Ernest (de) Gengenbach - Christophe Stener - E-Book

Ernest (de) Gengenbach E-Book

Christophe Stener

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Beschreibung

Ernest (de) GENGENBACH, séminariste défroqué pour avoir fait la noce avec une théâtreuse, fut adoubé par André BRETON. Epigone du Surréalisme, figure de la scène intellectuelle parisienne, s'affichant ensoutané, KIKI de Montparnasse sur les genoux, il multiplia les apostasies spectaculaires suivies de retours à Dieu, il séduisit et trahit aussi bien BRETON que SARTRE, MARITAIN que le RP RIQUET. Evêque autoproclamé d'une église cathare dont le précepte était "Au début était le sexe" il ne célébra jamais sa Messe d'Or mais prit part à des messes noires. CLOUZOT faillit tourner son scénario, Judas, un biopic sataniste. Vivant de la générosité de maîtresses âgées et de celle de l'Eglise, il écrivit à Paul VI, lors du concile Vatican II, lui proposant de devenir le convertisseur des intellectuels athées. Emissaire du Vatican et du général de GAULLE il crut pouvoir garder l'Algérie à la France. Une vie picaresque, des livres qui sont autant d'hagiographies mais aussi un passionnant témoignage sur les plus éminents intellectuels et homme d'Eglise de son époque.

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Image de couverture

Ce collage du manuscrit de Le Moine et la SirèneFEG 487 A réunit trois personnages : GENGENBACH en oraison en robe de bure, une chatelaine au profond décolleté, portant un paon, et un troubadour à ses pieds jouant de la viole.

GENGENBACH se passionna pendant son séjour dans la Montagne noire pour l’amour courtois, s’identifiant au personnage de Raymond de CORNET, un moine-troubadour du XIVe siècle, qui, épris d’une jeune châtelaine, et accusé de magie amoureuse, fut livré aux juges de l’Inquisition du pape d’Avignon, Jean XXII, un récit qui lui inspira un projet de pièce de théâtre, mis en musique, destiné à Jean VILAR pour être joué au Festival d’Avignon.

Pour une présentation détaillée cf. mon livre Collages de GENGENBACH.

Figure 1 Le Moine et le Sirène FEG 487 A

Sommaire

Table des matières

Image de couverture

III – 1939-1945 La drôle de guerre de GENGENBACH

Incorporation

La bataille de France

Démobilisation

Retour à Paris

Hitler, « un mystique »

Charles de Gaulle

L’Armée de Leclerc

1939-1943

Madame de REIBROS

Emmanuel LANCRENON, Curé de Saint-Germain-des- Près

1943

Richard COUDENHOVE-KALERGI

IV - 1945 – 1950 L’échec parisien

Une saison en enfer

Octobre 1945 – Obsèques de Robert DESNOS

Abbaye de Sainte-Marie-de-la-Pierre-qui-Vire

Mort au monde

SURREEL ET MERVEILLEUX CHRETIEN

GENGENBACH, un hôte importun

Madame de Saint Sulpice

La bombe & BERNANOS

1946

Lydie BASTIEN Mars-Juin 1946

« La diabolique de Caluire »

La haine de l’Église

Jean MOULIN

Occultisme, hypnose, yoga et France-Afrique

Documentation

Filmographie

Lydie BASTIEN, dans la narration gengebachienne

« Echec à la vie »

Madeleine SOLOGNE

Lettre à Loys MASSON sur le communisme et le christianisme

Le chanoine CHEVRÉ

Fausses retrouvailles avec André BRETON

Retour raté à Saint-Wandrille et à La Pierre-qui-Vire

Madame de Sévigné de l’abbaye

Olivier MESSIAEN

Judas, le film

La faim

Lettre ouverte à André BRETON

Epuration et fuite de l’abbé François

Emmanuel MOUNIER

L’Expérience Existentialiste

Rencontre avec ARTAUD et VELPRÉ

1947

Arcane 17 d’André BRETON

L’affaire Henry MILLER

Le bord de l’abime

1948

Mort d’Antonin ARTAUD 4 mars 1948

La chronique gengebachienne

Les faits

Le R.P. RIQUET

La Villa Manrèse

Expulsion ou fuite de la Villa Manrèse

Le vrai-faux retour de Lydie et la comtesse polonaise

« Des ténèbres sataniques à l’étoile du matin »

« J’ai bu les draps du père RIQUET ! »

L’abbé V

.

Jacques VAUTHRIN

Bibliographie de Jacques VAUTHRIN

Internement psychiatrique

Convalescence chez le curé Jean GENGENBACH

Madame Paul AURIOL

Journal Combat 17 septembre 1948

La dèche et la boutanche

De profundis clamavi

1949

Triomphe médiatique de Lydie BASTIEN

La Messe d’Or

Judas ou le Vampire surréaliste

Abbaye de Saint-Benoit d’En-Calcat

La Dame de l’Église des Étrangers

La Bonne Samaritaine

Elyane BLOC

L’Expérience démoniaque

Lettre ouverte à André BRETON

Les visions de Gilles BOUHOURS

Espis, un nouveau Lourdes ?

Des Ténèbres sataniques à l’Etoile du Matin

1951

1952

Voyage en Flandres

Biennale Internationale de Poésie

Mgr Louis KERKHOFS

La quête mariale. De la Madone liégeoise à l’Ange musicien d’Alsace

.

Dédicace à André BRETON d’

Adieu à Satan

Adieu à Satan

Note de l’éditeur

La Révolte démoniaque – Le Moine et les Sirènes

Schisme à Saint-Germain-des- Prés

Nuit mystique

Le débat sur l’Éternel féminin est ouvert – La Vierge Mère du catholicisme & la Femme-Enfant d’André BRETON

Le Surréalisme. Le cimetière marin

Lettre ouverte à André BRETON

Tentations de l’occultisme ou la nostalgie du surhomme

GENGENBACH, c’est le Diable à Paris

« Nous ne nous suiciderons pas au gaz »

Marie

Postface

Le Pape d’Avignon

Préambule au Pape d’Avignon. A qui faire signe ?

Seconde Postface

1953

Mariage d’Elyane et Ernest GENGENBACH

Mariage civil à Knokke-le-Zoute

Mariage religieux à St Louis Marie en Brocéliande

V - 1951 -1968 La Thébaïde cathare

La Tourette-Cabardès

Les hobereaux parisiens

De drôles de paroissiens

Les yeux rivés sur Paris

La répression du catharisme comme inspiration de la Messe d’Or

L’amour courtois et les Troubadours

L’Église de la Montagne noire

Occitanie, réveille-toi ! Montségur est-il le sanctuaire du Graal ?

1957

Décès de Marie-Héloïse VIARD le 12 juin 1957

1958

1961

Appel au secours à BRETON

Adrien DAX

Jean VILAR

Projets littéraires inaboutis

Le Moine et la Sirène

La Messe d’Or

Brûlons l’Inquisition (1956

)

La Quête mariale, De la Madone liégeoise à l’Ange musicien (1958

)

Correspondances

1957-1963 La réconciliation de l’Orient islamique avec l’Occident chrétien

Nostalgie de l’Empire français

Avertissement

Chronique d’une ambassade ratée

1957

Lettre au prince héritier Moulay HASSAN

1959

Rencontre avec le cardinal TISSERANT à Montserrat

GENGENBACH ruiné par la faute du Vatican

Ferhat ABBAS ne répondit pas

Préparatifs du voyage à Alger

Voyage à Alger

« Que Rome fasse attention à la colère des légions ! »

1961

Reconquérir l’Algérie

Retour d’Alger par l’Italie

Déboires financiers

1962

L’Algérie sans la France

Mehdi ben BARKA

Mgr LEFEBVRE

La Messe d’Or

1963

La France à portée de missile soviétique et d’invasion arabe

Militant de l’Algérie française

Abbaye de Lérins

(

Auto) consécration comme évêque cathare

Opération chirurgicale

1962-1965 Concile œcuménique Vatican II

1964-1969

Echec du retour du fils prodigue à l’Eglise

Mgr GOUET et Mgr Jean RODHAIN

Mgr Émile GUERRY victime de GENGENBACH

1966

28 septembre 1966 – Mort d’André BRETON

GENGENBACH : « je suis le dernier des surréalistes »

Vente forcée du « Mas de Cabardès »

VI 1968-1979 L’oubli, la maladie et l’ultime retour (?) à Dieu

Hauterive

L’abbé Henri BISSONNIER

1970

Postface – Historique de Judas ou le vampire surréaliste

1972

1976

Giancarlo DALLESPEDALE

Echec de la publication de La Messe d’Or

Confession

Radioscopie de Jacques CHANCEL

1977

Novembre 1977, GENGENBACH subit une attaque de paralysie

1978

Amputation

Supplique à la Vierge Marie

Retour à Dieu ?

