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Pierrot, fils d’un ancien républicain espagnol, fut licencié du CAKA – une grande entreprise proche du pouvoir franquiste. Il se retrouve avec son épouse et son fils sans ressources. Avec l’aggravation de l’état de santé de Jeannette, cette dernière est persuadée qu’à cause de « la bête immonde », les « aiguilles de son horloge arrêteront bientôt de tourner ». Alors, elle s’empresse de prendre un nouveau départ pour lutter contre toutes les injustices faites aux femmes.
À PROPOS DE L'AUTEUR
José Carcel, psychologue clinicien, exerce pendant trente ans dans des hôpitaux. Alors passionné par l’écriture, il partage modestement ses idées issues de ses constats cliniques.
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Seitenzahl: 113
Veröffentlichungsjahr: 2022
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José Carcel
L’espoir sinon rien
Roman
© Lys Bleu Éditions – José Carcel
ISBN : 979-10-377-4860-7
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Du même auteur
– Au pays de l’autre, 2007, Éditeur Indépendant ;
– L’écho des voix et du silence, 2007, Éditeur Indépendant ;
– Le clown pleureur, 2008, Édilivre ;
– L’échelle, 2008, Édilivre ;
– La nuit des tambours, 2008, Édilivre ;
– Le chant des sirènes, 2008, Édilivre ;
– L’Architecte, 2008, Édilivre ;
– Voyage au-delà du miroir, 2008, Édilivre ;
– Capucine, passage d’un monde à l’autre, 2008, Édilivre ;
– Les plus beaux sentiments, 2008, Édilivre ;
– La dernière rive, 2008, Édilivre ;
– Le temple invisible, 2008, Édilivre,
– Sur le chemin du souvenir, 2008, Édilivre ;
– Sur le chemin des oubliés, 2008, Édilivre ;
– Les naufragés de la vie, 2008, Édilivre ;
– Félix, le père parfait, -2008, Édilivre ;
– Le visage et le regard, 2008, Édilivre ;
– La chose, 2008, Édilivre ;
– Les retrouvailles, 2009, Édilivre ;
– Quand l’automne arrivera, 2009, Édilivre ;
– Le fils du poète, 2009, Édilivre ;
– La bête folle, 2009, Édilivre ;
– Les mauvais bergers, 2009, Édilivre ;
– Le petit chercheur, 2009, Édilivre ;
– L’hystérie de conversion, 2009, Édilivre ;
– L’autre pays, Édilivre, 2010 ;
– Le cirque universel, Édilivre, 2010 ;
– Le grand rocher, Édilivre, 2010 ;
– Mon île, Édilivre, 2016 ;
– Les quatre mondes de Narcisse, Édilivre 2016 ;
– Mon enfant a été tué au nom de Dieu, Édilivre 2016 ;
– L’héritière, Édilivre 2016 ;
– Le fils de l’autre, Édilivre, 2016 ;
– Le postier et l’homme de lettres, Édilivre, 2016 ;
– Émeraude et moi, Édilivre, 2016 ;
– Un train peut en cacher un autre, Édilivre 2019 ;
– Le poète disparu, Édilivre 2019 ;
– Quand on n’a que l’amour, Édilivre 2019 ;
– Le dimitrisme, Édilivre 2019 ;
– La pierre brute, Édilivre 2019 ;
– L’emprise, Édilivre 2019 ;
– Un heureux évènement, Édilivre 2019 ;
– De l’univers psychologique à l’univers initiatique, Édilivre, 2019 ;
– D’un inconnu à l’autre, 2020 ;
– Les morts symboliques, 2020 ;
– Quelque chose sinon rien, 2020 ;
– Les sans dents, 2020 ;
– D’un monde à l’autre, 2020 ;
– Tais-toi sinon… Les grillons qui chantent faux, 2020 ;
– La Vallée des Loups, 2021 ;
– Force de vivre, force d’exister, 2021.
I
J’avais dix-huit ans à peine quand je suis entré dans le CAKA, une grande entreprise dirigée par un « patron » rusé et cruel. Le CAKA est né juste après la guerre civile, on y fabriquait du carton. Mon père, viticulteur de métier, ne comprenait pas pourquoi, étant le fils d’un ancien combattant républicain, on m’avait embauché comme manutentionnaire.
