Enfumages - Firmin Le Bourhis - E-Book

Enfumages E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

Une trépidante enquête du côté d’Auray et de Locmariaquer suite à un accident pas si anodin...

Un banal accident de la circulation, a priori, va entraîner le lieutenant Phil Bozzi et le capitaine François Le Duigou dans une trépidante enquête du côté d’Auray et de Locmariaquer.
La ruse et l’intelligence de certains malfrats n’y suffiront pas, les preuves sont accablantes et nos deux OPJ dénoueront un à un les fils de cette enquête riche en surprises et rebondissements, au risque parfois d’en perdre leur latin !

Suivez le Duigou et Bozzi à Auray pour une nouvelle enquête palpitante jusqu'à la dernière page !

EXTRAIT

François l’écouta dans un premier temps puis lui demanda de reprendre plus posément avant de reformuler ce qu’il avait retenu et de mettre le haut-parleur pour en faire profiter Phil :
— Si j’ai bien compris, à la sortie de Quimper, vous rouliez en direction de Douarnenez pour vous rendre chez vous à Plonéis lorsqu’une voiture, venant de Douarnenez, s’est déportée face à vous. Vous avez tenté de l’éviter, mais vous vous êtes heurtés assez violemment et vous avez terminé votre course dans le mur de clôture d’un jardin, de même que l’autre voiture, dans l’autre sens, à une centaine de mètres plus loin…
— Oui, oui… c’est bien ça. Un habitant de la maison est sorti et a contacté l’hôpital pour ma femme, car elle est blessée, et il vient de me dire qu’il est allé voir l’autre véhicule, mais il n’y a personne dedans !
— Comment ça, personne ?
— Non ! Pas d’occupant à l’intérieur. Et aux alentours, personne non plus. C’est pour cette raison que je vous appelle…
— Bon. Donnez-moi l’endroit approximatif, nous arrivons tout de suite.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Ce nouvel opus, mené tambour battant, s'absorbe d'un trait entre Auray et Locmariaquer. Un polar d'automne constellé de rebondissements [...] - ouest-france.fr

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Enfumages

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

Aux éditions Chiron

 

Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour avril 2008

Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire novembre 2001

 

Aux éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

 

 

Dépôt légal 4e trimestre 2014

 

ISBN : 978-2-916248-74-5

 

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

 

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

 

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres,des lieux privés, des noms de firmes, des situations existant ou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70/Fax : 01 46 34 67 19. - © 2014 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

 

 

 

REMERCIEMENTS :

 

 

À tous ceux qui m’ont aidé tout au long de mon travail

de préparation :

 

- Ma fille Nathalie qui s’est particulièrement investie

en étant présente sur Auray.

 

- Madame Odile Le Fur pour qui Auray n’a pas de secret.

 

- Le lieutenant Laurent Chapparo, commandant la Brigade Territoriale Autonome de Gendarmerie d’Auray,

pour ses informations et nos sympathiques échanges.

 

- L’office de Tourisme d’Auray Communauté ainsi que celui

de Locmariaquer pour leur accueil et leur documentation.

 

- Sans oublier mes deux conseillers techniques habituels, le commandant de police François Lange et le commandant de police honoraire de la police judiciaire Pascal Vacher.

 

- Et toutes les personnes qui ont, à divers titres, apporté leur contribution à ce texte et qui se reconnaîtront…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Le diable, c’est l’ami

qui ne reste jamais jusqu’au bout. »

 

Monsieur Ouine.

Georges Bernanos.

 

 

 

 

« Nous ne pensons qu’à l’argent.

Celui qui en a pense au sien,

celui qui n’en a pas pense à celui des autres. »

 

Jusqu’à nouvel ordre.

Sacha Guitry.

 

Chapitre 1

Dimanche 13 avril…

Le Capitaine François Le Duigou et le lieutenant Phil Bozzi se remémoraient souvent la dernière importante affaire pour laquelle ils avaient été mutés provisoirement du côté de Pornichet et de La Baule. Celle-ci leur en avait fait voir de toutes les couleurs et ce malgré le charme des lieux et la période idyllique à laquelle elle se déroulait.

Depuis, ils avaient réintégré avec bonheur leur bureau de Quimper et, de ce fait, une certaine vie casanière en famille, ce qui n’était pas pour leur déplaire, particulièrement en ce moment où le temps offrait de vraies journées estivales.

De longs mois venaient de s’écouler sans dossier vraiment exceptionnel. La banalité du quotidien l’emportait, sans qu’ils manquent pour autant de travail, bien au contraire, car entre le 23 décembre et la fin février, les fortes pluies, le vent et de violentes grandes marées avaient mis la Bretagne tout entière sur les dents, épuisant complètement bon nombre de ses habitants.

