Walt Disney pédagogue - Bruno Humbeeck - E-Book

Walt Disney pédagogue E-Book

Bruno Humbeeck

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Beschreibung

Et si derrière chaque chef-d’œuvre des studios Disney se cachait un manuel d’éducation déguisé ? Bambi, Pinocchio, Peter Pan, Vice-Versa, La Reine des Neiges… : ces films iconiques ne sont pas que de simples divertissements. Ils parlent, avec une acuité incroyable, des peurs, des joies, des épreuves et des ressources intérieures des enfants.

Dans cet ouvrage passionnant, Bruno Humbeeck, psychopédagogue renommé, nous invite à redécouvrir ces classiques comme des outils puissants pour accompagner nos enfants dans leur construction personnelle et émotionnelle.

Ce que vous apprendrez à vos enfants :

Apprivoiser la perte et l’abandon avec Bambi

Accepter de grandir, comme Peter Pan

La fraternité des Aristochats

L’univers émotionnel d’un enfant grâce à Vice-Versa

L’image de soi à travers Blanche-Neige

Bruno Humbeeck est psychopédagogue, docteur en sciences de l’éducation et chroniqueur (France Inter, RTBF). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages de référence sur la parentalité et les émotions, et réunit plus de 65 000 abonnés sur ses réseaux où ses analyses pédagogiques de Disney rencontrent un grand succès. 
 À PROPOS DE L'AUTEUR

Bruno Humbeeck est psychopédagogue et directeur de recherche au sein du service des Sciences de la famille de l'université de Mons (Belgique). Titulaire d’un master européen de recherche en Sciences de l’éducation et d'un doctorat en Sciences de l’éducation de l’université de Rouen, il est aussi l’auteur de nombreux ouvrages de référence sur l’enfance et l’éducation, dont Hyper-parentalité (2022), L'intelligence émotionnelle chez l'enfant (2023), La génération de verre (2024) et Quelles pédagogies pour mon enfant ?.



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Seitenzahl: 305

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Couverture

Page de titre

PARTIE 1 Walt Disney et la pédagogie

Le problème avec le divertissement, c’est qu’on le considère toujours avec une forme de mépris condescendant qui laisserait entendre qu’il ne sert qu’à amuser, distraire et faire passer le temps…

« Mon premier réflexe, c’est de penser en termes de fantaisie animée à l’état pur. La fable est le mode de narration par excellence, et l’écran son meilleur intermédiaire1… » En parlant de cette façon, Disney apparaît immédiatement, aux oreilles des bienpensants, comme doublement suspect…

Suspect d’être trop fantaisiste pour être réellement pris au sérieux dans le monde de l’éducation et suspect de faire des écrans le média de diffusion privilégié de son œuvre, alors même que, par les temps qui courent, force est de constater que ces écrans ne sont pas nécessairement en odeur de sainteté.

Un fantaisiste qui rive les yeux de nos enfants à des écrans… Pour être adoubé par les universitaires et les scientifiques et pour s’avérer crédible d’un point de vue pédagogique, avouons-le, il y a mieux…

Nous avons réalisé beaucoup de dessins animés. Et même si certains n’étaient pas des comédies, j’espère que ceux que nous proposons vous amusent, vous font rire ou vous mettent tout simplement de bonne humeur2.

Décidément, Walt Disney se vend mal. Comment prendre au sérieux le statut pédagogique de quelqu’un qui limite son rôle et sa fonction à aider les autres à conserver leur bonne humeur ?

« Mon ambition, c’est d’enchanter la famille tout entière, petits et grands, parents et enfants avec ce que nous réalisons3… » Alors là, c’est tout autre chose puisqu’il ne s’agit plus de divertir mais d’enchanter et puisqu’il est question non pas d’isoler un enfant face à un écran qui le fascine mais d’emporter dans un même mouvement d’enchantement toute la famille, les petits comme les grands…

Et voilà donc où se cache le génie pédagogique de celui qui a posé les bases de cette pédagogie qui, selon moi, représente la quintessence de l’action éducative : la pédagogie de l’émerveillement.

Cette pédagogie de l’émerveillement suppose la mise en mouvement de trois ingrédients essentiels qui constituent précisément les socles de chaque dessin animé de Disney :

•La gaieté féerique d’un monde nourri de magie ;

•Le plaisir étonné d’être au monde ;

•Le bonheur de découvrir un monde nouveau.

Or, ces trois ingrédients font littéralement partie du patrimoine de chaque enfant dès sa naissance. C’est pour cela, sans doute, que les enfants sont aussi spontanément attirés par les dessins animés de Walt Disney.

C’est pour cela aussi sans doute que les pédagogies qui s’appuient sur ce socle ont le plus de chances de permettre aux enfants de réaliser des apprentissages, parce que leur désir de découvrir, leur envie d’explorer et leur plaisir de connaître auront été naturellement stimulés en aiguisant leur soif de savoir et en élargissant leurs centres d’intérêt…

Walt Disney est incontestablement un pédagogue, mais c’est avant tout un pédagogue de l’émerveillement, et les formes pédagogiques qu’il utilise, essentiellement implicites, ne sautent aux yeux que si on prend le temps de connaître, de comprendre et d’analyser tout ce que son œuvre contient d’édifiant, de bouleversant et de fascinant autant pour les enfants que pour ceux qui se préoccupent de leur développement… et pour ceux qui ont conservé leur âme d’enfant…

Connaître, comprendre et analyser l’œuvre de Walt Disney et son indiscutable sens pédagogique, c’est précisément ce à quoi nous nous attacherons dans le présent ouvrage.

