Peinture brûlante à Pontivy - Firmin Le Bourhis - E-Book

Peinture brûlante à Pontivy E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

Une affaire de routine... Vraiment ?

Le capitaine François Le Duigou et le lieutenant Phil Bozzi vont exceptionnellement prêter main forte à leurs collègues de Lorient.
Dès leur prise de fonction, suite à une banale déclaration de vol de voiture, nos deux officiers de police judiciaire vont rencontrer des personnages très attachants. Ils vont découvrir les jolies villes de Larmor-Plage, de Pontivy et de Guémené-sur-Scorff vers lesquelles l’enquête va les mener.
D’abord sceptiques, nos OPJ vont devoir déployer tout leur professionnalisme pour dénouer le fil d’un écheveau bien embrouillé…

Le Duigou et Bozzi sont affectés provisoirement à Lorient pour une enquête ficelée de main de maître !

EXTRAIT

Phil et François apprirent ainsi leur affectation à Lorient à partir du lundi 17 janvier suivant. Ils avaient juste le temps de boucler leurs dossiers en cours et de laisser les consignes à leurs collègues avant de partir. Cette mutation provisoire n’avait pas l’heur de plaire à François. Devenu plus casanier, il n’appréciait guère que l’on vienne bousculer ses petites habitudes. Phil y trouvait un certain attrait, car cela lui permettrait de découvrir une autre ville du sud Bretagne, voire une autre région. Les fêtes de fin d’année passées, le mois de janvier ne lui posait pas de problème pour bouleverser son emploi du temps. La voie express rapprochait les distances. Lorient n’était pas le bout du monde pour ce changement, annoncé pour une courte durée…
Phil et toute sa famille profitèrent même du week-end pour se rendre à Lorient. Ils commençaient véritablement à bien connaître le Finistère, c’était, à présent, l’occasion de s’intéresser au Morbihan…

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Firmin Le Bourhis propose toujours des enquêtes classiques et balisées, ainsi que bien documentées. S’il évoque en détail les lieux, il nous présente surtout une affaire criminelle retorse. - Claude Le Nocher, Rayon Polar

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Peinture brûlante

à Pontivy

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

Aux éditions Chiron

 

Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour

 

Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire

 

Aux éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

Dépôt légal 4e trimestre 2014

ISBN : 978-2-916248-69-1

 

 

 

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres, des lieux privés, des noms de firmes, des situations existant ou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70 - Fax : 01 46 34 67 19 - © 2014 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

À Lionel Collet, de Pontivy, pour les éléments d’un fait diversqu’il m’a apportés et qui ont servi de support à ce récit, de même que pour sa documentation précisesur la ville de Pontivy et pour les ouvrages qu’il m’a confiés.

 

À Pascal Vacher, officier de police judiciaire pour ses conseilset ses renseignements techniques.

 

À Yannick Rozelier, correspondant Ouest France, et son épouse,pour leur accueil et leurs informations à leur magasinMag-Presse à Guémené-sur-Scorff.

 

À l’accueil reçu lors de mon passage à l’Office de Tourismede Guémené-sur-Scorff, de Pontivy et de Lorient.

 

Aux policiers rencontrés à l’Hôtel de Policequai Charles de Rohan à Lorient.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Deux choses sont infinies,

l’Univers et la sottise humaine.

Mais je ne suis pas sûr de ce que

J’affirme au sujet de l’Univers…

 

Albert Einstein (1879-1955)

 

 

 

 

Je crois que l’imagination humaine

N’a rien inventé qui ne soit vrai.

 

Gérard de Nerval (1808-1855)

 

Chapitre 1

Mi-janvier - Commissariat de Quimper.

Quelques semaines plus tôt, l’immense désastre causé par le Tsunami dans l’Océan Indien marquait à tout jamais l’histoire de notre planète. Il rappelait aussi à l’homme que la vie et la mort se côtoient en permanence, attachées l’une à l’autre, faces indissociables d’un même destin. Le monde entier continuait sa mobilisation pour venir en aide à l’Asie après ce gigantesque séisme qui avait touché onze pays et fait plus de trois cent mille morts ou disparus, essentiellement en Thaïlande, en Inde, au Sri Lanka et en Indonésie.

En cette mi-janvier, de façon plus banale, après une terrible épidémie de gastro-entérite, voilà que la grippe sévissait de plus en plus sur l’ensemble de l’Europe de l’Ouest.