Visite de Roland CONILLEAU à Hauterive

8 décembre 1978, GENGENBACH est amputé de la jambe droite

1979

Cession de ses archives à la bibliothèque de Saint-Dié

31 Août 1979 Décès d’Elyane

11 novembre : visite d’Albert RONSIN à Ernest GENGENBACH

Les éditions RIJOIS ne répondent pas

Décès d’Ernest GENGENBACH 16 Décembre 1979

Lettre de condoléances d’Albert RONSIN à Jean GENGENBACH

Cimetière des Gosnards

1980-1982

Autodafé des archives par l’abbé Jean GENGENBACH

Hommage à Roland CONILLEAU et Albert RONSIN

Table des sigles

Œuvres de GENGENBACH

Œuvres sur GENGENBACH

Œuvres sur le surréalisme

Bibliothèques

Sommaire du Tome II

III – 1939-1945 La drôle de guerre de GENGENBACH

Quelle fut l’attitude de GENGENBACH durant la bataille de France puis durant l’occupation ? L’auteur est peu disert sur cette période. Résumons, GENGENBACH fut incorporé, ne participa à aucun combat, resta hostile au général de Gaulle, indifférent à la persécution des Juifs, exécra le communisme, ne fut pas Résistant, s’accommoda fort bien de l’Occupation, vécut à Paris d’expédients sans que son passé surréaliste le rende suspect. Qu’il n’ait été que passif et sympathisant au maréchal PÉTAIN est banal, tant d’autres intellectuels amis, comme Jean COCTEAU, ou futurs révolutionnaires comme Jean-Paul SARTRE s’acclimatèrent parfaitement de la botte nazie, ce qui heurte c’est qu’il ait, par une rédaction volontairement ambigüe, fait accroire à un lecteur hâtif qu’il fut résistant, écrivant « Lorsque j’essaie de revivre par le souvenir toute cette époque qui va de la défaite française en 1940 à la défaite allemande en 1945, je sens mon cerveau envahi par une brume. Et je pense à ce que répondait je ne sais plus quel homme célèbre du XVIIIe siècle à qui l’on demandait ce qu’il avait fait depuis la Révolution Française de 1789 jusqu’à la Restauration Royale de 1815 « J’ai vécu » répondait-il. Je pourrais faire la même réponse si l’on me questionnait… LEG-GIANCARLO DALLESPEDALE n° 27 », une brume bien pratique pour cacher au mieux un attentisme et une adhésion à la pensée d’un DRIEU LA ROCHELLE « J’avoue que personnellement de 1941 à 1943 je vécus dans cette illusion chimérique d’un HITLER, héros wagnérien d’une époque parsifalienne LEG-GIANCARLO DALLESPEDALE n° 27». Des rafles de Juifs, des exécutions d’otages, des exaxctions nazies, pas une ligne, pas une évocation dans toute son œuvre écrite, livres, correspondances, inédits ; GENGENBACH prendra des accents apocalyptiques pour parler de la bombe atomique et de la menace des « slavo-marxiste » et autre « arabes » sur l’Occident Chrétien, des malheurs des Français, rien, clamera l’injustice de sa misère, un égotisme tranquile qui sidère.

Incorporation

On se souvient, en 1937, de la comédie dont il s’était fait gloire qui lui avait de se faire réformer. Il donne maintenant deux versions de son incorporation, celle glorieuse « Je savais que ce certificat de réforme était un certificat de complaisance, à partir d’un état de dépression mélancolique que j’avais volontairement exagéré… Je me rendis au Bureau de recrutement du Ministère de la Guerre pour faire réviser ce certificat de réforme… LEG-GD n° 27 » et celle factuelle, plus vraie « A la suite d’une contre-visite militaire où on le reconnut bon, cette fois pour le service militaire, il fut affecté à un régiment d’infanterie alpine LED p.139-140 ». Alphonse BOUDARD dément cette version, écrivant : « Qu’avait-il fait pendant la guerre ? Inutile de dire qu’on l’avait réformé, l’armée française avait suffisamment de motifs de partir en quenouille… se faire dérouiller par les Fritz, sans y ajouter l’Abbé GENGENBACH 1».

La bataille de France

« Comme tous les fils de soldats tués à la précédente guerre de 19141918, il n’avait pas été envoyé en zone dangereuse. … De la guerre, il n’avait rien vu. LED p.139-140 » « Après plusieurs semaines on me fit savoir que j’étais affecté à un bataillon de chasseurs alpins à Romans (département de la Drôme) … J’aurais dû au bout de plusieurs mois partir au front comme mes camarades mais comme j’étais fils d’un officier, mort à la guerre de 1914-1918 je bénéficiai de la loi et fus muté dans un régiment d’aviation à Mérignac près de Bordeaux… Comme on le sait, les événements se précipitèrent… L’Allemagne après avoir signé le pacte de non-agression germano-soviétique qui lui permettait d’envahir la Belgique et la France bousculait tous les plans et calculs des Etats-majors… Et, au début de l’été, l’Armistice était signé par le Maréchal PÉTAIN. / Avec plusieurs de mes camarades, je quittai, en hâte, le camp d’aviation de Mérignac, avant que les troupes allemandes ne l’occupent… et je pus arriver à Arcachon près de l’Atlantique où madame de REIBROS qui avait fondé la maison d’alimentation Pro-France possédait une villa… LEG-GIANCARLO DALLESPEDALE n° 27 »

Démobilisation

Après sa démobilisation, GENGENBACH vécut d’abord en zone libre, ayant trouvé un havre à Arcachon « Elle [madame de REIBROS] m’offrit de suite l’hospitalité et je restais près d’un an dans cette région enchanteresse où d’immenses dunes et des pinèdes se dressent face à l’Atlantique… J’habitais au Mouleau, petit village de pêcheurs d’huitres… Les plages étaient pleines de jolies baigneuses… Des officiers allemand appartenant à une caste aristocratique, vêtus avec une élégance raffinée et parlant très bien le français paradaient dans les environs de la ville d’Arcachon. On se sentait loin de la guerre. LEG-GIANCARLO DALLESPEDALE n° 27 » Il semble avoir également séjourné dans le Limousin LEDp.142.

Retour à Paris

Dés fin 1940, début 1941, GENGENBACH revient à Paris « Pour moi, après un an de séjour dans la région d’Arcachon, je décidais de remonter à Paris pour prendre la température psychologique et spirituelle de la capitale… Je savais qu’avant la guerre, des rencontres culturelles avaient été organisées entre intellectuels français et intellectuels allemands. » En 1943 Madame de REIBROS vend sa maison d’Arcachon pour financer son projet de revue Cahiers d’Europe Chrétienne, projet qui selon lui faute d’accord des autorités n’aboutit pas avant qu’après avoir obtenu à la Libération une autorisation il liquide le capital non consommé et bu pendant l’occupation.

Hitler, « un mystique »

Dans la lettre adressée le 20 avril 1977 à Giancarlo DALLESPALE, il se livre à une longue dissertation sur HITLER, des propos qu’il n’avait pas osé publier dans ses livres et que, lâchement, il prête à des intellectuels, on lit assez facilement l’inspiration de DRIEU LA ROCHELLE dans ce qui suit : « Je savais qu’avant la guerre, des rencontres culturelles avaient été organisées entre intellectuels français et intellectuels allemands. Pour tous ces gens HITLER était bien autre chose qu’un politicien démagogue, animé d’une soif hystérique de conquête et de revanche au service du pangermanisme. C’était un mystique, un initié ésotérique, une sorte de Chevalier du Graal, chargé de délivrer l’Europe Chrétienne du Monstre, du Dragon apocalyptique Marxiste Communiste… Et il est fort possible, qu’au départ, HITLER, qui avait subéi l’influence d’un abbé cistercien, aît été cet homme… [Nous insérons ici le tableau de propagande de LANZINGER cf. notre Iconographie antisémite de Judas Iscariot, t. III]. Mais il devait par la suite, subir l’influence maléfique, celle du philosophe ROSENBERG, théoricien du racisme et adversaire acharné du Judéo-Christianisme . HITLER était un personnage trouble dans son âme et beaucoup s’y sont laissés tromper ; le Pape Pie XII, en particulier, qui était à cette époque Nonce du Vatican en Allemagne… Ils ont vu en HITLER l’homme providentiel qui allait reconstituer le St Empire Romain Germanique. Tous ces idéalistes chimériques pensaient qu’on allat revivre l’époque formidable de la Chrétienté Médiévale, telle que l’a décrite le grand écrivain NOVALIS… ou les génies du romantisme allemand. / J’avoue que personnellement de 1941 à 1943 je vécus dans cette illusion chimérique d’un HITLER, héros wagnérien d’une époque parsifalienne… Je savais qu’il s’était intéressé passionnément pour les recherches d’Otto RAHN 2 le célébre [Ici insérés 3 pages de NOVALIS, Europe et la Chrétienté, reproduites de l’exemplaire des Cahiers du Sud consacré au ‘Romantisme allemand’ : « Les temps ont existé, pleins de splendeurs et de magnificence, où l’Europe était une terre chrétienne, où n’étaient habitées que par une Chrétienté ces contrées façonnées à l’image de l’homme, alors qu’un puissant intérêt commun liait entre elles les provinces les plus éloignées de ce vaste royaume spirituel. … 3»] historien du Catharisme, cde pèlerin de Montségur qui écrivit l’ouvrage La Croisade contre le Graal. Je croyais que dans l’Europe pourrie, contaminée par l’Argent et le Matérialisme, un nouvel ordre des Templiers ou des Chevaliers Teutoniques, au service d’une idéologie aryenne et d’une mystique indo-européenne, allait se révéler… LEG-GD n° 27 ».

