Hors-circuit à Châteaulin - Firmin Le Bourhis - E-Book

Hors-circuit à Châteaulin E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

Meurtres en série près de Crozon.

Nos deux OPJ habituels, Phil Bozzi et François Le Duigou, se retrouvent à Châteaulin où, très vite, des méfaits se multiplient et des péripéties très troublantes les conduisent à sillonner la presqu’île de Crozon, de Plomodiern à Crozon et de Camaret-sur-Mer à Port-Launay.
De banals vols commis la nuit, chez des propriétaires a priori aisés et bien ciblés, sans lien entre eux, se terminent par des meurtres à répétition.
Devant l’ampleur de la tâche, en plus de la gendarmerie de Châteaulin, ils doivent solliciter l’aide des élèves de l’École des sous-officiers de Gendarmerie de Ty Vougeret, située tout près de là, pour mener à bien cette enquête où apparaissent de nombreux personnages interlopes et dont l’issue les laissera sans voix…

Inspirée de faits réels, cette nouvelle enquête de Le Duigou et Bozzi vous fera palpiter jusqu'à la dernière page !

EXTRAIT

— Que pouvons-nous faire pour vous, Madame ? Les yeux bleus, très clairs, comme délavés par le temps, les cheveux gris, presque blancs, permanentés, le visage pâle, marqué par une profonde toile de rides, la femme regarda François, comme implorante. Elle portait un tailleur noir sur un chemisier blanc immaculé et un gros camée coloré fermait le foulard léger qui enserrait son cou décharné. Sa fine main osseuse et valide serrait un réticule. Sa lèvre trembla légèrement avant qu’elle s’exprime :
— Hier après-midi, j’ai été victime d’une agression, au moment où je retirais de l’argent au distributeur de billets. Un individu m’a violemment arraché mon sac et je suis tombée, je n’ai pas pu le retenir… Peu de temps après, des passants ont alerté les secours et j’ai été conduite à l’hôpital et puis voilà… dit-elle en montrant son bras en écharpe.

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Hors-circuità Châteaulin

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

 

Aux éditions Chiron

 

- Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour

- Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire

 

Aux Éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

Dépôt légal 1er trimestre 2015

ISBN : 978-2-916248-96-7

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres, des lieux privés, des noms de firmes, des situations existantou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70 - Fax : 01 46 34 67 19 - © 2015 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

- À Pascal Vacher, commandant de police honoraire de la police judiciaire, pour ses conseils techniques.

- À l’Office de Tourisme de Châteaulin et de Plomodiern, à toute l’équipe et à Corinne en particulier.

- À l’Office de Tourisme de Camaret-sur-Mer, pour le bon accueil de Sabine Kerdommarec.

- À l’Office de Tourisme de Crozon, pour son sympathique accueil et sa documentation.

- À Marie Simon, du service culturel de l’Hôtel de Ville de Châteaulin.

- À la Compagnie de Gendarmerie nationale de Châteaulin.

- À l’École de Gendarmerie nationale, Caserne de la Tour d’Auvergne de Ty Vougeret à Dinéault, près de Châteaulin, et plus particulièrement au capitaine Caudan, officier de communication.

- À la Direction de l’Enfance et de la Famille du Conseil Général du Finistère, de Quimper, pour toutes ses informations techniques.

- À Alain Le Gouill, Président des Boucles de l’Aulne, pour ses indications.

- À Anne, conductrice de car, pour sa suggestion…

 

 

Comme pour chacun de mes ouvrages, il m’est évidemment impossible de citer tous ceux que j’ai approchés à un moment ou à un autre ; si vous vous sentez concernés, considérez que mes remerciements s’adressent aussi à vous. Merci à tous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« C’est être médiocrement habile,

que de faire des dupes. »

Luc de Clapiers - Marquis de Vauvenargues 1715-1747

 

 

« La vérité existe.

On n’invente que le mensonge. »

Georges Braque. 1882-1963

 

 

Chapitre 1

Lundi 26 mars.

Après deux dernières enquêtes1 menées loin de chez eux durant de nombreux mois, Phil et François appréciaient pleinement de retrouver la quiétude de leur bureau de Quimper, leurs collègues ainsi que leur patron, le commissaire Yann Le Godarec. Depuis leur retour l’été dernier, l’activité s’était déroulée sans affaire hors norme ; bref, une certaine routine s’était vite installée malgré la lourde charge de travail…

En réunion, le patron, entouré de son équipe au complet pour pouvoir travailler dans de bonnes conditions, avait retrouvé toute sa sérénité. Cela faisait de nombreux mois à présent qu’il savourait cette chance. Il n’était donc pas faux de prétendre que faire du mal à quelqu’un pendant un certain temps… lui procure une sensation de bien-être lorsque ça s’arrête…

En regagnant leur bureau, ils remarquèrent une femme âgée assise sur une chaise dans le couloir. Celle-ci, le bras en écharpe, les attendait.

