Échec et tag à Clohars-Carnoët - Firmin Le Bourhis - E-Book

Échec et tag à Clohars-Carnoët E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

Le capitaine François Le Duigou et le lieutenant Phil Bozzi se retrouvent cette fois face à la disparition inexpliquée du jeune Erwan, dix-sept ans, lycéen…

S’agit-il d’une fugue, d’une séquestration, d’un accident ? Avec acharnement, aidés par le groupement de gendarmerie, ils vont reconstituer l’environnement du jeune homme au lycée ainsi que dans sa vie familiale et privée… Ils découvrent sa passion… la BD. Mais, il est également adepte des bombes de peinture ; il pratique en effet le tag et le graffiti…
Plongés dans un milieu pour eux méconnu, ils découvrent des personnages attachants qui les conduiront dans un autre univers, plus inquiétant celui-là, plus « grave », comme ils se plaisent à dire…
Jusqu’au surprenant dénouement, dans le cadre, pourtant idyllique, de la région allant de Quimperlé à Moëlan-sur-Mer et au Pouldu, en passant par Doëlan et Clohars-Carnoët…

Un nouveau défi pour le célèbre duo d'enquêteurs dans ce roman palpitant !

EXTRAIT

Dans un silence pesant, le couple occupa les deux sièges disposés face au bureau de François.
Avant de se remettre à son poste, Phil resta quelques instants debout derrière François pour prendre connaissance des premiers éléments de la déclaration.
— Veuillez m’expliquer ce qui vous amène, entreprit François, posant un bloc pour prendre les premières notes avant d’envisager la saisie informatique.
L’homme se tourna vers la femme qui se concentra pour tenter de parler calmement, cachant mal une certaine nervosité.
— Voilà… Notre fils, Erwan, a quitté le lycée vendredi après-midi, après ses cours, vers seize heures. Il nous a appelés. En notre absence, il a laissé un message sur le répondeur nous informant qu’il rentrerait le lendemain car il allait rejoindre un ami, sans nous préciser son nom. Depuis, nous n’avons aucune nouvelle de lui.

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Échec et Tag

à Clohars-Carnoët

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

 

Aux éditions Chiron

 

- Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour

- Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire

 

Aux Éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

Dépôt légal 2e trimestre 2015

ISBN : 978-2-916248-99-8

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres, des lieux privés, des noms de firmes, des situations existantou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70 - Fax : 01 46 34 67 19 - © 2015 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

 

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

 

 

- À Pascal Vacher, officier de police judiciaire, pour ses conseils juridiques, techniques et de procédure.

- À Patrick, comme toujours, présent à mes côtés.

- À Mikaël Barzic pour sa connaissance et ses informations sur le tag, le graff.

- À la compagnie de Gendarmerie de Quimperlé et à la brigade de Gendarmerie de Moëlan-sur-Mer.

- À l’Office de Tourisme du Pouldu à Clohars-Carnoët et à celui de Moëlan-sur-Mer.

- À Bernard Morvan, le très sympathique libraire de la Maison de la Presse de Clohars-Carnoët.

- Et à tous ceux qui, parfois même sans le savoir, m’ont apporté une information, un renseignement que j’ai pu utiliser…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ainsi que pour les individus,

Nul ne fait du mal à autrui

Sans s’en faire à soi-même.

Ainsi pour les sociétés,

Celle qui opprime, qui en dégrade une autre,

Se condamne elle-même à la souffrance.

Les victimes d’hier sont les bourreaux de demain.

 

Victor Schoelcher

 

 

Chapitre 1

Commissariat de Police de Quimper, lundi 3 mai.

Le lieutenant Phil Bozzi aimait toujours venir en avance au travail. Il commençait ainsi la journée en parcourant la presse quotidienne, surtout un lendemain de week-end. Il s’accordait ce temps de lecture en prenant un café. Ce matin, il se sentait détendu après avoir passé deux jours printaniers en famille, sans dérangement professionnel intempestif.

Le journal ne lui apporta rien qui l’interpellât vraiment, tout au moins dans les gros titres. La télévision avait évoqué, sous tous les angles, les grands sujets : notamment l’arrivée de dix nouveaux pays dans l’Europe des quinze, ce samedi Premier mai, avec une intervention du président de la République. Le nouveau gouvernement de l’Espagne resserrait les liens avec la France et l’Allemagne, l’attentat du 11 mars précédent ayant provoqué la chute du parti d’Aznar. Le monde entier, pourtant, l’annonçait gagnant, quelques jours encore avant cet attentat de Madrid.

