Coup de tabac à Morlaix - Firmin Le Bourhis - E-Book

Coup de tabac à Morlaix E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

Morlaix-Moscou, ligne directe.

Le capitaine François Le Duigou et le lieutenant Philippe Bozzi doivent faire face à une série de meurtres qui va les conduire dans la ville de Morlaix...
Si les maisons à pans de bois et les venelles médiévales offrent un charme certain, le ou les assassins n’ont pas l’humeur bucolique et se montrent expéditifs dans leur façon de procéder.
Les pistes se font et se défont. Toutes les équipes de police et de gendarmerie, les spécialistes de la police technique et scientifique et les profileurs sont sur les dents...
L’enquête vous fera voyager de Morlaix à Moscou puis Saint-Pétersbourg vers un dénouement bien surprenant.

De la brise marine de Bretagne à la bise glacée de Russie, suivez Le Duigou et Bozzi dans cette aventure palpitante !

EXTRAIT

François passa son après-midi à traiter les affaires en cours. Il n’aimait guère l’horaire d’hiver et maudissait ce changement. Il faisait déjà sombre au dehors quand, satisfait, il s’apprêtait à ranger ses dossiers. Le patron, Yann Le Godarec, fit alors une irruption brutale dans son bureau.
— François, il faut que tu prennes une ou deux équipes avec toi, un habitant vient de me signaler un meurtre dans une résidence, rue de Kerfeunteun. J’appelle le proc’ et je te rejoins.
Pas le temps de réfléchir. D’abord, se rendre sur place et aviser. François prit sa voiture de service banalisée et se fit accompagner de deux véhicules aux couleurs de la police nationale et, toutes sirènes hurlantes, ils se dirigèrent vers la rue indiquée par le patron. Nous étions entre chien et loup, la nuit n’allait pas tarder à prendre sa place.

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Coup de Tabac

à Morlaix

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

Aux éditions Chiron

 

Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour

 

Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire

 

Aux éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

Dépôt légal 2e trimestre 2014

ISBN : 978-2-916248-60-8

 

 

 

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres, des lieux privés, des noms de firmes, des situations existant ou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70 - Fax : 01 46 34 67 19 - © 2014 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

 

Remerciements

 

 

À toute ma famille et mes proches, toujours disponibles et prêts à m’aider en toute occasion.

À mon fidèle ami, Pascal Vacher, officier de police judiciaire dont les renseignements me sont indispensablespour le respect des modalités habituellesd’investigations.

À l’Office du Tourisme de Morlaix.

Au service de communication de la ville de Morlaix et à celui du Télégramme.

Au personneldu commissariat de police de Morlaix.

Et à tous ceux qui sont toujours promptsà me rendre service et me soutenir dans mon écriture et dans mes actions.

Sans oublier toute l’équipe de Russie Cruiserencontrée lors de la croisièrede Moscou à Saint-Pétersbourg…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tout le malheur des hommes

vient de ce qu’ils ne vivent pas dans le monde,

Mais dans leur monde.

 

Héraclite

 

Chapitre 1

Dimanche 26 octobre.

Les arbres du bord de l’Odet commençaient à prendre les premières couleurs de l’automne. Finalement, ils semblaient bien se remettre de l’été caniculaire qui venait de sévir sur la France. Les politiques de tous bords continuaient à présent de se battre sur le sujet. Il était déjà question de trouver des solutions afin d’aider nos anciens à mieux vivre leurs vieux jours. Les idées circulaient allant de l’impôt spécial à la suppression d’un jour férié. Les médias ne manquaient pas de sujets chauds. L’augmentation du prix du tabac faisait fumer les buralistes. Les contrôles de vitesse par radars fixes excitaient les automobilistes, sans oublier la tolérance zéro côté alcool au volant. À chacun sa part. Les moins chanceux se prenaient même, parfois, les trois dans la figure !

Tout ceci ne dérangeait guère François. En ce dimanche, bien qu’étant de service, il sifflotait en revenant à son bureau après la pause-déjeuner, tout en marchant tranquillement le long de la rivière. Depuis la turbulente affaire de l’été1 il n’avait pas connu d’enquête « fracassante ». Son collègue et ami, le lieutenant Phil Bozzi avait bien raison de profiter d’un week-end familial. Le ciel était d’un bleu azur et l’air agréable, une belle journée de saison. Un parfum d’automne avançait dans la langueur de ce dimanche.