François l’invita à entrer et à prendre place sur l’un des deux fauteuils qui lui faisaient face de l’autre côté de son bureau.

Phil reprit sa place habituelle devant son ordinateur.

— Que pouvons-nous faire pour vous, Madame ? Les yeux bleus, très clairs, comme délavés par le temps, les cheveux gris, presque blancs, permanentés, le visage pâle, marqué par une profonde toile de rides, la femme regarda François, comme implorante. Elle portait un tailleur noir sur un chemisier blanc immaculé et un gros camée coloré fermait le foulard léger qui enserrait son cou décharné. Sa fine main osseuse et valide serrait un réticule. Sa lèvre trembla légèrement avant qu’elle s’exprime :

— Hier après-midi, j’ai été victime d’une agression, au moment où je retirais de l’argent au distributeur de billets. Un individu m’a violemment arraché mon sac et je suis tombée, je n’ai pas pu le retenir… Peu de temps après, des passants ont alerté les secours et j’ai été conduite à l’hôpital et puis voilà… dit-elle en montrant son bras en écharpe.

Elle baissa la tête en soupirant. Un silence de quelques secondes s’installa dans la pièce. Imaginant la situation, les deux OPJ ressentirent une réelle compassion pour cette femme âgée très digne. C’était la deuxième agression sur Quimper, ce mois-ci…

François tourna la tête vers Phil qui se mit aussitôt au travail pour enregistrer son identité. Malgré tout, cette femme portait très bien ses quatre-vingt-onze ans. Elle précisa :

— J’habite quai de l’Odet, vous voyez, pas très loin du Palais de Justice, c’est un quartier tranquille et j’y suis bien, je suis allée retirer quelques billets et voilà…

Elle expliqua les circonstances exactes, hélas, le scénario était le même qu’un précédent ; aucune description de l’agresseur. Elle signala la perte de sa montre également, au cours de l’agression. Était-elle restée accrochée au sac ou le sac l’avait-il arrachée et projetée ? Elle l’ignorait car, avec ces perturbations, elle ne s’était rendu compte de cette disparition que plus tard, au moment de se coucher.

Les deux victimes de ces agressions similaires s’accordaient à dire que ces agissements étaient l’œuvre d’un homme très barbu. Quant à son âge, pour l’une, il était plutôt jeune, pour l’autre, il avait quarante et peut-être même cinquante ans. Impossible de déterminer un véritable profil de l’individu dans ces conditions. Néanmoins, selon leurs dires, d’après son apparence générale, tout portait à croire qu’il pouvait s’agir d’une seule et même personne. Phil se leva pour regarder la carte détaillée de Quimper, les deux agressions avaient eu lieu le long de l’Odet ; la première, boulevard de Kerguélen, la seconde, quai de l’Odet ; les deux, en plein jour et, curieusement, toujours sans témoins.

Malgré leurs nombreuses questions, la femme n’apporta pas plus d’informations utiles à l’enquête ; elle était toujours sous le choc, ils se proposèrent de la ramener à son domicile. Ils prirent également avec eux l’autre dossier et s’en allèrent tous les trois.

Phil et François voulaient en profiter pour bien visualiser l’endroit où s’était déroulée la scène et ainsi par la suite mener une enquête de voisinage approfondie.

Ils cherchèrent également la montre dans les environs, en vain…

En la laissant devant la porte de sa résidence, ils s’efforcèrent de la rassurer, lui signifiant qu’ils avaient des pistes sérieuses et que, sans tarder, ils seraient en mesure de mettre un terme à ces agressions, ce qui eut pour effet de lui redonner le sourire et de pouvoir la quitter sur une note d’optimisme.

Ce qui fit dire à Phil, une fois qu’ils se retrouvèrent tous les deux :

— Ceci étant dit, en réalité, même si nous l’avons rassurée, nous ne sommes pas plus avancés, car nous n’avons rien de rien. Pas même le sac arraché, même vide, qui nous aurait permis de prélever quelques indices.

Ils interrogèrent les riverains, mais personne n’avait rien vu ni entendu…

 

*

 

Quelques jours plus tard.

Le même scénario se renouvelait, Quai Neuf, cette fois, un peu plus loin que le lieu précédent. Mais ce vol à l’arraché venait de se terminer en drame, la chute brutale de la victime avait entraîné le décès de cette dernière, lors de son transport vers l’hôpital.

