Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou - Firmin Le Bourhis - E-Book

Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

Une veste flotte entre deux eaux dans le paisible canal de Nantes à Brest. Un pêcheur l’apporte au commissariat.

Il s’avère que son propriétaire a quitté Châteauneuf-du-Faou avec son bateau pour remonter le canal vers Carhaix et s’est amarré non loin de l’écluse de Lanmeur… Depuis, il n’est plus réapparu.
L’environnement de cet homme est trouble et inquiétant. Querelles avec ses deux voisins les plus proches, une ex-épouse peu amène, une amie au passé douteux, des ex-collaborateurs vindicatifs à son égard… Autant de pistes possibles pour nos deux officiers de police judiciaire.
Dès lors, ils vont mettre tous les moyens en œuvre pour découvrir la vérité…

Retrouvez les deux personnages fétiches de Firmin Le Bourhis dans une enquête passionnante !

EXTRAIT

— Alors, de quoi s’agit-il ?
— Voilà, j’étais à la pêche, comme d’habitude, c’est-à-dire le dimanche après-midi. Pour une fois, j’étais seul, sans ma femme. Je ne me trouvais pas très loin de l’écluse du Gwaker, sur le Canal de Nantes à Brest. Est-ce que vous situez ?
— Non, pas vraiment… Mon collègue, le capitaine François Le Duigou, fin pêcheur, doit sûrement connaître. Mais, si vous en veniez au fait…
— Je pêchais tranquillement quand j’ai aperçu un vêtement qui flottait, j’ai cru sur le coup que c’était peut-être un noyé, car je n’en voyais qu’une petite partie. J’ai essayé de l’accrocher avec ma ligne à plusieurs reprises… Rien à faire ! J’ai posé ma canne à pêche et j’ai suivi un moment le cours du canal. J’ai enfin réussi, avec une longue branche, à dévier doucement ce qui flottait et à l’attirer vers la berge.

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Lanterne rougeà Chateauneuf-du-Faou

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

 

Aux éditions Chiron

 

- Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour

- Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire

 

Aux Éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

Dépôt légal 1er trimestre 2015

ISBN : 978-2-916248-97-4

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres, des lieux privés, des noms de firmes, des situations existantou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70 - Fax : 01 46 34 67 19 - © 2015 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

 

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

 

 

 

- À Pierrette et Pascal pour les renseignements professionnels de police judiciaire, indispensables à la crédibilité de cet ouvrage.

 

- Merci également à tous ceux qui ont apporté, de différentes manières, leur pierre à l’édifice : Paulette, Nathalie, Gwénaëlle, Patrick B…, Delphine P…, Armel Guilchet, Jean Gestin, les offices de tourisme de Châteauneuf-du-Faou et de Carhaix et tous les autres…

 

- Sans oublier Philippe Bozzi et, bien sûr, Seb Godard dans le rôle de Yann Le Godarec, le patron, qui existent réellement !

 

 

 

 

 

 

Ha droug ha mad

A denn d’he had.

Le mal ou le bien.

De sa semence vient.

(Proverbe breton)

 

 

 

 

 

Imagine toutes les personnes

Vivant pour le temps présent

Imagine qu’il n’y ait pas de pays

Ce n’est pas difficile à faire

Personne à tuer, personne pour qui mourir

Et pas de religion non plus

Imagine toutes les personnes

Vivant leur vie dans la paix.

John Lennon

 

Chapitre 1

Lundi 28 juillet.

L’homme entra discrètement dans le commissariat de police de Quimper, sans se faire remarquer. Il affichait un visage inquiet et tenait à la main, un grand sac en plastique d’une grande surface bien connue en Bretagne dont la création avait fait grand bruit dans Landerneau dans les années soixante. Ce personnage avait l’allure d’un pêcheur. Avait-il fait une prise exceptionnelle ? Dans ce cas, ce n’était pas au commissariat qu’il devait se rendre mais plutôt chez le correspondant local de la presse quotidienne…

À l’accueil, le personnel s’affairait, de nombreuses personnes attendaient leur tour. Après palabres, un gardien se décida à accompagner le visiteur à l’étage, au bureau des officiers. Le lieutenant Phil Bozzi libérait à cet instant précis une personne qui venait de déposer plainte. Il fit aussitôt entrer le pêcheur.