1.Pourquoi Walt Disney est-il un grand pédagogue ?

L’intention fondamentale de Walt Disney était d’utiliser le dessin animé comme moyen d’expression pour décrire toutes les merveilles susceptibles de jaillir de l’imagination humaine.

Le « réalisme magique », qui est la seule école artistique dont le génial créateur se revendique, l’a amené à conjuguer l’idée de mettre en scène, dans chaque œuvre animée, un monde possible, plausible et envisageable qui se révèle « réaliste », dans la mesure où il prend la consistance de la réalité, avec celle de donner naissance à un monde résolument « imaginaire », qui convoque la féérie des contes de fées, la transcendance des récits mythiques et la force virtuelle de tout ce qu’un être humain peut être amené à rêver…

C’est ainsi que le monde auquel Walt Disney – et tous ceux qui, dans ses studios, l’ont accompagné ou suivi – a donné naissance est devenu cet univers « réel-inventé », auquel tout le monde adhère. Aussi, il ne viendrait jamais l’idée à aucun enfant de remettre en cause le fait que Blanche-Neige, Bambi, Mickey, la Reine des neiges et tous les autres sont des êtres qui existent réellement et qui poursuivent leur existence bien au-delà du dessin animé dans lequel ils sont nés.

Du « réel magique », de la « magie réaliste »… Quoi de mieux pour apprendre à un enfant non seulement à faire face à tout ce que la vie comporte comme épreuves mais aussi à recevoir tout ce qu’elle contient comme sources de joie ?

L’enfant, face à un dessin animé de Walt Disney est invité à explorer l’ensemble des émotions (joie, tristesse, colère, peur et dégoût) mises à sa disposition, et c’est en explorant tous les états d’âme qui y sont associés qu’il réalisera le mieux tous les apprentissages essentiels qui feront de lui un être humain.

Toutefois, si Walt Disney, à travers ses dessins animés, se révèle un grand, un très grand pédagogue, il est aussi un piètre baby-sitter, parce que son « réalisme magique » se consomme très mal par un enfant isolé, seul face à un écran qui lui raconte une histoire souvent bien trop lourde de sens pour qu’il en comprenne la signification sans en être bousculé…

La mort, l’abandon, la construction de l’estime de soi, l’empathie, le lien avec le vivant, l’anxiété, la peur de grandir, la culpabilité… Les thèmes abordés dans les œuvres de Disney sont à la fois multiples, profonds et essentiels au développement de l’enfant.

La forme pédagogique privilégiée par Walt Disney fait la part belle aux états affectifs qui deviennent les véritables vecteurs d’apprentissage. On peut à cet égard parler de « pédagogie affective », dans la mesure où ce sont les états affectifs provoqués par le dessin animé qui favorisent l’envie de connaître, le besoin de comprendre et même le souci d’analyse qui se manifeste dès que l’enfant se sent impliqué dans l’histoire qui lui est présentée, parce que celle-ci provoque chez lui des émotions.

Les personnages imaginaires mis en scène dans les dessins animés ont en effet une véritable consistance psychologique. La forme résolument humaine qui leur est donnée, à travers l’expression subtile de leurs ressentis émotionnels, encourage les mécanismes empathiques et les projections mentales de l’enfant, qui se met à la place des héros et se met à éprouver ce qu’ils vivent comme s’il le vivait lui-même.

Chaque dessin animé ne donne ainsi sa pleine signification que lorsqu’il est regardé par l’enfant en compagnie d’un adulte. Il devient alors, pour l’un et l’autre, l’occasion de « prendre la leçon » en réalisant ces apprentissages essentiels dans le cadre d’un monde magique d’autant plus sécurisant qu’il est partagé avec un adulte…

C’est précisément l’ensemble de ces « leçons » que le lecteur sera invité à recevoir au cours de cet ouvrage qui permettra, je l’espère, d’utiliser chaque dessin animé de Walt Disney comme un véritable support pédagogique susceptible d’aider l’enfant à grandir…

Leçon de didactique façon Disney

Le Livre de la jungle et Bambi sont les deux dessins animés qui, chez Disney, décrivent sans doute le plus directement une relation d’apprentissage entre un apprenant qui a tout à apprendre et un autre qui, apparemment, aurait tout à lui enseigner.

L’un et l’autre constituent de prodigieuses leçons de pédagogie qui mettent en scène les différentes formes que peut prendre une action éducative visant explicitement un ensemble d’apprentissage. Un examen plus attentif de ces différentes relations éducatives permet en effet d’illustrer les principaux courants pédagogiques qui ont fait l’histoire de l’enseignement.

Bagheera considère ainsi Mowgli comme un « vase à remplir ». Il se pose comme le dépositaire du savoir que Mowgli, fondamentalement ignorant, doit recevoir en s’imbibant de ce que la panthère lui dit, lui montre ou lui explique. Apaisant, Bagheera incarne la pédagogie traditionnelle et la force tranquille du savoir qui s’impose avec fermeté même s’il ne s’interdit pas une forme de douceur et une réelle préoccupation affective.

