Saint ou démon à Saint-Brévin-les-Pins - Firmin Le Bourhis - E-Book

Saint ou démon à Saint-Brévin-les-Pins E-Book

Firmin Le Bourhis

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Beschreibung

À la recherche de la vérité, de la Loire-Atlantique jusqu'au Pays basque...

Une femme affolée signale la disparition de son mari… et la nouvelle enquête du capitaine François Le Duigou et du lieutenant Phil Bozzi démarre.
Les deux OPJ se retrouvent immédiatement en Loire-Atlantique et doivent sillonner le Pays de Retz : de Saint-Brévin-les-Pins à Paimbœuf en passant par Saint-Michel-Chef-Chef, La Plaine-sur-Mer ou encore Préfailles...
L’affaire rebondit de surprise en surprise, à un rythme effréné. Au point de les transporter au Pays basque du côté de Saint-Jean-de-Luz, Ciboure, Socoa et de leurs environs…

Cette enquête hors du commun propose un dénouement aussi imprévisible… que surprenant !

EXTRAIT

— Si j’ai bien compris, Madame, votre époux devait quitter la résidence secondaire que vous possédez à Saint-Brévin-Les-Pins, en Loire-Atlantique, samedi après-midi, pour être, en soirée, chez vous à Quimper…
— Oui, oui, c’est bien ça.
— Mais, à ce jour, il n’est toujours pas arrivé. Son téléphone portable ne répond pas. Hier, vous vous êtes rendue à Saint-Brévin-Les-Pins, faisant ainsi, en sens inverse, le chemin qu’il aurait dû normalement prendre. Cependant, sur la route, vous n’avez rien remarqué de particulier. Quant à la maison, celle-ci était normalement rangée et correctement fermée. Vous avez appelé les hôpitaux situés sur l’itinéraire… personne à ce nom n’a été enregistré.
— Oui, je suis terriblement inquiète. Il s’est sûrement passé quelque chose de grave, sinon il aurait donné de ses nouvelles… je ne comprends pas.

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né à Kernével en 1950, Firmin Le Bourhis vit et écrit à Concarneau en Bretagne. Après une carrière de cadre supérieur de banque, ce passionné de lecture et d’écriture s’est fait connaître en 2000 par un premier ouvrage intitulé Quel jour sommes-nous ?, suivi d’un second, Rendez-vous à Pristina, publié dans le cadre d’une action humanitaire au profit des réfugiés du Kosovo.

Connu et reconnu bien au-delà des frontières bretonnes, Firmin Le Bourhis est aujourd’hui l’un des auteurs de romans policiers bretons les plus appréciés, avec vingt-huit enquêtes déjà publiées. Il est également l’auteur d’essais sur des thèmes médicaux et humanitaires. Ses ouvrages sont tous enregistrés à la bibliothèque sonore de Quimper au service des déficients.

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FIRMIN LE BOURHIS

 

 

 

Saint ou démonà Saint-Brévin-les-Pins

 

éditions du Palémon

Z.I de Kernevez

11B rue Röntgen

29000 Quimper

 

DU MÊME AUTEUR

 

Aux éditions Chiron

 

Quel jour sommes-nous ? La maladie d’Alzheimer jour après jour

 

Rendez-vous à Pristina - récit de l’intervention humanitaire

 

Aux éditions du Palémon

 

n° 1 - La Neige venait de l’Ouest

n° 2 - Les disparues de Quimperlé

n° 3 - La Belle Scaëroise

n° 4 - Étape à Plouay

n° 5 - Lanterne rouge à Châteauneuf-du-Faou

n° 6 - Coup de tabac à Morlaix

n° 7 - Échec et tag à Clohars-Carnoët

n° 8 - Peinture brûlante à Pontivy

n° 9 - En rade à Brest

n° 10 - Drôle de chantier à Saint-Nazaire

n° 11 - Poitiers, l’affaire du Parc

n° 12 - Embrouilles briochines

n° 13 - La demoiselle du Guilvinec

n° 14 - Jeu de quilles en pays guérandais

n° 15 - Concarneau, affaire classée

n° 16 - Faute de carre à Vannes

n° 17 - Gros gnons à Roscoff

n° 18 - Maldonne à Redon

n° 19 - Saint ou Démon à Saint-Brévin-les-Pins

n° 20 - Rennes au galop

n° 21 - Ça se Corse à Lorient

n° 22 - Hors circuit à Châteaulin

n° 23 - Sans Broderie ni Dentelle

n° 24 - Faites vos jeux

n° 25 - Enfumages

n° 26 - Corsaires de l’Est

n° 27 - Zones blanches

n° 28 - Ils sont inattaquables

n° 29 - Dernier Vol Sarlat-Dinan

n° 30 - Hangar 21

n° 31 - L'inconnue de l'archipel

n° 32 - Le retour du Chouan

n° 33 - Le gréement de Camaret

 

Menaces - Tome 1 - Attaques sur la capitale

Menaces - Tome 2 - Tel le Phénix

Menaces - Tome 3 - Pas de paradis pour les lanceurs d'alerte

 

 

 

 

 

Retrouvez tous les ouvrages des Éditions du Palémon sur :

 

www.palemon.fr

 

Dépôt légal 2e trimestre 2014

ISBN : 978-2-916248-59-2

 

 

 

 

 

NOTE DE L’AUTEUR :

L’auteur s’empare, comme habituellement, d’une véritable affaire criminelle et, au terme d’une étude approfondie des faits et avec l’aide d’officiers de police judiciaire, en donne une version romancée aussi proche que possible de la réalité…

Un fait réel qu’il transpose dans d’autres lieux pour y bâtir une enquête qu’il livre à votre perspicace lecture…

 

 

CE LIVRE EST UN ROMAN.