Au commissariat, les moyens humains continuaient à faire défaut et ce mal récurrent avait pour conséquence la répartition des charges supplémentaires sur chacun d’entre eux. Nos deux OPJ n’échappaient guère à la règle…

Ceci avait permis de ressouder les équipes à qui la richesse de l’actualité offrait de belles discussions devant la machine à café, même si au fil des années, ces moments privilégiés tendaient à diminuer, eux aussi, contrairement au travail.

Le printemps était là, ensoleillé, serein, leur rappelant un autre, trois années plus tôt, le printemps arabe. Il avait paru si prometteur… Mais depuis, la Tunisie peinait à s’en remettre, même si l’espoir venait toujours de Tunis. L’Égypte avait retrouvé la mainmise de ses généraux. L’arrivée au pouvoir des Frères musulmans n’avait été qu’une parenthèse. Les tribus de Libye s’étaient partagé le désert et la charia régnait sur les sables, sur des milliers de kilomètres, créant une vaste zone de non-droit du Maghreb au Sahel, tandis que le chaos régnait toujours en Somalie comme en Érythrée… Se libérer est une chose, instaurer un régime stable de liberté en est une autre…

Au Moyen-Orient, la situation n’était pas meilleure. La Syrie de Bachar al-Assad illustrait le drame de nos idéaux de papier et l’on pouvait y observer les comportements contradictoires des instances internationales et des grandes puissances, permettant ainsi à un dictateur de se maintenir au pouvoir et de poursuivre ses crimes, dans une indifférence lassée qui signait la faiblesse des nations dont on avait du mal à écrire qu’elles étaient unies… Le pire scénario prévisible avait été joué pour devenir l’un des grands drames humanitaires de ces dernières décennies…

L’Asie était en effervescence et la pression continuait à se maintenir en Thaïlande comme au Cambodge ou en Corée du Nord. Jusqu’à quand ?

Quant à l’Ukraine, l’Afghanistan, l’Irak et autres pays de cette partie du monde, ils offraient à la Russie de Poutine, tout comme en Syrie, de pouvoir imposer à nouveau sa place dans le concert des nations… L’Ukraine en particulier inspirait aux Européens de la compassion et devenait de plus en plus tiraillée entre la Russie et l’Europe. Avec pour résultat des morts sur la place Maïdan et la perte de la Crimée, voire de tout l’est du pays…

Il s’avérait, comme toujours en politique, que les positions claires et tranchées cachaient obscurité et hésitation.

Beaucoup plus proches de Phil et François, tous deux toujours prompts à discuter sur les sujets les plus divers, d’autres faits d’actualité échauffaient les esprits partisans locaux : les élections municipales. Dieu sait que ces dernières avaient été riches en rebondissements surprenants, comme à Quimper notamment…

La vague bleue était passée par là et une autre, plus foncée, bleu marine celle-là, marquait son territoire en s’inscrivant comme troisième force politique du pays…

À présent, les partis se mettaient en ordre de marche pour les Européennes.

Il s’avérait que les élus locaux gardaient toujours une certaine importance aux yeux des administrés et les positions ou les arrangements de dernière minute, ici ou là, donnaient matière à gloser. Sans parler de l’épineux réaménagement du territoire, des régions, des départements et du nombre démesuré de communes en France…

À cet instant, Phil et François terminaient leur entretien avec des personnes venues porter plainte. Ils n’avaient guère envie de s’attarder sur cette nouvelle petite affaire.

Nous étions dimanche, ils étaient de service pour le week-end, ce qui ne constituait jamais pour eux une situation joyeuse. Une courte accalmie s’ensuivit dans le rythme effréné des dépositions… Pendant qu’ils dînaient rapidement, François en profita pour téléphoner à son épouse au sujet d’une sortie qu’il devait organiser, avec des amis de Concarneau, pendant que Phil appelait Gwen et échangeait avec Clémence à qui il ne lirait pas d’histoire ce soir avant qu’elle ne se couche, lui rappelant que, dans deux semaines, débuteraient les vacances scolaires et qu’il espérait en partager quelques jours avec elles. Pour l’instant, seule la zone C, dont Paris et Bordeaux, avait donné le coup d’envoi…

La nuit s’annonçait calme lorsqu’ils revinrent à leur poste.

Pourtant, un peu après vingt-deux heures, un homme particulièrement affolé appela le commissariat. Ses explications paraissaient pour le moins confuses.

François l’écouta dans un premier temps puis lui demanda de reprendre plus posément avant de reformuler ce qu’il avait retenu et de mettre le haut-parleur pour en faire profiter Phil :

— Si j’ai bien compris, à la sortie de Quimper, vous rouliez en direction de Douarnenez pour vous rendre chez vous à Plonéis lorsqu’une voiture, venant de Douarnenez, s’est déportée face à vous. Vous avez tenté de l’éviter, mais vous vous êtes heurtés assez violemment et vous avez terminé votre course dans le mur de clôture d’un jardin, de même que l’autre voiture, dans l’autre sens, à une centaine de mètres plus loin…

— Oui, oui… c’est bien ça. Un habitant de la maison est sorti et a contacté l’hôpital pour ma femme, car elle est blessée, et il vient de me dire qu’il est allé voir l’autre véhicule, mais il n’y a personne dedans !