Baloo, lui, envisage davantage Mowgli comme un « feu à allumer ». Il sait lui aussi ce qui est bon pour le petit homme mais fait en sorte que celui-ci le découvre par lui-même. Stimulant, Baloo personnifie le courant de la pédagogie active et la force du savoir qui se conquiert progressivement dans une forme d’écolage doux qui n’exclut cependant pas la fermeté.

Mais, avant ces deux mentors privilégiés, il y a d’abord la meute de loups – Akela, Rama et Raksha –, qui fait dire qu’il faut tout un village pour éduquer un enfant dès lors que celui-ci est considéré comme « une lumière à éclairer »… Les loups, notamment dans la scène du conseil, illustrent parfaitement, dans leur façon de fonctionner, le courant de la pédagogie institutionnelle, qui entend définir par le groupe lui-même les règles de vie du groupe et le cadre institutionnel dans lequel peuvent – ou pas – se réaliser les apprentissages…

Bagheera, Baloo et la meute de loups… Voilà donc trois courants pédagogiques parfaitement illustrés sans que l’un prenne le pas sur l’autre, parce que, Disney l’avait sans doute deviné, c’est la relation complémentaire de courants qui ne s’excluent pas mais s’enrichissent mutuellement de leurs qualités qui aide le mieux un enfant à grandir…

Voilà pourquoi il n’existe pas de « concurrence » entre la meute de loups, Bagheera et Baloo, mais seulement la juxtaposition de méthodes complémentaires qui ont chacune leur sens dans le développement de l’enfant.

Pour Bambi, c’est une autre histoire… Une histoire qui illustre, quant à elle, les bienfaits du tutorat.

En effet, dans ce grand dessin animé d’apprentissage, c’est à un petit lapin, Panpan, à peine plus âgé que Bambi, qu’incombe le rôle de transmettre au petit faon une leçon de vie… Apprendre par l’intermédiaire de quelqu’un qui vient tout juste d’en acquérir la maîtrise, c’est le principe du tutorat. Cette forme pédagogique est particulièrement efficace à tous les acteurs de la relation éducative. Celui qui explique, en enseignant, installe solidement la compétence, et celui qui apprend reçoit l’enseignement de la part de quelqu’un dont les ressorts de compréhension sont encore tout frais, au point de concevoir, mieux sans doute que quelqu’un qui maîtrise la connaissance depuis des lustres, par quel chemin cognitif il faut passer pour réaliser le travail de compréhension.

Bambi montre tout ce que peut apporter le tutorat quand l’enseignant, à peine plus âgé que l’apprenant, se situe dans cette zone proximale de développement4 qui ne se trouve pas trop éloignée du niveau de l’apprenant, de façon que celui-ci puisse réaliser des apprentissages nouveaux en s’appuyant sur ce qu’il connaît déjà.

Il est, à cet endroit, révélateur de souligner qu’à l’origine le mentor de Bambi aurait dû être Maître Hibou qui aurait alors été considéré comme une sorte de Bagheera des sous-bois… Disney a ensuite pensé, dans un second temps seulement, au papa de Panpan, un lièvre adulte, pour investir ce rôle… Ce n’est que dans un troisième temps, après avoir entendu le jeune acteur chargé de doubler la voix de Panpan, que Disney a jeté son dévolu sur le jeune lapin…

Tout s’est donc passé, comme dans la véritable histoire de la pédagogie, comme si le tutorat, souvent considéré, lorsqu’il est réalisé en suivant une méthodologie appropriée, comme le type le plus efficace d’enseignement, devait nécessairement passer à la suite de la forme scolaire sacralisée par la pédagogie traditionnelle d’un maître plus âgé qui sait et d’un élève beaucoup plus jeune qui ignore…

2.Pourquoi Walt Disney est-il un catastrophique baby-sitter ?

Les contes de fées aident à grandir, mais ils ne préservent pas de la peur, de l’anxiété et de l’angoisse qui s’attachent aux contenus qu’ils véhiculent. Les contes originaux de Grimm et de Perrault, par exemple, sont particulièrement cruels. On n’y compte plus les sorcières qui meurent en brûlant dans des chaussures chauffées à blanc, les marâtres qui finissent avec les yeux arrachés par un corbeau et les victimes de châtiments qui s’abattent sur leurs âmes impures, leurs mauvais cœurs ou leurs esprits pervers…

C’est pour cela que les contes de fées, tels qu’ils ont été conçus par leurs auteurs, n’ont pas été écrits à destination exclusive d’un public d’enfants. Ils ne gagnent pas en tout cas à être découverts par un enfant seul qui en prendrait connaissance sans pouvoir compter sur un adulte qui, tout en narrant l’histoire, exerce, par sa présence, une fonction rassurante. Le principe fondamental d’un conte, c’est, en effet, que… quelqu’un le raconte… et tout doit paraître mis en œuvre pour que celui qui raconte et celui qui rassure l’enfant soit le plus possible la même personne.