Toute ressemblance avec des personnes, des noms propres, des lieux privés, des noms de firmes, des situations existant ou ayant existé, ne saurait être que le fait du hasard.

 

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation…) sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre Français d’Exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands Augustins - 75 006 PARIS - Tél. 01 44 07 47 70 - Fax : 01 46 34 67 19 - © 2014 - Éditions du Palémon.

 

 

 

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

 

 

Aux Offices de Tourisme de Saint-Brévin-Les-Pins,

Saint-Michel-Chef-Chef, Paimbœuf,

Préfailles et La Plaine-sur-Mer.

 

À l’Office de Tourisme de Saint-Jean-de-Luz

et de Ciboure.

 

À la Communauté de Brigades de Gendarmerie

de Saint-Brévin-Les-Pins.

 

À Stéphane Brunerie,

Responsable de Marque chez Saint-Michel Biscuits,

pour la « Galette Saint-Michel »

de Saint-Michel-Chef-Chef.

 

À Pascal Vacher, Officier de Police Judiciaire,

pour ses apports techniques.

 

Et à toutes les personnes rencontrées

en Pays de Retz et au Pays Basque

et qui se reconnaîtront…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« L’homme seul est l’auteur de sa propre histoire,

même si l’histoire suit ses propres lois. »

 

Koco Racin (1909-1943)

 

 

 

Chapitre 1

Lundi 6 Septembre 2010, matin.

Le temps relativement correct des vacances d’été avait permis au capitaine François Le Duigou et au lieutenant Phil Bozzi d’oublier, pour un temps, leur précédente et ténébreuse affaire qui les avait conduits au Pays de Redon1…

La routine prenait à nouveau le dessus. En ce lundi matin, Phil, François et quelques collègues étaient heureux de se retrouver devant la machine à café tout en discutant de l’actualité. Le sport et la politique occupaient une place importante. Cette dernière offrait toujours ouverture aux débats habituels.

Comme bien souvent, François se lança dans ses commentaires engagés :

— Nos dirigeants sont trop souvent prêts à confondre le vrai et le faux, ils feignent de briser des tabous et sont toujours prompts à stigmatiser et à désunir alors qu’il faudrait rameuter au nom du droit, de la justice, de la raison, de l’intelligence et de la vertu. Quant à nos politiques, trop soucieux de ne pas déplaire, leur comportement se mesure, nous le voyons bien tous, à leur soumission à l’opinion et aux sondages…

— Je te sens en forme pour la semaine ! lui répondit Phil.

— Pourquoi, ce n’est pas vrai ce que je viens de dire ? Il y a un manque de courage évident chez ceux qui nous gouvernent, il suffit de regarder ce qui se passe dans les grands sujets d’actualité en ce moment… Il y a toujours des petits malins qui ne rêvent qu’au profit immédiat. Ceux qui cultivent une passivité désarmante se crispent sur les avantages et les modèles acquis. Sans oublier tous ces individus décomplexés que je ne citerai pas… mais, vous voyez bien de qui je veux parler ! Ils n’ont rien à faire du collectif et préfèrent faire joujou entre eux, mais au travers des écrans. Les médias, eux aussi, entretiennent couardise et cynisme en confondant spectacle et information, image et réel !

— Tu vas finir par nous faire désespérer !

— Pas du tout ! Victor Hugo disait que « désespérer c’est déserter » lorsqu’il défiait Napoléon… le Petit. À bon entendeur, salut !

Sur cette fracassante conclusion, chacun regagna son bureau. François poursuivit confidentiellement sa conversation avec Phil, évoquant, évidemment, la grande marée du 12 août au coefficient de 112, tout en salivant déjà sur la prochaine du 10 septembre, plus forte encore, puisque de 116. Phil, plus nostalgique, imaginait pendant ce temps la première rentrée scolaire de sa fille Clémence qui allait déjà sur ses trois ans…

La sonnerie du téléphone de François mit un terme à leur bavardage, c’était le collègue du standard de l’accueil du commissariat.

— J’ai, au téléphone, une dame affolée, elle veut absolument joindre un officier de policier judiciaire, à propos de son mari…

— Pourquoi, il la bat ?

— Non, ce n’est pas ça, au contraire, j’ai cru comprendre qu’elle était inquiète pour sa vie…

— La sienne ?

— Non, celle de son époux !

— Bon, passe-la-moi.