Le capitaine François Le Duigou fit une pause-café au distributeur du service avant de se remettre au travail. Quelques collègues confirmaient également la période d’accalmie dans les affaires. La récolte de champignons, notamment de cèpes dans quelques endroits humides, ainsi que de belles châtaignes occupait l’essentiel des conversations. Les chasseurs évoquaient leurs prises et le bon début de saison. Une telle quiétude pouvait-elle durer ? Cela faisait si longtemps que cela ne s’était pas produit… Qu’il était doux d’en profiter !

François passa son après-midi à traiter les affaires en cours. Il n’aimait guère l’horaire d’hiver et maudissait ce changement. Il faisait déjà sombre au dehors quand, satisfait, il s’apprêtait à ranger ses dossiers. Le patron, Yann Le Godarec, fit alors une irruption brutale dans son bureau.

— François, il faut que tu prennes une ou deux équipes avec toi, un habitant vient de me signaler un meurtre dans une résidence, rue de Kerfeunteun. J’appelle le proc’ et je te rejoins.

Pas le temps de réfléchir. D’abord, se rendre sur place et aviser. François prit sa voiture de service banalisée et se fit accompagner de deux véhicules aux couleurs de la police nationale et, toutes sirènes hurlantes, ils se dirigèrent vers la rue indiquée par le patron. Nous étions entre chien et loup, la nuit n’allait pas tarder à prendre sa place.

À une centaine de mètres après le cimetière, un attroupement laissait supposer qu’il devait s’agir du lieu de leur destination.

Ils se garèrent sur le trottoir, et la foule s’écarta sur leur passage. Les gardiens de la paix d’une des deux voitures ordonnèrent aussitôt aux badauds de reculer à l’extérieur du jardin.

Un mur surmonté d’une grille métallique longeait la rue. Un grand portail en fer, vert bouteille ou noir, François en distinguait mal la couleur, donnait sur un jardin. Il ne devait jamais être fermé au vu des herbes qui y poussaient. Une large allée gravillonnée menait jusqu’à la porte d’un garage donnant dans le sous-sol sur la droite de la maison. De ce même côté, un espace dénudé se prolongeait au pignon. Sur la gauche, un petit passage conduisait à un escalier en ciment d’une vingtaine de marches pour accéder à l’entrée principale de la maison. Quelques arbustes et buissons masquaient cet accès.

L’homme qui avait donné l’alerte se tenait là, debout, sous le choc. Il attendait l’arrivée de la police.

— Capitaine François Le Duigou. D’un instant à l’autre le commissaire Le Godarec devrait nous rejoindre. Alors, que s’est-il passé.

— J’occupe un appartement dans cette maison. En rentrant tranquillement chez moi, j’ai remarqué une chaussure qui dépassait du buisson. Il faisait encore clair. Heureusement car, à présent, je pense que je n’aurais rien vu. Je me suis approché et j’ai aperçu un homme. Je crois qu’il doit s’agir du locataire qui occupe l’appartement en face du mien à l’étage.

— Vous croyez ou vous êtes sûr ? Vous devez bien le savoir tout de même, non ? lança François en dirigeant le faisceau de sa lampe vers le visage révulsé de l’homme qui gisait sur le sol.

— C’est-à-dire que cette maison bourgeoise a été réaménagée pour être divisée en quatre appartements. Deux au rez-de-chaussée, deux à l’étage. Nous disposons d’un immense sous-sol. Je suis installé dans l’appartement du haut à gauche. De l’autre côté du palier, à droite, je pense que c’est lui. Je dis : je pense, car il vient d’emménager au début du mois d’octobre seulement. Je l’ai croisé une ou deux fois. J’étais en congés lors de son déménagement. Je ne l’ai pas encore vu beaucoup.

— Je comprends. Connaissez-vous les locataires du rez-de-chaussée ?

— Oui, à gauche c’est un couple, très sympa. Elle est quimpéroise et lui martiniquais. Ils sont partis, cela fait une dizaine de jours chez lui, dans sa famille, pour trois semaines. L’appartement de droite est occupé par un jeune militaire. Il est en mission pour plusieurs mois du côté de Djibouti.

— Vous êtes donc le seul occupant de cette demeure avec votre voisin ?

— Pour le moment, oui.