— Le gardien de la paix vient de me dire que vous souhaitiez rencontrer un officier de police pour lui faire part d’une découverte, est-ce bien ce que vous voulez ?

— Oui, effectivement…

— Alors, de quoi s’agit-il ?

— Voilà, j’étais à la pêche, comme d’habitude, c’est-à-dire le dimanche après-midi. Pour une fois, j’étais seul, sans ma femme. Je ne me trouvais pas très loin de l’écluse du Gwaker, sur le Canal de Nantes à Brest. Est-ce que vous situez ?

— Non, pas vraiment… Mon collègue, le capitaine François Le Duigou, fin pêcheur, doit sûrement connaître. Mais, si vous en veniez au fait…

— Je pêchais tranquillement quand j’ai aperçu un vêtement qui flottait, j’ai cru sur le coup que c’était peut-être un noyé, car je n’en voyais qu’une petite partie. J’ai essayé de l’accrocher avec ma ligne à plusieurs reprises… Rien à faire ! J’ai posé ma canne à pêche et j’ai suivi un moment le cours du canal. J’ai enfin réussi, avec une longue branche, à dévier doucement ce qui flottait et à l’attirer vers la berge.

L’homme au départ, timide, assis sur le bout de la chaise, prenait progressivement de l’assurance et, gestes à l’appui, mimait son opération, fier d’entretenir le suspense face à l’officier de police. Le lieutenant Phil Bozzi commençait à s’impatienter, n’ayant que faire de sa partie de pêche.

— Et alors, qu’avez-vous découvert ?

— Ce n’était qu’une veste, comme celle utilisée par les pêcheurs qui participent à des concours… vraiment d’une belle qualité ! Je suis rentré à la maison. Mais, en discutant avec ma femme, hier soir puis ce matin, finalement, elle m’a dit qu’il valait mieux venir à la police. J’habite à quelques centaines de mètres du commissariat, alors je suis venu…

— Vous avez bien fait. Mais vous ne vous êtes pas pressé tout de même ! Si celui qui portait ce vêtement était tombé à l’eau, il ne fallait pas qu’il attende votre secours !

L’homme resta insensible à la remarque et sortit sa « prise ». Il posa la veste encore mouillée sur le bureau. En la dépliant, il évoqua déjà des hypothèses.

— Cette veste est peut-être, tout simplement, tombée d’un bateau. Vous savez, avec le développement du tourisme fluvial, les vedettes et les bateaux loués ne cessent de passer. Alors, sur le nombre de passagers… Mais c’est peut-être aussi, une personne tombée à l’eau… Comme il y a des papiers dedans, il valait mieux vous le signaler. Vous pourrez vérifier si le propriétaire l’a perdue ou s’il a disparu…

— Bien sûr, mais n’allez pas si vite en besogne ! Des objets perdus, nous en avons tous les jours ! Voyons… De qui s’agit-il ? Le permis de conduire est plastifié, il n’a donc pas souffert de son séjour dans l’eau. On ne peut pas en dire autant de la carte grise ni de la carte verte ni de ce qui devait être le contrôle technique. Ah, voici quelques cartes de visite collées entre elles… Je ne remarque pas d’argent. En aviez-vous vu ?

— Heu… non. Non, je n’ai aperçu que ce que vous avez entre les mains.

— Bien, ceci appartiendrait à un certain Jean-Baptiste Castellin. Ce nom vous dit-il quelque chose ?

— Non, je ne l’ai jamais entendu.

— Il habite sur la commune de Saint-Goazec. D’après l’adresse, voyez-vous où ça se trouve ?

L’homme s’approcha du bureau pour lire la carte de visite.

— Montrez-moi… Ah oui, je vois ! Ce lieu-dit est situé entre Châteauneuf-du-Faou et Saint-Goazec, sur les hauteurs. Il y a un beau point de vue sur le canal d’ailleurs de ce côté-là. C’est sur la rive gauche.

— Très bien, nous allons vérifier si ce monsieur se trouve chez lui. Mais avant, je vais enregistrer votre identité.

L’homme se sentit enfin valorisé, l’officier de police prenait son affaire au sérieux. Finalement, son épouse avait eu raison. Peut-être était-il à l’origine d’une grosse affaire…

À la réflexion, la découverte de ce vêtement pouvait cacher bien des choses, se disait-il. Il laissait son esprit vagabonder dans des directions les plus insolites. Le lieutenant Phil Bozzi, quant à lui, rédigeait son procès-verbal consciencieusement.

