Biscarrosse

Thriller

ISBN : 978-2-37873-065-9

Collection Rouge : 2265-2728

Dépôt légal avril 2018

© couverture Ex Aequo

© 2018 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays. Toute modification interdite.

Le monde tourne,

j’espère qu’il ne s’effondre pas

Préface

Assis sur le sable de la plage nord de Biscarrosse, casquette vissée sur le crâne, je contemple les vagues d’une longue houle hivernale qui viennent effeuiller les prémices des dunes et redessiner le paysage. Je pense à Arnaud, Claire et Max. Je me demande ce qu’ils font en cet instant, je me questionne sur l’endroit où ils se trouvent… Au fil des pages de « Ressacs sur Bisca Beach », ces personnages ont quitté leur virtualité. Ma lecture s’est faite plus profonde… comme si de nouveaux amis me guidaient dans les paysages de ce petit coin de paradis que je connais si bien. D’ailleurs, je ne peux désormais plus déambuler sur le bitume ou le sable biscarrossais sans avoir l’impression que je vais les croiser, leur parler… ou bien encore aller boire un macchiatto au Coffee Shop, juste pour le plaisir d’être avec eux.

Avec son écriture à la fois incisive et poétique, tendre et féline, Remy nous entraîne dans un monde magique, car tellement réel. Sous sa plume, les Landes sèment leurs essences pour mieux nous ensorceler. Les personnages à qui il donne (ou redonne) vie tissent avec sincérité la toile d’une histoire où se mélangent les senteurs de l’amour, de la passion, de la tolérance mais aussi parfois de la violence ou de la haine. Attachants à souhait, chacun des protagonistes, quelle que soit la couleur de son rôle, entraine le lecteur dans des aventures rythmées par une mélodie océanique dont seules les Landes ont le secret.

J’ai eu un vrai coup de cœur, de folie, pour les écrits de Remy, mais plus que tout pour Rémy lui-même. Je me souviens encore de nos premiers échanges via les réseaux sociaux, puis autour d’un café au bord de l’océan, sous un chaud soleil estival. L’homme est à l’image de ses écrits : poétique et sincère. D’un mot, il esquisse puis souligne les traits d’une société qui s’est créée ses propres idéaux, à force d’abnégation et de relations avec la nature. De ses idées jaillissent les valeurs humaines, comme autant de vagues qui déroulent le long des plages biscarrossaises.

Alors, chers lecteurs, laissez-vous porter par Arnaud, Claire, Max, Jack ou Trop Chaud. Bienvenue à Bisca !

Bruno Dufourny (La Tortue)

l’un des premiers lecteurs

devenu personnage du second opus

L'an passé j'ai été suspendu de la police. Alors que j'étais en dehors du service, j'ai assisté au braquage d'un restaurant chinois. À l'époque j'en avais plein les bottes, j'étais devenu un flic de banlieue usé par ces voyous à la petite semaine qui braquent pour 50 euros et qui font régner la terreur en toute impunité. Alors sans réfléchir, mû par une colère qui ne supporte plus un état de fait, je m'étais levé pour désarmer le voyou qui tenait une arme de poing quand le type m'a tiré dans le ventre. Je n'avais aucun moyen de savoir que son arme était un calibre de défense parce qu'elle était la réplique d'une vraie, enfin c'était quand même du 9 mm grenaille, du plomb qui vous tue une fois le canon posé sur la tempe, mais pas non plus une arme de guerre.

La décharge que j'ai reçue dans le bide a dû déclencher une rage sourde parce que je suis monté sur le type et je l'ai frappé sans m'arrêter, je pissais le sang, j'avais mal, mais j'ai cogné le braqueur qui en a perdu l’œil. Ce sont les clients qui m’ont empêché de continuer, ils affichaient des mines écœurées, mais ils m'ont aidé à me lever sans que je comprenne ce qui m'arrivait. J'étais en plein effet tunnel, et je me suis évanoui sous l'effet de la douleur. Suspension administrative, procès pénal, le voyou a déposé plainte contre moi. Alors comme je virais alcoolo je suis venu ici pour des vacances de la dernière chance.