Le commissaire arrivait au même instant ainsi que l’ambulance et toute l’équipe de la police technique et scientifique. Les gardiens de la paix avaient déjà déployé les bandes fluorescentes en plastique jaune et noire portant le mot « police » pour délimiter un périmètre autour du corps. Les nouveaux arrivants balayèrent du regard la foule amassée à l’extérieur de l’enceinte, l’air de dire « nous prenons les choses en main », tout en adoptant une attitude blasée. Le médecin constata le décès, ce qui ne surprit personne. La rigidité cadavérique et les prises de température du corps laissaient penser que le meurtre s’était produit plus d’une heure ou deux auparavant seulement, donc en pleine journée.

Selon les premières constatations, l’homme avait dû être surpris de dos. Son agresseur lui aurait passé autour du cou un collier en plastique. Ce genre de collier, une fois passé, il suffit de tirer d’un coup sec et très fort et il devient impossible de le desserrer. La seule solution ensuite est de le couper pour pouvoir défaire la fixation. Ce modèle, utilisé dans l’industrie, permet de fixer des canalisations de PVC, des gaines en aluminium, toutes sortes de tubes ou de tuyaux, essentiellement dans le domaine de la ventilation industrielle. Le système est simple mais terriblement efficace. Si le meurtrier tient sa victime serrée dans ses bras, elle ne peut rien faire ; rapidement, elle décède. Il avait donc suffi de traîner le corps derrière le buisson pour le déposer à terre lorsque tout signe de vie avait disparu. Les traces de talons des deux chaussures avaient marqué le sol. Le forfait accompli, le criminel avait pu partir tranquillement, le plus simplement du monde.

La victime portait un blouson. François retira un portefeuille contenant des papiers d’identité, des billets de banque, une carte bancaire et un chéquier.

Les flashs de la police technique et scientifique crépitaient dans cet endroit à présent très sombre. Un des policiers terminait d’installer quelques baladeuses pour leur permettre de noter avec précision la position du corps. Le visage de la victime était effroyable et la vision difficilement soutenable. La lumière mettait en évidence les yeux ouverts et blancs, la marque presque noire au cou ainsi que la bouche entrouverte sur des dents irrégulièrement alignées. Rien d’étonnant à ce que son voisin, qui le connaissait à peine, ne puisse être certain de le reconnaître. Le plastique du collier disparaissait complètement, enfoncé dans la peau.

Les premières investigations effectuées, un officier de police souleva le corps pour le mettre sur le côté. Il remarqua aussitôt une feuille de papier blanc de format A4, pliée. Il la déplia et lut ces quelques mots imprimés : « En souvenir de Pierre Le Grand ». François Le Duigou et Yann Le Godarec s’en emparèrent et ajoutèrent ce document aux scellés déjà constitués par le portefeuille, un mouchoir, un porte-monnaie, un trousseau de clefs, un paquet de cigarettes d’importation, au vu de la vignette, un stylo à bille, un étui contenant un peigne et une lime à ongles.

Les premiers travaux terminés, le corps fut enlevé et acheminé à l’institut médico-légal pour autopsie. François ordonna au jeune stagiaire, futur officier de police et visiblement secoué par la première affaire de sa vie, d’interroger le voisin de palier tandis qu’il accompagnait l’équipe de la police technique et scientifique dans l’appartement de la victime. Une foule compacte s’amassait à présent le long de la grille du jardin. François regarda de ce côté en ce disant que, peut-être, le meurtrier se trouvait dans le groupe et qu’il les observait, vérifiant son ignoble travail. Il se demandait aussi ce que pouvaient penser tous ces badauds.

François et l’équipe de la police technique et scientifique gravirent l’escalier. La porte d’entrée était commandée par un digicode. Le témoin précisa, au passage, qu’en cas de panne, chaque locataire disposait d’une clef pour cette porte ainsi que pour celle du garage du sous-sol.