En page nationale, les imams intégristes en ligne de mire, un cimetière israélite profané en Alsace. Des croix gammées et celtiques tracées sur cent vingt-sept des quatre cents pierres tombales du cimetière israélite de Herrlisheim dans le Haut-Rhin. Phil prit le temps de lire l’article. Ces actions pro-nazies et antisémites l’indignaient toujours. La date du 30 avril 1945, considérée comme celle du suicide d’Adolf Hitler, et celle du 30 avril 2004 avaient été taguées dans le cimetière. Puis il s’attarda sur les “coups de gueule” de son ancien grand patron, “Sarko”. Celui-ci fustigeait le parti socialiste au parlement et, à chaque occasion, semblait particulièrement décidé à pratiquer l’escalade des mots, avant sa conférence de presse annoncée dans la semaine à Bercy devant trois cent cinquante journalistes. Depuis “la vague rose” des élections cantonales et régionales de mars, l’opposition se mobilisait en vue des Européennes.

Côté sport, la finale de la coupe de France de football verrait Châteauroux s’opposer au PSG au Stade de France à la fin du mois. Phil ne put s’empêcher de penser à l’enquête qui l’avait emmené dans le Berry à la poursuite de Théo.1 Le lieutenant Phil Bozzi s’attaqua ensuite à la kyrielle de faits divers locaux. Bref, rien de bien nouveau sous le soleil, pensa-t-il, au moment où son collègue, le capitaine François Le Duigou, fit son apparition. Les traditionnels échanges de banalités effectués, ils se rendirent chez le patron, le commissaire Yann Le Godarec. Rien d’exceptionnel ne s’était passé durant ce week-end du Premier mai, plutôt calme dans l’ensemble. Il est vrai qu’en dehors des manifestations habituelles prévues à cette occasion, il n’offrait pas de jour supplémentaire de repos pour ceux qui ne travaillaient pas habituellement le samedi. Les affaires en cours passées en revue, Phil et François rejoignirent leur poste de travail.

Un homme et une femme attendaient, assis sur les chaises placées dans le couloir près de leur bureau. Le gardien de la paix de l’accueil se tenait debout près d’eux et s’adressa au capitaine Le Duigou :

— Ce couple vient déclarer la disparition de leur fils. Pouvez-vous le recevoir ?

Le visage de la femme, marqué par la fatigue et l’angoisse, ne cachait pas l’inquiétude qui devait la tenailler. L’homme paraissait plus serein. Proches de la cinquantaine, très correctement vêtues, les deux personnes ne se distinguaient pas particulièrement de celles que nous pouvons croiser dans la rue, sans les remarquer vraiment, tant elles se fondent dans cette masse des anonymes dont nous faisons partie.

Dans un silence pesant, le couple occupa les deux sièges disposés face au bureau de François.

Avant de se remettre à son poste, Phil resta quelques instants debout derrière François pour prendre connaissance des premiers éléments de la déclaration.

— Veuillez m’expliquer ce qui vous amène, entreprit François, posant un bloc pour prendre les premières notes avant d’envisager la saisie informatique.

L’homme se tourna vers la femme qui se concentra pour tenter de parler calmement, cachant mal une certaine nervosité.

— Voilà… Notre fils, Erwan, a quitté le lycée vendredi après-midi, après ses cours, vers seize heures. Il nous a appelés. En notre absence, il a laissé un message sur le répondeur nous informant qu’il rentrerait le lendemain car il allait rejoindre un ami, sans nous préciser son nom. Depuis, nous n’avons aucune nouvelle de lui.

— Vous a-t-il appelés d’un portable ?

— Non. D’une cabine. Nous achetons régulièrement une carte à Erwan, ce procédé est moins onéreux et il est moins tenté de téléphoner sans raison. Mais il ne s’en plaint pas. Notre fils est très raisonnable.

— Est-ce dans ses habitudes de s’absenter longuement ou de ne pas donner de ses nouvelles quand il ne rentre pas ?