Figure 2 Hubert Lanzinger Der Bannerträger, 1934

Charles de Gaulle

GENGENBACH, antigaulliste avant-guerre, ne devint pas gaulliste pendant la guerre puis lui voua de la haine pour avoir ruiné sa mission diplomatique vers Ferhat ABBAS par la ‘trahison’ des Accords d’Evian tout en inventant un opportun passé de Résistante à son épouse LEG-PECH.

L’Armée de Leclerc

GENGENBACH, au détour d’une lettre appelant au secours BRETON, juste rentré d’Amérique, se targue d’avoir rejoint l’Armée Leclerc : « On a pillé mon appartement pendant que j’étais à l’Armée Leclerc et on m’a tout pris, bibliothèque, vêtements, souvenirs, meubles, linge, tout tout … 4LEG-AB 14juin 1946 ». C’est, à notre connaissance, le seul écrit où GENGENBACH prétend avoir pris part aux combats de Libération ; selon nous, une vacherie à l’égard de BRETON réfugié dans le havre américain alors que lui resta exposé à une toute fictive menace car la Gestapo ignorait probablement jusqu’à sa fréquentation du groupe surréaliste marxisé en 1935, mensonge éhonté, aussi, pour la bonne et simple raison que, s’il avait vraiment eu ce courage, il n’aurait eu de cesse de s’en revendiquer par la suite or jamais, et notamment quand il fut l’objet de suspicions des habitants de La Tourette-Cabardès il ne prétendit cela. Quant au prétendu pillage de ses archives, la réalité est toute autre : angoissé à la perspective d’être inquiété comme ex-écrivain surréaliste, et/ou parce que chassé de son logement pour non règlement du loyer, il avait confié ses affaires personnelles, lors de son incorporation, à sa mère qui, vivant dans les Vosges, en zone occupée, craignant une perquisition, les détruisit, version moins glorieuse que le mensonge rapporté à BRETON, lequel classa la lettre et n’y répondit pas.

1 BOUDARD Alphonse, L’éducation d’Alphonse, Bernard GRASSET, 1987, pages 95-103

2 HIMMLER offrit l’ouvrage d’Otto RAHN, La cour de Lucifer à HITLER pour son anniversaire 1937. RAHN publia Croisade contre le Graal (1933) suite à ses recherches sur les Cathares, tous sujets passionnants pour EG… WIKIPEDIA https://fr.wikipedia.org/wiki/Otto_Rahn

3 Nous ne citons ici que le début du texte de NOVALIS. A lire in extenso sur http://www.biblisem.net/meditat/novaeuro.htm

4 AAAB https://www.andrebreton.fr/fr/work/56600101000945

1939-1943

Madame de REIBROS

Madame de REIBROS 5 [la particule semble une invention littéraire, comme la sienne propre, cette bienfaitrice publiant des publicités sous le nom roturier de REIBROS] « sainte femme fondé de pouvoir d’une entreprise pro-familiale, mi-commerciale, mi-humanitaire … d’entraide aux classe moyennes Pro-France » lui procura « un emploi stable et lucratif » qui lui permet de jouer « rue Washington, une chambre dans un très bel hôtel particulier transformé en meublés LED p. 133-134 ». L’entreprise dut cesser ses activités dès l’occupation allemande. GENGENBACH est mobilisé. Cette

bonne samaritaine semble avoir été une nouvelle Catherine HÉRISÉ, ou une future Elyane BLOC, car elle l’emploie puis l’héberge à sa démobilisation dans « un château de Mayenne, transformé en clinique, où madame de REIBROS est infirmière », lui procure un capital, ainsi que l’ex-secrétaire du Président de l’Académie GONCOURT [qu’il ne nomme pas ; J.H. ROSNY aîné fut Président de l’Académie de 1926 à 1940 et le secrétaire en question doit être Robert de KALINOWSKI, plus connu sous le nom de plume de Robert BOREL-ROSNY, petit-fils de l’auteur 6] pour lancer une maison d’édition, n’hésitant pas à vendre pour cela sa maison d’Arcachon ; la maison d’édition qui « devait porter la même dénomination et posséder le même siège social que l’ancienne société d’alimentation Pro-France dont l’activité avait cessé avec la guerre » ne verra pas le jour après deux ans faute d’obtenir l’autorisation d’éditer de Vichy [Relevons ici une incohérence manifeste : si la supposée maison d’édition se plaçait sous l’égide de Pro-France son siège social étant en zone occupée, à Paris même, ce sont les autorités allemandes et non l’Etat de Vichy qui était compétent sauf à ce que GENGENBACH ait eu le projet d’une maison d’édition active sur la seule zone libre ce qu’il ne dit pas. Le paragraphe sur les exécrations antisémites, anti marxistes et antireligieuses du fonctionnaire de Vichy, non nommé, d’une administration non désignée, sont une manifeste invention] compte tenu de son titre Cahiers d’Europe Chrétienne. La maison d’édition reste donc en sommeil et malgré l’obtention de la Préfecture de Police de Paris de l’autorisation de lancer sa maison d’édition que lui vaut ses faits de Résistance et sur l’intervention du chanoine LANCRENON, curé de Saint-Germain-des-Prés, [nous reviendrons sur la drôle de guerre du soldat GENGENBACH] il « vend sa licence d’éditeur à un riche éditeur de cinéma LED p.142 ». Cette histoire de maison d’édition créée sous raison sociale d’une société d’alimentation et revendue à un éditeur de cinéma ne tient guère la route mais, à son habitude, l’auteur, par l’absence de noms, de faits, de dates, crée un flou propice à une partielle ou totale fiction littéraire. On retrouvera encore GENGENBACH hébergé dans le Limousin par madame de REIBROS au moment du lancement des bombes nucléaires sur Hiroshima (6 août 1945) puis sa mécène disparait du théâtre gengenbachien sans qu’il ne commente. Ce n’est pas la première mécène qui se lasse de l’auteur après avoir dilapidé tout ou partie de sa fortune pour lui. Cette liaison aura duré, semble-t-il, de 1939 à 1945.

Il donnera une version différente des largesses de la dame dans une lettre à GIANCARLO DALLESPEDALE LEG-GD n°27 « En 1938, j’étais devenu fondé de pouvoir d’une entreprise d’alimentation dans le quartier de St Germain des Près. … Et, au début de l’été, l’Armistice était signé par le Maréchal PÉTAIN. / Avec plusieurs de mes camarades, je quittai, en hâte, le camp d’aviation de Mérignac, avant que les troupes allemandes ne l’occupent… et je pus arriver à Arcachon près de l’Atlantique où madame de REIBROS qui avait fondé la maison d’alimentation Pro-France possédait une villa… Elle m’offrit de suite l’hospitalité et je restais près d’un an dans cette région enchanteresse où d’immenses dunes et des pinèdes se dressent face à l’Atlantique… J’habitais au Mouleau, petit village de pêcheurs d’huitres… Les plages étaient pleines de jolies baigneuses… Des officiers allemand appartenant à une caste aristocratique, vêtus avec une élégance raffinée et parlant très bien le français paradaient dans les environs de la ville d’Arcachon. On se sentait loin de la guerre. … Pour moi, après un an de séjour dans la région d’Arcachon, je décidais de remonter à Paris pour prendre la température psychogique et spirituelle de la capitale… Je savais qu’avant la guerre, des rencontres culturelles avaient été organisées entre intellectuels français et intellectuels allemands. / Madame de REIBROS et l’ex secrétaire du Président de l’Académie Goncourt voulurent m’aider à lancer une entreprise d’édition au service des doctrines de Richard CONDENHOVE-KALERGI 7, promoteur des Etats Unis d’Europe. Cela se passait en 1943. / Mais, je dus vite déchanter. Ce n’était pas une Chrétienté médiévale qu’HITLER voulait ressusciter… LEG-GD n°27 ».

Les deux versions s’accordent sur le mécénat, la probable liaison amoureuse de GENGENBACH avec madame de REIBROS et sur la dilapidation du capital d’une maison d’édition. Comme Catherine HÉRISÉ hier et Elyane BLOC demain, GENGENBACH a ébloui ces dames par son prestige d’écrivain et la perspective de s’associer à des œuvres de haute portée morale. Trois détournements amoureux de fonds pour des maisons d’édition avortées, encore que nous gardons un doute pour le second, car, lorsque GENGENBACH rencontrera Lydie BASTIEN il est à la tête d’une revue. Aurait-il gardé une partie du capital ? Nous mènerons l’enquête.