Phil et François furent nommés directeurs de l’enquête par le procureur et le directeur départemental de la police. Les directives du procureur étaient claires : éviter la psychose sur la ville et mettre en œuvre les moyens pour patrouiller sans arrêt et discrètement dans ce secteur, afin de mettre un terme à ces sordides agressions.

Pour la troisième fois, ils attaquèrent l’enquête de voisinage, aidés par quelques collègues mais, hélas, ils n’obtinrent aucune information leur permettant d’avancer. Il était désolant de constater que personne n’avait rien vu, rien entendu, ni même remarqué quoi que ce soit de particulier.

Sur le trottoir, ils croisèrent un homme qui venait du chemin de halage, il résidait juste après le quai Neuf. Ce dernier les reconnut car il avait longuement échangé avec eux lors de la seconde affaire qui s’était déroulée quai de l’Odet. Il vint aussitôt vers eux.

— Vous savez, depuis l’autre jour, j’en ai discuté avec tous mes voisins et à force d’évoquer le sujet, une chose nous est revenue…

— Ah ! Et laquelle ?

— Ben voilà, je ne m’en étais pas rendu compte non plus, mais c’est bien vrai… depuis un bout de temps, il y avait un bateau amarré juste après le pont de Poulguinan…

— Un bout de temps, c’est-à-dire ?

— Plusieurs semaines et, ce matin, il n’est plus là.

— Y était-il encore hier ?

L’homme réfléchit, embarrassé, avant de répondre :

— Oui, presque sûr, il a dû partir hier soir ou ce matin très tôt.

— Avez-vous une description du propriétaire ou de l’occupant ?

Il sonda les OPJ d’un œil scrutateur, tout autant que critique, et rajouta :

— Oui, avec mes voisins, on pense qu’il a une quarantaine d’années, est barbu, châtain ; il montre une légère claudication, comme s’il avait un petit problème pour marcher.

— Droite ou gauche ?

— Nous ne sommes pas tous d’accord sur ce point. Mais on ne peut pas vous en dire plus, car chacun d’entre nous ne l’a toujours vu que de loin, vous comprenez…

— Un signe particulier sur le visage, ses mains ou dans sa démarche, en dehors de cette claudication ?

— Non, il nous semble être toujours habillé de la même façon, mais sans que l’on puisse vous décrire précisément ses vêtements qui pourraient être de type militaire. Il porte des rangers, ça, nous en sommes sûrs ; pour le reste, il fait partie de ces gens que l’on croise dans la rue sans vraiment les voir.

— Quant au bateau, vous connaissez son nom et son immatriculation ?

Il s’empressa d’ajouter, dans une pathétique tentative de justification :

— Ben non justement, on n’a jamais pensé les relever, c’est un voilier en bon état, de couleur beige, mais qui doit également se déplacer à l’aide d’un moteur hors-bord fixé à l’arrière. Une fois, en marchant sur le quai, à sa hauteur, je me souviens avoir remarqué que celui-ci avait l’air assez récent.

— Quelle marque ?

— Aucune idée.

Ils s’efforcèrent tout de même de définir une certaine description du bateau et du contexte de vie de son occupant. L’homme semblait vivre seul à bord, il s’en allait discrètement à pied en ville et revenait tout aussi discrètement, évitant de parler avec les riverains, ne se liant avec personne.

Il fallait se garder de jugements hâtifs, mais peut-être détenaient-ils un début de piste…

Forts de ces informations, ils se rendirent alors auprès des personnes interrogées précédemment dans le cadre des autres agressions. Certaines convergèrent vers cette description et plusieurs pensaient l’avoir aperçu également en ville.

Le profil retenu était celui d’un homme, barbu, d’une bonne quarantaine d’années et ayant une légère claudication… C’était peu, très flou, mais sans doute pas anodin.

De retour au bureau, ils lancèrent ce signalement, bien qu’imprécis, afin de localiser ce bateau, soit sur l’Odet jusqu’à Bénodet, soit sur la côte, se dirigeant vers Concarneau, d’un côté, ou vers le Pays Bigouden, de l’autre.

 

*

 

Le lendemain, près de la gare de Quimper, un jeune SDF, originaire du Nord-Finistère, Jacques Le Folgoët, était arrêté au cours d’une bagarre entre marginaux. Il était en possession d’une importante somme d’argent en espèces qui, au vu de sa situation, était tout à fait anormale. Ses propos sur ce point restaient parfois contradictoires, mais, il prétendait détenir cet argent de sa grand-mère, décédée récemment, sans toutefois pouvoir le justifier.