Phil remercia l’homme et l’assura de le tenir informé, en précisant cependant qu’il ne s’agissait sans doute que d’une banale chute de vêtement de l’un de ces nombreux bateaux en circulation sur le canal.

Assis à son bureau, il se demandait si c’était vraiment son rôle d’en chercher le propriétaire. Après une courte réflexion, à tout hasard, il rechercha dans l’annuaire téléphonique. Il y figurait bien. Il appela. Après plusieurs sonneries, la voix claire et gaillarde d’un homme se déclencha sur un répondeur invitant à laisser un message. Phil se contenta de se présenter et de décliner ses coordonnées. Ceci le rassura. Puis il reprit le cours de son travail.

 

 

Chapitre 2

Mardi 29 juillet.

En reprenant son service le lendemain matin, Phil fut interpellé par son ami le capitaine François Le Duigou posté devant la machine à café.

— Phil, puis-je t’offrir un café ?

— Bien volontiers, merci !

Un gobelet de café à la main, ils se dirigèrent vers le bureau en échangeant quelques banalités. En entrant dans le bureau, François aperçut la veste. Il émit un sifflement admiratif et questionna son collègue sur la présence de ce vêtement, précisant qu’elle ferait bien son affaire pour aller à la pêche. Phil expliqua en quelques mots ce qui s’était passé la veille.

— Comme nous devons nous rendre à Brest ce matin, faisons un petit détour, juste question de vérifier en passant et puis, tu verras, tu ne regretteras pas, le coin est super sympa.

Dans l’heure qui suivit, le micro-ordinateur portable chargé dans la voiture avec le matériel nécessaire à leur enquête brestoise, la voiture de service quittait la voie express à la hauteur de Briec en direction de Châteauneuf-du-Faou. Ils passèrent devant la gendarmerie en entrant dans la localité, mais se dirent qu’il était prématuré de contacter les collègues pour l’instant. Ils descendirent vers le centre-ville. L’église paroissiale présentait un énorme chantier, en raison de la rénovation de l’extérieur. En ralentissant devant, François Le Duigou en profita pour signaler que l’édifice bénéficiait dans son baptistère de quatre grandes scènes de la vie religieuse signée Paul Sérusier.

— Le peintre de l’école de Pont-Aven ? s’enquit aussitôt Phil Bozzi.

— Parce que tu t’y connais en peinture ?

— Année du centenaire de la mort de Gauguin oblige !

— C’est vrai qu’on en parle sans arrêt cette année. Sérusier, Parisien d’origine, a découvert cette ville en 1893 et elle l’a séduit. Il y a même fait bâtir sa maison en 1907. Il est décédé brutalement en 1927. Sérusier a, en fait, assuré la liaison entre les idées de Gauguin et le groupe des nabis - ce qui signifie prophète en hébreu - dont il fut le fondateur.

En sortant de la ville, la voiture laissait à présent sur sa droite la chapelle Notre-Dame-des-Portes avec sa flèche néo-gothique toute en finesse et élégance. Après une succession de virages, un magnifique panorama s’offrit à eux, surplombant la vallée de l’Aulne et le canal de Nantes à Brest.

— Je ne suis jamais venu par ici, mais j’avoue que les lieux sont idylliques !

— N’est-ce pas ? En dehors de la beauté du site, quels bons coins de pêche sur le canal que ce soit en amont ou en aval d’ici ! Dans le virage, juste avant de s’engager sur le pont, il est possible de tourner sur la gauche pour remonter le canal par le chemin de halage goudronné. J’y viens assez souvent. Sur la droite, le site de Penn-ar-Pont, mini-port fluvial ou plutôt petite base de plaisance, aujourd’hui essentiellement animée en saison par une société de location de vedettes sans permis et de différents engins flottants. Nous allons continuer pour monter en face vers le Château de Trévarez.

— Est-ce le château rouge que nous apercevons sur le versant opposé, là-bas ?