5 Malgré nos recherches nous n’avons retrouvé trace ni de madame de REIBROS ni de l’entreprise Pro-France or une publicité parue dans Le Figaro du 13 février 1933 : « N'hésitez plus, il n'y a vraiment que chez Reibros où vous trouverez la lingerie garantie indémaillable, les bas mat, de ravissants chapeaux, à des prix inconnus à ce jour. 11 rue Lafayette » https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k297237s/f2.itemPublicité identique dans Samedi N°05 ( 05 février 1938 )

https://www.bibliotheque-numeriqueaiu.org/viewer/17228/?page=2&o=ocr#page=2&viewer=picture&o=ocr&n=0&q=

Une citation dans une biographie de Brigitte BARDOT La vraie Brigitte Bardot (1984) par Henri de STADELHOFEN situe sous ce nom une boutique de layettes au 11 rue de la Boétie. https://excerpts.numiloGENGENBACHcom/books/9782307143758.pdf p.13

6 Merci, pour cette information, à Fabrice MUNDZIK animateur du blog http://jhrosny.overbloGENGENBACHcom/contact

7 WIKIPEDIA https://fr.wikipedia.org/wiki/Richard_Coudenhove-Kalergi

Emmanuel LANCRENON, Curé de Saint-Germain-des- Près

Figure 3 Emmanuel LANCRENON

Disons ici un mot de la belle figure d’Emmanuel LANCRENON (1886-1961), un homme d’un grand courage qui paya la protection apportée à des prisonniers évadés par un séjour dans les geôles allemandes en 1941 puis à nouveau deux fois pour propagande au sein du sanatorium pour le clergé de Thorenc, institution dont il avait été le fondateur. Membre du Comité de Libération de Paris en août 1944, il fut salué en pays (tous deux avaient des attaches à Colombey-les-Deux-Eglises)8 par le général de Gaulle. Il fut l’ami du pape Jean XXIII. 9

Le chapitre que consacre GENGENBACH à ce courageux prêtre est fort ambigu. Après avoir narré la censure de son projet de maison d’édition des Cahiers d’Europe Chrétienne par l’administration de Vichy, GENGENBACH écrit : « GENGENBACH crut ne pas devoir insister. / Par la suite, avec l’appui du fils du général de MAUDHUY 10 et la complicité d’infirmières chargées du vestiaire de la Croix-Rouge, il aida à cacher des Alsaciens et des Lorrains qui s’étaient échappés pour ne pas être enrôlés dans la Wehrmacht, leur procurant de faux papiers, des vêtements et des contrats de travail… En remerciements de ces services rendus, le chanoine LANCRENON, curé de Saint-Germain-des- Près, héros de la Résistance, obtint pour lui, après la Libération, de la Préfecture de Police, l’autorisation de lancer sa maison d’édition. Mais son capital de départ ayant été entamé par cette longue attente, GENGENBACH n’avait plus les reins assez solides pour faire paraître des livres, en s’approvisionnant au marché noir du papier… Il dut donc abandonner son projet, renoncer à ses ambitions et vendre sa licence à un riche producteur de cinéma… LED p.141-142 ».

Nous avons expliqué précédemment pourquoi cette histoire de licence d’éditeur revendue à un producteur de cinéma nous semble une affabulation pour enjoliver la réalité à savoir que GENGENBACH mangea et but le capital obtenu, détourné, de sa maitresse madame de REIBROS. Nous soulignerons ici un autre détournement, celui-ci encore plus coupable, celui des faits de guerre du Père LANCRENON 11 car un lecteur rapide peut comprendre que le « il » initial est GENGENBACH et non le courageux curé, confusion entretenue par la formule « En remerciements de ces services rendus ». Nous ne croyons pas à une imprécision de plume, car si GENGENBACH n’est pas un exemple de rigueur, mélangeant intentionnellement les dates, les personnages, procédant par boucles et itérations, ici, GENGENBACH égare volontairement le lecteur et se targue honteusement d’actes de Résistance alors qu’il a été passif face au nazisme.

Ce bon prêtre apparait également, non nommé, dans un passage édifiant d’Espis, nouveau Lourdes ? (1949) alors que GENGENBACH « Après une SEMAINE SAINTE vécue dans la plus noire déréliction et dans une errance famélique, après une sinistre journée de Pâques où je fus en proie aux idées les plus lugubres, comme jamais je ne l’avais été jusqu’ici, j’assistais à l’église Saint-Germain-des- Près, à la messe matinale célébrée par le curé de la paroisse… Il n’y avait presque personne à cette messe, comme si tous les chrétiens repus des liesses de la fête, gavés d’alléluias, d’hymnes triomphales, d’agneaux pascals, faisaient religieusement la sieste… [Suit deux belles pages de recueillement de l’auteur] J’ouvris machinalement mon paroissien… L’Introït commençait par ces mots : « Le Seigneur vous a introduit dans la terre où coulent le lait et le miel ». Le lait et le miel !... Au propre comme au figuré, j’en avais la fringale… … La messe touchait à sa fin. Une immense angoisse m’envahissait, je songeais au bonheur de ce curé qui, après avoir célébré cette messe et accompli le plus grand acte de magie consécratoire permis à un mortel, allait réintégrer son confortable presbytère couvert de lierre… et je comparais son sort au mien. J’aurais pu, j’aurais dû, moi aussi être prêtre, me pencher sur une hostie diaphane et prononcer les mots terribles par lesquels s’opère la merveilleuse alchimie de la transsubstantiation eucharistique. Et j’étais là, en ce matin du lundi de Pâques, expulsé de mon hôtel, jeté à la rue, sans gîte, enviant « les renards qui ont une tanière et les oiseaux qui ont un nid… » condamné à un des sorts les plus humiliants. … ENL p.79-86 ».

C’est le chanoine LANCRENON qui recommanda en 1949 GENGENBACH à une dame charitable, une « Bonne samaritaine LEG/PV 1951/1 », Elyane BLOC, sa future femme, et non ce qu’écrit la version roman-photo de Espis, nouveau Lourdes ? (1949) ENL p.86-88 mais c’est ce qu’il déclare à son oncle Prosper VIARD dans un courrier de 1951 (où il tente de lui extorquer un prêt d’argent), que GENGENBACH ne le nomme pas et pose au pieux chrétien recevant l’illumination de son rachat lors de la messe servie par le curé LANCRENON est un exemple parmi tant des manipulations romanesques de l’auteur.

8 Archives du Comité d’histoire de la Seconde guerre mondiale https://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/media/FRAN_IR_053870/cu00diqa252--1tbywzlt7v878/FRAN_0086_026516_L

9 Biographie détaillée sur le blog de la famille LANCRENON http://lancrenon.fr/10-enfants-_-emmanuel

10 Louis Ernest de MAUD'HUY (1857-1921), lorrain, héros de la guerre de 1914-1918

11 Archives du Comité d’histoire de la Seconde guerre mondiale https://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/media/FRAN_IR_053870/cu00diqa252-1tbywzlt7v878/FRAN_0086_026516_L

1943

Richard COUDENHOVE-KALERGI

Figure 4 Richard COUDENHOVE-KALERGI en 1930

L’enthousiasme de GENGENBACH pour la pensée de Richard COUDENHOVE- KALERGI (18941972) l’un des fondateurs de l’idée européenne 12 n’est pas feint, Son Histoire du mouvement paneuropéen de 1922 à 1962 (1962) figure dans sa bibliothèque BIBRETON. Il ne prétend jamais l’avoir rencontré. Son projet de Cahiers d’Europe Chrétienne visait à promouvoir cette vision, celle d’une Europe chrétienne, une idéologie proche de celle du MRP français et de la Démocratie chrétienne italienne, mais indifférente au sort fait aux Juifs. GENGENBACH dit avoir réussi à intéresser « plusieurs officiers allemands, ayant un nom à consonnance française, descendants de protestants de France … foncièrement antinazis LEDp.140 ». Sa conviction était que « ce n’était pas le racisme hitlérien, se réclamant d’une idéologue païenne, qui construirait l’Europe mais une collaboration étroite entre catholiques, protestants et orthodoxes réconciliés LEDp.140 ». Le projet ne vit pas le jour, sans surprise, car la Gestapo saisit les archives de l’Union paneuropéenne à Vienne en 1939 lors de l’Anschluss tandis que Richard COUDENHOVE-KALERGI dut s’exiler aux Etats-Unis d’Amérique.