C’est évidemment la même chose pour les dessins de Walt Disney. Les contes de fées traduits en dessins animés, même si Walt Disney en a éradiqué les contenus explicitement cruels, aident à grandir pour autant que le contexte soit vécu par le tout jeune enfant comme parfaitement sécurisant. C’est à ce prix seulement que les contes pour enfants, qui servent de toile de fond aux principaux dessins animés de Disney, les aident à affronter leurs peurs en mettant celles-ci en scène dans un contexte imaginaire qui leur donne le sentiment que l’on peut se relever du pire et affronter tous les dangers.

La mort, l’abandon, l’amour non partagé, le sentiment d’impuissance que l’on éprouve à l’idée d’affronter plus fort, plus grand ou plus puissant que soi, ou l’impression de danger que l’on ressent quand il est question de se confronter à des épreuves qui risquent de nous anéantir ou d’anéantir ceux qu’on aime, voilà les thèmes majeurs abordés par les grands dessins animés des Studios Disney…

Regarder Bambi ou Blanche-Neige, La Reine des neiges ou Le Roi Lion, c’est, pour un enfant, se laisser embarquer dans un récit qui produit un flux émotionnel épouvantablement puissant dont les parents n’ont pas toujours pleinement conscience…

C’est le propre des émotions, en s’enchaînant les unes derrière les autres, de donner parfois l’impression de s’annuler les unes les autres. Or, vu qu’un conte de fées comme Blanche-Neige ou qu’un récit bucolique comme Bambi, qui évoque l’éternel retour du printemps, finissent par nature généralement bien, on oublie trop souvent, puisque tout se termine sur un état émotif positif, que les enfants ont été confrontés à des situations émotionnelles d’une intensité terrible.

Apprendre que la mort est un définitif non-retour et que l’amour ne protège pas de la mort, puisque aimer ceux qui nous entourent aussi fort que possible ne les empêche pas de mourir, ce n’est pas anodin. Tout comme assister au spectacle, terrorisant pour un enfant, que représente la métamorphose diabolique de celle qui a pris la place d’une maman… Et pourtant…

Pourtant, beaucoup de parents laissent trop souvent leurs enfants regarder seuls ces dessins animés. Ce n’est évidemment pas Walt Disney qui est en cause. Lui n’avait pas prévu des écrans individuels qui permettent au tout jeune spectateur de répéter sans fin le film pour apprivoiser à force de répétition le flux émotionnel et réaliser, au bout du conte, une forme de métamorphose du traumatisme qui fait que ce qu’il gardera comme souvenir du dessin animé, ce sont des souvenirs-écrans, c’est-à-dire les scènes les plus anodines comme le patinage avec Panpan ou la scène du bain des sept nains…

Non, ce que Walt Disney avait prévu c’est le cinéma, c’est-à-dire un spectacle impliquant et toujours accompagné d’un adulte capable, par sa présence, de contenir les émotions de l’enfant et qui indique, parce qu’il est là, que l’enfant peut compter sur lui quand il est traversé par des émotions à la valence négative (comme la tristesse ou la peur) et notamment quand celles-ci prennent une intensité inédite…

L’histogramme des émotions est un outil qui permet précisément de repérer dans un flux émotionnel celles qui forment des pics d’intensité particuliers et nécessitent un soutien adulte et celles qui apparaissent plus anodines parce qu’on ne peut imaginer qu’elles seront évacuées sans conséquences dans le courant que forment ensemble tous les états émotifs qu’un enfant traverse dans la narration d’une histoire ou le cours d’un récit…

Pour aider les parents à accompagner leurs enfants quand ils regardent un dessin animé, nous présenterons ainsi, pour chacun de ceux qui sont évoqués dans le présent ouvrage un « histogramme des émotions » qui permet de rendre compte de l’intensité émotionnelle du spectacle qui est proposé à l’enfant…

Les émotions, en effet, ne sont pas fermées les unes aux autres. Aussi, lorsqu’on parle de régulation émotionnelle, il est généralement davantage question de réguler un flux affectif qui s’étale dans le temps plutôt que de maîtriser une émotion isolée qui se manifesterait de façon ponctuelle.

Pour comprendre comment fonctionne un flux émotionnel et, par exemple, celui qui traverse l’enfant pendant qu’il regarde un dessin animé, il faut d’abord concevoir que les émotions ont une valence. Cette notion se définit par la tonalité plaisante/ positive ou déplaisante/négative que revêt une émotion. La joie a ainsi une valence positive, parce qu’elle donne lieu à un état plaisant et peut être associée à des situations agréables à vivre et dont on éprouve de la satisfaction à se remémorer ; la tristesse ou la peur ont, en revanche, une valence négative.

Le propre d’un dessin animé de Disney, c’est de faire alterner les émotions à valence négative qui déstabilisent l’enfant avec des émotions plus positives qui le font rire ou sourire… C’est pour cela que lorsque l’on demande à l’enfant non pas « Qu’as-tu pensé du dessin animé ? », mais plutôt « Qu’as-tu ressenti en le regardant ? », sa réponse doit nécessairement tenir compte de tout un flux émotionnel.

C’est pour cela aussi que les adultes ne prennent pas toujours conscience des émotions déstabilisantes éprouvées par l’enfant parce que celles-ci apparaissent, en quelque sorte, masquées par les émotions à valence plus positive.