Une des clefs du trousseau permit l’ouverture de l’appartement. La porte donnait sur une grande pièce de vie. Tous les cartons du déménagement n’avaient pas encore été vidés et s’entassaient dans l’angle de la pièce. Sur la gauche, une cuisine à l’américaine, en face, un WC et une salle de bains. Sur la droite, une grande chambre. Le logement ne présentait pas de désordre. Posée sur le téléviseur, la photo du jeune homme, au volant d’un important ensemble routier. Sur un meuble bas, des cartouches de cigarettes en provenance d’un pays frontalier. Sur la moquette, un carton ouvert contenait encore plusieurs cartouches de cigarettes d’importation. Sur une étagère, une série de matriochkas gigognes en bois peint - ces fameuses poupées russes. Rien n’attirait particulièrement l’œil par ailleurs. Pas de vaisselle en retard dans la petite cuisine parfaitement propre et bien entretenue. François ne remarqua rien non plus dans la salle de bains ni dans la chambre. Le lit était fait. Sur le chevet, une photo de la victime au milieu d’un groupe de jeunes devait dater de quelques années, peut-être du service militaire, sans doute un des derniers services obligatoires. À côté une autre photo d’un groupe scolaire, en la regardant de plus près cela éveilla chez François tout un tas d’émotions. Il se dit que l’occupant des lieux, en un clin d’œil embrassait son passé… Ces photos pouvaient évoquer chez lui la joie de la jeunesse comme la difficulté de grandir. Éprouvait-il des bouffées de nostalgie.

Selon les événements à suivre, il y aurait certainement lieu de revenir fouiller en détail le logement. Pour l’instant, il était convenu de le mettre sous scellés. Ils quittèrent les lieux.

De retour à son bureau, François apprit que l’enquête lui était confiée. Le patron venait de le lui annoncer après avoir eu le procureur. Il n’avait pas d’autres solutions que d’appeler son ami et collègue, le lieutenant Phil Bozzi à son domicile.

— Phil ? C’est François. Comment vas-tu ?

— Je vais très bien. Nous venons de passer une super journée. Nous ramenons des châtaignes, des pommes et des cèpes de notre sortie. Gwen est ravie. Nous allons attaquer la préparation d’une succulente omelette, si le cœur t’en dit, en rentrant chez toi, tu t’arrêtes. Quand il y en a pour deux il y en a pour trois ! Est-ce toujours aussi calme ?

— C’était ! Le temps vient de changer depuis tout à l’heure. Nous écopons d’une sale affaire a priori. C’est pour cette raison que je t’appelle. Demain matin, première heure, sur le pont !

François situa en quelques mots cette nouvelle enquête pour ne pas trop perturber Phil.

Puis, il informa son épouse Paulette qu’il rentrerait tard, il commença à rédiger les procès-verbaux. Elle était habituée depuis le temps et lui proposa, avant d’aller se coucher, de lui griller des châtaignes dans la cheminée qu’elle mettrait sur le côté dans un papier en aluminium pour les garder au chaud à son retour. Elle savait que François adorait en manger devant une flambée en buvant un verre de cidre doux, frais.

La victime, Soan Le Rou, vingt-huit ans, était née à Morlaix. Le jeune homme n’avait pas eu le temps de faire changer l’adresse de sa carte d’identité. Il était toujours domicilié quai de Tréguier à Morlaix. Le permis de conduire précisait qu’il était chauffeur de poids lourds. Des fiches de paye, découvertes dans le logement, indiquaient qu’il était salarié à la grande société STEN (Société des Transports de l’Europe du Nord), basée à la sortie de Quimper.

Demain matin, il devrait commencer par approfondir leur connaissance de la victime avec Phil Bozzi. François se demandait ce qui pouvait pousser une personne à agir de la sorte. Le premier objectif semblait clair : le meurtrier avait visé précisément cette personne. Il devait la connaître. Impossible d’imaginer une frappe aussi précise au hasard. Peut-être la suivait-il depuis quelque temps ? L’enquête de voisinage apporterait certainement des renseignements.

Quelle était la signification de ce message « En souvenir de Pierre Le Grand » ? François se disait que « Le Grand » était un nom très répandu en Bretagne, mais s’agissait-il d’une personne vivante ou décédée ? Avait-elle un lien avec la victime ? Où était-ce une allusion à tout autre chose, comme le nom d’un établissement scolaire ?

Les hypothèses se présentaient nombreuses et il paraissait impossible pour l’instant de tenter d’en isoler une plus particulièrement, au risque de prendre une mauvaise piste.