— Oui. Superbe édifice, n’est-ce pas ? Je vais ralentir en montant, tu pourras ainsi mieux le découvrir et profiter de la vue un peu plus loin. C’est une véritable folie architecturale de style néo-gothique en briques et granite de Kersanton. Son opulence témoigne de la fortune de son initiateur de l’époque. Il a été édifié de 1894 à 1906 et bénéficiait d’un mobilier abondant et très à la mode, d’eau courante, d’électricité, d’un chauffage à air pulsé et même d’ascenseurs, luxe incommensurable à cette époque, au cœur du centre-Finistère ! Et je ne te parle pas des nombreuses dépendances et des monumentales écuries, sans compter le magnifique parc, bel ensemble botanique, œuvre d’architectes-paysagistes parisiens. Tu as de la chance de le voir ainsi aujourd’hui, car les bombardements de 1944 avaient détruit la toiture. En 1985, des travaux de restauration ont été entrepris et le revoilà flambant neuf à nouveau !

— En effet, il me paraît extraordinaire. On ne s’attend pas à trouver ce genre de château par ici.

— Voilà, nous allons tourner à gauche devant une des entrées pour prendre la direction de Saint-Goazec. Nous ne devons pas être très loin de chez ton homme.

La voiture se gara devant une superbe maison d’architecture classique des années soixante-dix : une construction sur sous-sol avec porte d’entrée de garage face au portail, ravalement blanc, toit en ardoises naturelles et encadrement des ouvertures en granite du pays… Les volets étaient ouverts. Ils sonnèrent au portail. Pas de réponse. Par précaution, ils décidèrent de se rendre à la porte d’entrée de la maison. Nouvelle sonnerie sans réponse. Ils tentèrent d’ouvrir la porte, mais elle était fermée à clef. Du portable, ils appelèrent la maison et entendirent clairement la sonnerie, puis le répondeur se déclencher. Ils ne laissèrent pas de message.

Avant de rejoindre leur voiture, ils décidèrent de faire le tour de la demeure. Devant celle-ci, s’étendait une belle pelouse remarquablement entretenue, encore verte malgré la sécheresse, plantée de quelques arbres. Derrière, une bande de gazon et des arbres fruitiers se partageaient l’espace avec sur la droite, une belle partie réservée au potager. Dans celle-ci, une rangée de plants de tomates agrippés à leur tuteur, à côté, une planche de salades puis un espace où des pommes de terre venaient vraisemblablement d’être arrachées car les fanes flétrissaient en tas dans un petit enclos en bois réservé au compost. La terre avait été manifestement remuée ces jours derniers. Le terrain était clos d’une haie de cyprès, haute de deux mètres environ, parfaitement taillée, véritable mur naturel de verdure ne permettant aucune vue sur le voisinage. François prétendit que ce lieu devait être entretenu par un homme, il n’y ressentait pas de présence féminine en raison de l’absence de fleurs et de ces détails que seules les femmes savent distiller dans un tel espace.

Phil s’agaçait avec cette affaire, il n’y avait sans doute pas lieu de s’inquiéter, mais voilà qu’il ne cessait d’y penser. Par précaution, avant de quitter les lieux, ils se rendirent chez le voisin le plus proche, distant d’une petite centaine de mètres. Les multiples aboiements de chiens laissaient penser qu’il devait y avoir de la vie. Un homme d’une soixantaine d’années, une cigarette papier maïs collée au coin des lèvres, sortit de la maison quand les officiers de police descendirent de leur voiture.

— Nous cherchons à rencontrer monsieur Jean-Baptiste Castellin, est-ce bien votre voisin ?

— C’est ce qui est écrit sur sa sonnette !

— Savez-vous s’il est là ?

— Aucune idée et je m’en fiche pas mal.

— Ah ? fit simplement Phil, étonné par la réponse abrupte de cet homme si peu loquace et peu enclin à parler de son voisin.

— Un homme qui n’aime pas les bêtes n’aime pas les hommes, grommela l’individu.

— Quand l’avez-vous vu pour la dernière fois ? relança Phil, ignorant volontairement le commentaire précédent.

— Je crois bien que c’était dimanche matin… J’ai aperçu de loin sa voiture s’en aller, c’est tout ! Pour le reste, on ne se cause pas ! Ici le Castellin, on ne l’aime pas beaucoup…

— Quand vous dites « on », vous pensez à qui ?

— Ça…

Il se contenta de hausser les épaules, énigmatique.

— Selon vous, où pouvait-il se rendre ?