Les autres caractéristiques liées à une émotion sont, d’une part, son intensité, et, d’autre part, sa durée.

En tenant compte de la valence des émotions, de leur intensité et de leur durée, on comprend aisément pourquoi un flux émotionnel prend généralement l’apparence d’une succession de vagues, d’intensité et de durée variables, qui se manifestent à travers la double polarité que leur donnent les valences positives et négatives.

L’histogramme émotionnel facilite la prise en considération d’états émotionnels qui se succèdent ou se chevauchent avec une valence, une durée et une intensité variables. Il peut être utilisé par l’adulte, soucieux de favoriser chez l’enfant une régulation émotionnelle positive, qui peut alors parler plus en profondeur avec l’enfant de ce qu’il a éprouvé en regardant le dessin animé dont le contenu affectif a eu sur lui un impact fort de façon à éviter que le retentissement émotionnel ne soit excessif.

Il ne s’agit évidemment pas d’utiliser cet outil pour prescrire ou proscrire un certain nombre de dessins animés, mais au contraire pour les rendre tous accessibles à l’enfant en permettant au parent d’identifier plus précisément les moments de l’histoire où sa présence est plus particulièrement requise.

Tous les dessins animés de Walt Disney sont édifiants… Certains sont émotionnellement plus bouleversants que d’autres, mais aucun n’est complètement anodin au point d’être oublié aussitôt qu’il a été vu sans laisser de traces dans la représentation du monde que l’enfant est occupé à se construire.

Walt Disney et ceux qui ont dirigé son studio à sa suite ne sont pas de simples créateurs de dessins animés destinés à divertir. Ils sont de grands, de très grands pédagogues. Les leçons qu’ils donnent aux enfants sont à la fois profondes, fécondes et essentielles.

Voilà sans doute un des objectifs majeurs qui a justifié la rédaction de ce livre…

Il ne s’agit pas en effet seulement de « prendre la leçon » de chacune des œuvres majeures des Studios Disney – depuis Blanche-Neige jusqu’à Vaiana –, mais d’apprendre à regarder ces dessins animés avec nos enfants sans les abandonner seuls face à des écrans « individualisés » chargés de véhiculer un contenu qui apparaît, dès lors qu’il s’agit de dessins animés de cette qualité, tellement édifiant qu’il pourrait bien se révéler traumatisant pour eux ou leur donner l’impression que les leçons prises seraient tellement insignifiantes qu’elles ne valent pas une présence adulte…

C’est pour cela sans doute que tous les enfants de ma génération, ceux qui n’ont vu les dessins animés de Walt Disney dans des conditions de cinéma, peuvent – même si l’expérience a été réalisée il y a très longtemps – identifier sans mal les adultes qui les ont accompagnés…

Pour ma part, je me souviens par exemple précisément avoir vu Bambi avec une tante que j’adorais, Le Livre de la jungle assis entre mon papa et ma maman… Il y a bien longtemps maintenant. Je m’en souviens comme si c’était hier, et je me souviens précisément non seulement du dessin animé et de ses scènes marquantes, mais aussi de la présence contenante, rassurante et bienveillante de ces adultes aimants grâce auxquels j’ai pu réaliser ces apprentissages essentiels dans un environnement affectif suffisamment sécurisant pour que j’ose m’aventurer dans ces eaux troubles de la vie humaine où l’on apprend les lois de la vie, de la mort et de l’amour…

Si ce livre incite les adultes significatifs aux yeux de l’enfant à concevoir, de la même façon que l’ont fait mes merveilleux parents et mon adorable tante, que la consistance pédagogique des œuvres de Disney justifie qu’ils regardent les dessins animés avec leurs enfants, sans les laisser seuls face à l’écran d’un ordinateur, alors, je sais qu’il aura rempli son objectif…

3.Pourquoi les dessins animés de Walt Disney, plus que les autres, initient à la lecture ?

L’art de Walt Disney, ce n’est pas celui des musées mais celui des chambres d’enfants et des bibliothèques publiques, c’est-à-dire l’art des livres d’images… Toute sa vie, Walt Disney a couru derrière l’idéal d’une « illustration animée ». Ses dessins animés sont en réalité conçus comme des fenêtres ouvertes, par l’image, sur le monde de la narration.

L’image d’un livre qui s’ouvre introduit d’ailleurs la plupart des dessins animés de Disney (Blanche-Neige, Cendrillon, La Belle au bois dormant, Pinocchio, Merlin l’Enchanteur, Le Livre de la jungle, Alice au pays des merveilles, Peter Pan) non seulement pour rendre hommage à l’œuvre dont ils sont issus mais aussi pour que la couverture du livre exerce sur le spectateur le même effet que le lever de rideau dans un théâtre… Les récits de Walt Disney rappellent ainsi d’emblée qu’ils sont issus de livres qu’ils s’attachent à mettre en images dans le même temps qu’ils soulignent que ce dessin animé n’a pas pour vocation de remplacer le livre mais bien de le rendre vivant en l’animant…

Walt Disney s’est appuyé sur des livres écrits par d’autres que lui mais sans s’aliéner à eux. À travers cette émancipation vis-à-vis de l’écrit, il poursuit, comme nous le verrons, un double objectif :

•Donner une consistance psychologique aux personnages de sorte que leurs actions, leur manière de penser le monde et de ressentir ce qui leur arrive soient « humainement » suffisamment crédibles pour encourager les projections de l’enfant ;

•Aider l’enfant à grandir en lui apprenant ce qu’il peut retirer des épreuves de l’existence et en lui donnant, dans un cadre affectif sécurisant, des clés de développement, des arguments de résilience ou des exemples de composition imaginaire avec la réalité quand celle-ci est trop difficile à accepter.