— Comment ça, personne ?

— Non ! Pas d’occupant à l’intérieur. Et aux alentours, personne non plus. C’est pour cette raison que je vous appelle…

— Bon. Donnez-moi l’endroit approximatif, nous arrivons tout de suite.

Phil sollicitait déjà deux binômes en tenue pour l’accompagner sur les lieux car la circulation serait certainement à régler et les témoins à interroger… Il fit également appel au spécialiste des accidents de la route pour prendre des photos, effectuer les marquages au sol, relever les mesures et ainsi, déterminer la scène, les circonstances de l’accident et le lieu d’impact.

Les trois véhicules, deux aux couleurs de la Police Nationale et un banalisé, gyrophare en action, quittèrent la rue Théodore Le Hars, traversèrent une partie de la ville, calme à cette heure, en direction de la route de Douarnenez…

Lorsqu’ils arrivèrent sur place, le SMUR prenait déjà en charge la femme en état de choc ; son époux, bien qu’indemne, avait l’air abattu… L’avant de la voiture se trouvait dans le jardin et l’arrière sur le trottoir ; le côté passager avant avait pris le pilier d’entrée qui tenait le portail.

Un binôme prit aussitôt en main la circulation pour la sécurité des personnes présentes sur la voie publique où un attroupement s’était formé ; un autre recensait l’identité des témoins tandis que Phil et François se dirigeaient vers l’autre véhicule, distant de plus d’une centaine de mètres.

Une BMW X6 assez récente était encastrée dans le mur de clôture d’un jardin. Les airbags avant avaient bien fonctionné, pas de trace de sang ; effectivement, le ou les occupants avaient disparu, comme volatilisés !

La plaque mentionnait le 56, cependant, depuis les nouvelles directives de mai 2009, il n’était plus obligatoire d’immatriculer son véhicule dans son département de résidence. C’est de cette manière que sur les plaques des automobiles, le département de la Corse est devenu le plus utilisé alors que c’est la plus petite région administrative de France en termes de population.

Phil interrogea le fichier des voitures volées et constata, sans surprise, qu’elle y figurait… Ceci expliquait en partie la disparition du conducteur.

Phil demanda au commissariat de dérouter les équipes chargées de la surveillance de nuit afin que celles-ci concentrent leurs patrouilles autour du lieu de l’accident et puissent interroger tous les éventuels piétons rencontrés…

Hélas, aucun d’entre eux ne put donner le nombre d’occupants de cette voiture ni une quelconque indication, puisqu’il n’y avait pas de témoin oculaire de l’accident. Certaines personnes présentes se trouvaient là alertées par le bruit ; d’autres s’étaient arrêtées par curiosité ou pour porter secours si besoin. On pouvait penser que le conducteur s’était enfui à pied ou avait été récupéré par un autre véhicule…

Phil et François revinrent vers l’auteur de l’appel, au moment où l’ambulance démarrait. Ce dernier avait été rassuré par l’urgentiste et son équipe sur l’état de santé de son épouse. Il avait soixante-dix ans environ et ils étaient tous deux retraités. Ils venaient de quitter le domicile de l’un de leurs enfants, situé au centre-ville de Quimper où ils avaient dîné, et rentraient chez eux à Plonéis.

Il était incapable de dire si le conducteur qui venait en face était un homme ou une femme et s’il avait des passagers. Il avait en effet été aveuglé par ses phares, ce que comprenait parfaitement François.

Le binôme resta bredouille dans la pêche aux témoignages, aucune des personnes présentes ne pouvant apporter la moindre précision.

Pendant ce temps, Phil avait appelé la société de remorquage pour évacuer la BMW X6, exigeant que le personnel porte des gants, car il serait certainement nécessaire de prélever des indices pour tenter d’identifier le ou les passagers de la voiture au moment de l’accident, si toutefois ces derniers étaient fichés.

Le spécialiste avait pris toutes les photos nécessaires et terminait les relevés. Son marquage au sol à la bombe de peinture lui permettrait également de revenir le lendemain au grand jour pour vérifier précisément si tout ce qu’il allait consigner dans son dossier était bien conforme à la situation.

Les deux véhicules furent enlevés. L’homme, accompagné par un binôme en tenue, put rejoindre son épouse à l’hôpital.