Des vérifications confirmèrent que la grand-mère était effectivement décédée quelques semaines plus tôt, mais comme Jacques Le Folgoët avait rompu toute relation avec ses parents, il s’avérait impossible de lui opposer le contraire.

Quand les collègues de Phil et François voulurent rapprocher cet individu des trois vols à l’arraché, son ami d’errance, un autre marginal, originaire de la région parisienne, certifia se trouver avec lui dans un autre lieu très éloigné de ces faits, écartant de cette manière l’hypothèse qu’il puisse être l’auteur de ces vols.

Il nia farouchement, par ailleurs, être l’auteur des agressions, car le pécule donné par sa grand-mère le dispensait de s’inquiéter de disposer d’espèces pendant un certain temps, au vu de son train de vie.

Mais ce qui vint clore cette piste fut le fait qu’aucune des victimes ne l’identifia formellement comme pouvant être le coupable.

L’homme, bien que plus jeune, semblait avoir la quarantaine passée. D’autre part, il portait une barbe et des cheveux assez longs, sales et hirsutes… mais un autre élément joua en sa faveur : il ne semblait pas présenter de forme de claudication particulière.

Les collègues de Phil et François leur en parlèrent au cours de la réunion avec le patron, faisant le point sur les affaires en cours, mais chacun considéra que l’on ne pouvait rien retenir contre lui, tout au moins dans le cadre des affaires suivies par Phil et François.

Jacques Le Folgoët portait tout de même un peu de drogue sur lui, il fut donc déféré, jugé en comparution immédiate et légèrement condamné pour violence et voie de faits sur le domaine public, même si chacun doutait de l’intérêt d’une telle condamnation pour un individu vivant en marge de la société et qui ne semblait absolument pas vouloir rejoindre une certaine vie sociale…

 

*

 

Puis les jours passèrent sans que personne ne signalât la présence de ce bateau, bien que nous fussions hors saison.

Les jours suivants, il n’y eut pas non plus d’autres agressions à Quimper, ce qui calma tout le monde et laissa penser que le coupable pouvait avoir quitté la ville.

 

1. Voir Rennes au galop et Ça se Corse à Lorient, même auteur, même collection.

 

Chapitre 2

Mardi 10 avril.

En ce lendemain de week-end de Pâques, chacun reprenait son fardeau pour la semaine.

Les précédents vols à l’arraché semblaient s’oublier au fil des jours. Le train des petites affaires poursuivait son cours tranquillement.

C’est alors que la gendarmerie nationale de Châteaulin appela François :

— On ne sait pas s’il s’agit bien de votre bateau, mais une de mes équipes en a localisé un à Port-Launay. Ce qui nous intrigue le plus, c’est que son occupant pourrait bien correspondre au profil de l’homme que vous recherchez.

— Il se trouve à bord ?

— Non, certaines personnes l’ont vu quitter les lieux et marcher en direction de Châteaulin, un sac sur le dos…

— Quelle distance cela représente ?

— Ce n’est pas très loin, seulement à trois kilomètres environ…

— Bien, nous prévenons le patron et nous arrivons.

— Le plus simple c’est que vous veniez à la gendarmerie et un de mes gars vous accompagnera.

 

*

 

Trois quarts d’heure après, ils descendaient vers Châteaulin.

Confortablement installée dans un méandre de l’Aulne et entourée de collines que le printemps reverdissait un peu plus chaque jour, Châteaulin méritait d’être appelée « la petite suisse bretonne ».

Ils garèrent leur voiture dans la cour de la gendarmerie et gravirent prestement l’escalier en ciment, au pignon du grand bâtiment qui longeait la rue et dominait les environs. Ils s’annoncèrent à l’accueil et furent aussitôt conduits à l’étage, dans les bureaux de la compagnie. Le capitaine se souvenait avoir été en relation avec eux, il y a quelques années, sur une affaire qui se déroulait sur le canal de Nantes à Brest et dans les villes de Châteauneuf-du-Faou et de Carhaix2.

Cela favorisa un contact très cordial et chaleureux. Ils allèrent à l’essentiel et le capitaine appela un gendarme. Moins d’une demi-heure après, ils passaient devant la mairie de Châteaulin à l’architecture typique, longeant l’Aulne sur le quai Jean Moulin puis Charles de Gaulle et, déjà, ils sortaient de la ville. Sur l’avenue Louison Bobet, François ne put s’empêcher de soupirer :

— J’ai toujours un pincement au cœur quand je me retrouve ici, dit-il, en regardant sur la droite les vestiges des tribunes à ciel ouvert…

— Pourquoi, qu’y avait-il là ?