Et un soir à Bisca, témoin d'une agression, j'interviens pour sauver un ado de deux dealers de Bordeaux. J'ai sympathisé avec ce jeune, Max, même s’il était un petit revendeur local. Il a arrêté de dealer quand je suis rentré dans sa vie. Je me suis fait aider d'un flic de la BAC de Bordeaux, « Trop Chaud », pour faire plonger les dealers de bordeaux qui oppressaient mon nouveau pote. Je suis tombé amoureux de Claire, la mère de Max, et en sauvant cet ado du stup je me suis sauvé de mon naufrage personnel. Mais je n'avais plus la force d'aller à la rencontre de Claire. Et puis j'ai eu cette rencontre improbable avec un chien une nuit d'orage. Il devait être abandonné, et il me fixait intensément sous la pluie. Sauf qu'il n'avait pas le regard canin. Je ne sais pas ce que j'ai vu cette nuit-là, j'ai bien cru avoir affaire à un esprit. J'ai eu peur de finir seul dans ma vie, alcoolo et déprimé, face à ce chien qui affichait une tristesse sans fond. Et le lendemain Claire est venue me chercher à la Siesta, un bar sur la plage. C'est elle qui m'a embrassé. En plus elle cherchait un employé pour son café, le coffee-shop...

Et depuis je ne suis plus reparti de Bisca. Ça fait un an que je travaille pour Claire et que je suis le beau-père de Max. J'ai signé mes papiers de mise en disponibilité de la Police Nationale. J'ai rendu mon arme, mes menottes, mon brassard. Je me renseigne pour monnayer mon départ avec un petit bonus accompagnant une démission, parce qu'aujourd'hui les fonctionnaires sont poussés à quitter leur service par tous moyens, y compris financiers, quand ils veulent se lancer dans un projet de reconversion.

Cet hiver j'ai bossé dans une scierie parce que sans activité touristique le commerce de Claire était au point mort. Je me suis cru bûcheron aux États-Unis, avec une partie du job au grand air et une autre au chaud à sentir la résine de pin pénétrer mes habits. Et je suis bien obligé de m'avouer que je revis loin de mon métier. Et puis j'ai découvert Bisca hors saison, enivré du calme que procure la proximité de l'océan. Les grands lacs des Landes fument les matins froids dans une atmosphère de paix et de début du monde. Ils reviennent aux oiseaux dès l'automne, et les promeneurs ou les chasseurs avec leurs chiens s'en donnent à cœur joie. Les pins ont des coiffes de givre et l'air froid a un goût de silence et de liberté. Ici dans les grands espaces, je marche dans des forêts odorantes de résines, sous leurs canopées arrondies, ou sur de longues plages nues bordant l'océan qu'on entend rugir, et que l'on voit se dérouler avec des chevelures d'écume formant une brume d'embruns jusque dans la ville. L'océan parle comme un monstre bavard et souvent dans les rues je m'arrête pour l'écouter et me dire, « quelle chance tu as de vivre à Bisca, rien que pour ça. »

Et puis les feux de bois. La joie de se chauffer auprès de l'insert. D'allumer son feu avec des pommes de pin ; moi le flic de banlieue je réalise que j'ai une seconde chance, que je vis une parenthèse loin d'une vie absurde, rapide, sans plus de sens, où des gens entassés dans des cités grises s’entretuent sans raison, sinon qu'ils vivent trop nombreux au kilomètre carré.

Ça fait un an que je cherche le chien, ce vieux boxer rencontré une nuit d'orage que j'ai surnommé « chamane ». J'ai fait les SPA et les fermes isolées à sa recherche, aucune trace de ce vieux cabot mystérieux qui est rentré dans ma vie comme un esprit, et qui m'a aidé à me poser les bonnes questions. Pourtant je sais ou je sens qu'il est en vie, quelque part pas loin d'ici, en tout cas il a déposé quelque chose en moi, un peu comme l'aurait fait un vieux sorcier indien.