Au Congrès de Barcelone, le quatuor des grands se transforma en duo, car Silvio Berlusconi et Gerhard Schröder annoncèrent leur défection pour grippe.

Jacques Chirac et José Luis Zapatero allaient devoir assurer pour quatre ! D’autant que l’Espagne comptait de plus en plus sur l’échiquier européen et qu’elle serait la première à voter pour ou contre la constitution européenne.

Même si notre Président de la République tenait le coup, la France n’avait jamais connu un tel nombre de personnes alitées. Les journaux télévisés annonçaient plus de deux millions de personnes touchées. Le « Plan Blanc » d’urgence était décrété dans différentes régions du pays. Toulouse en tête. Les bras commençaient à manquer un peu partout. Certains services administratifs et des ateliers tout entiers devaient même fermer leurs portes. Cette contagion occupait dorénavant la une de la presse et des médias en général. Tout comme pour la canicule de 2003, des voix s’élevaient ici ou là pour mettre en avant les insuffisances constatées face à une telle pandémie. Mais la France ne se contente-t-elle pas trop facilement de slogans qui ne sont souvent que bonne conscience, au nom du principe de précaution ?

Le commissariat de police de Quimper semblait ménagé par ce fléau. Phil Bozzi et François Le Duigou assuraient leur charge de travail sans faiblir. Leur famille respective était épargnée, pour l’instant encore.

C’est dans ce contexte particulier que le patron, Yann Le Godarec, débarqua dans leur bureau. Pour assurer le service, préfets et procureurs de différentes villes de Bretagne s’étaient réunis en cellule de crise afin d’équilibrer les moyens humains entre les commissariats. Il devenait urgent de détacher des équipes ou des binômes, au moins d’une ville sur une autre. Le Finistère étant moins touché que le Morbihan, des affectations provisoires devaient être envisagées au profit de Lorient et de Vannes.

Phil et François apprirent ainsi leur affectation à Lorient à partir du lundi 17 janvier suivant. Ils avaient juste le temps de boucler leurs dossiers en cours et de laisser les consignes à leurs collègues avant de partir. Cette mutation provisoire n’avait pas l’heur de plaire à François. Devenu plus casanier, il n’appréciait guère que l’on vienne bousculer ses petites habitudes. Phil y trouvait un certain attrait, car cela lui permettrait de découvrir une autre ville du sud Bretagne, voire une autre région. Les fêtes de fin d’année passées, le mois de janvier ne lui posait pas de problème pour bouleverser son emploi du temps. La voie express rapprochait les distances. Lorient n’était pas le bout du monde pour ce changement, annoncé pour une courte durée…

Phil et toute sa famille profitèrent même du week-end pour se rendre à Lorient. Ils commençaient véritablement à bien connaître le Finistère, c’était, à présent, l’occasion de s’intéresser au Morbihan…

Muni de son guide de la ville, Phil Bozzi apprit ainsi que le pays de Lorient avait déjà une longue histoire, sans doute de cinq mille ans, au regard des recherches archéologiques effectuées mais que c’était surtout la Compagnie des Indes qui lui avait donné véritablement la possibilité de s’ouvrir sur le monde, notamment par l’édit royal de juin 1666. Celui-ci avait retenu le lieu comme étant le plus propice et le plus commode pour l’établissement de la Compagnie : Port-Louis recevant les magasins et la presqu’île du Faouëdic l’implantation de son chantier naval. Cette année-là peut donc être considérée comme celle de la fondation de Lorient sous le vocable de L’Orient.

Des périodes fastes succédèrent à d’autres plus difficiles du XVIIe et XVIIIe siècles. Après la révolution de 1789, L’Orient se transforme alors en Lorient. La ville se dessine au fil des années et en complément de l’activité militaire, s’ajoute, au XXe siècle, l’ouverture d’un port de pêche qui deviendra le deuxième de France et connaîtra l’essor du port de commerce.

La deuxième guerre mondiale sera un désastre pour la ville bombardée et détruite à près de 90 % en 1943. Sa reconstruction lui façonnera un visage moderne, sans patrimoine historique. C’est cette ville que Phil et sa famille découvraient…

Le petit groupe arrivait à présent à hauteur de l’hôtel de police situé Quai Charles de Rohan, intégré dans une construction de granit gris comprenant également la sous-préfecture et le palais de justice. Un ensemble uniforme protégé par des grilles métalliques peintes en vert sombre, fixées sur un soubassement en pierre de taille. Toute la famille Bozzi marchait sur le trottoir, devant le commissariat. Puis elle traversa la rue pour se retrouver devant le Palais des Congrès d’où s’offrait une très belle perspective sur le port de plaisance, lieu de départ de certaines grandes courses nautiques à la voile.