Le ton de l’interlocutrice était passablement excité, impatient, embrouillé et l’entretien difficile à suivre. Après l’avoir longuement écoutée, François rompit l’aphasie ambiante et lui proposa de reprendre calmement ses déclarations, tout en reformulant cette logorrhée :

— Si j’ai bien compris, Madame, votre époux devait quitter la résidence secondaire que vous possédez à Saint-Brévin-Les-Pins, en Loire-Atlantique, samedi après-midi, pour être, en soirée, chez vous à Quimper…

— Oui, oui, c’est bien ça.

— Mais, à ce jour, il n’est toujours pas arrivé. Son téléphone portable ne répond pas. Hier, vous vous êtes rendue à Saint-Brévin-Les-Pins, faisant ainsi, en sens inverse, le chemin qu’il aurait dû normalement prendre. Cependant, sur la route, vous n’avez rien remarqué de particulier. Quant à la maison, celle-ci était normalement rangée et correctement fermée. Vous avez appelé les hôpitaux situés sur l’itinéraire… personne à ce nom n’a été enregistré.

— Oui, je suis terriblement inquiète. Il s’est sûrement passé quelque chose de grave, sinon il aurait donné de ses nouvelles… je ne comprends pas.

— Je vous propose de venir nous apporter, dès que possible, quelques documents : état-civil, photos, numéro de portable, renseignements sur sa voiture notamment… Nous lancerons un avis de recherche immédiatement par la suite.

— Je serai chez vous dans une demi-heure environ.

Phil et François s’entretinrent longuement. Ceci ressemblait plutôt à un appel au secours, mais pouvait aussi être un réel cri d’alarme. Mais, entre la fugue conjugale et l’éventuel accident, car rien n’avait été découvert à ce jour, le champ d’investigation était vaste…

Comme prévu, un peu plus tard, une femme se présenta, les yeux hagards et rougis, le geste nerveux, cachant difficilement l’angoisse qui l’étreignait. D’un mètre soixante-dix environ, malgré une fatigue apparente, c’était une belle femme brune aux cheveux mi-longs, aux traits fins, à la peau légèrement hâlée et aux yeux noisette. D’une élégance discrète, elle portait un pantalon noir bien coupé et une veste légère sur un chemisier blanc, peu de bijoux, une chaînette en or autour du cou, une bague ornait chaque main dont une alliance sobre, une montre fine au poignet, le tout semblait visiblement attester, d’une certaine aisance. Les présentations rapidement faites, François considéra que la voix au téléphone s’accordait parfaitement avec son allure. Ils entrèrent aussitôt dans le vif du sujet, la laissant d’abord s’exprimer sans l’interrompre. Assis à son bureau, en face d’elle, François prenait quelques notes au passage tandis que Phil, sur le côté, enregistrait ses déclarations. Quand elle parut avoir dit l’essentiel, François reprit :

— Résumons. Votre époux, Frédéric Arthon, né en juillet 1965, quarante-cinq ans, est cadre commercial dans une entreprise nantaise. Vous êtes mariés depuis quinze ans et vous avez deux filles. L’une, Manon, dix-huit ans…

— Oui, nous l’avons eue avant notre mariage. Nous vivions déjà ensemble depuis quatre ans, c’est-à-dire depuis 1991, dit-elle, en s’efforçant de prendre un ton léger.

— L’autre, Camille, quatorze ans. Vous demeurez à Quimper, à l’adresse que vous venez de nous indiquer. Y a-t-il mésentente dans votre couple ? Un sujet de discorde ? Avez-vous connu un différend ces derniers temps ?

— NON ! Jamais la moindre dispute, mon mari est un homme remarquable, sain, sportif, il ne fume ni ne boit d’alcool, ou rarement. D’une très grande force de caractère, il est apprécié de tous ceux qui le côtoient, charismatique et clair à la fois. Je serais tentée de dire qu’il aime tout le monde, et inversement. Terriblement discret. Pourtant, au milieu des autres, on ne voit que lui.

— A-t-il eu ou a-t-il des tendances suicidaires ?

— Certainement pas ! Il adore la vie, il est hyperactif et je ne l’ai jamais vu en situation de faiblesse ni de déprime. Ceci est à bannir de son profil. C’est un homme d’action, il adore le sport ou plutôt plusieurs qu’il pratique de façon irrégulière, car son travail lui prend énormément de temps !

— Parlez-nous de votre rencontre et ce, jusqu’à ce jour…

— Nous nous sommes rencontrés il y a de cela vingt ans. Il vivait chez ses parents à Quimper. Tous deux sont actuellement retraités et pas en très bonne santé. Il est fils unique. À cette époque, il venait d’être embauché comme agent technico-commercial dans une entreprise nantaise qui fait partie d’un groupe international. Il avait en charge le secteur de trois départements, le Finistère, le Morbihan et les Côtes d’Armor.

— Vous habitez Quimper depuis votre rencontre ?

— Oui, nous occupons toujours le même pavillon que nous avons acheté lorsque nous avions décidé de vivre ensemble, cela fait dix-neuf ans.

— Vous nous avez parlé de son travail qui l’accaparait…

— Oui, en effet, il s’est toujours donné à fond et a obtenu d’excellents résultats et s’est retrouvé, cinq ans après, responsable de la région Bretagne - Pays de la Loire. Il y a six ans, il a été nommé directeur commercial de la moitié Ouest de la France. Depuis ce temps…

— Oui ?