— Pas du tout, au contraire, il ne part jamais sans m’en demander l’autorisation, sans me dire où il va, avec qui, pour combien de temps…

— Depuis vendredi après-midi me dites-vous ? Pourquoi avez-vous attendu tout ce temps avant de venir nous voir ?

— C’est-à-dire que… samedi, c’était le Premier mai. Nous sommes partis le matin, de bonne heure, pour rejoindre des amis du syndicat pour le défilé dans la ville de Quimper. Je travaille à la Poste et mon mari à EDF. Nous ne sommes rentrés que très tard dans la soirée, pensant trouver Erwan à la maison. Mais, rien… personne, pas d’appel ni de signe de vie. Toute la journée de dimanche, nous avons commencé à faire le tour de ses copains de classe, des jeunes qu’il fréquente, de ses amis, de la famille du côté de mon premier époux…

— Vous venez de parler de votre premier époux. Quelle est votre situation matrimoniale actuelle, Madame ?

— Je suis veuve, mon premier mari s’est tué au volant de son camion sur une route d’Espagne. Cela fait tout juste quinze ans… ce Premier mai. C’était le père d’Erwan. Je me suis remariée il y a dix ans et nous avons deux enfants, deux filles de huit et six ans. Mais nous nous entendons tous très bien. Il n’y a jamais eu le moindre problème. D’ailleurs, Erwan a toujours considéré Jean-Jacques, mon mari – elle se tourna vers l’homme assis à ses côtés qui approuvait de la tête tous les dires de son épouse – comme son père à part entière.

— Erwan est un jeune homme très agréable, sans histoire et très doué en plus… précisa l’homme pour justifier sa présence et les propos tenus.

— Bien, reprit François. Vous savez que les quarante-huit premières heures sont très souvent déterminantes. La rapidité et la qualité des informations données influent largement sur les chances de retrouver vivante et en bonne santé une personne disparue.

Sur ces mots, la femme éclata en sanglots. François s’efforça aussitôt de la rassurer.

— Chaque année, la police et la gendarmerie reçoivent des signalements de disparition pour quarante mille personnes environ. Ce sont, pour la plupart, des récidives de fugue. Dans une très grande majorité, celles-ci se concluent par un dénouement heureux. Nous sommes conscients qu’il s’agit toujours au départ, pour les familles touchées, d’un événement douloureux et nous abordons systématiquement chaque cas avec la plus grande attention, car même une disparition semblant a priori banale peut parfois aboutir à un drame.

Considérant ce dossier comme grave, Phil sortit alors de sa réserve et proposa de prendre note de toutes les informations. Dans un premier temps, il pensait se contenter d’inscrire une synthèse des informations recueillies sur la main courante mais opta rapidement pour une audition détaillée et l’établissement d’un procès-verbal.

— Nous allons recueillir les renseignements nécessaires afin de diligenter une procédure administrative de recherche pour disparition inquiétante qui sera placée sous l’autorité du procureur de la République. De cette façon, il impliquera aussi la gendarmerie, précisa-t-il.

Phil s’installa devant son micro-ordinateur tandis que François dirigeait les questions. L’état civil du jeune homme et celui de la famille enregistrés, François passa au signalement du jeune disparu qui allait avoir dix-huit ans prochainement. Il se présentait au bac à la fin de l’année scolaire. Bon élève, studieux, il montrait d’indéniables dispositions pour les arts graphiques et envisageait de poursuivre ses études dans ce domaine. Il se déplaçait généralement avec un scooter qu’il possédait depuis bientôt deux ans, un sac à dos Oxbow en bandoulière. Phil nota précisément le nom du lycée de Quimper fréquenté par Erwan ainsi que celui de ses professeurs. Il devait être vêtu d’une parka de marque, d’un pantalon Carhartt bleu et portait des chaussures gris-bleu, des Vans. Comme beaucoup de jeunes, il avait superposé deux tee-shirts, l’un à manches longues et l’autre à manches courtes. Les cheveux ras, dans le style “décoiffé” actuel, il arborait un piercing sur l’arcade sourcilière droite. Sa photo d’identité ainsi qu’une photo en pied furent scannées dans la fiche signalétique et dans le procès-verbal. L’entretien permit de mieux cerner le disparu, sa famille et ses relations, les circonstances de sa disparition.