La voiture les emmena vers l’Office de Tourisme, l’embarcadère Lorient-Groix, la zone de l’estacade et le port de commerce afin de découvrir la rade de Lorient, puis le port de pêche et l’ancienne base sous marine de Kéroman… La voiture franchit le Ter qui, à marée basse, côté gauche, donnait l’impression d’un marigot tandis que, de l’autre, l’étang du Ter offrait le beau plan d’eau qu’animent à la belle saison les voiliers de la base nautique. Ils continuèrent en direction de Larmor-Plage.

La journée était ensoleillée et la température anormalement douce pour cette journée de mi-janvier. L’épouse de Phil s’intéressait de plus en plus aux églises et chapelles de Bretagne. Au fil du temps, elle se constituait une impressionnante documentation sur leur architecture et histoire. Elle envisageait de leur consacrer un jour un beau livre.

Sur la gauche, un curieux clocher en pierre qui dominait les toits des maisons du centre de Larmor-Plage, leur fit faire un crochet. La halte leur permit de découvrir l’église Notre-Dame de Larmor avec ses cinq retables du XVIe et XVIIe siècles, son porche aux douze apôtres, orienté ici au Nord, contrairement aux habitudes, généralement vers le Sud.

Un panneau situé dans le jardin, leur indiqua qu’à l’origine, cet édifice était une chapelle de pèlerinage pour les marins et le clocher-tour, autrefois, une tour de guet fortifiée surmontée d’une flèche. La date de début des travaux les interpella : 1491. L’année du mariage de la duchesse Anne de Bretagne avec Charles VIII. Le bâtiment religieux n’avait été terminé qu’en 1552. Depuis 1990, il était classé monument historique. Autant d’informations qui viendraient compléter sa documentation déjà fournie.

Après cette étape qui ne sembla pas obtenir l’adhésion totale des enfants, ils longèrent la côte vers Fort Bloqué et Guidel… Un bon vent offrait aux surfeurs la possibilité de s’exprimer au mieux et ils jouaient avec les vagues pour le plus grand plaisir des yeux émerveillés des enfants, cette fois bien plus captivés. Les démonstrations rivalisaient en qualité avec celles qu’il est possible de voir à la Pointe de la Torche. Un agréable goûter de crêpes chaudes et de chocolat fumant combla cette après-midi de promenade du côté de Guidel-Plage.

 

Chapitre 2

Lundi 17 janvier - Hôtel de Police de Lorient.

Le lieutenant Bozzi et le capitaine Le Duigou furent reçus par le commissaire divisionnaire, grand patron du commissariat central, c’est-à-dire de tout le corps des policiers en tenue, d’un côté, et de toute la section divisionnaire de la police judiciaire, de l’autre. Son vaste secteur géographique d’activité s’étendait d’Hennebont au Fort Bloqué, soit sur une population de cent quarante mille habitants environ… La rapide présentation de l’organigramme fonctionnel effectuée, ils furent pris en charge par le commissaire principal Jean Saliou, leur nouveau patron durant ce détachement.

Aussitôt après, Phil et François découvrirent leur lieu de travail. Ils constatèrent que les effectifs en poste se réduisaient provisoirement à peau de chagrin. Après avoir salué les quelques officiers de police judiciaire présents, ils prirent possession de leur bureau pour recevoir les nouvelles demandes afin de laisser les affaires en cours aux collègues sur place. De la fenêtre du bureau, ils apercevaient, sur la gauche, le parc de verdure qui s’étendait du Palais des Congrès aux monuments aux morts, en face d’eux, le Palais des Congrès se situant en pignon et, sur la droite, le port de plaisance et sa forêt de mâts. Cette belle vue les réjouit et leur rappela la lutte acharnée que se livraient Riou sur PRB et Le Cam sur Bonduelle dans le Vendée Globe et qu’ils suivaient avec la plus grande attention, en habitués des pontons de Port-La-Forêt.

À peine s’étaient-ils installés à leur poste de travail et avaient-ils connecté leur ordinateur portable qu’un gardien de la paix de l’accueil apparut dans l’encadrement de la porte :

— Un homme voudrait porter plainte pour le vol de sa voiture, est-ce que vous pouvez le recevoir ?