— Je dois le reconnaître, nous nous voyons très peu. Son travail compte plus que tout pour lui. Il se déplace en permanence. Chaque semaine, il doit se rendre obligatoirement à Nantes, afin de limiter la fatigue et les risques de la route, aussi réside-t-il très souvent dans la maison secondaire de ses parents, située avenue de Beauval, à Saint-Brévin-Les-Pins. Ces derniers n’y vont plus jamais depuis leurs graves problèmes de santé.

— Et… quelles sont vos relations ?

— Elles sont excellentes. Il revient aussi souvent qu’il le peut ; étant donné son énorme secteur, je comprends que cela ne soit pas très facile.

— Et avec vos filles ?

— Leur père leur manque, mais elles y sont habituées…

— Passez-vous vos vacances ensemble ?

— Oui, mais trois semaines au maximum par an. Le reste de ses congés, il les met sur son compte épargne temps pour qu’en fin de carrière, il puisse partir plus tôt à la retraite.

— Comment vous organisez-vous ?

— En général, nous partons tous les quatre une semaine aux sports d’hiver et deux semaines en voyage, de par le monde. Il nous laisse le choix de la destination et des réservations. Nous ne nous privons de rien et sommes toujours très gâtées tout au long de l’année. Si ce n’était la charge considérable de son travail, nous pourrions être les plus heureux du monde !

— Avez-vous contacté son entreprise ?

— Oui, ce matin, mais il ne s’y est pas présenté, c’est bien la première fois, d’où mon affolement. J’en ai profité pour demander l’immatriculation de son véhicule de fonction. Il lui est certainement arrivé quelque chose de grave, cela ne peut pas en être autrement…

— Avez-vous appelé ses parents ?

— Oui, mais je n’ai pas voulu les inquiéter, outre mesure… Ils n’ont pas eu de ses nouvelles depuis plusieurs jours non plus.

— Quelles sont vos relations avec eux ?

— Parfaites, ils sont adorables, que ce soit avec leur fils, moi ou nos deux filles. Ceci est d’autant plus important pour moi que mes parents sont décédés…

— Pouvez-vous nous donner l’identification complète de son véhicule ?

— Oui, bien sûr. Il s’agit d’une voiture de la société. Son employeur la renouvelle régulièrement, en fonction du kilométrage, par des contrats annuels de location. Il parcourt plus de soixante mille kilomètres par an, si bien que je ne connais pas par cœur son immatriculation actuelle ni sa catégorie, il change si souvent…

— Exercez-vous une activité ?

— Oui, je suis enseignante, à mi-temps, en art plastique, ce qui me laisse de la disponibilité pour ma famille. Mes filles sont parties à l’école ce matin et j’ai évité de les affoler en prétextant que le travail de leur père avait dû l’obliger à modifier son programme, au dernier moment, comme cela lui est déjà arrivé à plusieurs reprises.

— Dans ce cas, pourquoi vous inquiétez-vous cette fois-ci ?

— Parce qu’il me prévient toujours par téléphone ou par SMS, et là, rien ! Et je viens de vous le dire, son portable est aux abonnés absents. Je vous assure, il y a un problème, il ne serait jamais resté sans nous faire un signe, que ce soit à moi ou à nos filles…

— Donnez-nous son numéro de portable.

— Voici sa carte professionnelle sur laquelle il figure ainsi que les coordonnées de l’entreprise, voici également quelques photos de lui.

— A-t-il reçu des menaces ou vous a-t-il semblé tracassé lors de votre dernière rencontre ?

— Non. Il était comme d’habitude, il m’a seulement dit qu’il était fatigué de cette vie à deux cents à l’heure, qu’il saturait et aimerait bien pouvoir faire un break. C’est justement en raison de cet état de fatigue que je crains un éventuel accident. Il s’est peut-être assoupi au volant et sa voiture a pu quitter la route et n’est peut-être pas visible par des automobilistes de passage… Je suis inquiète, Messieurs, faites quelque chose… je vous assure, il est peut-être coincé dans sa voiture quelque part et chaque heure compte…

Elle avait tenu jusque-là, mais cette fois, l’émotion devenait trop forte et elle ne put retenir ses larmes. Ils respectèrent un silence religieux, échangèrent encore un peu avant de conclure. Ils la prièrent de rentrer chez elle, de repenser à tout ce qu’elle avait vécu ces derniers temps avec lui et de ne pas hésiter à les appeler au numéro de portable figurant sur leurs cartes, même si ce qu’elle pensait pouvait lui paraître saugrenu. Désormais, tout pouvait revêtir de l’importance.

Elle s’étonna :

— Je ne comprends pas, je viens de vous dire que mon mari a certainement été victime d’un accident de la route, alors, pourquoi vous obstinez-vous à vouloir rechercher autre chose ?

— L’absence de nouvelles de la part de votre époux peut, effectivement, n’être que le signe d’un banal accident de la route, mais peut aussi cacher autre chose. De ce fait, il nous appartient de ne négliger aucune piste.