— C’était l’arrivée du fabuleux Circuit de l’Aulne ! Le plus souvent, la course avait lieu au moment du grand pardon de Châteaulin et, quand j’étais gamin, j’accompagnais mon père pour assister à cette course mythique. Tous les « grands » de l’époque ont couru ici, de Bobet à Anquetil en passant par Poulidor, Merckx et des centaines d’autres…

— Ah bon ? se contenta de répondre Phil qui ignorait tout de cette épreuve.

— Le dernier critérium du fameux Circuit de l’Aulne s’est couru en 1998, c’était le soixantième !

— Ah, tout de même…

— Il a été remplacé en 1999 par les « Boucles de l’Aulne », mais cela n’a plus rien à voir en termes d’épreuve, bien que la manifestation soit régie par l’UCI. Cette dernière se déroule désormais chaque année fin mai.

Mais ni Phil ni le jeune gendarme ne pouvaient ressentir ce que François éprouvait, d’autant qu’au-delà de l’épreuve sportive, sans doute, devait-il aussi revivre une tranche de vie de sa jeunesse, gardant visiblement de ces sorties avec son père un souvenir heureux. Le gendarme demanda à Phil de ralentir pour quitter cette route en tournant à gauche dans le virage, afin de continuer à suivre le cours de l’Aulne.

— Voilà, nous sommes à Port-Launay, dit-il. Il y a toujours de nombreux bateaux amarrés le long du quai et celui qui pourrait vous intéresser se trouve un peu plus loin.

— À quelques encablures de l’océan, Port-Launay fait partie des ports bretons qui ont toujours vécu de la mer, sans jamais la voir, glissa François à Phil avant de poursuivre. Construit au bord de l’Aulne, dos aux collines, l’endroit a connu un développement économique prospère au XIXe, point de liaison entre la batellerie du canal et les gabares de la rade de Brest, à mi-chemin entre les terres et les flots, pour devenir aujourd’hui une halte prisée des plaisanciers et des pêcheurs.

Effectivement, le cadre était particulièrement agréable et donnait une ambiance de petit port fluvial. D’un côté de la route, le long du quai édifié sous Napoléon III, se mélangeaient divers types de bateaux dont l’un d’entre eux, noir et blanc, ressemblait terriblement à ces vieux chalutiers en fer des années soixante, comme ceux de Concarneau, réhabilités et aménagés pour la plaisance.

De l’autre côté, les larges façades, souvent fleuries, des maisons de caractère du XIXe où vivaient autrefois commerçants et armateurs ainsi que quelques commerces, s’alignaient sur plus d’un kilomètre, le long de la chaussée.

Phil se gara sur le quai, juste à hauteur du fameux voilier, objet de tout leur intérêt. Il correspondait, a priori, au descriptif établi par les riverains de l’Odet, à Quimper. Il semblait inoccupé. Une bâche plastique protégeait l’arrière contre les intempéries ; le moteur hors-bord, visiblement récent, était vigoureusement cadenassé. Le plus proche riverain confirma que le voilier était arrivé au moteur, avec un seul homme à bord. Celui-ci l’avait amarré et avait pris ses dispositions pour le protéger au mieux, comme s’il devait s’absenter quelque temps. Puis cet homme, correspondant à la description, barbu, chaussé de rangers, un sac militaire sur le dos, était parti tranquillement à pied en se déplaçant avec une légère claudication, le long de l’Aulne en direction de Châteaulin. Depuis, il n’était pas réapparu.

Le long du canal, l’eau y allait de son léger clapotis ; quelques goélands et mouettes squattaient les lieux et poussaient quelques cris stridents.

« Le bateau s’appelle Maracuja et est basé à Lorient » nota François qui releva également l’immatriculation puis interrogea l’inscription maritime.

Puis ils regagnèrent la gendarmerie car, pour l’instant, ils ne pouvaient rien faire de plus sur les lieux.

Au moment où ils s’installaient dans l’un des bureaux, François reçut la réponse aux questions posées :

— Ce bateau a été immatriculé pour la première fois en juin 2006 et appartient à Pascal Le Vastil, né sous X en janvier 1966 à Quimper, célibataire, militaire de carrière.

— Vous avez son adresse ?

— Oui, mais je ne sais pas si elle est toujours bonne car elle correspond à celle de la base militaire de Lorient où il était affecté au moment de l’inscription.

— D’accord, merci, nous allons voir…

Le profil commençait à ressortir : quarante-six ans, célibataire.