— Pas de problème ! Faites-le venir !

Phil se tourna vers François :

— J’espère que nous n’aurons pas trop de vols de voitures ni de chiens écrasés à traiter !

Un homme, d’une quarantaine d’années, se présenta devant eux dans les secondes suivantes. Cheveux bruns, courts, une tenue de marque, mi-sport, mi-ville, lui donnait une certaine allure. Les présentations faites, invité à s’asseoir, l’homme parut fort aimable et répondit aux questions sans se faire prier. Il s’exprimait avec aisance, soutenant le regard des deux officiers de police judiciaire. Phil s’activa aussitôt sur son clavier tandis que François observait l’arrivant. Il le trouvait plutôt bellâtre que beau et plus apprêté qu’élégant et pensa qu’il avait tout pour plaire à une femme mûrissante…

Originaire de Belgique, Michel Van Queven, célibataire, habitait à Larmor-Plage depuis bientôt trois ans. Artiste peintre, il occupait une maison qui lui permettait d’exercer son art. L’état-civil enregistré, Phil en arriva au fait, afin d’écouter les circonstances de ce vol.

— Je me suis rendu hier, dimanche, sur les bords du canal à Pontivy avec mon amie afin de repérer quelques endroits à photographier pour, ensuite, les croquer. Nous avons utilisé sa voiture. J’avais laissé la mienne sur la place du…

— Je ne comprends pas très bien, nous sommes à Lorient, alors, pourquoi Pontivy ? De quelle manière se sont passées les choses ? Nous sommes nouvellement affectés ici, aussi faut-il tout nous expliquer clairement. Racontez-nous les faits dans l’ordre, s’il vous plaît.

— Je partage ma vie avec une femme qui s’appelle Marie-Jeanne de Kermao. Elle habite Pontivy. Elle occupe, en hiver, un appartement situé place du Martray à Pontivy. C’est une place médiévale qui reçoit le marché de la ville chaque lundi. En été, elle s’installe dans son moulin réhabilité, le long du Blavet.

— Vous partagez votre vie, dites-vous, en habitant, vous près de Lorient et elle à Pontivy ?

— Oui, c’est ainsi. Je peins, en général, les bords de mer plus que l’intérieur du pays. Afin de nous ménager une certaine liberté dans notre vie de couple, je passe autant de temps chez elle que dans ma location à Larmor-Plage… Je participe à de nombreuses expositions internationales également.

— Bien. Alors, cette voiture ?

— Il s’agit d’une Mercedes C 220. J’en change chaque année dans le cadre d’un contrat de location longue durée avec le concessionnaire de Lorient…

— Cette voiture était-elle équipée d’un système de protection particulier ?

— Non, c’est le modèle de base.

Il présenta sa carte grise et l’attestation d’assurance. Il expliqua ensuite que son amie avait tenu à prendre son véhicule car elle voulait déposer quelques affaires dans son moulin avant d’aller se promener avec lui à la découverte d’endroits intéressants à peindre. Ils étaient rentrés à la nuit et n’avaient pas prêté attention à sa voiture. Ils avaient ensuite dîné chez elle et passé toute la soirée devant la cheminée. Vers minuit, au moment de rejoindre sa voiture, il s’était aperçu de sa disparition…

— Comme il était tard, nous avons décidé d’attendre le lendemain pour porter plainte. Marie-Jeanne m’a prêté son véhicule pour rentrer. Et voilà, vous savez tout, est-ce clair cette fois ?

— Oui, je pense. Nous allons enregistrer votre plainte et déclencher le signalement de votre véhicule. Selon vous, vers quelle heure aurait-elle été volée ?

— Entre dix heures et minuit… Car je suis arrivé dans la matinée pour l’accompagner à la messe du dimanche matin… Tout au long de la journée, nous n’étions pas là, comme je viens de vous le dire. Nous n’avons constaté le vol qu’au moment de mon départ…

— C’est large comme tranche horaire. Volée dans la matinée, elle peut, à cette heure, se retrouver dans un pays de l’est ou en route pour l’Afrique du Nord !

— Oui, je m’en doute. Mais je viens de vous expliquer exactement de quelle manière les faits se sont déroulés. Je ne peux pas vous le dire autrement. Il me faut, à présent, une attestation de mon procès-verbal de déclaration de vol pour me rendre chez mon concessionnaire afin qu’il me mette un autre véhicule à disposition.