S’agissant du projet de revue Cahiers d’Europe Chrétienne, s’agit-il d’un vrai projet ou, encore, d’une invention hagiographique de l’auteur ? force est de constater qu’il n’existe aucune preuve matérielle, aucun témoignage de tiers sur la véracité de ce projet, tandis que les circonstances abracadabrantesques du projet de maison d’édition nous rendent très dubitatifs. Que GENGENBACH se soit embarqué dans le projet fort risqué de promouvoir la pensée dans la France occupée d’une homme politique exilé par la menace nazie, lui si prudent, dont on ne connait aucun fait de Résistance, nous semble fort douteux, une tartatinade. Selon nous cette digression sur COUDENHOVE-KALERGI n’est que la revendication de la pensée de l’illustre penseur politique pour promouvoir sa vision d’une Europe chrétienne.

12 European society COUDENHOVE-KALERGI https://european-society-coudenhove-kalergi.org/

IV - 1945 – 1950 L’échec parisien

Une saison en enfer

L’immédiat après-guerre est pour GENGENBACH une période difficile ; homme de lettres oublié, sans un sou vaillant, faute d’une riche maîtresse, il vit d’expédients, tire la porte des hommes d’église (R.P. RIQUET) pour acheter son repas par des promesses non tenus de se réformer, tente de se rabibocher avec BRETON de retour des Amériques, fricote un peu avec les Surréalistes. Il tombe dans la dépression et aussi l’alcool jusqu’au délires éthyliques « il frôlait parfois la cabane, le cabanon carrément, pour ses excentricités multiples BOU1 ». Pour l’ancienne gloire de La Coupole, la géographie des cafés littéraires a changé, Montparnasse est détrôné par Saint-Germain-des-Prés, « les existentialistes du Café de Flore, les surréalistes des Deux-Magots ENL p.50», ce sont plusieurs ‘Saisons en enfer’ pour pasticher RIMBAUD qu’admiraient tant ses anciens coreligionnaires surréalistes, marquées par une déréliction maniaco-dépressive, alternant retraites monastiques, prisons et internements en centres psychiatriques. La publication de Judas, le Vampire surréaliste le fait revivre un instant sur la scène intellectuelle parisienne, surtout à ses propres yeux, il s’affiche avec la sulfureuse Lydie BASTIEN mais cette liaison qui ne dure que quelques mois lui vaut la une de quelques journaux à potins mondains. Il négocie ce regain d’intérêt pour sa personne en 1948 en prenant le parti de ruiner une vieille fille riche, Elyane BLOC, pour le mirage d’une gloire catholique, grâce à la publication d’un livre Espis, nouveau Lourdes ? soutenant la reconnaissance du caractère miraculeux des apparitions mariales s’y produisant. Las ! l’Eglise rejette le jeune Gilles BONHOURS à l’anonymat, condamnant le coûteux tirage à compte d’auteur de la brochure au pilon. Ernest régularise sa situation en épousant Elyane ; tous deux, désargentés n’ont plus les moyens de vivre à Paris et vont s’enterrer au « Mas de La Tourette », une simple maison dans un petit village de la Montagne noire, sublime de beauté mais ils vont par leur morgue de hobereaux créer un climat de Clochemerle. La page parisienne de la vie de clôt en 1950, le diable vieilli, marié, se retirera alors en pays cathare pour une vingtaine d’années.

La chronologie de cette période est parfois incertaine compte tenu des silences, des omissions, de l’imprécision volontaire de l’auteur sur les dates. Voilà ce que nous avons pu reconstituer au mieux.

Octobre 1945 – Obsèques de Robert DESNOS

GENGENBACH titre La mort de DESNOS le chapitre 1er de la IVe partie de L’Expérience Démoniaque citant le journal tchèque Sovobne Noviny du 31 juillet 1935 qui raconte la reconnaissance de DESNOS mourant en un Revier à Térézin par l’étudiant en médecine STUNA un dernier poème dans sa poche :

J’ai rêvé tellement fort de toi / J’ai tellement marché, tellement parlé / Tellement aimé ton ombre / Qu’il ne me reste plus rien de toi. / Il me reste d’être l’ombre entre les ombres / L’ombre qui viendra et reviendra dans la vie ensoleillée.

DESNOS pour qui il avait préparé une oraison funèbre qu’il n’eut pas le droit de prononcer selon sa relation mais fut-il même invité aux obsèques, ce n’est pas même certain.

Abbaye de Sainte-Marie-de-la-Pierre-qui-Vire

Figure 5 Abbaye de Sainte-Marie-de-la-Pierre-qui-Vire

Mort au monde

« Après les funérailles de Robert DESNOS à Saint-Germain-des-Prés GENGENBACH se réfugia dans la solitude forestière érémétique des Bénédictins de la Pierre-qui-Virre où il termina sa lettre à BERNANOS sur la bombe atomique ENL p.61» ajoutant « Je demanderai aux moines de m’exorciser car je suis de plus en plus hanté par Satan LED p.151».

SURREEL ET MERVEILLEUX CHRETIEN

Tel est le titre d’une « étude » de trois pages où GENGENBACH mêle un fois de plus des « cauchemars noirs » de « moines maudits, vierges folles, démons révolutionnaires de la Révolution espagnole, incubes, succubes, lesbiennes … et dialogue édifiant avec l’Abbé du monastère, évoquant Mgr BEAUSSARD, qui lui aurait déclaré « Vous avez été l’objet de terribles assauts diaboliques mais je sais aussi que vous avez été favorisé de grandes prévenances divines » certificat douteux car venant d’ un prélat obligé de démissionner à la Libération, prélat dont il se prévaut à nouveau dans sa correspondance avec Mgr GUERRIN… suivi de considérations sur le déclin de l’Eglise qui n’est plus thaumaturge. Suivent deux pages fort saint-sulpiciennes exaltant la beauté mystique de la messe de minuit « dans la solitude sauvage d’une vieille forêt celtique … Christ, Verbe Incarné, Parole qui est Lumière et Vie, je T’en supplie, reviens ! LED p.152-160 ». N’est pas Jean de la Croix qui veut et il y a loin ici de la Nosce obscura (1578) 13.

GENGENBACH, un hôte importun

Il est possible que GENGENBACH tint des propos approchants aux moines, troublant leur quiet recueillement, à lire le F. Claude JEAN-NESMY 14 qui fait, en 1976, une version moins édifiante, celle d’un homme venu se restaurer, plus physiquement que spirituellement et dont les moines

refusèrent qu’il revînt en 1966 : « J’ai effet connu E. de Gengenbach qui est venu dans notre abbaye comme dans beaucoup d’autres maisons religieuses, pour y être hébergé quelques jours. Je dois vous dire que, personnellement, j’en ai tiré la conclusion 1°) que le talent de cet écrivain était assez pauvre 2°) qu’il se servait de sa conversion comme d’un chantage moral : « J’ai tout perdu pour me faire chrétien et maintenant les Chrétiens ne veulent pas me donner de quoi vivre et menaçant de revenir au surréalisme si on ne voulait pas l’entretenir. Bref, un personnage assez suspect (quelle part de sincérité ?) et déplaisant. […] C’est mon avis personnel. Il se peut que je me trompe et qu’il ait été sincère. […] Mais j’ai en réalité peu connu GENGENBACH, il y a longtemps (avant 1950) avec échange de lettres en 1965-1966 où nous avons refusé de le recevoir une nouvelle fois pour les raisons susdites LGD °14 ». Ayant communiqué au chercheur un dossier d’archives sur GENGENBACH, le F. Claude JEAN-NESMY réitère par deux autres courriers en décembre ses plus extrêmes réserves sur la sincérité du personnage qu’il traite, avec des mots chrétiens de pique-assiette opportuniste et envisage, par pure charité chrétienne, une enfin sincère conversion du libertin, mais qui serait miraculeuse : « Je n’ai malheureusement conservé aucun document de son premier séjour à l’abbaye en 1946. Il y était arrivé démuni de tout (je me rappelle qu’il n’avait pas même de quoi payer ses timbres). J’ai alors fait de mon mieux pour qu’il profite au maximum de ce séjour. / Très vite j’ai acquis la conviction qu’il se servait de sa conversion pour vivre aux crochets des prêtres et religieux qu’il apitoyait, jouant au besoin d’une espèce de chantage moral : j’ai tout perdu pour le Christ et voilà que les chrétiens ne veulent pas m’aider, la liste est déjà longue des personnalités qu’il avait ainsi sollicitées. Mais, renseignement pris, ces protecteurs avaient vite compris, et ne voulaient plus être la dupe de ce chantage (que je veux bien croire inconscient de la part de son auteur). / Il est vrai aussi que de ce surréalisme dont il se targuait, et que je continue à croire un mouvement important, E. de Gengenbach me semble être un représentant tout à fait secondaire et même un peu suspect (je me demande s’il n’a pas abusé du surréalisme pour y trouver des protecteurs comme de sa conversion pour s’en prévaloir auprès des chrétiens, jouant alternativement des deux : se faisant valoir comme ex-surréaliste auprès des prêtres et comme renégat auprès des surréalistes…). / Cela explique, pourquoi, quand il a voulu revenir à l’abbaye en 1966, d’accord avec le P. Abbé, j’ai trouvé des prétextes pour ne pas l’y recevoir. Ce dont il a été évidemment blessé, comme vous le montrera le courrier d’alors. Evidemment, il se croyait chargé de mission par Mgr HUYGUE. Mais à nos yeux, ce n’était qu’un évêque de plus qui se faisait des illusions sur lui. / Bien sûr je peux me tromper, et le souhaiterais presque, pour l’honneur de Gengenbach et de Dieu. Peut-être votre travail m’apportera des éléments qui me porteront à réformer mon [mot barré « clair » ?] jugement… / Quoi qu’il en soit, vous souhaitant bon travail, je compte que vous voudrez bien me renvoyer ce dossier dès que possible, par poste recommandée. Je vous demande de le faire depuis la France, car il y aurait trop de risque par la poste italienne, et vous comprendrez que j’ai besoin de ce dossier pour pouvoir répondre à toutes accusations éventuelles. C’est seulement pour vous rendre service que j’accepte de m’en séparer. / Merci donc pour ce retour du dossier, et bien uni à vous dans la joie de Noël. Avec tous mes vœux pour 1977. Votre LGD n°17 ».