François sentait déjà que l’enquête ne serait pas très simple, d’ailleurs aucune ne l’était. Mais démarrer d’une façon aussi brutale ne présageait rien de bon. Il n’aimait pas les meurtres si expéditifs. Cela supposait de la préméditation et de la détermination. Ce type de meurtrier l’inquiétait, car la signature pouvait laisser supposer une suite… Le meurtrier avait choisi un message identifiable ; à qui était-il adressé ? Pourquoi ?

Éparpillées devant lui, éparpillées, les pièces du dossier et les images crues l’obligeaient, en cette fin de dimanche clair et doux, à s’isoler du monde.

Il imaginait son épouse devant la cheminée. Il se disait que son collègue Phil devait lui aussi déjà penser à cette nouvelle affaire qui l’attendait. Il s’employa, pendant quelques minutes à chasser la nausée qui lui montait à la gorge et reprit la rédaction de ses rapports. Il en était aux constatations et à l’énumération des scellés…

Le souvenir du jeune homme allongé dans le jardin ne le quittait pas. Il s’efforçait par moments, de rédiger certains passages très rapidement, comme pour passer plus vite sur l’horreur. Il entrait à présent complètement dans cette nouvelle affaire qui allait occuper totalement son esprit pour les jours, les semaines voire les mois à venir… Il boucla son rapport bien après vingt-trois heures.

1. Voir Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou, même auteur, même collection.

 

Chapitre 2

Il entra dans la chambre inoccupée, mais parfaitement rangée, comme si l’occupante habituelle venait de la quitter. Les photos, bibelots et poupées laissaient penser qu’ils devaient appartenir à une jeune fille. Hésitant, d’un pas mal assuré, il se dirigea vers un petit meuble à usage de table de nuit. Il se pencha pour ouvrir la petite porte en bois et sortit un registre 21 x 29,7.

La couverture rigide noire, en carton entoilé, lui donnait l’apparence de ces registres d’état civil ou de ces anciens livres de compte. En le tenant en main et le serrant précieusement contre lui, il vint s’asseoir au bout du lit. Il posa le précieux document sur les genoux, le feuilleta délicatement pour rechercher précisément une page sur laquelle il s’arrêta.

 

*

 

Jeudi 15 mai, J-2.

Ces annotations étaient portées d’une écriture parfaitement assurée, tout en haut de la feuille. Comme à chaque fois, il se plongea dans la lecture…

Si tu savais comme je suis heureuse de faire ce merveilleux voyage et peinée à la fois, car tu ne seras pas à mes côtés.

Au moment même où j’écris ces lignes, avant de me coucher, comme chaque soir, je réalise que c’est la première fois de notre vie que nous serons séparés réellement et pour une durée aussi longue. Te souviens-tu du moment où nous avions décidé d’ouvrir ce journal intime ?

En entrant en sixième ! Le passage au collège avait été déterminant, nous avions tellement eu peur d’être séparés que, juste avant la rentrée scolaire, nous nous étions rendus à la librairie-papeterie du centre-ville de Morlaix pour acheter cet énorme registre à petits carreaux. Cela me fait tout drôle d’y repenser aujourd’hui. Notre appui pour nous aider face aux épreuves, notre moyen de résistance. Un espace de liberté aussi, où nous pouvons nous confier, nous raconter, sans être jugés. C’est notre sphère de création, notre défouloir…

Je m’aperçois que nous n’avons pas été séparés plus d’une journée. Sauf une fois ! Lors de ton appendicite ! Comme j’avais eu peur à cette époque ! Ma tête bouillonnait, mes nuits furent peuplées de cauchemars. Nous en avons ri ensemble ensuite…

J’en reviens à mon départ pour ce fabuleux voyage. Quel dommage que le nombre de places soit bloqué ! Tu as tellement insisté pour que je parte sans toi, que j’ai fini par accepter. Mais tu sauras tout de ce que je vais vivre, jour après jour…

Je viens à l’instant de relire tout le programme et je m’imprègne à présent de l’histoire de cet immense pays, de sa géographie… J’aimerais connaître tellement de choses pour préparer ce premier voyage de ma vie à l’étranger. Ce sera humainement une expérience enrichissante que je voudrais te faire partager totalement à mon retour.

J’entends déjà les sons des balalaïkas…

Dans mon esprit, je revois Le Docteur Jivago que nous avons vu et revu ensemble… Serai-je agréablement surprise ? Déçue ? Enthousiasmée ? Je suis terriblement impatiente à présent…

 

*

 

Vendredi 16 mai, J-1.