 

*

 

De retour au bureau, Phil et François discutaient avec le spécialiste. Ils se retrouvaient tout de même face à une situation peu banale : deux voitures accidentées, dont l’une sans occupant et volée…

Ils appelèrent les urgences un peu plus tard dans la nuit. La blessée était hors de danger. Simplement victime du coup du lapin et de multiples contusions, après d’autres examens et des soins appropriés, elle devrait pouvoir sortir au bout d’un jour ou deux.

 

Chapitre 2

Lundi 14 avril.

Dès la première heure, la discussion était vive au bureau du patron entre ce dernier, Phil, François et le spécialiste. Alors qu’ils évoquaient les faits et les circonstances de l’accident de la veille, ils reçurent les renseignements demandés sur le vol de la BMW X6. Ils n’étaient pas au bout de leurs surprises : ce véhicule était le fruit d’un violent home-jacking commis à Auray, quelques jours plus tôt.

Deux malfaiteurs avaient malmené, bâillonné et ligoté une femme sur une chaise, puis après une fouille sommaire de la maison, s’étaient enfuis avec les clés de la berline qui venait d’être mise en vente sur le site Internet Le Bon Coin. Malgré l’important plan de recherches déployé par la gendarmerie d’Auray, les deux hommes n’avaient pu être retrouvés.

— Vous voyez ce que je veux dire ? lança le patron.

— Ouais ! répondit François. Il faut que les gars de la police technique et scientifique s’attaquent avec une très grande précision au relevé d’indices dans cette voiture en la passant au peigne fin. Et que, munis de ces éléments, nous nous transportions à Auray !

— Exactement, j’en informe le procureur.

— Et rebelote… direction le Morbihan ! souffla François en se tournant vers Phil, devant le sourire amusé du spécialiste et du patron.

De retour à leur bureau, les deux OPJ examinèrent les documents en leur possession, concernant ce fameux home-jacking d’Auray.

Cette façon de procéder au domicile du propriétaire du véhicule convoité était une technique encore peu courante, surtout en Bretagne ; elle faisait en quelque sorte suite au car-jacking1 pratiqué surtout dans la région PACA et quelques grandes villes.

Ils contactèrent la gendarmerie d’Auray pour l’informer et convenir d’un rendez-vous.

Le responsable de l’équipe de la police technique et scientifique appela pour signaler qu’ils venaient de découvrir cinq cents grammes d’herbe de cannabis dans le coffre de la BMW et qu’il avait requis l’intervention des chiens spécialisés car ils allaient devoir désosser le véhicule.

Cette affaire se compliquait, Phil et François commençaient déjà à se demander où elle allait les conduire.

Ils se rendirent au bureau du policier chargé de récapituler les éléments de l’accident. Ils réexaminèrent ensemble les photos et les notes, sans rien en tirer.

Le patron leur confirma que le procureur nommait François directeur de l’enquête.

Puis ils firent une visite au local où était entreposée la BMW. Les collègues avaient terminé le relevé des empreintes digitales et biologiques et des autres indices ; ils commençaient tout juste à la démonter. Ils en profitèrent pour noter le kilométrage affiché au compteur afin de calculer plus tard la distance parcourue par les malfaiteurs, au volant de ce véhicule. Les chiens devaient arriver d’un instant à l’autre.

Ils déjeunèrent rapidement au restaurant administratif avant de prendre la direction d’Auray.

Ils n’avaient pas encore eu l’occasion de travailler sur cette ville, et ne connaissaient pas encore cette zone du Morbihan, bien qu’ayant mené précédemment différentes enquêtes sur Vannes, Lorient, Plouay, Pontivy…2

Ils quittèrent la voie express pour emprunter l’ancienne route nationale 165 qui borde également Auray. Avenue Kennedy, au giratoire du Pratel, ils filèrent vers la gendarmerie toute proche, située dans la résidence de la Forêt.

Elle était blottie dans un vallon. Le bâtiment en béton, aux formes géométriques, peint en jaune, faisait face au lycée Benjamin Franklin. Entre les deux se glissaient les voies affectées, pour certaines à la circulation routière et pour les autres aux bus. Le quartier était donc animé du fait des allées et venues des élèves.

L’accueil était informé de leur venue et on les orienta vers le capitaine Le Sablen qui les reçut fort sympathiquement. Ils s’accordèrent un peu de temps pour faire connaissance.

Cet officier de gendarmerie commandait la brigade territoriale autonome d’Auray qui couvrait sept communes.

— Vannes étant tout près, j’imagine que vous en dépendez ?

— Non ! Justement pas, nous dépendons de Lorient, même si la direction départementale du groupement se trouve à Vannes. Nous disposons de quelques techniciens d’investigation criminelle de proximité qui ont été formés par des spécialistes.

— Votre charge de travail doit connaître une forte fluctuation avec la fréquentation estivale…

— Non, pas plus que ça, notre activité est intense mais relativement régulière en réalité.

Bien au fait du dossier qui les amenait, ils entrèrent ensuite rapidement dans le vif du sujet.