— Non, je n’y crois pas, vous allez faire fausse route et vous risquez de perdre du temps.

— Notre métier nous impose de nous montrer plutôt trop méfiants que trop naïfs ! L’expérience en la matière nous a, bien souvent, réservé des surprises. Je n’affirme en rien que ce sera le cas ; néanmoins, notre priorité absolue est bien de reconstituer son itinéraire, avec l’aide, notamment, de nos collègues, gendarmes. Cependant, sans que cela nuise à nos investigations, nous devons d’ores et déjà envisager d’autres hypothèses, parallèlement.

François raccompagna Isabelle Arthon en tentant de la rassurer et de lui certifier que tout allait être mis en œuvre pour rechercher et retrouver son époux. Il lui appartenait de l’avertir immédiatement de toute nouvelle information en lien avec cette disparition.

En regagnant sa place, François, l’air sombre, s’adressa à Phil :

— Qu’en penses-tu ?

— Je me laisserais bien tenter par son hypothèse, pas toi ?

— Étant donné le poste occupé par son époux, j’imagine que la pression et le stress devaient être au maximum et je pencherais par conséquent plutôt pour un suicide. Les derniers propos de son épouse me laissent penser qu’il était à bout après avoir tout consacré à son travail. Et dans ce cas, on se retrouve devant n’importe quelle situation imprévisible et, vraisemblablement, incohérente. Il a très bien pu décider de se jeter avec sa voiture soit dans la mer du haut d’une falaise, dans un endroit peu fréquenté, soit dans un lac, voire dans la Loire… Une fois le véhicule englouti et donc invisible, on n’est peut-être pas près de le retrouver…

— Vu de cette manière, on n’est pas sortis de l’auberge… Mais, commençons par la reconstitution de son itinéraire présumé. Allons voir le patron avec cette affaire…

— Allons-y !

Après avoir écouté ses deux OPJ, le commissaire, Yann Le Godarec, se montra assez proche de l’avis de François, quant au caractère inquiétant de la disparition. Néanmoins, il fallait procéder dans l’ordre et commencer par éliminer l’hypothèse de l’accident de la route en lançant des recherches immédiates. Trois parcours furent retenus : l’un, passant par Guérande et La Roche-Bernard pour rejoindre la voie express menant à Quimper ; l’autre, par Pontchâteau, et enfin le troisième, par Savenay, en se disant, pour ce dernier cas, qu’il avait choisi de ne rouler que sur des quatre voies, dans un souci de tranquillité car ce trajet était le plus long en distance.

Il avertit le procureur qui, aussitôt, décida d’intégrer cette demande dans le cadre d’une enquête administrative pour disparition inquiétante et non dans celui d’une enquête de police judiciaire. En effet, rien ne laissait présumer d’une disparition résultant d’un crime ou d’un délit. Aussi les motards de la gendarmerie mobile furent-ils immédiatement sollicités, solution la plus adaptée à la situation.

Dans le même temps, Phil et François devaient inscrire Frédéric Arthon au FPR2. Chaque année, quarante mille personnes disparaissent. Si, dans la grande majorité, ces disparitions se concluent par un dénouement heureux, il s’agit toujours au départ, pour les familles touchées, d’un événement douloureux que les services de la police nationale doivent systématiquement aborder avec la plus grande attention, car ce type de situation, a priori banale, peut souvent tourner au drame.

Cette corvée administrative effectuée, ils lancèrent des demandes de renseignements sur le portable… localisation d’abord, appels reçus et émis ensuite, ainsi que les SMS contenus. Ils vérifièrent si la voiture avait été flashée en excès de vitesse, mais non… rien n’apparaissait. Par contre, ils découvrirent qu’il ne disposait plus que de deux points sur son permis ; les autres, au fil des années, allaient et venaient au rythme des contraventions, toutes pour vitesse excessive.

Après ces premiers travaux, le patron leur signifia de se rendre à Saint-Brévin-les-Pins afin d’établir une enquête de voisinage. Il leur fallait de ce fait, demander à madame Isabelle Arthon si elle consentait à leur confier les clefs du pavillon aux fins d’examen, mais il ne s’agissait, en aucun cas, d’une perquisition et, en conséquence, il leur appartenait de lui préciser que rien ne l’obligeait à les leur remettre.

Quelques minutes plus tard, Isabelle Arthon acceptait de bonne grâce de leur laisser libre accès à la maison, soulagée d’apprendre que des motards sillonnaient les routes à la recherche d’un indice permettant de découvrir la voiture de son époux, si toutefois celle-ci avait quitté la route. Elle resterait à son domicile à Quimper, dans l’attente d’un quelconque signe de vie de la part de ce dernier…

1. Voir Maldonne à Redon, même auteur, même collection.

2. Fichier des Personnes Recherchées.

 

Chapitre 2

Lundi 6 septembre 2010, après-midi.

Après un sandwich rapidement avalé, ils roulaient sur la voie express vers Saint-Brévin-les-Pins. Passé Pontchâteau, en direction de Saint-Nazaire, deux motards examinaient un plan d’eau, situé en bordure de route. Ils s’arrêtèrent pour leur demander s’ils avaient remarqué quelque chose de particulier, après s’être présentés.