— Nous allons vous la remettre après signature. Cela vous est-il déjà arrivé ?

— Quoi ? Qu’on me vole ma voiture ? Non, jamais, pourquoi ?

— Pour rien. Si ce n’est que vous semblez bien connaître la procédure et guère affecté… Pourtant, une si belle voiture…

— Moi, vous savez, les voitures, ce n’est pas mon truc. J’en ai besoin pour me déplacer et puis c’est tout. Et, concernant la procédure, je suis passé voir le concessionnaire avant de venir ici et c’est lui qui m’a expliqué comment m’y prendre dans le cas d’un contrat de location longue durée…

— Effectivement, je comprends mieux. Eh bien, nous allons nous en occuper ! Ah si, une dernière chose, à quel numéro de téléphone pouvons-nous vous joindre ?

— Voici ma carte, je vais vous le noter dessus. Je suis répertorié en liste rouge pour ne pas être embêté par ces vendeurs de toutes sortes, vous comprenez ?

— Bien entendu. Et… votre portable ?

— Ce n’est pas nécessaire que vous l’ayez, j’ai un répondeur-enregistreur que j’interroge à distance régulièrement quand je m’absente…

— Comme vous voulez.

Phil et François restèrent dubitatifs après le départ de Michel Van Queven. À Pontivy, il n’y avait plus de police nationale sur la ville depuis la réorganisation Police-Gendarmerie. Subsistait encore la police municipale. Ils appelèrent en conséquence la brigade territoriale de gendarmerie située dans le Quartier Clisson, rue Julien Guidard. Pontivy était aussi dotée d’un important escadron de gendarmerie mobile et d’une brigade motorisée.

— Marie-Jeanne de Kermao ? Oui, elle est d’ici, issue d’une grande famille, elle possède un important patrimoine dans la région. Elle était mariée avec un type de Guémené-sur-Scorff. Un certain Jean-Olivier de Kerradoret. Fille unique, elle a perdu ses parents accidentellement il y a de nombreuses années. Elle exerçait comme assistante d’un parlementaire européen très connu en Bretagne. Un député avec qui elle a dû confondre relation professionnelle et personnelle, ce qui lui a valu son divorce, semble-t-il. Elle a donc repris son nom de jeune fille. Lors des élections, le député n’a pas été réélu, elle a perdu son boulot. Cependant, grâce à ses entrées dans le milieu du Parlement Européen, elle a réussi à exercer comme interprète à Bruxelles et à Strasbourg pendant quelques années, je crois que c’est à peu près ça…

— Quel âge a-t-elle ?

— Je dirais la cinquantaine.

— A-t-elle de la parenté sur Pontivy ?

— Pour toute famille, je crois qu’il ne doit lui rester que sa cousine. Elle doit avoir une dizaine d’années de plus qu’elle et vit à Guémené-sur-Scorff également. Pourquoi, il lui est arrivé quelque chose ?

— Non. Pas à elle. Et Michel Van Queven, cela vous dit quelque chose ?

— … ? Ce nom ne me dit rien !

— Ce serait l’ami de Marie-Jeanne de Kermao…

— Ah, l’artiste peintre ! J’en ai entendu parler, mais j’ignorais son nom ! Tout le monde sait qu’elle fricote avec un Belge, mais je n’en sais pas davantage ! Ils se seraient rencontrés à Bruxelles… mais c’était avant son AVC…

— Son AVC ?

— Oui. Marie-Jeanne de Kermao est, non seulement fortunée mais, en plus, c’est une jolie femme, enfin… je devrais dire c’était, car elle a été victime d’un accident vasculaire cérébral qui l’a beaucoup diminuée et handicapée. Depuis, elle ne travaille plus, c’est bien triste d’ailleurs… Mais, elle est courageuse.

Phil raconta alors l’entretien avec Michel Van Queven et le vol de la Mercedes, mais ceci ne semblait pas exceptionnel ni anormal. Fait divers classique, hélas, qui n’entraînait pas de commentaire particulier. Pontivy n’était pourtant pas une place connue pour ses vols de voitures. Ceux-ci étaient plus répandus sur Lorient ou Vannes.

Une fois les démarches administratives accomplies, Phil et François se chargèrent de recevoir à un rythme soutenu le défilé habituel de personnes pour dégradation de véhicule, perte de papiers et vols divers, réalisant que la ville de Lorient semblait plus agitée, de ce côté, que celle de Quimper.