C’est ce qui explique que, davantage que la lecture qu’elle encourage, les dessins animés de Disney exercent un effet cathartique plus direct qui, par les affects qu’ils bousculent, suppose l’indispensable présence rassurante d’une grande personne avec laquelle l’enfant se sent en sécurité.

Pour un enfant, regarder un dessin animé de Walt Disney revient ainsi, en quelque sorte, à vivre l’expérience vécue par un adulte quand il assiste à une pièce de théâtre…

C’est pour cela que l’on ne doit pas faire l’économie du rituel qui l’accompagne – assister à une pièce de théâtre suppose un lever de rideau ainsi qu’une manière particulière de saluer de la part des acteurs – et du caractère sacré des lieux où elle se déroule – une salle de théâtre ou de cinéma –, de façon que l’expérience d’immersion dans l’imaginaire ressemble à celle que l’on réalise avec un livre une fois que l’on en découvre la première page et que les conditions ritualisées de lecture ajoutent au caractère merveilleux de la plongée dans l’imaginaire…

Regarder un dessin animé de Disney n’a rien d’antinomique avec la lecture. L’expérience se révèle au contraire une parfaite initiation au monde du livre et, si cette initiation a déjà eu lieu, se pose véritablement comme son complément idéal.

C’est pour cela que, de la même façon que les amateurs de théâtre sont généralement de grands lecteurs, les enfants friands de dessins animés de Disney s’ouvrent, si on s’y prend bien pour les accompagner et que l’on donne au spectacle qui s’offre à eux toute la place qu’il mérite, une voie royale vers l’amour des livres… Tous les enfants qui regardent les dessins animés de Walt Disney au cinéma éprouvent un plaisir immense à prendre connaissance du livre qui en reprend les principales images et en retrace le fil narratif.

En revanche, donner l’occasion à l’enfant de lire un de ces livres sans lui offrir au préalable l’opportunité d’avoir regardé le dessin animé rend l’expérience de lecture beaucoup plus aléatoire. L’enfant s’y engagera probablement avec beaucoup moins d’empressement.

Ainsi envisagés, les dessins animés de Walt Disney ne doivent pas être considérés comme un frein à la lecture mais, au contraire, comme une manière positive de l’encourager et d’initier l’enfant à la lecture envisagée avec le surcroît de plaisir que l’on associe à la redécouverte d’une histoire connue et aux retrouvailles sur papier de personnages familiers.

4.Pourquoi les dessins animés de Walt Disney ont-ils un impact différent sur le développement de l’enfant que les contes originaux ?

Ceux qui prétendent que Walt Disney n’a jamais fait que reprendre à son compte dans ses dessins animés les œuvres des grands conteurs que sont Grimm, Perrault ou Andersen n’ont sans doute pas lu les contes originaux ou alors, ils n’ont pas pris la peine de regarder ce que Walt Disney en a fait.

Les contes de Grimm, de Perrault et d’Andersen visaient un objectif moral explicite. Écrits à destination d’un public plus large que celui des enfants, ils cherchaient à montrer comment « bien » grandir, c’est-à-dire comment devenir le modèle d’homme ou de femme conforme aux attentes du monde social, fidèle à l’éthique morale ou en adéquation avec le discours religieux. Rien de tout cela dans les dessins de Walt Disney, où il est seulement question d’apprendre à grandir en ne prenant qu’implicitement des leçons morales ou éthiques.

Ainsi, dans les contes classiques, la punition des fautifs est à la fois cruelle, spectaculaire et visible aux yeux de tous, tandis que, chez Walt Disney, il s’agit essentiellement de leur faire regretter amèrement leurs comportements, leurs attitudes ou leurs conduites. Dans le premier cas, la sanction « divine » ou « magique » frappe de l’extérieur. Dans le second, il s’agit davantage de mettre en mouvement des mécanismes psychologiques, comme le remords ou le regret, qui rongent de l’intérieur en exacerbant les sentiments de honte et d’humiliation…

C’est par ailleurs une composante majeure qui distingue les contes traditionnels de ceux mis en dessins animés par Walt Disney : le dessin animé, en mettant en scène les personnages, prend soin de les humaniser en leur donnant une véritable consistance psychologique, alors que, chez les conteurs classiques, ceux-ci évoluent comme des ectoplasmes au service d’une question morale, éthique ou religieuse.