Ces renseignements recueillis, aucun élément ne laissait présumer que la disparition soit d’origine criminelle ou délictuelle. Si tel devait être le cas, dans les heures ou les jours à venir, le cadre de l’enquête administrative laisserait la place au cadre judiciaire.

La femme rajouta :

— Erwan n’a jamais fugué ni raté l’école. Nous avons espéré son retour jusqu’à l’heure de la reprise des cours. Nous nous sommes rendus ce matin au lycée, à son premier cours… Il n’était pas là. Nous avons rencontré ensuite le proviseur. Il aime l’école, vous savez. Et son bac, il veut vraiment l’avoir, contrairement à beaucoup de jeunes. Nous n’avons même pas besoin de le pousser, il se met la pression tout seul. C’est un gentil garçon sans histoire. Il ne fume pas, n’a pas de mauvaises fréquentations. Non, vraiment, il s’est sûrement passé quelque chose de grave…

— Avez-vous appelé les hôpitaux de la région ?

— Oui, tous, dans un rayon de quarante kilomètres, rien…

— Nous allons reprendre de façon méthodique toutes les recherches et inscrire Erwan immédiatement au FPR, le fichier des personnes recherchées, et transmettre les informations à l’Office Central des Disparitions Inquiétantes. Nous resterons ensuite en liaison étroite avec vous. Voici mon numéro de téléphone mobile ainsi que celui du lieutenant. Vous devrez nous avertir immédiatement de toute nouvelle information, quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit. Nous devons pouvoir vous joindre à tout moment et vous invitons à prendre vos dispositions pour libérer une ligne téléphonique.

— Nous allons acheter un nouveau téléphone portable afin que personne d’autre que vous et nous ne l’utilise, car nous ne pouvons empêcher nos amis de nous appeler…

— C’est très bien de procéder ainsi.

Lors du premier contact, la femme avait paru visiblement sous le coup du choc, elle semblait à présent soulagée. La prise en compte de son état émotionnel, le climat de confiance établi par François et Phil dans ce bureau assurant la confidentialité de l’entretien rassurèrent partiellement le couple.

Phil rajouta quelques recommandations :

— Votre déclaration ne vous dispense pas de procéder vous-mêmes à des recherches…

— Oui, c’est ce que nous pensions faire avec les jeunes du lycée. Et nos voisins doivent contacter l’association qui soutient les parents d’enfants disparus.

— Très bien. Nous vous suggérons de ne rien communiquer aux médias sans nous avoir consultés au préalable. D’autre part, pour tout appel lié à cette disparition, nous vous demandons d’en noter l’heure, la durée et si possible l’origine. Si toutefois vous deviez recevoir un courrier, ne le touchez pas après la première personne qui l’aura ouvert et mettez-le avec son enveloppe, sous protection dans un dossier en notant l’identité de celui qui l’a manipulé.

— Parce que vous croyez à un enlèvement ?

— Non. En l’état actuel nous ne pouvons privilégier aucune thèse, pas plus celle de l’enlèvement que de la fugue ou de la disparition volontaire… Il va sans dire qu’en cas de retour d’Erwan à votre domicile ou au lycée, vous devez impérativement nous le signaler.

— Bien entendu.

— Ah, une dernière chose avant de nous séparer : si la disparition devait se prolonger, si des personnes venaient vous proposer une collaboration en vue de retrouver Erwan, voyants, radiesthésistes, détectives, avisez-nous-en aussitôt… Malheureusement, dans de telles circonstances, de nombreux profiteurs rôdent…

— D’accord, répondit la femme, songeuse.

— Pouvons-nous nous rendre, en fin de matinée, dans le lieu de vie habituel d’Erwan ?

— Bien sûr, nous allons rentrer. Nous avons pris une journée de congé que nous renouvellerons si nécessaire… Nous comptons sur vous. Retrouvez-le, notre petit Erwan… nous vous en supplions, lança la femme en proie à une nouvelle crise d’angoisse et de sanglots.

François raccompagna le couple tandis que Phil restait songeur devant son écran informatique en relisant le procès-verbal.

En revenant à son bureau, la porte à peine refermée, François demanda à Phil :

— Qu’en penses-tu ?