— À son bateau, évidemment ! Au port de Penn- ar-Pont, à Châteauneuf !

— Quel type de véhicule possède-t-il ?

— Un Espace, dans lequel il fourre tout à l’arrière, en vrac… Si vous allez au port, vous le verrez bien, devant le quai ! L’homme estimait avoir assez parlé et amorça un demi-tour en lançant : bon, ce n’est pas tout, mais je dois m’occuper de mes chiens maintenant.

— Vous en avez une sacrée équipe !

— Une meute, Monsieur ! Une meute ! Et sans doute la plus belle de la région ! rectifia l’homme avant de disparaître dans sa demeure.

— Drôle de bonhomme ! se contenta de commenter Phil en remontant dans sa voiture.

Ils reprirent alors la direction du petit port de Châteauneuf que François connaissait bien. En arrivant, ils remarquèrent aussitôt l’Espace garé à proximité du quai.

Des gréements de toutes sortes ainsi que du matériel de pêche encombraient l’arrière du véhicule. François prit le commandement des opérations.

— Allez, viens… prenons un café au bistrot, là-bas… C’est un endroit où nous pouvons obtenir plus de renseignements que dans n’importe quelle capitainerie, d’autant qu’il n’y en a pas à Châteauneuf-du-Faou ! Ici, c’est très sympa, tout est à la bonne franquette.

« Chez Odile, le bar du Quai » offrait en effet un accueil convivial. Phil s’aperçut aussitôt que François devait fréquenter assidûment les lieux lors de ses sorties de pêche, car la serveuse s’exclama :

— Mais dites donc, François, vous avez une drôle de tenue pour la pêche aujourd’hui !

— La pêche, ce sera pour une autre fois ! Dites-moi Odile, connaissez-vous monsieur Castellin ?

— Jean-Baptiste ? Bien sûr !

— Quand l’avez-vous vu pour la dernière fois ?

— Je crois bien que c’était dimanche matin, même qu’il n’est pas venu prendre son petit caoua comme d’habitude avant de partir…

— Et depuis ?

— Rien, ma foi ! Mais je vais demander à Dédé, car je ne suis pas toujours là. Dédé, as-tu vu Jean-Baptiste depuis dimanche ?

Le Dédé en question quitta l’arrière de son comptoir, s’essuya les mains, jeta négligemment sur l’épaule la serviette qu’il utilisait et vint saluer François.

— Non, je ne l’ai pas vu depuis dimanche matin et, d’ailleurs, j’ai été étonné, car je pensais qu’il allait venir quand je l’ai aperçu garer sa voiture, pas tout à fait à l’endroit habituel, pour être plus près du bateau sans doute. Je lui avais même préparé son café, sûr de sa visite… Et là, en quelques minutes à peine, je l’ai vu s’éloigner sur son bateau pour remonter le canal. Peut-être était-il pressé ? Mais c’est bien la première fois qu’il ne passe pas. Êtes-vous allé voir chez lui ?

— Oui, nous en venons. Rien ! Les volets sont ouverts, mais personne. Est-il marié ?

— Divorcé depuis quelques années. Il réfléchit quelques secondes et précisa : c’est simple, depuis l’année où il s’est retiré ici, pour de bon, en retraite !

— Pêche-t-il beaucoup avec son bateau ?

— Oh, pas tant que ça. Il aime avant tout se balader sur le canal. À mon avis, il remontait plutôt pour aller rejoindre sa copine. Elle habite du côté de l’écluse de Lanmeur, une maison un peu à l’écart du canal de Nantes à Brest !

— Connaissez-vous son amie ?

— Pas vraiment. Cette femme, nous ne l’avons pratiquement jamais vue. Elle vient plutôt de la ville, vous voyez ce que je veux dire ? Habillée dernière mode, maquillée… Elle fréquente surtout Carhaix ou les plus grandes villes !