François appela aussitôt Pierrot3 à l’Hôtel de Police de Lorient pour savoir s’il avait des « entrées » chez les militaires.

Ce dernier ne se fit pas prier, trop heureux de leur rendre service.

Effectivement, sans tarder, il rappela, fier d’apporter les renseignements :

— Pascal Le Vastil s’est engagé dans les commandos de marine en février 1987, homme du rang, puis sous-officier, il a terminé sa carrière militaire comme officier il y a quelques semaines, après vingt-cinq ans de service dans ce commando de prestige. Il a un sacré palmarès et est superbement noté…

— C’est-à-dire ?

— Il était engagé dans le commando Trépel, héritier des unités commandos de la France libre, créées pendant la Seconde Guerre mondiale en Grande-Bretagne, du nom du capitaine Trépel qui fut, avec Philippe Kieffer, un des créateurs des commandos et qui disparut lors d’un raid à Wassenaar, sur la côte hollandaise, en février 1944. Basé à Lorient, ce commando est spécialisé dans l’assaut à la mer…

— Effectivement ! Plutôt profil baroudeur…

— Attendez ! Notre homme a participé à de nombreuses opérations : Turquoise, au Rwanda en 1994, Badge, en Afghanistan en 1996, Maracuja, aux…

— Attends un peu, comment dis-tu ? le coupa François.

— Maracuja, aux Caraïbes en 1997.

— Voilà l’origine du nom de son bateau !

— Et ce n’est pas tout, il a également participé à l’extraction de ressortissants à Dolissi, au Congo-Brazaville. Puis, récemment, il a été blessé à la jambe droite en Afghanistan, ce qui lui a permis une mise à la retraite légèrement anticipée, il y a quelques semaines de cela seulement. Certains le décrivent comme un individu rigide, acharné et allergique à toute forme d’incursion sur ses plates-bandes.

— D’accord, on voit ! C’est pas un rigolo… Tu as son adresse actuelle ?

— Là, y a un problème, il s’est déclaré itinérant et son courrier arrive toujours près de la base, à l’adresse de l’association des anciens du commando Trépel, c’est tout.

— Bien. Ceci ne nous arrange pas !

— Vous êtes encore sur un gros coup ? demanda Pierrot dont l’intonation reflétait nettement son envie de partager cette enquête avec eux.

— Ben, on n’sait pas pour l’instant. Au vu de son profil, on n’imagine pas ce gars pratiquer le vol à l’arraché, et, de plus, à l’encontre de personnes âgées ! Y a un truc qui nous échappe dans cette affaire. Faut donc bien voir…

Une fois la communication terminée, Phil et François menèrent leur réflexion avec le jeune gendarme. Étant donné sa carrière exemplaire, cet homme bénéficiait certainement d’une pension complète d’officier et ne devait pas manquer de moyens financiers, et tous les trois s’accordaient à dire qu’il serait étonnant qu’il puisse se laisser aller à de si viles agressions pour ne voler que quelques dizaines voire centaines d’euros.

— À moins que… suggéra Phil.

— Oui ? demanda François, voyant bien que Phil pensait à quelque chose de particulier.

— Qu’il soit victime d’une ou de plusieurs addictions : drogue, jeux, alcool, que sais-je encore…

— Qu’il aurait contractées au cours de ses pérégrinations militaires mouvementées ?

— Par exemple, et, pour ce faire, il craquerait tout l’argent de sa pension et, par conséquent, serait capable de tout pour s’en procurer. Étant donné sa bonne condition physique, malgré son petit handicap au niveau de la jambe, il repère la personne, agit efficacement et disparaît, ça tient… D’où le fait qu’il soit insaisissable.

— Ouais… Curieux tout de même, après tout ce qu’il a fait et démontré durant toute sa vie, il serait tombé bien bas…

— Nous pouvons voir dans la presse assez de cas de ces personnes qui, placées tout en haut de l’affiche, terminent parfois très mal malgré tout.

— C’est vrai… et puis, il y a cette naissance sous X, il faut creuser de ce côté-là aussi…

Phil et François regagnèrent leur bureau à Quimper. Après avoir rendu compte de la situation à leur patron, ils constituèrent un dossier administratif aussi complet que possible sur Pascal Le Vastil, récupérant également sa photo d’identité et plus de détails sur son véritable profil. Cette affaire les dérangeait tout autant que le patron, car, pour l’instant, ils ne travaillaient que sur des suppositions et ne disposaient de rien de concret ni de bien établi pour faire avancer l’enquête.

 

2. Voir Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou, même auteur, même collection.

3. Voir Ça se Corse à Lorient, même auteur, même collection.

 

Chapitre 3

Le lendemain matin, mercredi 11 avril.