— Non, rien pour l’instant, aucune trace de pneus en sortie de route. Mais, plans d’eau, rivières, bosquets et vallons méritent une attention plus soutenue.

Phil et François reprirent la route. À soixante et un mètres au-dessus de La Loire, en franchissant le pont reliant Saint-Nazaire à Saint-Brévin-Les-Pins, ils aperçurent les fameux Chantiers Navals, en contrebas sur leur droite, et repensèrent à une précédente affaire, menée quelques années plus tôt3.

Ils remarquèrent qu’il était indiqué qu’actuellement, le pont faisait l’objet d’une « expérience » en circulation alternée sur la voie centrale, en fonction du trafic ; il est vrai que le matin cela posait problème dans un sens et le soir dans l’autre… Le pont datant de 1975, la circulation y était devenue gratuite en 1995.

Après avoir parcouru les trois kilomètres trois cent cinquante du pont qui enjambe la Loire, la voiture filait sur la route bleue. Sur leur droite, le château d’eau de la ville se distinguait par son sommet hérissé de radars et d’antennes installés à cet endroit pour suivre le trafic dans l’estuaire de La Loire ; sur leur gauche, s’alignaient à perte de vue sur la berge, en remontant le cours de la Loire, ces fameuses cabanes de pêcheurs en bois dont le carrelet, ce filet carré, pend à une perche terminée par une poulie.

Ils devaient d’abord rendre visite à la gendarmerie qui se trouvait dans la rue éponyme, à la sortie indiquant Paimbœuf, Corsept et la zone de La Guerche. Juste après le rond-point, le GPS leur indiqua qu’ils étaient arrivés.

Les maisons, le plus souvent basses et de plain-pied, étaient recouvertes de tuiles ; les murs, pour la plupart de couleur ocre, jaune ou terre de Sienne, indiquaient bien que nous étions en « Sud Loire ». Le passage du pont avait définitivement marqué la différence d’architecture des constructions avec le « Nord Loire » ou, selon les termes retenus, entre la rive gauche et la rive droite du fleuve.

Certains diront même que le pont marque la frontière avec la Bretagne… vaste sujet d’interminables polémiques entre le poids de l’Histoire et un découpage administratif plus récent.

Fort aimable, le major qui les reçut ne connaissait pas la famille Arthon mais précisa aussitôt :

— Ici, nous avons énormément de résidences secondaires et de maisons destinées à la location estivale. La population y est, par conséquent, très fluctuante passant du simple au sextuple sinon plus, selon les périodes. Mais, malgré tout, la ville est calme. Saint-Brévin-Les-Pins et Saint-Brévin-l’Océan ont su garder un caractère familial, pas de grands édifices en béton, mais des maisons blotties dans les pins.

François leur présenta l’affaire sur laquelle ils se mirent tous à réfléchir. Le major reprit la parole :

— Côté route, les collègues vont faire le nécessaire. Mais, si vous penchez aussi pour un suicide, cela devient plus compliqué, les endroits discrets ne manquent pas, que ce soit dans la Loire, au lac de Grand-Lieu, un peu plus haut vers Nantes, ou même plus simplement, ici, dans la forêt de la Pierre Attelée.

— Quelle est sa superficie ? demanda Phil.

— Quarante et un hectares. C’est la seule forêt dunaire de Loire-Atlantique, elle se situe le long de la plage de la Roussellerie. Je vais demander à l’une de mes équipes d’y patrouiller, sait-on jamais. Ici, nous sommes en communauté de brigades et nous recouvrons Paimbœuf et Saint-Père-en-Retz, aussi vais-je demander à mes équipes d’être attentives aux bords de Loire. J’en profiterai aussi pour alerter les collègues de Pornic, responsables également du secteur situé plus au sud, notamment du littoral de La Plaine-sur-Mer et de Préfailles. Comme cela, nous pourrons examiner le périmètre immédiat du lieu de la disparition.

Le major s’installa devant une carte punaisée au mur pour situer les lieux de l’action à mener. Le courant passa bien entre les hommes qui décidèrent de se tenir informés.

Ils se garèrent dans l’avenue de Beauval, devant la maison ; celle-ci était d’architecture classique pour la région. Murs de clôture et ravalement de la maison en crépi teinté, huisseries en PVC. De l’autre côté de l’avenue, la Plage des Pins, baignée par l’océan Atlantique et, sur leur droite, de l’autre côté de la Loire, la ville de Saint-Nazaire avec, au pied du pont, les installations des chantiers dominées par un immense portique.

Ils entrèrent dans la maison dont l’intérieur était très coquet et les meubles, simples et sobres. Tout semblait parfaitement bien ordonné, comme si l’occupant venait juste de quitter les lieux. D’après la photo de Frédéric Arthon remise par son épouse, ils n’eurent aucun mal à le reconnaître sur les clichés disposés un peu partout, présentant la famille, tantôt le couple avec les enfants, tantôt les filles seules ou encore les parents de Frédéric Arthon, propriétaires des lieux. Ils fouillèrent délicatement à la recherche d’un téléphone portable ou d’un indice quelconque, mais rien ne retint leur attention, tant tout semblait banal. Pas de téléphone fixe dans la maison.