Le capitaine leur expliqua :

— Il s’agit d’une femme, veuve depuis peu. Elle ne voulait pas garder la voiture que conduisait habituellement son époux décédé. Aussi les enfants ont-ils eu l’idée de la mettre en vente sur le site Internet Le Bon Coin. Cette opération s’est faite dimanche dernier et, dès lundi, elle a eu des demandes de renseignements. La nuit même, vers une heure, deux hommes, le visage dissimulé, se sont introduits dans sa maison, puis dans sa chambre. Ils l’ont sortie du lit sous la menace d’une arme de poing…

— Réelle ou factice ?

— Elle était trop tétanisée pour en juger. Ils l’installent sur une chaise et l’attachent sommairement, lui demandent de l’argent et les clefs de sa voiture. Ils s’emparent de quelques dizaines d’euros dans son sac à main, récupèrent les clefs et les papiers, puis aspergent son visage de gaz lacrymogène avant de s’enfuir avec la BMW, sans vraiment fouiller la maison. Selon elle, ils semblaient pressés et inquiets comme s’ils craignaient le déclenchement d’une alarme. Il faut dire que cette femme est très aisée et son logement cossu. C’était un couple de notables de la ville, à la retraite depuis de nombreuses années. Elle est plus jeune que son mari mais doit approcher des quatre-vingts ans…

— L’action a donc été violente mais brève. Comment la victime s’en est-elle sortie ?

— Elle a réussi à se défaire de ses liens et à appeler aussitôt ses enfants qui ont donné l’alerte. Son médecin est venu. Très choquée, elle se remet doucement.

— Vous avez les résultats des relevés d’indices ?

— Non, pas encore. Nous les attendons, les faits remontent à une semaine tout juste. Mais nous n’avons pas grand-chose car les malfaiteurs portaient des gants, une tenue fermée, un bonnet de laine, et un foulard dissimulait leur visage. Ils ont très peu parlé. Elle estime que l’un, plutôt corpulent, devait faire un mètre quatre-vingts environ ; tandis que l’autre faisait plutôt gringalet à côté…

— Ouais, pas facile dans ce cas-là.

— Elle pense que l’une des demandes de renseignements qu’elle a reçues dans la journée pouvait provenir de l’un d’entre eux. Nous avons effectué le relevé des appels entrants sur son fixe. Elle n’est pas sur liste rouge et le numéro était mentionné dans l’annonce, l’annuaire aura donc donné son adresse… À l’heure à laquelle elle situe cet appel, nous en avons retrouvé un provenant d’une cabine publique du centre-ville d’Auray.

— Oui, si bien que l’on peut aisément imaginer le lien entre l’annonce publiée et la visite des malfaiteurs, commenta Phil spontanément.

— Effectivement, c’est ce que nous avons pensé.

— Nous avons certainement affaire à une fine équipe…

François exposa la situation qui les amenait : l’accident, suivi de la découverte de la drogue. Il évoqua également la recherche d’indices en cours sur le véhicule.

— Hum, hum… fit le capitaine. Comme il s’agissait d’un vol de voiture de luxe, nous n’espérions guère la retrouver, car il existe de nombreux réseaux organisés pour écouler ce type de véhicule, ce qui coûte d’ailleurs « la peau des fesses » aux assurances françaises. Mais étant donné ce que vous venez de m’apprendre, il s’agit peut-être de tout autre chose…

— Oui, en venant ici, nous étions dans une autre approche, nous penchions plutôt pour un trafic de drogue. Du go-fast…3 Cela n’empêche nullement qu’ensuite, le véhicule rejoigne un réseau… commenta François.

— Oui, ou soit purement et simplement détruit ou incendié pour éliminer toute trace, ou encore immergé, rajouta le capitaine de gendarmerie.

— Ces deux hypothèses se tiennent indiscutablement et il nous faut donc pousser nos recherches dans ces directions, en nous concertant en permanence, conclut Phil. Savez-vous comment ces deux individus sont venus chez cette femme ?

— Non. Aucun véhicule suspect n’a été signalé dans le quartier et nous ignorons s’ils ont terminé leur trajet à pied après avoir laissé leur voiture assez loin de là. Vous m’avez dit que vous inspectez la BMW dans les moindres détails, cela devrait peut-être nous apporter quelques informations…

— Oui. Les collègues de la scientifique sont déjà en train de la démonter. Nous allons également pouvoir évaluer le kilométrage parcouru entre le jour du vol et celui de l’accident.

— Il serait souhaitable que vous rencontriez la victime du home-jacking afin de vous faire votre propre opinion sur ses déclarations. C’est une femme très bien, décrite comme un parangon de vertu. Je demande à l’un de mes gars de vous accompagner.

Le capitaine se saisit de son téléphone posé devant lui sur son bureau et donna quelques ordres.