« Cher M. l’Abbé, J’ai bien reçu le dossier Gengenbach début que votre lettre du 4. Mais c’était à la veille d’un départ en tournée de confréries en Hollande. Je vous ai toutefois porté le cahier de ‘Témoignages’ comportant mon article sur le Surréalisme. J’espère que vous l’avez bien reçu ? / Sur l’article de GUILLEMMINAULT 15 dans ‘La Bataille’, je ne saurais me prononcer. Il est très difficile de discerner dans les dires de GENGENBACH lui-même la part de vérité, de grossissement (chacun est naturellement porté à se croire très important, mais dans le cas présent, il me semble que ce n'est qu’un épigone, pour ne pas dire un parasite) et enfin d’affabulation proprement dire. Je serais précisément très intéressé que votre travail aide à voir plus clair dans la réalité objective, et je suppose qu’il faudra pour cela beaucoup d’esprit critique. / Quant à vos rapports avec Gengenbach, je souhaite qu’ils soient profitables à lui comme à vous. Si j’ai un conseil à vous donner, pourtant, ce serait d’être très prudent, et de pas lui donner de pièce écrite par laquelle il puisse se recommander de vous auprès d’autres, si tant est qu’il continue sa vie de quémandeur. Car après tout, depuis si longtemps que je n’ai plus de nouvelles, peut-être se serait-il réellement converti ? Tous les miracles sont possibles à la grâce de Dieu. » / J’espère que vous voudrez bien me tenir au courant, lors de la paru publication de votre ouvrage, et, vous remerciant à l’avance, je reste uni en Xt. LGD n°18 ».

13 STENER Christophe, L’Extase. Dictionnaire amoureux.

14 Claude JEAN-NESMY (1920-1994) est le nom de plume de Claude SURCHAMP, moine de l'Abbaye bénédictine Sainte-Marie de la Pierre-qui-Vire (depuis 1938/1939 ; ordonné prêtre en 1944) Fils d'Henri SURCHAMP, dit Jean NESMY, et frère de José, en religion Angelico, SURCHAMP https://data.bnf.fr/fr/11908719/claude_jean-nesmy/

15 Gilbert GEMMELINAULT (1914-1990) Rédacteur en chef de successivement de Paris Presse, de l’Aurore, du Crapouillot.

Madame de Saint Sulpice

A une question de BRETON en février 1928 lors d’une séance de l’atelier de Recherches sur la sexualité « GENBAGH est-il allé au bordel ? » GENGENBACH répondit, sans détours, « Oui » 16.

BOUDARD Alphonse, dans Madame… de Saint-Sulpice (Editions du Rocher, 1996), consacre un chapitre à la messe noire organisée par un personnage qui n’est autre que GENGENBACH, pour le plaisir d’une comtesse dans un bordel spécialisé dans la clientèle ecclésiastique. L’existence de cette maison de tolérance Chez Jeanne de la Grille au 15 rue Saint-Sulpice est avérée17. Nous n’avons pu identifier de spécialiste de BOUDARD capable de nous dire si le récit drolatique et dramatique, car il s’achève par le suicide de la jeune prostituée profanée durant la cérémonie satanique, relate un fait réel ou est pure fiction. Le lecteur trouvera en T II les pages concernées. Disons ici qu’elles ont, pour nous, malheureusement, un caractère de plausibilité. Les événements se déroulent dans l’immédiat après-guerre avant la fermeture des bobinards par la loi dite Marthe RICHARD (une ancienne prostituée fichée) de 1946.

16 Archives du Surréalisme, 4, Recherches sur la sexualité, Janvier 1928-août 1932, Préfacé et annoté par José PIERRE, Gallimard, NRF, 1990, p. 99

17 WILLEMIN Véronique, La Mondaine, Ed. Hoëbeke, p. 70

La bombe & BERNANOS

GENGENBACH reproduit, avec un visible orgueil, dans L’Expérience Démoniaque IV-3, sa correspondance avec Georges BERNANOS et François MAURIAC qui vaut, à nos yeux, seulement par les sombres propos, le déclinisme, de l’auteur de Sous le soleil de Satan et non les prétentieux bavardages de GENGENBACH ni les béni-oui-oui propos de MAURIAC.

Le chapitre s’ouvre par sa lettre du 1er septembre 1945 adressée à son « Cher Confrère », lettre ouverte, dont il prétend l’avoir commencé pendant la guerre. Dans cette missive, il lui fait la leçon lui reprochant de se disperser dans des « discussions d’intellectuels à propos de postures politiques » et s’enorgueillissant de vivre « au bord de la Loire, dans un site enchanteur à proximité du royal château d’Amboise où on goûte la douceur de vivre et on oublie la cruauté et la laideur des êtres », conspue, nouvel Isaïe, l’orgueil prométhéen des hommes car « la fin est proche » signant avec satisfaction, car toute sa vie GENGENBACH a aimé les belles adresses, « Chez le Comte TOLSTOÏ, La Violeterra, Amboise ». Georges BERNANOS l’honore d’une réponse fort ironique en date du 6 septembre « Je vous félicite d’être « au bord de la Loire… » mais je dois vous faire remarquer que je n’écris pas pour vous mais pour les pauvres diables qui ont besoin de comprendre que je me débats dans la même gadoue qu’eux-mêmes, et que j’essaie de m’en sortir, au risque de me crotter jusqu’aux yeux. … Le plus sûr témoignage de la conquête du monde par Satan, ce n’est pas la bombe atomique, c’est la lâcheté des gens d’Eglise en face d’une société qui, depuis des siècles, se fortifie contre Dieu, mais avec laquelle ils n’en sont pas moins toujours disposés à signer des concordats avantageux. / Quant à cette « bombe atomique », je pense qu’elle donne quelques chances à l’homme, seul en face des colossales organisations économiques qui ne méritent plus depuis longtemps, le nom de patries, et croyaient assurée à jamais leur domination sur la production. Qu’un homme seul avec un seul engin puisse faire trembler, demain peut-être, Londres, New-York ou Moscou, cela me semble, au contraire, assez consolant. On imagine un futur Jean-Bart fumant sa pipe devant le tonneau de poudre et disant aux hommes devenus d’irrémédiables salauds : « Un pas de plus et je fais sauter la planète ». » François MAURIAC refusa de descendre dans l’arène. GENGENBACH réitère son appel à BERNANOS « Cher Monsieur, Il faut absolument que nous parlions de cette grave question de la fin du monde… », invoque les mânes de O.V. LUBICZ de MILOSZ, réitère sa vision apocalyptique et tance ultimement son destinataire « Que Dieu, Cher Monsieur, vous accorde avec le sens eschatologique de l’Histoire, la Paix que le monde ne peut donner LED p. 161-170 ». BERNANOS ne répondra pas à cette exhortation.

Ce que n’avoue pas GENGENBACH c’est qu’il adressa sa lettre à BERNANOS sous le pseudonyme employé pour L’Expérience Démoniaque celui de « Frère Colomban de Jumièges » ce qui peut expliquer qu’il fut honoré d’une réponse de l’écrivain catholique 18.