Huit ans plus tard, j’ai reçu une lettre du Directeur des Ressources Humaines :
— Monsieur Lesmicard,
J’ai le regret de vous informer que je suis contraint de vous licencier pour motif économique à partir de demain. Le CAKA est à votre disposition pour vous aider à réussir votre reconversion professionnelle.
En apprenant la nouvelle, j’ai fait un malaise… Comme Jeannette me tenait dans ses bras, je lui ai dit d’une voix cassée :
— Je ne comprends pas la raison de mon licenciement alors que le CAKA a fait des dizaines de millions de bénéfices…
— C’est bizarre… tu n’as pas commis une faute ?
— Non.
— Alors il y a une raison que la direction ne te donne pas.
— Jeannette, je suis très inquiet. Avec 1200 pesetas en moins, qu’allons-nous devenir ? Comment payer le loyer ? Comment vêtir Pierrot, lui offrir des vacances, des jouets, des jus de fruits et des gâteaux ?
— Je reprendrai mon travail de femme de ménage.
— Mais non Jeannette, le docteur t’a interdit de travailler, tu dois te reposer. D’ailleurs, ce n’est même pas la peine de penser à faire du ménage, tu n’iras plus jamais faire de ménage chez les dirigeants du CAKA.
— Fred, j’ai peur…
— S’il te plaît ma chérie, ne pleures pas, bientôt je trouverai du travail et tu pourras réaliser ton rêve.
Jeannette rêvait depuis très longtemps d’acheter une voiturette d’occasion pour partir en famille à la campagne, hélas le CAKA avait mis fin à son rêve…
Jeannette est née dans la « Vallée du Rêve », moi, dans « la Vallée de l’Espoir », juste à quelques centaines de mètres du CAKA. Mon père avait horreur du CAKA, j’ignorais pourquoi. Jeannette n’avait que quatre ans quand ses parents sont arrivés à la Vallée de l’Espoir, ils se sont installés tout près de chez moi. Son père, ancien fermier au chômage, ne songeait qu’à travailler dans le CAKA. À l’époque, la vie de la plupart des habitants de la Vallée de l’Espoir tournait toute entière autour du bon vouloir du « patron »…
Jeannette et moi, nous nous sommes rencontrés sur les bancs de l’école « Descartes ». Nous avions alors six ans. Le jour de la rentrée scolaire, comme Jeannette n’avait pas de crayon, je lui ai donné le mien. Voilà comment nos regards se sont croisés la première fois. Depuis, main dans la main, sous le regard attendri de nos parents, nous partions à l’école avec un cartable pour deux. Fier de ma force, je voulais le porter sur mes épaules. Jeannette portait le goûter de l’après-midi que nous dévorions souvent au petit matin sur le chemin de l’école. Je ne songeais qu’à devenir le « roi » de la Vallée de l’Espoir, Jeannette ne pensait qu’à devenir la « reine »… C’était notre jeu préféré. À l’âge de neuf ans, Jeannette perd sa maman après un long combat contre la maladie. Accablé par le chagrin, son père part vivre avec Jeannette cinquante kilomètres plus loin. Quelques années plus tard, nous nous sommes retrouvés au « Bal des Pompiers ». Depuis ce jour-là, nous ne nous sommes jamais quittés.
« J’ai le regret de vous informer que je suis contraint de… » Ces mots résonnaient dans ma tête le jour et la nuit.
Comme je n’étais pas quelqu’un à me laisser abattre pour la perte de mon emploi, j’ai rebondi aussitôt. Deux jours après mon licenciement, avec la rage au ventre, le certificat d’études en poche et une longue expérience de manutentionnaire, j’ai décidé d’aller frapper à la porte des entreprises de la région… Sur le chemin, quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai lu sur la première page du journal « La Détresse » une annonce écrite en grandes lettres :
« Urgent ! Poste de manutentionnaire à pourvoir dans le CAKA ! Curriculum vitae exigé »
Soudain, mon cœur s’est mis à battre de façon accélérée. Je me suis empressé de me rendre sur place, persuadé que c’était la fin de mon cauchemar. Avec mon curriculum vitae, écrit à la hâte sur un bout de papier chiffonné, j’ai demandé un entretien avec le Directeur des Ressources Humaines, le même qui m’avait licencié deux jours auparavant. Il avait l’âge de mon père, le regard accueillant. Après avoir jeté un coup d’œil furtif sur mon curriculum vitae, il dit d’une voix triste :
— Monsieur Lesmicard… croyez-moi, je suis…
— Je vous écoute, j’ai hâte de reprendre le boulot !