Tandis que les discussions, essentiellement politiques, continuaient à alimenter les conversations et faisaient rage autour de la machine à café, le capitaine de la gendarmerie de Châteaulin appela François :

— Un couple de personnes âgées, qui s’était absenté durant une grande partie de la journée pour participer à une sortie de leur club, a eu la désagréable surprise, à son retour, de constater que sa maison avait été visitée et fouillée méthodiquement et discrètement, mais dans un but bien précis. Seul l’argent liquide a disparu, pas les objets divers recensés, pourtant coûteux et intéressants à revendre, ce qui nous a tout de suite fait penser à votre gars.

— Oui, en effet, seules les espèces l’intéressent. Nous pourrions y voir un même objectif dans la façon de procéder. Et alors, que faisons-nous ?

— J’ai eu votre patron qui, lui, a joint le procureur, il serait d’avis de vous confier l’enquête et nous travaillerions de pair sur ce coup-là.

— Oui, ça commence à faire beaucoup, trois agressions physiques pour voler des espèces et maintenant, cambriolage de maison, dans le secteur où est justement censé se trouver notre homme, serait-ce un fil conducteur ?

— C’est ce que nous avons tout de suite pensé. Cependant, rien ne prouve que ce soit la même personne pour autant.

— Bien sûr. Bon, nous voyons avec le patron… Suite aux entretiens avec le capitaine de la gendarmerie de Châteaulin, le procureur et le patron départemental, Yann Le Godarec, leur confirmèrent qu’ils seraient bien directeurs de l’enquête à mener en étroite relation avec les collègues gendarmes.

Phil et François savaient ce que cela signifiait en termes de travail. Il leur appartenait de récapituler les premières constatations et de rédiger un procès-verbal long et très détaillé, pour figer la chronologie des faits et l’environnement des lieux. Ils auraient également la charge de croiser tous les éléments recueillis par chacun, policier ou gendarme.

 

*

 

Dans l’heure qui suivit, après avoir récupéré un jeune gendarme, Phil et François se rendirent chez le couple habitant rue de Ty Carré, à moins d’un kilomètre de la gendarmerie,· dans le haut de la ville de Châteaulin.

Tous deux devaient approcher des quatre-vingts ans mais restaient visiblement alertes et vifs d’esprit.

L’homme, de taille moyenne, mince, cheveux blancs coiffés en arrière, vêtu de façon soignée, paraissait entretenir sa santé et son physique. Son épouse, à peu près de même taille, tout aussi mince, s’harmonisait parfaitement avec lui. Tous deux avaient été cadres dans l’industrie agroalimentaire et s’étaient retirés dans cette maison, à leur retraite, depuis près de vingt ans.

Dynamiques, ils s’investissaient activement dans la vie de plusieurs associations locales, précisèrent-ils, leur identité à peine enregistrée par Phil, visiblement impatients de raconter ce qu’ils avaient découvert en rentrant chez eux. Ce fut l’homme qui intervint le premier :

— Nous avons participé à une sortie avec notre club. L’après-midi, une visite était organisée et le soir, un repas dansant au Point de Vue à Laz, près de Châteauneuf-du-Faou…

— Oui, oui, nous connaissons, confirma François qui voyait l’homme hésitant, comme s’il voulait préciser où cela se trouvait.

— Bien. Au retour, le car nous a déposés devant la maison un peu avant minuit. J’ai ouvert la porte d’entrée à l’aide de ma clef.

— Elle n’était pas fracturée ?

— Non, non, fermée à clef normalement.

— Par où le voleur est-il passé alors ?

— Justement, on ne sait pas, car nous fermons les volets des fenêtres et de la porte-fenêtre quand nous nous absentons et aucun accès n’a été fracturé, ni sur la façade ni sur l’arrière.

— Qu’est-ce qui vous a alertés alors ?

— En entrant, rien ne nous a frappés, c’est seulement en allant nous coucher que nous avons remarqué que, dans l’armoire et la commode, certaines affaires étaient en désordre…

— Non, disons plutôt qu’elles n’étaient pas rangées comme d’habitude, précisa son épouse qui, visiblement, tenait aussi à participer. Et nous avons découvert que tout l’argent liquide avait disparu.

— Que représentait cette somme ?

Le couple se regarda, hésitant, avant que l’épouse ne réponde très franchement :

— Dix mille euros… cinq mille, dans l’armoire, sous les vêtements pliés, et cinq mille dans la commode, dans le double fond de la boîte à bijoux…

— Et ces derniers ?