Dans une lettre adressée 12 juin 1946 à André Breton à son retour d’Amérique, GENGENBACH écrit :

« J’ai fait paraître récemment une étude sur l’apocalypse, sous le titre « Lettres d’un ancien surréaliste à Georges BERNANOS. Mais une NADJA (numéro 2) [Lydie BASTIEN] est survenue dans ma vie qui après lecture de mes écrits a poussé chez moi un énorme éclat de rire en disant « je me fous éperdument de la désintégration de planète et de la fin du monde. Que voulez-vous que cela m’atteigne dans mon éternité, dans mon désir d’identification et de réintégration de mon unité ? Toutes vos considérations chrétiennes eschatologiques ne sont que des histoires de croquemitaine qui ne sauraient troubler une âme orientale comme la mienne. 19LEG-AB 12 juin 1946 »

18 Correspondance reproduite en page 574 (lettre 744) de Combat pour la liberté (Plon, 1971) de BERNANOS ainsi que dans le Bulletin de la Société des amis de BERNANOS n° 46, juin 1962 Merci pour des références à monsieur François ANGELIER auteur de Georges Bernanos : La colère et la grâce, Éditions du Seuil, 2021

19 AAAB https://www.andrebreton.fr/fr/work/56600101000943

1946

Ernest de GENGENBACH photographié par le « Studio Mondanités DORYS » en 194

Lydie BASTIEN Mars-Juin 1946

Figure 6 Collage, Lydie BASTIEN et prêtre à tête de cadavre

Ce collage FEG, daté des années 1970, montre Lydie BASTIEN reprise d’une photo parue dans Point de vue 17 avril 1947 que regarde un prêtre, en habit romain, dont le crâne de mort montre une belle femme lascive, une œuvre peut-être de M. GALLIENI, un montage érotico-mystique.

Figure 7 Caricature, Journal ?? du 3/07/1949 FEG 510 A

Les tourments infligés par Lydie BASTIEN sont le véritable mobile de la publication de L’Expérience Démoniaque en 1949 par GENGENBACH se posant en victime d’une femme luciférienne mais, en fait, ravi de publier cette liaison avec une femme qui fit la une des journaux aux moments des deux procès de René HARDY pour profiter de l’effet d’aubaine de l’intérêt de la presse du soir pour celle qui ne fut sa maîtresse que quelques mois mais dont il fait la réclame pour vendre son livre.

La narration de cette liaison ouvre la Ve partie de L’Expérience démoniaque et si c’est Régine FLORY qu’il prétend avoir mis en couverture de l’édition c’est celle de Lydie BASTIEN qui devrait figurer et Éric LOSFELD ne s’y est pas trompé en la mettant dans un face à face, qui n’eut pas lieu, avec le R.P. RIQUET dans son affiche promotionnelle dont la composition fut très probablement inspirée par GENGENBACH.

Figure 8 Affiche de la réédition de L'Expérience démoniaque par Éric LOSFELD, 1968, détail

Avant de lire la narration complaisante de cette liaison par l’ex surréaliste, ex écrivain chrétien, futur gardien de la flamme surréaliste et nouvel HUYSMANS… rappelons, factuellement, les éléments essentiels de la biographie de la sulfureuse Lydie BASTIEN, en résumant ici quelques éléments de l’ouvrage de référence de Pierre PÉAN.

« La diabolique de Caluire » 20

Lydie BASTIEN (1922-1994) est une aventurière rendue célèbre par l’accusation d’être celle qui permit l’arrestation par Klaus BARBIE de Jean MOULIN, et d’autres chef du Conseil National de la Résistance, sur les indiscrétions de son amant René HARDY (1911-1987) au sujet de la tenue de la réunion à Caluire du 21 juin 1943. Pierre PÉAN documente de manière convaincante la culpabilité de celle qu’il surnomme « La diabolique de Caluire » dans un ouvrage de 1999 largement corroboré depuis 21. Deux procès en 1947 (où elle soutint HARDY) puis en 1950 (où elle témoigna à charge contre lui) aboutirent tous deux à des jugements de relaxe. René HARDY n’avoua jamais, l’innocence de Lydie BASTIEN et/ou de René HARDY sont encore sujets de controverses.

En mars 1946 GENGENBACH tombera sous le charme de LYDIE BASTIEN, expérience qu’il qualifiera de « démoniaque » dans son ouvrage presqu’éponyme publié en 1949.

La haine de l’Église

LYDIE BASTIEN fut élevée par une marâtre qui, jalouse de l’adoration mutuelle entre elle et son père, la mit en pension dans l’école tenue par des sœurs de Notre-Dame-de-la-Couture (Le Mans) à l’adolescence pour ses études ; elle en garda toute sa vie la haine de la religion qualifiant dans un livre posthume [plutôt ses confessions d’avril 1947 à France-Soir] le couvent de « goulag » « comptant les années pour s’évader de ce théâtre de pacotille » traitant les sœurs de « dragons noirs ». Elle fera mine de vouloir écraser sur un passage piéton le futur cardinal LUSTINGER. Par réaction elle développe une passion pour l’occultisme, ce qu’elle appelle « la Réalité essentielle » et la conviction que sa beauté et son intelligence lui permettront de tracer elle-même son destin. Croyant à la réincarnation elle se prétend la réincarnation de Cléopâtre et un avatar de KALI (la déesse méchante hindoue) ; René HARDY la désignera en 1971 comme « une divinité infernale ».

Jean MOULIN

Consciente de sa beauté et persuadée de sa supériorité, elle fut au début de la guerre maîtresse de Harry STENGRITT adjoint de Klaus BARBIE. Elle séduisit René HARDY, alors chef du réseau de Résistance des chemins de fer, qui, fou amoureux d’elle, devint agent au service de la GESTAPO et livra les membres du Conseil National de la Résistance réunis à Caluire le 21 juin 1943. Son nom de pseudo-résistante était « Béatrice ». René HARDY et Lydie BASTIEN s’enfuirent à Alger après la fausse évasion de René HARDY. Elle y affiche ses infidélités. René HARDY en revint en août 1944, LYDIE BASTIEN en octobre. René HARDY est arrêté en décembre 1944 à son retour. LYDIE BASTIEN travailla activement à la préparation de la défense de René HARDY par Me GARÇON lors de son premier procès (1947), par intérêt, pour se protéger elle-même, en réussissant à ne pas se voir convoquée comme témoin à la barre, mais livra des témoignages à charge contre son mari dès 1947 22 des mémoires accusatrices à France-Soir lors de son second procès en 1950, suite au mensonge de René HARDY qu’il avait reconnu avoir fait en mars 1947 au lendemain de son premier acquittement, selon France Soir parce que « Lydie ne l’aimait plus ». De René HARDY, Pierre de BÉNOUVILLE écrivit : « Judas était parmi nous mais, avant de trahir, il était pareil à nous 23». Lors du second procès en 1950 LYDIE BASTIEN fera une déposition d’une voix presque inaudible. L’amour de René HARDY pour LYDIE BASTIEN était total, il l’appelait « son lapin bleu » surnom donné à Lydie par son père mais aussi « Lion ascendant sabotage ». Malgré l’amertume de se voir chargé par elle, il ne la dénoncera jamais mais il écrira à la fin de sa vie dans des notes préparatoires, non reprises dans la version finale de son livre Derniers mots (1984) 24« Les ‘femmes’ et les ‘putains’ furent mon problème : savoir les distinguer, c’est une épreuve, quo qu’on en dise, fort difficile, et je n’osais croire le mot de VOLTAIRE rapporté par CHAMFORT « Elles sont toutes garces et putains » un livre-plaidoyer pro domo écrit à la veille du procès de Klaus BARBIE (1987) 25 dont René HARDY pouvait craindre des révélations mais le dossier Caluire n’entrant pas dans le champ des crimes contre l’humanité imprescriptibles n’y fut pas évoqué.

Figure 9 Lydie BASTIEN, 3/04/47 rédigeant ses ‘confessions’ pour France-Soir (photo reprise en couverture du livre de Pierre PÉAN) 2627 - Figure 10 Lydie BASTIEN, lors de son audition au procès de HARDY de janvier 1947 (?)28 - Figure 11 René HARDY, lors de son procès de 1947 29

Figure 12 Lydie BASTIEN dans Point de vue 3, 17 et 24 avril 1947 30

Occultisme, hypnose, yoga et France-Afrique

Anticléricale, anticommuniste, antisémite, LYDIE BASTIEN prétendait être la réincarnation de Cléopâtre et disposer de pouvoirs hypnotiques. Férue d’occultisme et de spiritualité indienne, elle développa des activités de conférence et des centres en France et aux USA sous le nom de Ananda (soldat de Bouddha) et Devi (déesse) mot proche de devil (diable) avec le patronage de BURGESS et de MAUROIS. Ayant ruiné plusieurs hommes d’affaires douteux, elle finit sa vie en France gérante à Montparnasse d’un restaurant-discothèque, Le Boucanier, haut lieu du punk et du gothique, d’un bar à filles et de trafic d’influences en Afrique (Guinée en particulier). LYDIE BASTIEN donnera refuge au Boucanier à une certaine « Louise » qui avait tourné dans Requiem pour un vampire de Jean ROLLIN (1972)31 un film révéré par les gothiques qui fréquentaient sa boite ; dans le souvenir de Louise, LYDIE BASTIEN, c’était Lilith, la figure diabolique créée avant Eve. Jusqu’à la fin de sa vie LYDIE BASTIEN disposa d’un solide carnet d’adresses dans les milieux gaullistes mais aussi cagoulards, fréquentant Edgar FAURE notamment. Pesant cent kilos à la fin de sa vie elle meurt dans des circonstances peut-être peu naturelles, après avoir livré une partie de la vérité du l’affaire de Caluire à son exécuteur parlementaire Victor CONTÉ qui avait été son complice dans ses trafics africains, confidences que celui-ci livra à Pierre PÉAN.