Le sourire qui accompagnait ses paroles en disait long, pensèrent au même moment Phil et François. Ils en profitèrent pour demander plus de renseignements sur l’homme et la fameuse copine, une certaine Marie-Jo Le Gall. Déjà, la serveuse laissait à son tour entendre que, si la femme de monsieur Castellin était partie, c’était peut-être, à l’époque, à cause de la copine justement ! Les nombreuses « rumeurs ou informations locales » déversées, Dédé et son épouse s’accordèrent à dire, en guise de conclusion, que monsieur Castellin n’avait pas pour habitude de ne pas passer les voir. Ils précisaient également qu’ils ne se souvenaient pas de ne pas le voir rentrer chez lui pendant plusieurs jours, surtout en laissant sa voiture au port ! Aussitôt, les questions fusèrent. Que lui était-il arrivé ? Pourquoi le recherchaient-ils ? Que s’était-il passé depuis dimanche matin ? François prit le contre-pied immédiatement pour stopper les questions et la rumeur qui ne manquerait pas de se développer après leur départ, s’il ne limitait pas la portée de leur visite immédiatement.

— Il ne se passe rien de particulier, je voulais juste le rencontrer au sujet de son bateau. Mais rien ne presse, je le verrai une autre fois.

Ils payèrent leurs consommations en emportant l’adresse de la fameuse copine, quittèrent le bar, laissant le tenancier et sa femme sur leur faim et dans le doute. Phil et François se trouvèrent bien embarrassés en remontant dans leur voiture. Ils devaient se rendre à Brest pour traiter leur affaire en cours mais, dès leur retour, ils verraient aussitôt leur patron, Yann Le Godarec, pour lui faire part du cas Jean-Baptiste Castellin. Peut-être n’y avait-il pas lieu de s’alarmer. La copine s’était sans doute montrée plus attachante que d’habitude, tout simplement ! Tout de même, ceci les gênait et les intriguait sérieusement à présent, tous les deux…

Au retour de Brest, ils firent à nouveau le détour par le port de Châteauneuf, le véhicule n’avait pas bougé, arrêt devant la maison d’habitation, sonnerie, toujours pas de réponse. Ils appelèrent leur patron, Yann Le Godarec. Celui-ci les invita à se rendre chez la fameuse copine, madame Le Gall, afin de vérifier si monsieur Castellin ne s’y trouvait pas. Il était préférable d’en avoir le cœur net, avant de revenir au bureau.

 

 

Chapitre 3

Ils empruntèrent la Nationale 787 en direction de Carhaix pour la quitter au lieu indiqué par Dédé et Odile, les bistrotiers du quai, afin de se diriger vers le domicile de la bonne dame Le Gall.

Une coquette maison, nichée dans un écrin de verdure, dont la façade recouverte de pots de fleurs offrait un spectacle multicolore. Les géraniums-de-lierres, blancs, rouges, violets se mélangeaient avec bonheur. Les rosiers grimpants se confondaient avec la glycine.

À l’inverse de la maison de Jean-Baptiste Castellin où l’austérité et les lignes géométriques dominaient, ici, tout n’était que couleurs et fleurs de toutes sortes. Pas le moindre brin d’herbe sauvage, pas de fleurs fanées, chaque plant faisait l’objet d’une attention toute particulière et d’un soin méticuleux. Une voiture était garée devant la porte du garage accolé à la partie droite de la maison. Sur la gauche, le jardin devait être dissimulé derrière des touffes d’hortensias aux énormes fleurs bleues ou roses pour certaines, violacées pour d’autres, avec derrière, un grillage couvert de passiflores. Sur la droite, après le garage, un coin de pelouse parfaitement verte malgré la sécheresse, impeccablement coupée, laissait jaillir en son sein, une superbe touffe d’agapanthes bleues qui rivalisait avec son voisin, le jasmin étoilé. Après avoir vérifié le nom sur la sonnette, ils firent sonner le carillon, déclenchant aussitôt les jappements d’un chien. Une femme, la cinquantaine, apparut à la fenêtre.

— Sommes-nous chez madame Le Gall ?

— Oui, c’est bien ici ! Que voulez-vous ?

— Je suis le capitaine François Le Duigou et voici le lieutenant Phil Bozzi. Pouvez-vous nous accorder quelques instants, Madame ?

— Bien entendu, j’arrive.

La femme disparut derrière la fenêtre qu’elle venait de fermer pour se présenter à la porte. De taille moyenne, les cheveux teintés en blond, bien coiffée, légèrement maquillée, elle vint à leur rencontre en tenant dans les bras un jeune caniche blanc. Elle se dirigea d’un pas décidé vers le petit portail où attendaient les deux officiers. Phil pensa aussitôt à la description faite par Odile et Dédé, il devait bien s’agir d’une citadine, en effet. Des bijoux étincelaient à ses mains. Sa tenue légère, bien coupée, portait quelques signes distinctifs d’une marque de renom.