Ils échangèrent des copies de leurs dossiers respectifs afin de les compléter l’un et l’autre. Durant quelques minutes, chacun resta plongé dans ses documents, en silence. Peu de temps après, le lieutenant désigné, David Le Rosmec, vint les rejoindre et tous les trois prirent la direction du domicile de la femme agressée.

 

*

 

En découvrant le centre-ville, Phil ressentit la formidable douceur de vivre qui émanait de cette cité.

Un quart d’heure plus tard, ils arrivèrent dans le vieux quartier aux ses ruelles tantôt sombres, tantôt baignées d’une lumière à peine voilée caressant les pierres grises. Ils durent se garer sur un parking proche, puis ils rejoignirent à pied une des belles maisons de caractère de la ville. L’été, ce vieil Auray, pétri d’histoire, se remplissait de promeneurs qui, appareil photo en main, contemplaient ces vestiges des temps passés.

Un homme d’une soixantaine d’années les reçut sur le pas de la porte et leur précisa aussitôt :

— Je suis le fils de madame de Saint-Fiacre, suivez-moi, je vous accompagne au salon et je vais chercher ma mère…

Ils traversèrent un vestibule aux murs crème et au sol carrelé, essentiellement meublé d’ancien et chargé de souvenirs révélant que les maîtres des lieux conservaient des objets transmis de génération en génération. Puis ils furent conduits dans un grand salon dont les hautes fenêtres offraient une vue sur un petit parc, à l’arrière de la demeure.

Devant la cheminée, des fauteuils de cuir râpé entouraient une table basse en bois ciré, posée sur un épais tapis couvrant en partie le sol dallé. De l’autre côté, une lourde porte en chêne donnait sur une autre pièce. Aux murs colorés d’un céladon apaisant, quelques peintures anciennes. Dans un angle, un majestueux bahut était surmonté d’un imposant rayonnage garni d’ouvrages anciens et de valeur. En face, un guéridon, flanqué de deux chaises en vis-à-vis, supportait un échiquier en bois précieux. Cette pièce offrait une atmosphère agréable, apaisante et avait le charme des vieilles demeures avec ses plafonds hauts et ses murs aux angles biscornus.

La grande porte s’ouvrit et laissa apparaître la mère et le fils.

Les OPJ se présentèrent rapidement, elle fit de même à son tour et les invita, d’un geste large, à s’installer dans les fauteuils.

Elle portait une tenue du meilleur goût, dissimulant ainsi en partie son âge. Bien coiffée, parée de bijoux de valeur, elle respirait une certaine aisance et affichait une prestance peut-être un peu vieille France. Elle était grande, près d’un mètre soixante-dix. Son teint avait gardé l’éclat de celui des femmes qui vieillissent bien et prennent soin de leur corps.

François reprit les grandes lignes de cette affaire et les informa que leur voiture avait été retrouvée, sans donner plus de précisions.

Elle tourna vers lui des yeux qui semblaient envahis par l’inquiétude comme si elle s’attendait au pire, tandis que le fils parut soulagé et esquissa un léger sourire. Aucun des deux ne parla, attendant la suite…

François lui expliqua alors les circonstances :

— Compte tenu de ce que je viens de vous dire, nous devons d’abord approfondir la fouille de votre véhicule. Pour nous permettre d’évaluer la distance parcourue par les malfaiteurs, nous avons besoin d’en connaître le kilométrage au moment du vol, l’auriez-vous relevé ?

Elle se tourna vers son fils qui réagit aussitôt :

— Bien entendu, nous l’avions noté précisément au moment où nous préparions l’annonce… Je vais vous chercher le document…

Il disparut par la même porte. Une petite discussion s’établit avec la femme qui semblait avoir une très bonne capacité de résilience face à cette récente agression. Elle commença par leur dire que beaucoup de choses n’allaient plus dans ce monde, l’épreuve qu’elle venait de subir en était une preuve douloureuse.

— La société tout entière vit un cauchemar avec l’effondrement de tous les modèles et voilà où ça nous mène ! lança-t-elle.

Elle affichait sans retenue le mépris que lui inspirait ce type de comportement. François approuva de la tête, tout comme les deux autres collègues, la laissant s’exprimer pour lui permettre d’extérioriser son ressentiment. Elle avait visiblement envie de se confier. Son vocabulaire était châtié et montrait par ses propos qu’elle n’avait rien d’un bas-bleu. Elle affirma qu’il ne fallait pas être surpris de la montée de certains partis populistes. François détestait perdre son temps à analyser le monde dans lequel il vivait, pour lui, cela ne servait à rien… Il la sentait prête à se lâcher, à se faire plaisir, aussi marqua-t-il un temps de pause, en réfléchissant, pour choisir ses mots, puis revint habilement sur les événements pour éviter de la contrarier, tout en recentrant les propos sur l’objet de leur visite :

— Dans l’intervalle, un détail, aussi insignifiant puisse-t-il être à vos yeux, vous est-il revenu ?