— Je ne serais pas surpris qu’on le retrouve sur la route menant au lieu de l’accident de son père biologique. Sorte de pèlerinage, d’autant que la disparition correspond à une date anniversaire…

— C’est ce que tu as perçu ? Moi j’ai tout de suite pensé à une fugue avec un copain ou une copine et, le bonheur aidant, il a joué les prolongations…

— En tous les cas, le couple a l’air très bien. Au vu des vêtements de marque et du scooter, le gamin ne paraît pas maltraité.

— Non, effectivement, mais méfions-nous des apparences. En nous rendant chez lui et en visitant sa chambre, nous nous rendrons mieux compte de la situation. Ensuite, nous irons au lycée…

Le temps de relire le procès-verbal et de rencontrer leur patron pour lui communiquer la déclaration, ils se dirigèrent vers le parking pour prendre leur véhicule de service.

 

1. Voir Étape à Plouay, même collection, même auteur.

 

Chapitre 2

Le couple habitait une maison d’une quinzaine d’années, dans un petit lotissement de Penhars dominant la ville. L’homme vint leur ouvrir la porte et les fit entrer.

Dans la salle à manger, plusieurs personnes discutaient. Le silence s’installa à leur arrivée. La femme expliqua qu’ils préparaient une affiche avec des amis et une association. Un homme se détacha du groupe et se présenta comme étant le président local de l’association.

— Avec l’accord de nos membres, je proposais de lancer une grande campagne d’affichage et j’envisageais de prendre contact avec vous pour vous soumettre le projet.

— Très bien, c’est une bonne démarche. Nous la validerons et vous mettrons également en rapport avec les services de gendarmerie afin que la diffusion soit la plus rapide possible. Avant de les imprimer nous vous communiquerons un numéro vert pour que nous centralisions les appels et puissions les vérifier. Nous connaissons l’action de votre association et la soutenons. Nous avons informé les parents d’Erwan que, chaque année, sur le fichier des personnes recherchées, nous enregistrons quarante mille inscriptions dont trente-cinq mille de mineurs et que, pour l’essentiel, ce sont des fugueurs retrouvés dans les deux ou trois jours qui suivent, surtout chez des jeunes de plus de quinze ans. Le cas de jeunes qui disparaissent et qu’on ne retrouve pas est rare, en moyenne un par an…

— Oui, ce sont également nos statistiques. Néanmoins, nous comptons une vingtaine de cas d’enfants disparus sur les cent soixante familles que nous accompagnons. Les autres, ce sont surtout des enfants assassinés. Nous avons un site Internet et une douzaine de policiers à la retraite travaillent également pour nous bénévolement. Ils nous aident à être très complémentaires de votre rôle et surtout à éviter tout risque d’interférences malheureuses.

— Oui, nous le savons.

François se tourna vers la mère d’Erwan.

— Nous souhaitons écouter le message laissé sur le répondeur par Erwan.

La femme se dirigea vers l’appareil et appuya sur la touche de la messagerie. La voix d’Erwan paraissait claire, agréable, détendue. Aucune appréhension ne se percevait.

— Est-ce son timbre de voix habituel ?

— Oui… tout à fait, répondirent en chœur les parents. Rien ne laisse supposer la moindre inquiétude dans ses propos.

— Nous vous demandons de nous confier cette cassette, nous allons la recopier et vous la rendrons. Nous vérifierons également de quel endroit l’appel a été donné.

— La voici, fit la femme en déclenchant l’éjection de la cassette.

— Nous souhaitons à présent visiter la chambre d’Erwan.

La maman d’Erwan conduisit Phil et François à l’étage, tandis que les conversations reprenaient dans la pièce qu’ils venaient de quitter. Ils découvrirent une chambre claire et ensoleillée, parfaitement rangée. Les visiteurs furent frappés par les innombrables dessins et les graffs aux couleurs vives qui recouvraient les murs. Une couette enveloppait le lit, fermant l’angle droit de la pièce. À gauche, un petit bureau en bois blanc et, au-dessus, des étagères croulant sous le poids des albums de bandes dessinées. À côté du micro-ordinateur posé sur le bureau, quelques manuels scolaires et des figurines. Phil saisit un petit bonhomme à la longue houppette blonde et interrogea la maman d’Erwan :

— Qui est-ce ?

— Titeuf ! Vous ne connaissez pas ? Le personnage imaginé par Zep, le petit héros le plus populaire des scolaires.