En fin de journée, le sympathique gardien de la paix vint les rejoindre :

— Vous n’avez pas chômé, au moins vous pourrez dire que vous n’êtes pas venus pour rien !

— C’est le moins qu’on puisse dire ! Alors, dans ce commissariat de Lorient, comment va la vie ?

— Nous sommes une super équipe et avons d’excellents rapports entre nous. Solidaires. Soudés. En général, ceux qui viennent y travailler s’y plaisent.

— Et le patron, comment est-il ?

— Le commissaire Saliou est un type bien. Fédérateur et intègre au management participatif, vous verrez… Il a juste une petite manie qu’il applique davantage avec les nouveaux venus. Passionné de Latin et de Grec, mais aussi excellent juriste, il ne peut s’empêcher de coller, ici ou là, des citations latines ou grecques pour épater la galerie. Ceci dit, il est très cultivé et intéressant mais parfois chiant pour ceux qui n’accrochent pas à ses commentaires de latiniste…

— Nous avons remarqué aussi, dans le fond du couloir, un type qui ne donne guère l’impression de se mélanger aux équipes…

— Oui, c’est Pierrot. Lui aussi c’est une tête… Mais, c’est un peu le bordel dedans, fit le gardien de la paix, d’un geste de la main en direction de sa tempe. Il est sous-off, bien qu’ayant réussi brillamment le concours des officiers de police judiciaire. Il a des difficultés pour s’exprimer verbalement et est incapable de prendre un commandement. Sinon, il rédige bien et a de solides connaissances. Certains se moquent parfois de lui à cause de sa façon de s’exprimer. Aussi préfère-t-il se mettre un peu en retrait, mais c’est un brave type… Il paraît que ses deux enfants sont comme lui. Un QI qui explose, des études brillantes et pas de communication ni de vie à côté… Mes gosses les connaissent bien, ils me disent toujours qu’ils ne vivent pas…

— Vous en avez encore beaucoup de cas particuliers ?

— Non. C’est tout ! Et ce n’est rien de bien méchant. Je ne sais pas comment c’est chez vous à Quimper, mais, ici, au fil des mois, le boulot ne cesse de grimper, alors nous n’avons pas tellement le temps de lever le nez. De plus, les moyens humains ne suivent pas. Et maintenant avec cette sale épidémie, c’est le bouquet !

— C’est, hélas, un peu partout pareil. Je crois que nous allons faire du bon travail ensemble.

— Je n’en doute pas. Nous sommes bien contents de bénéficier de votre aide. Sur ces mots, bonne soirée et à demain, bon pied, bon œil !

 

Chapitre 3

Jeudi 20 janvier - Commissariat de Lorient.

Troisième jour de travail loin de leur base habituelle pour Phil et François. Les procès-verbaux de toutes sortes ne manquaient pas. Détention de stupéfiants, alcool au volant, vol à la roulotte, conduite sans permis, des délits habituels, mais aucune affaire ne sortait du lot. La routine…

La sonnerie du téléphone de François retentit :

— Brigade territoriale de la Gendarmerie de Pontivy. C’est bien vous qui m’avez appelé l’autre jour au sujet d’un vol de voiture ?

— Oui. Surtout pour avoir des informations sur une certaine dame de Kermao, l’amie de notre Belge qui s’était fait voler son véhicule. Pourquoi, vous avez du nouveau ?

— Oui, on l’a retrouvée !

— C’est une chance, car ce type de bagnole, en général…

— Ne vous réjouissez pas trop vite. Il y a, tout de même, comme un petit problème !

— C’est-à-dire ?

— Elle a été incendiée dans une grange qui servait à ranger du foin et de la paille pour des bêtes, entre Pontivy et Guémené-sur-Scorff…

— Ça alors, elle ne sera pas allée bien loin…

— Attendez, ce n’est pas tout ! Dedans, on a retrouvé un macchabée tellement carbonisé qu’il faut attendre les résultats des experts pour savoir si c’est une femme ou un homme et en connaître un peu plus sur ce qui s’est passé !

— Eh bien, je crois que nous allons avoir un peu plus de boulot encore, sans tarder !

— Nous avons remonté les faits au procureur. Nous attendons.

À peine eurent-ils raccroché que mille questions traversèrent l’esprit de François et de Phil tout en restant silencieux quelques instants.

— Phil, tu le sens toi, ce Belge ?