Elle crispa ses doigts, serra les dents avant de répondre :

— J’aimerais tant pouvoir donner une indication sur l’un ou l’autre de ces deux individus, mais j’ai beau me repasser la scène en boucle, je ne vois rien de particulier… Qu’est-ce qui pourrait vous aiguiller par exemple ?

— Un tatouage, un piercing, une montre, des lunettes particulières…

— Non, des lunettes, ils n’en portaient pas et puis, avec les gants, la tenue fermée, le bonnet, le foulard… sans compter la panique dans laquelle je me trouvais, vraiment, je suis désolée, pour l’instant aucun indice de ce type ne me revient, mais je vais continuer à y réfléchir.

— Nous les retrouverons, madame, nous allons tout faire pour cela…

Son fils revint et leur remit le bout de papier sur lequel était noté le kilométrage. François le rapprocha de son relevé…

— La voiture a parcouru un peu plus de deux cents kilomètres, ce qui est assez peu en regard de la distance qui sépare Auray de Quimper. Ceci signifie qu’ils n’ont pas eu à pousser très loin pour s’approvisionner en drogue.

— Selon vous, ces personnes sont-elles d’Auray ?

— Nous n’en savons rien en l’état actuel de nos investigations, même si nous commençons à avancer, lui répondit François, d’un ton rassurant.

— Croyez-vous qu’ils puissent revenir ?

François prit un air grave et la rassura avec sollicitude :

— Nous ne le pensons pas, leur visite était ciblée, ils ont atteint leur objectif… Si j’ose dire, vous ne les intéressez plus… Nos collègues gendarmes redoublent de vigilance en ville et dans les environs, ils multiplient les contrôles et nous ne sommes pas près de relâcher la pression.

— Désormais, je me méfierai de tout le monde, tout le temps… Cela va devenir ma seconde nature, rajouta-t-elle.

— La voiture est-elle réparable ? demanda son fils.

— Nous ne sommes pas experts en la matière. Elle ne semblait pas en très mauvais état, mais étant donné le choc dans ce mur, il paraît difficile de se prononcer.

— Quand pourrons-nous la récupérer ?

— Dès que la police technique et scientifique aura terminé de l’examiner, vous serez avertis. Cependant, mettez-vous déjà en rapport avec votre assureur.

Lorsqu’elle les remercia de leur visite, la méfiance semblait avoir disparu de son visage pour laisser place à un vague sourire.

— Maîtresse femme ! dit alors François dans la voiture lorsqu’ils quittèrent les lieux.

— C’est une famille dont la lignée est renommée sur Auray…

Sur le chemin du retour, ils discutèrent de leurs activités et notamment de l’importance de la délinquance dans cette ville. Le lieutenant, David Le Rosmec, leur répondit qu’elle était équivalente à celle d’autres villes de même importance et que cette affaire était pour le moins inhabituelle, pour ne pas dire exceptionnelle.

 

*

 

À la gendarmerie, ils échangèrent une nouvelle fois avec le capitaine Le Sablen mais, faute d’indices permettant de remonter jusqu’aux malfaiteurs, ils n’avaient guère avancé dans leur enquête. Ceux-ci étaient-ils d’Auray ou simplement de passage dans la région ? Était-ce seulement l’annonce sur Internet qui les avait guidés à cet endroit ?

Pour reprendre l’expression consacrée, délivrée aux médias dans ce genre de situation, on pouvait dire que les forces de l’ordre n’excluaient aucune piste…

1. Méthode souvent encore plus violente ; venue d’Italie, elle consiste à voler un véhicule, souvent de luxe, en arrachant le conducteur du volant pour s’en emparer et s’en aller avec.

2. Voir : Étape à Plouay, Faute de Carre à Vannes, Peinture brûlante à Pontivy et Ça se corse à Lorient, même auteur et même collection. 4 enquêtes se déroulant dans le Morbihan.

3. Vol de voiture rapide pour filer à toute vitesse à Paris ou dans un pays limitrophe, au nord ou au sud de la France, et revenir en Bretagne commercialiser la marchandise importée.

 

Chapitre 3

Une semaine plus tard… mardi 22 avril.

Après un week-end de Pâques apprécié par tous, Phil et François reprenaient le travail en espérant obtenir des réponses à bon nombre de demandes lancées la semaine précédente.

Les collègues de la scientifique avaient le sourire en entrant dans le bureau du patron, le commissaire Yann Le Godarec…

— En dehors du lot de cannabis découvert dans le coffre, sans doute oublié dans la précipitation de la fuite après l’accident, il n’y avait rien d’autre dans la voiture. Le ou les occupants de la BMW n’ont guère laissé de traces…

— S’ils étaient habillés comme lors du home-jacking à Auray, il est évident que vos chances sont limitées.