— Non, désolé, se contenta de répondre Phil en se tournant vers François qui ne paraissait pas plus branché.

— Mon fils est un inconditionnel de Zep. Il possède tous les albums de son petit personnage irrévérencieux, depuis la sortie du premier. Le père du héros a d’ailleurs été récompensé au festival d’Angoulême cette année. Mais Erwan ne se contente pas de lire des albums, il dessine également et veut créer sa propre bande dessinée. Il a du talent, tout le monde le dit et ce que vous voyez sur les murs, c’est son travail…

— Il possède un beau coup de crayon en effet, commenta Phil, admiratif, malgré son inculture dans ce domaine. Ne se serait-il pas déplacé à Angoulême, dans ce cas ?

— Non. Le salon est passé. Mais il est allé récemment avec Jean-Jacques à Perros-Guirec où se tenait également un salon de la BD.

— Vous le soutenez ?

— Complètement et mon mari aussi. Ils nourrissent tous les deux la même passion et s’entendent très bien pour cette raison. En plus de Titeuf, leurs héros s’appellent Cédric, Kid Paddle, Spirou ou encore Parker et Badger, et j’en oublie…

François avisa, au même moment, un sac à dos posé au sol. Il s’en saisit et l’ouvrit. Il découvrit des bombes de peinture, un masque et des gants maculés de peinture. Il se tourna vers la femme, interrogatif. Elle rougit avant de répondre :

— C’est-à-dire qu’Erwan est aussi graffeur.

Phil remarqua alors les magazines spécialisés sur une étagère. Il saisit le premier de la pile, “Graff it !” celui du trimestre en cours, afin de le parcourir rapidement.

— Ce n’est plus la même chose que de la BD, lança François devant cette découverte, comme si elle modifiait sa perception sur le jeune homme. Il réalisa et regretta au même moment ses paroles.

— Détrompez-vous. Beaucoup de jeunes commencent par des tags sur les terrains vagues ou les friches industrielles, évoluent vers des graffs voire des fresques avant de trouver leur véritable voie dans la peinture, la déco ou la BD et j’en passe. D’ailleurs, après le bac, Erwan, comme nous vous l’avons dit, envisage de faire des études d’arts graphiques tout en suivant des cours complémentaires aux Beaux-Arts. Nous lui avons même promis de lui offrir un stage sur la BD en Belgique, durant les vacances scolaires de l’année prochaine, s’il continue à bien marcher dans ses études.

Phil et François se contentèrent de noter ces informations. Ignorants en la matière, ils devraient se renseigner et rencontrer ce milieu pour se forger d’autres pistes sur Erwan voire une image différente.

Le mot “tag” venait de sonner comme une fausse note dans l’oreille des deux officiers de police. Jusqu’à présent, leur connaissance du sujet se limitait davantage à un jeu du chat et de la souris avec certains jeunes, suite à des plaintes de particuliers, de collectivités locales ou de la SNCF qui voyait régulièrement ses wagons décorés par une communauté de tagueurs. Il était vrai, cependant, qu’ils avaient bien noté le projet de poursuite d’études d’Erwan dans les arts graphiques.

Ils reprirent leur recherche de photos, de renseignements divers – numéros de téléphone de copains, messages, courriers – mais ne découvrirent rien d’intéressant.

— Erwan a-t-il une amie attitrée ?

— Non, ce n’est pas son problème en ce moment. Il ne s’intéresse pas encore aux filles, ses passions sont le dessin et la BD.

— Et le tag ? surenchérit François maladroitement.

— Non. Le graff et uniquement sur des lieux autorisés, répondit sèchement la femme.

François, ayant du mal à percevoir la différence entre tag et graff, n’insista pas, d’autant qu’il sentait qu’il provoquait d’une certaine manière la maman qui défendait son fils. Elle devait aussi, visiblement, l’admirer pour ses dispositions. Ce n’était pas le moment de l’agacer avec ce genre de détail.

— A-t-il un bon copain ?

— Oui, plusieurs, au lycée, nous les avons contactés. Ils sont dans sa classe.

— Très bien, comme nous devons nous y rendre, nous verrons sur place.

François et Phil prirent congé et quittèrent la maison. Ils se dirigèrent aussitôt vers le lycée.

— Que penses-tu de cette passion pour le tag et le graff, Phil ? demanda François.