Prenons, pour illustrer notre propos, l’exemple de La Petite Sirène d’Andersen. Dans le conte original, la petite sirène ne désire pas seulement épouser le prince dont elle est tombée amoureuse ; elle veut surtout acquérir l’immortalité promise aux âmes humaines alors même que les sirènes finissent immanquablement, au bout de trois cents ans, par se transformer en écume des mers. L’objet de la quête de la petite sirène d’Andersen est de posséder une âme, et notamment une âme chrétienne puisque celle-ci assure l’immortalité. Son chagrin n’est pas de ne pas pouvoir aimer et être aimée par le prince, mais, faute d’être aimée par lui, de manquer d’âme. Ainsi, ce que la sorcière lui promet en échange de sa voix et de son renoncement à être une sirène, c’est l’assurance que, si le jeune prince s’éprend d’elle, elle pourra, elle aussi, bénéficier de l’éternité qui s’attache à une âme chrétienne.

Rien de tout cela dans la version de Walt Disney, où il est seulement question pour une adolescente rebelle de s’émanciper de son père, aimant mais un brin tyrannique, et de ses exigences inflexibles dont celle de rester fidèle à l’identité de sirène en demeurant en permanence sous son emprise, c’est-à-dire dans l’océan. Le problème posé ici n’est donc plus la quête de l’âme, mais l’émancipation du statut d’adolescente et l’acquisition d’une véritable autonomie affective. Dans un tel contexte, la sorcière Ursula se fiche bien de l’âme de la petite sirène et ne lui « achète » sa voix qu’en échange de l’opportunité de devenir humaine et d’en finir avec cette queue de poisson qui l’empêcherait d’avoir des enfants avec le prince.

La quête mystique cède ainsi le pas, chez Walt Disney, à une lutte pour le développement psychologique optimal et la recherche d’autonomie qui, pendant l’adolescence, s’y associe inévitablement.

Nous le verrons dans les pages qui suivent, la distance importante qui sépare les dessins animés des contes originaux sur lesquels s’appuie le récit s’articule généralement autour de trois composantes essentielles :

•Un objectif moral, idéologique ou religieux moins explicitement affirmé ;

•Une consistance psychologique des personnages, qui les rend humainement crédibles et favorise les projections psychologiques de l’enfant ;

•Une quête mystique, qui cède le pas à tout un cheminement psychologique qui concrétise une quête d’affiliation, d’accomplissement personnel ou d’autonomie individuelle.

Ce qui est vrai pour les contes de fées l’est aussi, par ailleurs, pour les récits moins directement liés à un univers féerique sur lesquels s’appuie le récit mis en scène dans le dessin animé (James Matthew Barrie, Lewis Carroll, Rudyard Kipling, etc.). Ces récits « non féeriques » font systématiquement l’objet d’une adaptation visant tout à la fois à créer un univers « humainement crédible » et accessible aux enfants, dans lequel ceux-ci peuvent facilement se projeter, et à mettre en scène des manières d’être ou de faire qui les aident à grandir sans les obliger à s’enfermer dans un cadre moral ou selon un canevas religieux préalablement défini.

C’est pour cela que nous serons attentifs, pour chaque œuvre analysée d’un point de vue pédagogique, à mettre en évidence les distances que le dessin animé a résolument prises avec le matériel original dont s’est inspiré le récit, en relevant notamment tout ce qui chez Disney augmente la portée humaine et émotionnelle des récits.

5.Pourquoi les dessins animés de Walt Disney sont-ils à la fois constitués d’invariants éducatifs et sensibles aux caractéristiques de l’époque qui les a vus naître ?

L’amour, la préférence, la mort, l’abandon, les liens qui se font et se défont, l’estime de soi, l’identité personnelle et collective, l’affiliation à un groupe ou l’appartenance à un univers social, l’accomplissement individuel, la recherche d’autonomie, le sens des responsabilités, la fidélité, la confiance, les raisons de vivre, les façons différentes d’exister, la curiosité, le plaisir de découvrir, le temps qui passe, le passé qui pèse, l’avenir qui interroge, les qualités et les défauts que l’on se reconnaît, ceux que l’on ignore, l’empathie, l’amour de la nature, la beauté, la laideur, la gentillesse, la méchanceté… L’ensemble de ces thèmes traverse l’œuvre des dessins animés de Disney comme autant d’éléments qui, de tout temps, partout dans le monde, constituent l’objet des apprentissages que l’enfant doit nécessairement faire, à un moment ou l’autre, pour grandir.

Ces invariants éducatifs ne font l’objet d’aucun enseignement explicite. Ils ne sont pas repris dans les programmes scolaires et, alors même qu’ils se révèlent fondamentaux, demeurent essentiellement du ressort des apprentissages implicites.

C’est pour cela que les dessins animés exercent, dans le domaine de l’éducation familiale, une fonction aussi importante. Ils permettent de faire l’inventaire de tous les apprentissages qu’un enfant doit réaliser pour apprendre petit à petit, dans un cadre bienveillant et sécurisant, à exercer son métier d’homme. Parce qu’ils sont porteurs de ces invariants éducatifs, les dessins animés de Disney concernent tous les enfants, de tous les pays, et transcendent les caractéristiques particulières de chaque époque.

Toutefois, les œuvres animées produites par Disney ou ses studios sont également marquées par le contexte de leur diffusion et les caractéristiques socio-culturelles du monde dans lequel elles ont vu le jour… Il suffit, pour s’en convaincre, de faire le tour des princesses Disney et de leur évolution au fil du temps. En comparant les sages et lisses Blanche-Neige, Cendrillon et Aurore avec Yasmine, déjà plus libérée, ou Pocahontas, bien moins formatée, et plus encore avec la dynastie des rebelles (Raiponce, Rebelle et Mulan), on prend conscience de l’évolution positive qui s’attache au statut et à l’image de la femme.