Je fais du vélo, j'ai repris la course à pied et j'ai gardé la muscu. On vit en autarcie, Max, Claire et moi. Il a fallu que je me mette à la culture du surf, enfin j'ai essayé, je suis trop vieux moralement pour m'y mettre à fond. J'ai accroché à l'album thicker than water et à son chanteur Jack Jonhson, surtout quand il se pose énormément de questions comme celle de savoir si les étoiles sont des trous vers le paradis. Et à Ben Harper, mais Claire et Max le trouvent trop déprimant. J'ai imposé la lecture des romans du très grand Jim Harrison à ceux que j'aime, parce que pour avoir conscience de vivre pleinement dans la nature, il faut savoir lire et apprécier cet ogre borgne. J'ai repris la poésie, au grand désarroi de Claire qui préfère jouer avec mon corps qu'avec mes feuilles de poèmes. Mais elle est gentille et fait des efforts, à condition que je m'applique à lui donner des orgasmes. Quand elle me lit, je passe le balai avec anxiété pour attendre son jugement. Et quand elle a terminé, elle penche sa tête pour simuler l'assoupissement, ses cheveux blonds et blancs tombent en cascade ; alors je suis contraint de les lever pour découvrir son regard pétillant qui attend des câlins, des bisous et de la tendresse avant qu'elle me dise ce qui lui plaît ou pas.

À vivre ici on a envie d'être un ermite attentif à l'écho du monde. Je me réveille le matin avec des pensées aussi naïves et sincères que celle-là. C'est le signe que je retrouve mon innocence, une foi dans la vie et la nature qui m'entoure. J'ai gardé mes Jack Kerouac. Je regarde les vieux Landais partir à la messe et j'envie leur foi. J'ai découvert Rick Bass, mais aussi Pete Fromm et Craig Jonhson. Je suis heureux quand je lis des auteurs qui ont des choses à dire sur le monde et leur âme, et quand je m'occupe de mon foyer. Parfois je me demande pourquoi j'ai été flic, et m'interroge quand je repense à tout ce que j'ai dû affronter, porter à bout de bras pour apporter un peu de justice pour des vies de misère dans ces environnements de béton. Ici, j'ai changé de vie. J'ai droit à un nouveau départ. Je m'étais trompé d'orientation, voilà tout. J'ai heureusement perdu ma peau urbaine. Je suis en paix. Je n'ai plus aucune dose d'agressivité en moi.

Enfin, c'est ce que j'aimerais croire. Depuis qu'on prépare la saison et que de grosses berlines conduites par des gosses rôdent pour les vacances, avec du rap, des casquettes et du stup c'est comme si le flic que j'étais n'était pas mort, mais endormi. Au contraire, il s'est reposé et crie sa faim. Il réclame justice. Il ne supporte pas cette délinquance, ici, dans ce petit paradis des Landes. C'est pire ; c'est comme si j'attendais les premiers dealers avec la faim d'une bête qui veut donner la chasse, juste pour éprouver le plaisir de se sentir libre en courant pour attraper, soumettre, et mettre hors d'état de nuire. Et c’est ce moi que je crains avec l'arrivée des touristes. Je ne peux plus supporter de voir ces gamins frimer avec leur argent sale et leur sentiment de supériorité sans pouvoir réagir. Mais je ne suis plus flic, et je ne peux pas mettre Claire en danger. C'est pire que ça. Je tiens son commerce et serai appelé à les servir. Mais pour l'instant, je refoule avec angoisse cette perspective.

Cet hiver il ne s'est pas passé une journée sans que je voie l'océan et depuis l'arrivée du printemps je me baigne tous les jours. Même si l'eau est encore froide, qu'il pleuve ou qu'il vente, et si ce n'est que pour cinq minutes, je rentre lentement, plonge et ressors ruisselant. Ensuite je reste assis dans les vagues, le temps pour moi de sentir les eaux bouillonner sur mon corps, et je m'applique à écouter l'écume pétiller de sel sur mes épaules. Ce doit être une habitude qui a pris une valeur symbolique, comme un rite païen, j'imagine. Puis une fois ma baignade accomplie je sors reprendre le cours de mes affaires.