Ce tour d’horizon fait, ils entreprirent l’enquête de voisinage en commençant par les plus proches voisins, de part et d’autre de l’habitation. Il s’agissait de questionner ces personnes sur ce qu’elles avaient pu remarquer, notamment les faits inhabituels ou la présence insolite d’individus ou de véhicules dans les jours ou heures précédant la disparition.

Un couple de retraités, âgés de soixante-dix ans environ, les accueillit dans la première maison voisine et les invita à s’installer au salon. Après diverses questions formulées par François, c’est la dame qui prit la parole :

— Oui, nous connaissons bien les parents de Frédéric Arthon, hélas, depuis leurs problèmes de santé, survenus il y a quelques années, nous ne les avons plus jamais revus ici. Quant à Frédéric, il a bien réussi dans la vie, c’est un homme gentil, d’une très grande correction, poli, serviable. Nous le voyons de temps en temps en compagnie de son épouse, Isabelle, et de ses deux charmantes filles. Nous sommes en admiration devant cette famille unie et saine. Ils s’adorent tous, c’est un plaisir de les voir ensemble !

— Nous savons que monsieur Frédéric Arthon, pour éviter de faire trop de navettes entre Nantes et Quimper, y vient également seul durant la semaine. Reçoit-il des visites fréquemment ?

La dame fut surprise par cette question, elle se tourna vers son époux assis près d’elle avant de répondre :

— Nous ne comprenons pas. Nous ne l’avons pratiquement jamais vu venir seul ici. N’est-ce pas, Roger ?

L’homme prit alors la suite de la réponse :

— Si tel était le cas, nous le saurions et le verrions ! En quelques années, nous pouvons compter le nombre de fois où il est venu seul, sur les doigts d’une seule main.

Son épouse approuva et répéta pratiquement les mêmes propos que son époux. Cette information interpella les deux OPJ qui ne laissèrent rien paraître. Tous deux se rappelaient que l’épouse et les deux filles avaient bien quitté les lieux le samedi matin et Frédéric Arthon, dans l’après-midi, un peu avant quinze heures, seul. Il n’y avait pas eu de visites particulières, ni de voiture stationnée à proximité, ni d’individu louche aperçu. Ils n’avaient rien de plus à apporter.

Les deux OPJ se rendirent dans les autres maisons voisines où les réponses furent pratiquement identiques. Frédéric Arthon ne venait jamais seul, mais toujours avec sa famille. Cette assertion leur parut pour le moins troublante. Cependant, pour tous, Frédéric Arthon était un homme parfait à tout point de vue et ils le décrivaient avec des qualificatifs dithyrambiques. Un véritable saint pensèrent-ils…

Ils repassèrent rapidement par la gendarmerie et reprirent le chemin du retour vers Quimper. En route, ils apprirent que les recherches des motards étaient restées vaines sur les trois itinéraires possibles. Quant à la localisation du téléphone portable, celle-ci s’avérait impossible. Non seulement, il était déconnecté du réseau mais, a priori, la carte SIM semblait avoir été retirée de l’appareil. De nombreuses questions commençaient à surgir qu’il faudrait éclaircir auprès de son épouse. Ils l’appelèrent et lui demandèrent de venir à leur bureau le lendemain matin, vers neuf heures.

3. Voir Drôle de Chantier à Saint-Nazaire, même auteur, même collection.

 

Chapitre 3

Mardi 7 septembre 2010, matin.

Phil et François terminaient de faire le point sur cette affaire avec leur patron, le commissaire Yann Le Godarec, lorsque l’accueil leur annonça l’arrivée d’Isabelle Arthon.

Ils regagnèrent leur bureau afin de la recevoir. Elle affichait une petite mine, nul doute que son sommeil avait été perturbé par ses inquiétudes. La tristesse de son regard et la pâleur de son visage n’enlevaient pourtant toujours rien à sa beauté naturelle.

François lui rendit compte rapidement des résultats obtenus la veille et en vint à leurs préoccupations :

— Vous nous avez bien dit, Madame, que votre époux séjournait très souvent dans la maison de Saint-Brévin-Les-Pins, ceci afin de limiter les kilomètres en voiture et de se ménager physiquement, n’est-ce pas ?

— Oui, effectivement, c’est la réalité, ces cinq ou six dernières années, il y a passé au moins deux ou trois jours par semaine. Il m’appelle pratiquement chaque jour pour m’informer de l’endroit où il se trouve. Pourquoi cette question ?

— Parce que l’enquête de voisinage, effectuée hier, nous apprend qu’il n’y venait jamais en dehors de votre présence ou de celle de vos filles…

— Non, c’est impossible ! Je vous assure…

Un silence pesant s’installa dans le bureau.

Son regard se troubla, la consternation s’y devinait après cette révélation. Elle baissa la tête, une tempête bouleversait son esprit, des milliers de questions devaient s’y succéder, mais les affirmations étaient trop fortes, elle ne pouvait les mettre en doute.

Comment était-ce possible ? Aucune explication ne lui venait.