Documentation

PÉAN Pierre, La Diabolique de Caliure, Paris, Fayard, 1994. Ouvrage de référence. THIOLAY Boris, Jean Moulin: derniers secrets sur son arrestation, 24/11/2018 https://www.lexpress.fr/actualite/societe/jean-moulin-derniers-secrets-sur-sonarrestation_2049917.html

Le Monde 01/04/1947 Déclarations accusatoires de LYDIE BASTIEN à l’encontre de RH https://www.lemonde.fr/archives/article/1947/04/01/mlle-lydie-bastienramenee-a-la-surete-apres-un-court-interrogatoire-par-le-nouveau-magistratinstructeur_1885649_1819218.htmlhttps://www.lexpress.fr/culture/livre/c-est-elle-qui-a-fait-arreter-jean-moulin_796887.html

http://certitudes.eklabloGENGENBACHcom/lydie-bastien-la-femelle-diabolique-ducaluire-de-jean-moulin-a191014020

https://www.memoiresdeguerre.com/article-bastien-lydie-56282475.htmlhttp://chez.jeannette.fleurs.over-bloGENGENBACHcom/lydie-bastien-la-balance-dejean-moulin-ou-la-diabolique-de-caluire

https://www.youtube.com/watch?v=NcUVhsSjisA">http://certitudes.eklabloGENGENBACHcom/affaire-jean-moulin-rene-hardy-letraitre-amoureux-de-juin-1943-a192691848https://www.youtube.com/watch?v=NcUVhsSjisA

Filmographie

2002 : Jean Moulin : jouée par Julie Dreyfus, France 2

2003: Jean Moulin, une affaire française, de Pierre Aknine : joué par Vanessa Devraine, TF1

2000 : Lydie Bastien, Amy Newstead, United Kingdom, Scotland / 2000 / Fiction / 09'00, http://my.clermont

filmfest.com/index.php?m=138&c=3&id_film=100026422&o=

Figure 13 Journal ?? du 3/07/1949FEG 510 A

Lydie BASTIEN, dans la narration gengebachienne

Les circonstances du coup de foudre de GENGENBACH sont relatées par le journal Samedi-Soir et par GENGENBACH qui consacre un chapitre de L’expérience démoniaque (1949) où il décrit la possession dont il fit l’objet de cette « démone » décrivant ainsi son coup de foudre « Tout à coup, il m’a semblé que je recevais un coup sur la nuque. J’ai levé les yeux et je suis resté interdit : il y avait en face de moi la plus belle femme du monde. Elle me regardait d’un regard comme je n’en ai encore jamais vu et comme je n’en verrai plus jamais. Un regard de démone… j’éprouvais une violente volonté de lui parler mais aucun son ne sortait de ma bouche LED p.173s ». La rencontre se fit dans une rame de la ligne 9 de métro en mars 1946 alors qu’il corrige des exemplaires de la revue Paris, les arts et les lettres qui imprime, grand scandale, Eugène GENGENBACH et non Ernest GENGENBACH. Il descend à la station Trocadéro pour suivre l’inconnue à qui il fait porter par un louveteau un exemplaire de la revue sur laquelle il a griffonné son adresse et ces mots : « En hommage admiratif de l’auteur ». On retrouvera la même mise en scène de l’auteur faisant la cour à une jolie femme avec l’un de ses ouvrages dans le roman-photo de sa rencontre avec Elyane BLOC, le louveteau devenant un groom de l’hôtel Lutétia. Suit une réponse aimable de l’inconnue parfaitement non crédible où l’auteur s’autocongratule « La lecture de votre Lettre à BERNANOS m’a troublée, séduite, captivée … LED p.175» L’intrigante est effet prompte à lui envoyer quelques heures plus tard un pneumatique sans détours : « Vous ne pouviez trouver plus charmant messager que votre petit louveteau. Je n’avais pas été sans me rendre compte de votre manège dans le métro… et j’en étais volontairement complice car je sentais confusément entre nous des affinités métaphysiques, esthétiques et érotiques » suivi d’un long commentaire occulto-métaphysique de l’article de GENGENBACH. Lydie y pare de ses « maintes expériences de lucidité et de clairvoyance sur des sensitifs » affirmant que « L’avenir, dans certaines psychiques et avec certains individus, n’est plus une énigme mais une réalité dont on peut obtenir l’image par simple photographie en dehors même du Temps » le critiquant pour son esprit religieux et exaltant « le véritable esprit réaliste, en matière de métaphysique » que l’ancien abbé ne possède pas. Cet esprit dont elle fait l’apologie résonne étrangement en ces lendemains de guerre : « Celui qui a conscience de l’évolution des Êtres et de son Être dans cette longue ascension vers l’Absolu… en dehors du Temps et de l’Espace… en dehors du joug de la loi du Bien et du Mal LED p.175s ».

Lettre selon nous apocryphe que l’auteur signe « Lydie HARDY » car Lydie BASTIEN avait épousé René HARDY en Algérie mais il se défend d’avoir, lors de cette rencontre, su qui était Lydie HARDY née BASTIEN « GENGENBACH ne savait pas qu’il existait un cas René HARDY… LED p.180 » et c’est, pour le coup, crédible car GENGENBACH n’a jamais, ni de près ni de loin, fréquenté les milieux résistants et, en 1946, comme l’explique Pierre PÉAN la ‘diabolique’ essayait d’échapper aux médias, ce n’est qu’en 1947 qu’elle fera la Une des journaux et qu’elle s’y complaira pour lancer, espérait-elle, sa carrière cinématographique.

Ce fatras séduit GENGENBACH qui lui répond aussitôt : « Votre réponse était devenue une sorte d’enjeu entre Dieu et moi ou, si vous préférez, une suprême et désespérée tentative d’avoir la preuve de la Présence de l’Éternel dans mon éphémère et terrestre et tourmenté destin » poursuivant « Bref, je suis un contemplatif qui attend sa révélation par la manifestation dans sa vie de l’éternel féminin » concluant par une drague en bonne et due forme : « Moi aussi je cherche désespérément l’identification, la Réintégration dans mon Tout Éternel Harmonieux… Je désire vous voir d’urgence avant de prendre une décision définitive au sujet de mon itinéraire spirituel ! ... ». Il lui demande de se déplacer à 14 heures telle qu’elle était quand il l’a rencontrée. « Sinon ayez la bonté de me téléphoner entre 2 heures et 3 heures à Auteuil 64-42. Elle téléphone et débarque une demi-heure plus tard. Une semaine après « tout était consommé ».

« Il porta lui-même sa réponse, et se fit déposer, en taxi devant un pavillon de Montreuil-sous-Bois » une poste restante. Ce détail peut sembler inutile mais en fait il trahit le fait que l’intéressée ne voulait pas révéler l’adresse de son riche, et vieil amant, et d’ailleurs c’est chez GENGENBACH dans son studio d’Auteuil qu’elle se rendra et se livrera « Une semaine après cette première entrevue, tout était consommé … Ils n’étaient plus que deux êtres croyant se retrouver après de multiples incarnations dans l’extase érotique, mystique, rituelle du geste sacral, profané par tant de non-initiés. LED p.181» célèbre GENGENBACH

A cette date, Lydie a déjà pris ses distances de René HARDY, ruine un amant un vieillissant mais richissime importateur de pelleterie de Russie, un individu décrit par PÉAN comme un probable agent du Komintern, qui, ruiné, se suicide en se jetant sous les roues d’un métro à Étoile, protecteur qu’elle traite de « vieux » dans un coup de fil partagé par les deux hommes.

Elle devint sa maîtresse, se présentant comme Lydie HARDY et grâce à lui fréquenta les milieux littéraires et artistiques parisiens notamment surréalistes. GENGENBACH et LYDIE BASTIEN croyaient tous deux à la métempsychose et étaient entichés de spiritualités orientales. Les procès de René HARDY faisaient alors la une des journaux et LYDIE BASTIEN écrit dans les colonnes de Paris, les arts et les lettres des papiers nietzschéens sous le nom de ‘Diane d’Estarbique’. Elle ambitionne également une carrière de starlette, posant quasi nue dans les journaux et exigeant de GENGENBACH qu’il remanie son scénario inspiré de son amour déçu pour Régine FLORY, adapté de son Satan à Paris, pour y prendre le rôle de la séductrice, adoptant le nom de plume BASTIEN-FLORY pour affirmer sa ‘prise de guerre’. LYDIE BASTIEN aurait pu tout aussi bien vouloir supplanter MUSIDORA dans son rôle d’Irma VEP dans Les vampires de FEUILLADE dont un des épisodes s’intitule « Les yeux qui fascinent »32.