C’est la première fois que je pars sans toi. Demain, à Paris, un avion me propulsera à plusieurs milliers de kilomètres de Morlaix. Aurai-je peur de l’avion ? Avant d’éteindre la lumière de ma chambre, je me sens à nouveau subitement triste, sans doute une réaction de mon esprit perturbé par cette expérience qui m’attend. Quelque chose me dit que je ne devrais pas partir, peut-être est-ce dû aux crashs d’avions qui ont marqué l’actualité de ces derniers temps ? L’attentat attribué aux Tchétchènes à l’opéra de Moscou ? Que sais-je ? Non, je ne devrais pas partir sans toi… Comment vais-je vivre sans ta présence rassurante, sans nos échanges quotidiens ? Je veux renoncer à mon départ… ne pas mettre mon réveil à sonner tout à l’heure, simuler une maladie brutale, tiens une appendicite !

Non, à la réflexion, tu n’apprécierais pas. Est-ce bien raisonnable ? Je sens monter l’angoisse du départ. Je vais partir… c’est décidé… mais j’ai mal déjà de vivre notre séparation.

 

*

 

Samedi 17 mai, J !

Tu viens de me déposer à l’aéroport. Je t’ai vu t’éloigner. Quelque chose me pince le cœur. Le jour ne s’est pas encore levé. La société de communication de l’enseigne commerciale qui nous offre ce fabuleux voyage vient de nous accueillir. Comme prévu, nous sommes dix, pas un des gagnants ne manque à l’appel.

Bien que nous soyons tous de Morlaix et des environs, nous ne nous connaissons pas. Deux jeunes filles doivent avoir à peu près mon âge. Je me rapproche d’elles. Comme nous, quatre jeunes hommes, entre vingt-cinq et trente ans, se regroupent de leur côté, un homme d’une quarantaine et un autre d’une soixantaine environ. Tout naturellement, trois groupes viennent de se former par affinités. L’agence de communication nous attend pour la photo de groupe. Elle dispose devant nous la banderole de l’enseigne commerciale. Puis, nous nous dirigeons vers la porte annoncée. Nous voilà installés dans un Tupolev, plein à craquer. Un charter sans doute. Mon cœur bat très fort. Comment va se passer ce premier voyage aérien ? J’ai peur… si tu savais comme j’ai peur… Les autres ont-ils peur comme moi ? Je n’en ai pas l’impression, ça me rassure !

Après trois heures trente de vol, l’avion nous a déposés à l’aéroport international de Cheremetievo-2, en pleins travaux de rénovation, situé à trente kilomètres, au nord de Moscou.

Je suis à Moscou ! Je n’arrive toujours pas à réaliser. J’ai envie de le crier, mais je dois me montrer raisonnable, tout le monde paraît calme, comme si cela était normal ! Sur le parking de l’aéroport, un autre groupe s’est joint à nous pour compléter le car qui nous dépose au terminal fluvial nord sur le canal de Moscou pour rejoindre notre bateau. Notre croisière se déroulera sur le Dimitri Furmanov. Il nous mènera de Moscou à Saint-Pétersbourg. Notre bateau ne reçoit que des Français et l’équipe d’animation nous accueille dans notre langue. Un groupe folklorique chante, danse et joue de la musique à bord. Je filme et photographie tout ce que je peux. Nous, les trois filles, prenons les premières cabines, suivies des adultes et des quatre garçons. Mes deux nouvelles amies de voyage s’appellent Nolwenn et Sandrine. Elles ont l’air très gentilles. Nolwenn est visiblement heureuse de vivre et boute-en-train. Sandrine, plus réservée, adepte du piercing, porte une tenue plus extravagante, fume beaucoup, son regard est plus porté vers les garçons que le paysage…

 

Chapitre 3

Lundi 27 octobre.

En ce début de semaine, la première heure est la plus savoureuse. Les troupes fraîches apportent les effluves d’after-shave, de déodorant et de parfum. Elles croisent les « nuiteux » aux joues noircies par la barbe et dont une forte odeur de tabac, de transpiration et parfois de crasse se mélange à certains relents d’alcool. Bref, les odeurs d’une nuit de dimanche qu’une bonne odeur de café vient parfois sauver. Ce lundi matin n’échappait pas à la règle. Les journaux locaux évoquaient déjà l’affaire de la veille. Les discussions allaient bon train devant la machine à café. Phil discutait avec les collègues en attendant François.