François reprit la parole :

— Qu’est-ce qui vous fait penser qu’il y séjournait réellement ?

— Il me téléphonait…

— Y avait-il un téléphone fixe dans cette maison, qui vous permettait de vérifier qu’il vous appelait bien de là ?

— Non… il l’avait fait enlever après les troubles de santé de ses parents, surtout ceux de son père.

— Cela fait combien de temps ?

— Cinq à six ans environ, au moment de sa nomination comme directeur commercial de la moitié ouest de la France.

— Disposez-vous de plusieurs comptes bancaires dans différentes banques ?

— Oui, plusieurs comptes d’épargne, mais un seul compte de chèques, en compte joint, depuis notre mariage, le tout dans une seule banque.

— Son salaire y était-il viré ?

— Oui bien sûr, chaque mois, pour les douze mois de l’année avec une régularité de métronome et je peux vous dire qu’il ne dépensait guère car il passait l’essentiel de son temps en déplacement pour son entreprise. Tous ses frais étaient directement pris en charge.

— Pourquoi, selon vous, votre époux aurait-il eu intérêt à vous faire croire qu’il se rendait dans sa maison de Saint-Brévin-Les-Pins ?

Troublée, elle ne sut que répondre, elle réfléchit quelques instants avant de s’exprimer :

— Je ne sais pas… non, je ne sais pas… pour ne pas nous inquiéter pour tout le temps qu’il passait sur les routes… pour nous rassurer. Oui. C’est certainement ça, pour nous rassurer.

— Nous allons poursuivre nos investigations et ne manquerons pas de vous tenir informée. Si, de votre côté, quelque chose vous revenait, n’hésitez pas à nous appeler.

François la raccompagna et revint vers Phil, sceptique devant cette situation. Ils allèrent l’expliquer au patron. Chacun s’interrogeait sur les raisons qui avaient pu pousser Frédéric Arthon à laisser croire à sa famille qu’il séjournait dans sa maison. Plusieurs hypothèses se présentaient à eux, mais ils ne voulaient pas se laisser influencer, ils devaient rechercher des faits et non pas se contenter de spéculations.

Le patron conclut l’entretien :

— Il ne vous reste plus qu’à vous rendre chez son employeur pour obtenir son profil professionnel : sa moralité, son comportement. Il faut aussi essayer de reconstituer son emploi du temps tout en recherchant ce qu’il fait réellement et comment.

— Oui, ce mensonge reste inexpliqué, alors que toutes les personnes interrogées le portent aux nues, y compris son épouse.

— Raison de plus pour l’étudier sous tous les angles et le découvrir sous une autre facette, peut-être méconnue de sa famille…

 

*

 

Mardi 7 septembre 2010, après-midi.

Ils roulaient une nouvelle fois sur la voie express les conduisant à Nantes, dont la Zone Est se confondait avec celle de Saint-Herblain où ils avaient rendez-vous, à quatorze heures, au siège de l’entreprise.

Ils franchirent le portail d’entrée donnant sur d’imposantes installations en bardage gris et se garèrent sur le parking réservé aux visiteurs, juste devant les portes vitrées de l’établissement.

Le spacieux hall d’accueil, au sol brillant, intégrait en son centre, un bureau-comptoir cylindrique, en bois clair, dans lequel une jolie jeune femme s’affairait sur son ordinateur, un casque sur les oreilles. Elle s’arrêta en les apercevant et ôta son casque. Elle prévint aussitôt le DRH4 avec lequel ils avaient rendez-vous.

Ils s’installèrent dans un petit salon situé à l’écart, se servirent dans le présentoir en fascicules présentant l’entreprise et ses activités. Ils prirent ensuite le temps d’observer les grands panneaux affichant certaines réalisations de la société, visiblement spécialisée dans les chaînes de production en agroalimentaire.

L’attente fut de courte durée. Un homme d’une quarantaine d’années, costume gris anthracite, chemise blanche, cravate rouge à motifs, cheveux grisonnants coiffés en arrière, le teint hâlé, se présenta devant eux et les invita à l’accompagner. Ils empruntèrent un escalier en spirale, sans contremarche, pour accéder à l’étage.

Il les conduisit, à pas feutrés par une épaisse moquette, jusqu’à la porte d’un bureau sur laquelle une plaque portait l’inscription « Directeur général adjoint », il frappa et les fit entrer.

Un autre homme, à la calvitie rassurante, les attendait et tous les quatre s’installèrent autour d’une table ronde située dans l’angle de l’important bureau au design moderne où fer, bois précieux et tissus de grande qualité se mélangeaient avec goût.

Les présentations faites, le directeur général adjoint s’exprima le premier :

— Que nous vaut votre visite ?

François prit la direction de l’entretien tandis que Phil lançait son ordinateur portable.

— À la demande de son épouse, Frédéric Arthon fait l’objet d’une enquête administrative pour disparition inquiétante.

— Disparition inquiétante me dites-vous, ce qui voudrait dire qu’il aurait eu un accident ou qu’il se serait suicidé ?

— Non. Pourquoi dites-vous cela ?

— Vous venez bien de parler de disparition inquiétante ?