Et puis je me suis fait un nouvel ami, un géant au crâne rasé, surfer et ancien photographe pro de surf sessions, Bruno DUF qu’on appelle « la tortue ». Je l’ai rencontré bizarrement. À force d'être heureux dans ce département des Landes j'ai publié certains de mes poèmes nés de ma vie contemplative à Bisca, que la presse comme « le crapaud qui fume » ou l'école de surf de la « Vigie team » ont bien voulu mettre en vente. Alors quand un inconnu est venu me commander un macchiatto en tenant mon livre, forcément j'ai eu des palpitations et des sudations. Je lui ai appris que j'en étais l'auteur, et on s'est regardés curieusement tous les deux. Il m'a dit qu'il adorait ma poésie, qu'il se baladait dans la ville avec mes vers en tête. J'étais aux anges. Ça a fini que je lui ai dédicacé mon recueil en même temps que j'étais gêné de signer un livre lu par un inconnu, mais on est rapidement devenus amis. Bruno DUF, « la tortue », est un créateur graphique passionné de camions customisés ou de bagnoles carrossées avec classe. Et puis surtout il apprécie que j’écrive sur sa ville avec sensibilité. Il a la vraie beach way of life pour rouler dans des voitures décorées pour un easy ride au soleil couchant. Y a des mecs comme ça à Bisca.

Avec l'approche de la saison, Claire comme les autres commerçants s'active à tout préparer. Les commandes, le stockage, etc. un boulot de fou que je découvre. Max a réussi son année d'université, il est dans une filière des sciences de l'éducation parce qu'il ambitionne plus tard de devenir professeur des écoles. Pour fêter sa réussite aux examens de fac, on a sorti le champagne qu'on boit ce soir sous les pins. Avec Claire on a acheté une ancienne maison de vacance à prix d'or, une Landaise avec des pins autour et de l'herbe qui pousse sur le sable nous servant de jardin. Elle a accroché des lampions dans les branches pour fêter la nouvelle. Leur lumière se reflète dans les bulles du champagne. D'où on est, on entend l'océan.

Max est très calme, d'habitude il est toujours excité, rebelle, en colère, exalté, ado quoi. Mais là il est heureux et satisfait. Presque solennel. Il nous fait un petit discours, dans lequel il m'inclut. Ce gosse m'adore. C'est réciproque. Il part à 21 heures avec ses potes. Fabian, un jeune cool, vient le récupérer dans la voiture de ses parents. Ils sont toute une bande à aller dans des bars, et ensuite en boîte.

Claire reste silencieuse sous les guirlandes lumineuses et je lui verse le reste de champagne. Il pétille de bulles dorées, et cette musique de coupe que je remplis nous ravit, surtout quand les bulles se libèrent et éclatent avec des bruits secs à ras bord. Je pars chercher ma bouteille de Cognac. Elle vient du logis du Renfermis, faite par Sylvain Lascaux. C'est un hors d'âge. Je commence à chauffer le verre ballon dans ma paume et l'alcool aux reflets d'ambre m'envoie des parfums de bois et de violette.

Claire a des yeux brillants dans l'obscurité. Je souris. J'espère garder ce moment longtemps en moi, qu'il se grave dans mon squelette et que dans trois mille ans des chercheurs pourront l'extraire de mes fragments d'os. Qu'ils feront revivre cet instant où Claire me regarde sous les pins en buvant du champagne.

Je mets « You and me » de Neil Young. Si je chante aigu, ce sera comique, le chanteur peut monter haut, pas moi. Alors je chante d'une voix douce.