— Oui. Toujours est-il que les empreintes digitales et biologiques relevées n’ont pas débouché sur un résultat positif lors de nos interrogations de fichiers.

La bonne surprise vient du lot de drogue. Le cannabis était emballé dans un premier sachet en plastique sur lequel figuraient de belles empreintes digitales. Celui-ci était à son tour caché dans plusieurs sachets, mais pour cette autre manipulation, ils devaient porter des gants, car ils n’y ont laissé aucune trace.

— Intéressant…

— Notre homme s’appelle Jacques Kerfrécant, trente et un ans, il est né dans la région parisienne, banlieue ouest, mais ses parents sont originaires d’Auray. En rupture totale avec sa famille depuis des années et notamment depuis deux précédentes affaires de drogue, il a été arrêté plusieurs fois pour trafic de stupéfiants et pour détention de cannabis qu’il déclare toujours comme étant pour son usage personnel.

— Classique… Le problème, c’est que rien ne prouve que les empreintes digitales relevées sur le lot soient celles des voleurs de la BMW d’Auray, pas plus que celles des occupants de la voiture au moment de l’accident, même si c’est fort probable.

— Il a terminé sa peine il y a un peu plus de six mois, rajouta le spécialiste.

— Vous avez son adresse ?

— À sa sortie de prison, il a donné celle de son grand-père, domicilié au port d’Auray appelé Saint-Goustan, qui fait partie du cœur historique de la ville.

— C’est un très beau quartier sur la rive gauche de l’estuaire du Loch, annonça aussitôt François, affichant un sourire admiratif à l’évocation de ce lieu.

— Tu connais ? lui demanda Phil.

— Oui, disons que le centre-ville d’Auray où nous nous sommes rendus l’autre jour est situé sur une colline ; le port, qui doit dater du début du XVIIe siècle, a connu son heure de gloire jusqu’à la construction du port de Lorient. Ce dernier étant plus accessible par les voies routière et ferroviaire, celui d’Auray a périclité au début du XXe. C’est devenu aujourd’hui un lieu très fréquenté par les touristes et aussi les plaisanciers… Le site est magnifique… précisa François, songeur.

Le patron venait de prendre possession du dossier que lui avait tendu le responsable de l’équipe de la police technique et scientifique et, après l’avoir compulsé, rajouta :

— Voilà, c’est chemin du Bélano… Vous avez aussi son palmarès judiciaire et pénal, son temps de liberté n’est jamais très long a priori entre deux incarcérations. Comme on ne connaît pas le rôle exact qu’a pu jouer ce type, vous vous calez avec nos collègues gendarmes et vous y allez, il faut lui mettre la main dessus… Ah, pour votre info, la femme blessée lors de l’accident est rentrée chez elle à Plonéis, en milieu de semaine dernière. Secouée, mais hors de danger, semble-t-il.

Après s’être concertés au téléphone avec le capitaine Le Sablen, Phil et François s’en allèrent vers Auray pour passer prendre un gendarme et se rendre à Saint-Goustan.

 

*

 

Ce fut le lieutenant de gendarmerie, David Le Rosmec, qui les accompagna.

En franchissant le pont qui enjambe l’estuaire du Loch, Phil fut émerveillé en apercevant la place Saint-Sauveur avec ses jolies maisons colorées à pans de bois. Ils se dirigèrent vers le quai Benjamin Franklin pour rejoindre leur destination, ce qui inspira une réflexion à Phil :

— Décidément, Benjamin Franklin semble être particulièrement apprécié à Auray ! C’est le nom donné au lycée situé en face de la brigade, puis encore ici…

Ce à quoi David Le Rosmec répondit :

— Je m’intéresse beaucoup à l’histoire de cette ville. Ce personnage est né à Boston en janvier 1706 : physicien, imprimeur, éditeur, inventeur du paratonnerre comme chacun le sait, mais aussi diplomate, ce que l’on ignore souvent. Il avait été chargé de négocier un traité d’alliance avec la France afin d’aider les Américains lors de la guerre d’Indépendance4. Il se rendait à Nantes à bord d’un navire mais le mauvais temps le contraignit à se rapprocher des côtes morbihannaises. Il débarqua à Auray le 4 décembre 1776. Avant de regagner Nantes par la route, on sait qu’il a profité de sa courte escale pour écrire plusieurs lettres à des amis. Ces dernières furent interceptées puis envoyées aux Affaires Étrangères avant d’être transmises à leurs destinataires et c’est la traduction qui en a été faite qui a permis de comprendre dans quelles circonstances Benjamin Franklin était passé à Auray… d’où l’explication de sa popularité ici !

— Eh bien, me voilà renseigné ! répondit Phil en riant… Tu savais ça, François ?

— Non. Je n’en ai jamais entendu parler…