— Pourquoi, tu crois qu’il est dans le coup ? Il m’a plutôt fait une bonne impression pourtant.

— Je ne sais pas…

Ils n’eurent guère le temps de pousser plus loin leur réflexion qu’un nouveau dépôt de plainte se présenta et, juste après, le commissaire Saliou débarqua dans leur bureau.

— Le substitut du procureur vient de m’appeler. Comme vous êtes détachés sur Lorient, plutôt que de vous consacrer aux affaires locales, il préfère que vous vous occupiez de cette voiture brûlée et de son propriétaire Belge. Avec tout ce que l’on a vu dans les journaux depuis quelque temps dans le Nord de la France et en Belgique, il pourrait être influencé ! Le substitut trouve que ça sent la magouille. Il vous nomme directeur de cette enquête. Si vous pouviez rendre visite à notre homme, au concessionnaire et à son amie à Pontivy… Puis, vous examinerez avec les experts ce qu’ils ont pu faire ressortir et ce qu’ils en pensent… Vous avez du pain sur la planche. Mais, Labor improbus omniat vincit ! Un labeur opiniâtre vient à bout de tout !

— Hey, mais vous connaissez le latin ! Enchaîna aussitôt Phil afin d’amener le patron sur son sujet préféré, en évitant de regarder François pour ne pas sourire.

— Oui, quand je faisais mes études fin soixante, début soixante-dix, il y avait les classiques et les modernes. Je faisais partie des premiers. Quatre langues au minimum, dont le grec et le latin… Bref, j’ai une maîtrise de lettres classiques et je devais me diriger vers l’enseignement. Mais, après soixante-huit, l’enseignement… surtout dans ces matières, vous voyez ce que je veux dire… J’ai fait volte-face pour devenir juriste. Puis, par accident, je me suis présenté avec succès au concours d’entrée à l’école des officiers de police à Cannes-Écluse, près de Melun. Plus tard, je me suis présenté au concours de commissaire et j’ai été à l’École Nationale Supérieur de Police de Saint Cyr au Mont d’Or dans le Rhône. Voilà en deux mots…

— Bravo ! Parcours peu orthodoxe, mais brillant ! Nous avons la chance d’avoir un patron érudit. Je sens que ça va être un réel plaisir de travailler avec vous.

— Oh, vous savez… Il ne rajouta rien, mais Phil et François avaient su toucher le point sensible, son ego et sa modestie… grâce aux pertinentes informations du collègue, gardien de la paix. Ceci devrait être de nature à établir de bons rapports entre eux.

Ce genre d’investigation n’était pas pour déplaire à Phil et François qui se sentirent subitement plus motivés par ce travail. L’administratif commençait à leur peser.

Ils quittèrent le quai Charles de Rohan afin de rejoindre l’avenue du Général de Gaulle, le rond-point Bir-Hakeim pour emprunter la D29, rue Monistrol. Ils franchirent la rivière, le Ter, pour se retrouver à Larmor-Plage toujours sur la D29 appelée ici rue du Président Kennedy. Avant d’arriver au centre-ville et la plage de Port Maria, ils tournèrent à gauche, Rue Beau Rivage. Au bout de cette courte rue, un magnifique panorama s’offrit à leurs yeux. Impossible d’aller vers la droite, ils tournèrent à gauche sur le boulevard de Toulhars dominant la plage éponyme.

Ils s’étaient bien gardés d’appeler Michel Van Queven, préférant jouer l’effet de surprise. En longeant la plage, ils découvrirent, tout au bout, sur la gauche, dans une rue étroite, la maison, simple, récemment rénovée, fraîchement crépie de jaune ocre, comme cela se pratiquait beaucoup à présent. Fenêtres et volets en PVC blanc, toiture recouverte d’ardoises naturelles. Le portail ouvert donnait sur une allée gravillonnée. Une Mercedes C 220 était garée devant la porte du garage, laissant augurer que l’homme devait être présent.

Ils sonnèrent à la porte d’entrée. Une voix lointaine leur répondit :

— Patientez quelques instants, je viens vous ouvrir !

Quelques longues secondes plus tard, notre homme se présenta en blouse blanche maculée de peinture de différentes couleurs.

— Excusez-moi, je travaillais, le temps de m’arrêter, de ranger un peu mon plan de travail, de me laver les mains… voilà, je suis à vous. Si vous voulez bien entrer.