Celui-ci arriva de son pas tranquille. Rien ne pouvait le faire aller plus vite ni changer son rythme. Il s’arrêta à peine, tout juste le temps pour Phil de lui programmer la machine pour son café et tous deux, gobelets fumants en main, se dirigeaient vers leur bureau.

Rapidement François reprit tous les éléments de la veille. Le temps de passer voir le patron et déjà ils partaient vers les lieux du meurtre. Les bandes plastiques fluorescentes délimitaient toujours le périmètre protégé. Phil gara la voiture dans l’allée.

Ils se positionnèrent tout d’abord le long de la rue. Il était clair que le meurtrier ne pouvait être remarqué, dissimulé par les arbustes et les buissons. Phil et François tentèrent d’imaginer l’arrivée de la victime : elle devait tourner le dos à son agresseur afin d’emprunter l’escalier extérieur. L’effet de surprise avait été total. Son forfait accompli, le meurtrier pouvait quitter les lieux par l’entrée de la propriété donnant sur la rue. Une inspection de la clôture du jardin montrait qu’il était impossible ou risqué de s’en aller par le jardin situé à l’arrière de la maison. En partant, ils croisèrent les officiers de police en charge de l’enquête de voisinage. Pour l’heure, visiblement, personne n’avait rien remarqué. Tout au plus, une dame âgée qui habitait juste en face de l’entrée, de l’autre côté de la route, en rentrant de promenade avec son chien, avait-elle vu un jeune homme de taille moyenne, brun, de vingt-cinq ans environ, sans pouvoir en donner une description précise et surtout sans pouvoir certifier que cette personne sortait de la propriété. Le jeune homme pouvait très bien passer simplement sur le trottoir. Autant dire qu’aucun indice n’avait été relevé pour l’instant.

Phil et François prirent aussitôt la direction de l’institut médico-légal. Ils n’y avaient pas remis les pieds depuis l’affaire de Châteauneuf-du-Faou. En retrouvant l’odeur des antiseptiques et du formol, Phil se sentit mal à l’aise, surtout en ce début de semaine après deux journées passées en famille. Les morts violentes, les accidents de la route, le plus souvent survenus le week-end, apportaient leur lot habituel du lundi matin. Penché devant un compartiment ouvert, leur ami, Pascal Le Bon, examinait un corps tandis que son auxiliaire en relevait les mensurations.

— Ah ! Salut les gars, j’ai commencé par votre client ce matin !

D’un geste, il les invita à le suivre. Il avait revêtu sa tenue d’opération : bonnet, lunette d’autopsie, blouse verte, bottes de caoutchouc et gants de latex. Si François le suivit gaillardement, Phil montrait toujours de la répugnance face aux cadavres. Ils devinèrent le corps allongé sur la table dans une toile de plastique blanc fermée par une fermeture éclair.

— J’ai terminé l’autopsie, le corps est totalement vidé de ses viscères. Ils sont dans les bacs, en vue de les peser et de les examiner, voulez-vous les voir ? dit-il avec un sourire, sûr de la réponse.

— Non, ce ne sera pas nécessaire, s’empressa de répondre François pour épargner cette épreuve à Phil qu’il sentait déjà suffisamment incommodé.

— Bon, dans ce cas, je vais parcourir le rapport. Il s’agit d’une mort par strangulation comme vous deviez bien vous en douter. Pas de blessure, pas d’autre élément à noter sur le corps. Pour moi, le meurtrier devait être extrêmement déterminé. À mon sens, il a dû agir avec précision et rapidité.

— Faut-il être physiquement fort pour réaliser cette action ?

— Non, tout réside dans la précision du geste et la vitesse d’exécution. Le piège est tellement redoutable qu’au pire, une fois son geste commis, le meurtrier peut s’en aller. Il reste très peu de chance de sauver la victime. Mais pour s’assurer du résultat, le meurtrier a dû tenir sa victime de dos pour l’immobiliser puis, ensuite, l’allonger sur le sol comme vous l’avez trouvée. J’ai constaté des marques de pression sur les deux bras sans doute pendant qu’il tenait la personne.

— Existe-t-il des traces de défense de la victime ?

— Non.

— Quelles sont les mensurations de la victime ? demanda Phil.