— Oui, Messieurs, que puis-je faire pour vous ? demanda-t-elle, un peu hautaine avant d’ouvrir le portillon.

— Connaissez-vous monsieur Jean-Baptiste Castellin ?

— Oui, parfaitement, c’est un ami.

— Quand l’avez-vous vu pour la dernière fois ?

— Jean-Bat ? Heu… je veux dire monsieur Cas- tellin, disons une semaine à peine, c’était mercredi dernier.

— Pouvez-vous nous le préciser, s’il vous plaît ?

— C’est simple ; il est venu ici le samedi, nous étions le 19 juillet.

— En voiture ou en bateau ?

— En voiture. Nous avons même laissé la voiture dans la cour pour nous rendre au festival des Vieilles Charrues qui se déroulait du 18 au 20 juillet. Fort heureusement, les organisateurs ont pu s’arranger avec les intermittents du spectacle qui étaient en grève un peu partout. Tout s’est bien passé ! Comme quoi, une négociation intelligente peut tout de même tout arranger…

— Dans ce cas, comment vous y êtes-vous rendus ?

— En taxi. Mon amie Muriel tient un taxi à Carhaix, nous sommes bien plus tranquilles ainsi, lors de ces grandes fêtes. Je voulais tellement voir Enrico Macias et Renaud !

— Quand vous a-t-il quittée ?

— Le lundi dans la journée. Puis il est revenu en bateau mercredi. Nous avons pique-niqué au bord du canal et trempé ensuite un peu la ligne. Puis, il est rentré dans la soirée. Mais pourquoi toutes ces questions ? Que se passe-t-il ?

— Quand deviez-vous le revoir ?

— Justement, je m’inquiétais, car il devait revenir dimanche si les choses se passaient bien avec son ex-épouse, le samedi… Un problème de maison à vendre, je crois. Je n’ai pas osé appeler dimanche. Lundi, j’ai pris mon téléphone, mais, pas de réponse ! Je me suis dit qu’il avait peut-être dû aller avec elle lundi voir le notaire ou je ne sais qui… et, aujourd’hui, toujours rien. J’envisageais justement de prendre ma voiture pour me rendre chez lui, ce que je ne fais qu’exceptionnellement. Vraiment, je suis étonnée qu’il ne me donne aucune nouvelle ! Ce ne sont pas ses habitudes de rester deux ou trois jours sans appeler, vraiment pas son genre !

— Quand il vient en bateau, où va-t-il et comment procède-t-il ?

— Toujours de la même façon. Il amarre son bateau au quai, juste après le pont de la route de Spézet, situé avant l’écluse de Lanmeur. Il m’appelle de son portable avant d’arriver et je vais l’attendre avec ma voiture ou je marche sur le chemin de halage à sa rencontre selon le temps. Par le petit chemin vicinal qui coupe, c’est rapide à pied. C’est un peu plus loin, si vous passez par la grande route.

— Acceptez-vous de nous accompagner jusqu’à l’endroit où il attache son bateau ?

— Tout de suite ?

— Oui, s’il vous plaît.

— Pouvez-vous me dire ce qui se passe ? Vous m’intriguez avec vos questions !

— Pour l’instant rien, Madame, mais nous devons vérifier quelque chose.

— Très bien, je rentre mon chien et nous y allons.

Elle fit demi-tour et s’adressa au chien : « Tu vas rester bien sage à la maison, Jedï, maman va s’absenter quelques instants avec ces messieurs… »

La porte refermée… Phil tourna son regard vers François. L’inquiétude se lisait sur leur visage. Ils commençaient à se dire que Jean-Baptiste Castellin avait rencontré quelques problèmes. La dame apparut à nouveau et referma la porte à clef derrière elle.

— Vous m’emmenez, ce n’est pas très loin, ou dois-je prendre ma voiture ?

— Venez avec nous.

Le visage de la femme avait changé. Il n’offrait plus ce regard rayonnant ni ce sourire affiché lors de leur arrivée. Le tracas venait de le ternir. Une certaine angoisse apparaissait. C’était comme si elle venait de prendre dix ans d’un seul coup.