— Il ne semble pas en manquer…

— Et autrement ?

— Nous n’avons rien remarqué de particulier, mais peut-être sommes-nous encore sous le choc et ne découvrirons-nous une disparition que plus tard…

— Oui, c’est souvent le cas…

— Aucun objet de valeur auquel nous tenions n’a disparu, c’est certain, c’est pourtant facile à emporter et à monnayer !

François semblait intrigué et le nota, avant de leur demander :

— Mais pourquoi gardez-vous autant d’argent chez vous ?

— C’est une vieille habitude, reprit l’homme, nous tapons dedans régulièrement pour régler les dépenses courantes, les petits travaux, les achats divers, les dons aux enfants et petits-enfants et également pour les sorties et, dès que nous arrivons à moins de cinq mille euros, nous en ressortons de la banque… et, là, c’est ce que nous venions de faire.

Était-ce une coïncidence ? se demandèrent les trois policiers.

— Vous n’avez qu’une banque ?

— Non, deux, ainsi qu’un compte d’épargne à la poste.

— Vous n’avez donc pas affaire à une seule personne en particulier qui vous connaîtrait particulièrement bien, par exemple ?

— Non ! Dans les banques, ça change tout le temps et il n’y a plus de personnes pour entretenir des relations personnelles, ce n’est plus comme dans le temps…

— Bien… Si nous résumons, votre logement ne donne pas l’impression d’avoir été fouillé de fond en comble, mais visiblement, le ou les voleurs se sont tout de même rendus précisément là où se trouvait l’argent liquide. Le vol d’objets ne les intéressait pas, a priori. Nous pouvons penser que nous sommes en présence de malfaiteurs informés qui, non seulement, savent vos habitudes, mais se sont procuré le moyen d’entrer chez vous sans effraction, ce qui veut dire que vous allez commencer par changer toutes vos serrures et ne donner un double des clefs qu’à des personnes de confiance et désignées… Pouvez-vous recenser à qui vous en avez confié ou simplement prêté ?

Le couple se consulta du regard et sembla embarrassé pour répondre.

L’homme reprit la parole :

— Vous savez, depuis plus de vingt ans que nous habitons ici, nous n’avons jamais rencontré le moindre problème, alors des clefs, nous en avons donné ou prêté quelques-unes ! En dehors des enfants, nous avons la femme de ménage qui vient parfois quand nous ne sommes pas là, le service d’aide à domicile, le gars qui s’occupe de notre jardin et, également, le chauffagiste qui effectue la maintenance de notre chaudière ou encore le livreur de fuel et nous en oublions, très certainement !

— Vous allez cependant nous établir la liste de ces personnes avec leur adresse, nous devons tout de même vérifier.

— Nous en confions depuis plusieurs années et avons donc peut-être oublié à qui parfois… Nous ignorons totalement l’usage que l’un ou l’autre a pu en faire, indépendamment de nous…

— Oui, nous comprenons bien, disons depuis un an ou deux alors…

— C’est un quartier calme, pourtant. Tout le monde connaît tout le monde et il ne se passe jamais rien de…

— Non, jusqu’au jour où ça arrive ! fit François.

Ils haussèrent les épaules d’impuissance en secouant négativement la tête, reconnaissant qu’ils avaient peut-être été victimes de leur trop grande confiance.

— Mettez-vous une clef, parfois, à l’extérieur, pour le cas où vous auriez oublié ou perdu la vôtre ?

— Oui, nous en laissons toujours une sous le pot de fleurs, à droite de l’entrée, car notre porte n’a pas de poignée et si nous ne faisons pas attention, elle peut se refermer toute seule… C’est déjà arrivé et si l’un de nous est seul, il doit attendre le retour de l’autre ou casser un carreau pour pouvoir entrer. Mais en ce moment, il n’y en a aucune, car l’autre jour, notre fils n’avait pas la sienne, alors il a pris celle-là et a oublié de la remettre en partant.

— Il habite dans la région ?

— À Brest où il travaille. Quand il passe dans le coin, il s’arrête, car son employeur a aussi un établissement secondaire à Lorient et un autre à Concarneau. Si nous sommes absents, il nous laisse un petit mot et parfois vient prendre ou déposer une bricole appartenant aux petits-enfants ou autre chose…

— Pouvez-vous nous remettre tout de suite quelques adresses à exploiter ? Vous déposerez à la gendarmerie, à notre attention, celles qui vous reviendront plus tard…

L’homme, affable, l’air songeur, déclara :

— Je doute fort que l’une de ces personnes puisse être soupçonnée d’un tel méfait à notre égard.