Ces éléments « conjoncturels » liés à l’évolution de la société ne font évidemment pas l’objet d’un examen conscient de la part de l’enfant. Ils se révèlent davantage à travers les mécanismes d’identification qui poussent l’enfant à projeter son image dans la princesse qui correspond le plus à l’image que l’enfant se fait de ce qu’est une jeune fille épanouie… C’est ce qui explique l’identification massive à Elsa et Anna, les deux princesses de La Reine des neiges qui, de nos jours, drainent davantage les tendances projectives des petites filles que Blanche-Neige ou Cendrillon…

Nous reviendrons évidemment dans les pages consacrées à l’analyse des contenus pédagogiques des dessins animés sur cette tendance, au-delà des invariants qui mobilisent l’attention de tous, à se révéler perméables aux caractéristiques de son époque. Cette tendance aide aussi, pour le meilleur et pour le pire, les enfants à en adopter les standards de fonctionnement.

Au terme de l’analyse des différents dessins animés, nous proposerons par ailleurs un test autoréflexif qui permettra, à partir de deux questions simples (quelle est ta princesse préférée ? Qui est le prince charmant le plus séduisant à tes yeux ?), de vérifier quels sont les modèles de développement privilégiés par l’enfant.

Ce faisant, il est évidemment davantage question de tenir compte de l’ancrage social dans lequel l’enfant est amené à choisir parmi les différentes formes de développement rendues disponibles par l’évolution de la société. Ce qui vaut pour les princesses vaut par ailleurs pour tout ce qui constitue l’environnement dessiné dans lequel s’animent les personnages mis en scène par Walt Disney et ses studios.

Les dessins animés de Walt Disney apparaissent par exemple également, dans cet ordre d’idée, comme de puissants révélateurs de l’évolution de notre conscience écologique profonde et de l’intensité de « l’expérience de nature » qui s’offre à nos enfants. Ainsi, si dans les années 1940, la durée des scènes dans des paysages naturels représentés par au moins un arbre ou une plante constituait 80 % des scènes d’extérieur, en 2000, ce chiffre est tombé à 50 %5. De la même façon, si l’on compare Blanche-Neige (1947) et sa ribambelle d’animaux (qui ne représentent pas un personnage et donc qui ne parlent pas) avec Mulan (1987) ou Raiponce (2010), le nombre d’animaux passe de vingt-deux espèces représentées à seulement six pour Mulan et trois pour Raiponce. Tout se passe donc comme si les contes de fées de Disney manifestaient dans leur contenu une tendance nette à s’adresser à des générations moins connectées à la nature dont les représentations mentales de l’environnement naturel seraient à la fois moins riches et moins précises. Le Monde de Némo et Le Roi Lion offrent de ce point de vue des sursauts salutaires quant à la stimulation de la conscience écologique à la biodiversité. Mais aucun de ces deux dessins animés n’est un véritable conte de fées… Pour lesquels force est de constater que le paysage naturel habité s’est singulièrement appauvri…

Voilà pourquoi, parce qu’ils sont à la fois traversés par des invariants éducatifs et parce qu’ils sont inévitablement ancrés dans leur époque, les dessins animés qui forment l’univers de Disney véhiculent des éléments universels, qui font partie du patrimoine qui permet à chaque enfant de grandir, et des traits propres à son époque qui incitent l’enfant à s’y adapter pour le meilleur ou pour le pire.

L’utilisation des dessins animés de Disney à des fins éducatives doit évidemment tenir compte de cette double composante.

6.Pourquoi, et comment, les dessins animés de Walt Disney permettent-ils aux enfants d’apprendre les mécanismes qui alimentent leur résilience ?

Les dessins animés de Disney mettent systématiquement en scène des personnages imaginaires confrontés à des épreuves, à des chocs émotionnels ou à des événements traumatiques qu’ils devront dépasser pour poursuivre leur développement au-delà de ce qui aurait dû les fracasser. Ainsi envisagés, ils peuvent être considérés comme de véritables moteurs d’une éducation à la résilience qui prépare l’enfant à se confronter aux exigences du réel et à affronter une réalité qui ne se pliera pas à leur désir et ne prendra pas nécessairement la forme qu’ils souhaitent.

L’éducation à la résilience constitue une forme pédagogique qui suppose de considérer que l’objectif éducatif n’est pas de faire en sorte d’éviter toutes les épreuves en faisant comme si la vie n’était faite que de moments de joie, d’instants de plaisir et d’opportunités de contentement mais, en considérant que la réalité est ce qu’elle est et qu’elle peut à ce titre cogner fort, de doter l’enfant des ressources qui lui permettront, en cas de coups durs, de s’engager dans un développement nouveau qui l’aidera à poursuivre son développement en puisant dans ce qu’il a vécu de quoi continuer sa route. Dans cette optique, l’éducation à la résilience vise essentiellement à stimuler les ressources affectives, cognitives et sociales favorables à la mise en place de stratégie de résilience.