— Je n’y connais rien, mais cette image me plaît moins. À mon avis, cette enquête risque d’être plus compliquée qu’elle n’y paraît !

Arrivés au lycée, ils furent conduits au bureau du proviseur qui les reçut aussitôt.

Il parla le premier, avant même de s’asseoir à son bureau.

— Vous venez pour Erwan, je suppose ? Alors, avez-vous des nouvelles ?

— Non, pas pour l’instant. Avez-vous de bons rapports avec Erwan ?

— Oui, d’autant plus qu’il participe à l’élaboration du magazine du lycée. Il en fait généralement les dessins. Il possède un réel talent, vous savez. Et il fait partie de ces jeunes sans histoire.

— Quels sont ses rapports avec les professeurs ?

— Excellents. C’est un bon élève. Il s’intéresse à tout. Il est curieux de tout…

— Aurait-il eu un accrochage avec l’un d’entre eux ?

— Non. Pas à ma connaissance.

— Et avec d’autres élèves ?

— Non plus. Erwan ne fait pas preuve d’absentéisme, ne fume pas, n’a pas de mauvaises fréquentations. Non. Je ne vois pas. Côté lycée tout au moins.

— Parce que hors lycée, vous pensez que…

— Non ! Excusez-moi, ce n’est pas ce que je voulais dire, reprit le proviseur, comprenant l’interprétation faite par les officiers de police judiciaire. Je vous l’ai dit, jeune homme sans histoire au sein d’une famille équilibrée.

— Nous avons appris qu’en dehors de sa passion pour le dessin de BD, il se livrait aux tags et aux graffs, qu’en savez-vous ?

— Rien… non vraiment rien. J’ignore dans quel cadre il le fait. Non, je ne sais pas…

— Nous souhaitons rencontrer les professeurs de sa classe et ensuite les élèves. Vous nous avez parlé également d’un magazine. Nous voulons voir tous ceux qui y collaborent.

— Bien sûr, je comprends. Je regarde le tableau des emplois du temps… et vais faire le nécessaire pour vous permettre d’échanger avec eux, pas tous malheureusement, avant la reprise des cours à quatorze heures. Je vois que cette classe termine le programme de la journée à seize heures aujourd’hui, je demanderai que vous puissiez dialoguer avec les élèves en salle de permanence à cette heure-là. Entre-temps, vous pourriez peut-être parler avec quelques élèves qui travaillent à la parution de la revue du lycée.

— Parfait. Nous vous remercions et vous demandons d’informer les enseignants de notre venue vers treize heures trente.

Ils franchirent les portes du lycée à l’heure convenue. Les jeunes allaient et venaient, à pied ou en scooter, créant une belle animation devant l’établissement. Le concierge se libéra aussitôt pour les conduire à la salle des professeurs, occupée exceptionnellement par les enseignants concernés par la classe d’Erwan. François fit les présentations et Phil s’installa immédiatement devant son clavier de portable afin d’enregistrer l’identité des maîtres présents.

François rappela les circonstances de la disparition et demanda quel était le professeur qui avait vu Erwan pour la dernière fois. Celui qui enseignait l’anglais se leva. Il assurait le dernier cours de vendredi après-midi. Non, il n’avait rien remarqué d’inhabituel dans le comportement d’Erwan. Oui, il confirmait les bons renseignements déjà donnés sur le jeune homme. Chaque enseignant s’exprima ensuite sur l’élève. Aucune fausse note ne ressortit de l’ensemble des entretiens.

L’image du bon élève studieux revenait le plus souvent. Le professeur d’arts plastiques confirma le véritable talent d’Erwan. Pour lui, cela ne faisait aucun doute, il le classait d’emblée dans la catégorie des futurs artistes comme on n’en rencontre qu’un ou deux dans toute sa carrière. Chaque personne présente s’étant exprimée, Phil ne put s’empêcher d’aborder le sujet du tag.

— Nous avons aussi appris qu’Erwan, outre son indéniable talent en dessin, notamment dans le domaine de la bande dessinée, était un adepte du tag, qui peut nous en dire un peu plus ?

Les regards se tournèrent vers l’enseignant en arts plastiques.

L’homme, d’une trentaine d’années, rougit légèrement et se sentit obligé de répondre à la question :