« Ouvre tes yeux/ Regarde comme vole le temps de notre vie » Claire m'observe tandis que je tourne autour d'elle. « Je pensais à toi et moi/ faisant l’amour sous l’arbre/ et maintenant je me demande : se pourrait-il ? »

— Oui, crie-t-elle enjouée. Oui tu peux me faire l'amour sous l'arbre.

Je m'approche et entoure ses épaules de mes bras. Elle dépose sa tête contre mon cou. Au-dessus de nous les lampions répandent une lumière dorée. Claire m'embrasse. On entend l’océan s’inviter dans le jardin. Il occupe toutes les rues de Biscarrosse cette nuit. Il a des choses à dire.

Il est onze heures, quand Max arrive, affolé, alors que Claire et moi sortons de la douche, tous les deux, prêts à se cajoler sexuellement.

Il appelle dans le salon.

— C’est mon pote Fabian. Il est pas bien ! Arnaud, vite !

— Vous ne deviez pas aller en boîte après votre sortie dans les bars ?

— Tout allait bien, mais Fabian est sorti dans une ruelle, on l’a cherché partout. Vite, dépêche-toi.

Et Max s’enfuit en trombe, je le suis dans une petite rue près de chez de nous. Fabian est un gosse, d’à peine 19 ans, il a à moitié dégobillé sur lui. Il fait des bulles sans s’en rendre compte et ça c’est pas à cause de l’alcool.

— Appelle les pompiers, je dis.

— Arrête, sauve-le, toi. Le laisse pas tomber, le temps qu’ils arrivent et qu’ils partent pour l’hosto, il sera dans le coma ou pire, aide-moi à le porter.

En route pour les urgences. Max les appelle à ma demande pour les prévenir de notre arrivée. Je passe les vitesses en poussant les rapports. Fabian bave des bulles et a le teint vert. La nuit est lourde et saturée d’humidité. Je me rappelle que je n’ai pas de gyro en cherchant inconsciemment la commande de la sirène deux tons dans la voiture.

— C’est pas l’alcool qui le fait baver comme un escargot, Max.

Mais il ne dit rien.

— T’en as pris ?

— Non ! Je ne touche plus à rien, hormis la picole. Je ne sais pas ce qu’il a ingurgité.

— Tiens lui la tête et fais attention qu’elle ne parte pas en arrière, qu’il ne se vomisse pas dans les bronches.

L’air a de la peine à fraîchir malgré la vitesse et les fenêtres grandes ouvertes. Je retrouve des sensations dans l’urgence. Des réflexes.

— Tu conduis super vite !

— Laisse faire. Essaie de maintenir Fabian éveillé, parle-lui.

— Vas pas nous tuer.

— Parle à ton pote plutôt.

— Il est dans le gaz.

— Surveille qu’il bouffe pas sa langue au lieu de me donner des leçons de prudence, p’tit gauchiste d’apprenti instit.

Je prends les ronds-points avec le même talent qu’autrefois, sauf que j’ai pas de lumière bleue au-dessus de la voiture pour prévenir les gens. Je mets les feux de détresse et fais des appels de phare en continu pour alerter d’une urgence. Les mains serrées autour du volant je me faufile au milieu de la route en forçant les gens à s’écarter. En arrivant aux urgences de l’hôpital, j’ai le dos trempé. Quand j’ouvre ma portière le plafonnier m’envoie une dose de douleur dans les yeux, réveil nerveux au sortir de ma concentration de pilote ; je porte Fabian dans mes bras aux admissions. Je trouve la première femme à l’accueil. J’ai le front en sueur, l’ado fait bien ses quatre-vingts kilos, putain.

— Ce gosse est un ami de mon beau fils, il a ingurgité des médicaments ou des stupéfiants.

À voir les yeux révulsés du gamin, il est pris en charge immédiatement. Je reprends mon souffle en marchant dans le hall, où j’écoute attentif mon cœur redescendre doucement. Max fait les cent pas à l’accueil. Il va falloir qu’il prévienne les parents. Je lui laisse cette chance d’exercer ses responsabilités.