Ils pénétrèrent dans le couloir et furent dirigés vers une pièce, salon-salle à manger, sur la gauche. La maison était trompeuse, car plus profonde que large de façade.

— Je vous montre mon atelier ?

Dans le prolongement de la pièce, une très grande véranda donnait sur le jardin. Il y régnait un désordre indescriptible : des toiles de toutes sortes, certaines achevées, d’autres en cours ou parfois seulement esquissées voire griffonnées et tout un matériel en pagaille sur une table ou sur des petits meubles côtoyant différents chevalets.

— Voilà, c’est ici que je travaille, voyez, dehors, cette magnifique vue ! En face, de l’autre côté, la citadelle de Port-Louis et le chenal d’accès au port de Lorient. Sur la droite de la ville fortifiée, la pointe de Gâvres ! Superbe, non ?

— Très beau, en effet !

— Tiens, encore une marie-salope qui se dirige vers Groix avec sa vase !

— Pardon, demanda Phil, interloqué par l’expression, en regardant en direction du chaland qui passait au même moment.

— Non, ce n’est pas une vulgarité, c’est seulement le nom donné à ces embarcations… Elles n’ont pas fini de passer avec leur vase…

Tout en parcourant du regard certaines toiles, Phil pensa à Kévin1, le graffeur ou plutôt le graphiste de Quimper et tenta une question :

— Quel est votre style ?

— Vous vous intéressez à la peinture ?

— Oui, un peu, mais enfin, je n’y connais pas grand chose…

— Je vais tenter d’être bref. Disons, qu’étant Belge, j’ai suivi un enseignement aux Beaux-Arts de Bruxelles et j’ai d’abord étudié la nature morte. C’est de cette manière que je me suis d’abord fait connaître en Europe du Nord…

Il se tourna vers un ensemble de toiles posées les unes sur les autres à même le sol et en sortit quelques-unes : des natures mortes, toutes signées Mic.V.Q.

— Puis, j’ai évolué vers l’école flamande XIXe et XXe, apparentée au réalisme. Ceci afin de représenter la nature telle qu’elle est sans chercher à l’idéaliser…

— Vous êtes-vous intéressé aussi aux nouveaux courants ?

— Je n’ai jamais accroché au futurisme ni au cubisme. Je n’ai pas plus mordu aux tentations surréalistes, abstraites, ou expressionnistes encore moins à l’expressionnisme abstrait d’un Mark Rothko - ou à l’art cinétique d’un Vasarely, même si je reconnais leur talent… Même chose concernant le modernisme ou le modern style. Je n’ai jamais pu me laisser attirer, par le cruel et l’absurde, d’un Topor, dont vous avez certainement entendu parler, tout en reconnaissant la qualité de leur travail… L’artiste doit trouver le style qui lui permet de s’exprimer avant tout, selon ses propres pulsions.

Il interrompit son débit frénétique de paroles pour adopter un air rêveur.

— Mais, voyez-vous, depuis que j’ai rencontré Marie-Jeanne, mon style a changé. Les couleurs et la luminosité des paysages de Bretagne et surtout de ses bords de mer m’inspirent. Je m’intéresse même à des artistes comme Raoul Dufy, à présent, ce coloriste apparenté au fauvisme. Le charme elliptique de son dessin me plait. Comme quoi, on change avec le temps ! On peut être influencé par son environnement… Cette rencontre avec Marie-Jeanne est la plus belle chose qui me soit arrivée dans la vie. Quand je l’ai vue pour la première fois, si jolie et si frêle et, après lui avoir parlé, je me suis dit qu’une aussi jolie femme ne pouvait être seule. J’ai alors appris qu’elle était divorcée et puis, tout s’est enchaîné si merveilleusement… Nous envisageons d’unir définitivement notre destinée par un acte de mariage, reste à en fixer les dates et la forme…

Il se dirigea vers le coin de la pièce et présenta, cette fois, quelques toiles de paysages bretons.

— Quand je regarde vos différentes œuvres, j’ai l’impression de voir le travail de trois, quatre, cinq artistes ou plus, tous d’un style très différent… se permit de commenter François.

— C’est tout l’art d’un artiste complet ! Je ne travaille pas selon les grands principes darwinistes, de la théorie de l’évolution ou de la variabilité d’un style, mais plutôt sur des types déterminés à part entière…

Son visage s’était figé et durci quelques dixièmes de seconde, puis, se tournant vers eux, il eut un bref sourire sibyllin, son visage s’illumina, et il proposa :