— Fred, je suis vraiment désolé, je… je… excusez-moi, je ne peux rien faire, on m’oblige à donner la priorité aux candidats avec Bac+3.
— Monsieur, ce n’est pas parce que je n’ai pas fait de longues études que je suis bête.
— Je sais très bien que vous n’êtes pas bête…
— Pourquoi le CAKA demande tant d’études pour charger et décharger les camions ?
— Je n’ai pas le droit de vous répondre…
— Pour le poste de manutentionnaire mieux vaut quelqu’un avec de gros bras plutôt que quelqu’un bardé de diplômes.
— Je suis d’accord avec vous, hélas j’ai reçu des ordres du « patron »… je vous en prie, n’insistez pas, c’est assez douloureux comme ça.
— Merci, Monsieur Lamertume ! J’ai tout compris.
— Mon cher Fred, je vous le promets, je vais parler à mes amis, peut-être qu’ils accepteront de vous prendre avec votre certificat d’études.
— Je vous remercie, je serais l’homme le plus heureux !
— Je tiendrai ma promesse, faites-moi confiance.
— Jeannette sera ravie de l’apprendre… vous savez, ça fait des années qu’elle rêve d’acheter une vieille voiturette d’occasion pour aller à la campagne.
— Je suis au courant… on m’en a beaucoup parlé.
— Les rouges ou les noirs ?
— Les deux ! Ils ont décidé en secret de faire quelque chose contre les agissements du « patron ».
— Alors là, ça va faire du bruit ! Il va voir rouge…
— Comme il craint que les « rouges » et les « noirs » se manifestent, il a dit d’une voix autoritaire à ses subordonnés : « S’ils sont trop impolis, je délocaliserai l’entreprise ». Personne ne l’a cru car la veille il avait dit aux actionnaires venant des Bahamas : « Le CAKA a tout intérêt à rester dans le paysage ».
— Quelles sont les revendications des rouges et des noirs ?
— Pour l’instant, ils ne revendiquent rien, ils craignent la réaction des forces publiques, ils veulent dénoncer avec des tracts le licenciement abusif dont vous avez été victime.
— Ils vont faire ça pour moi ?
— Oui, pour vous tout seul !
— Vous êtes avec eux ?
— Oui, discrètement, très discrètement. Fred, je vous demande de garder pour vous ce que je vous ai dit. Comme vous le savez, le « patron » est un homme capable de tout…
— Monsieur Lamertume, à part Jeannette, personne ne saura rien, promis et juré.
Jeannette attendait impatiemment mon retour. L’infirmière était encore là. Elle l’a embrassée et elle est partie aussitôt.
— Alors tu as le poste ?
— Non, je n’ai pas les diplômes que le CAKA demande.
— Tu blagues ?
— Non, Jeannette, c’est vrai.
— Alors tu es allé pour rien.
— Je suis heureux d’avoir rencontré Monsieur Lamertume. Il m’a promis de m’aider à trouver du travail. Jeannette, avec son aide, ton rêve deviendra réalité.
— Fred, excuse-moi, je suis un peu fatiguée, je vais m’allonger une petite heure.
Pierrot s’est approché de moi, il m’a pris par la main :
— Dis papa, quel est ton travail ?
— Mon travail ? Tu es trop petit pour comprendre mon travail.
— Je suis grand, bientôt j’aurai sept ans !
— Pierrot, en ce moment je travaille à plein temps pour trouver du travail, tu sais, c’est très fatigant.
— Tu gagnes beaucoup d’argent ?
— Disons que… non, non, pour l’instant, je ne gagne pas beaucoup d’argent…
— Maman m’a dit que tu as quitté le CAKA, c’est vrai ?
— Oui… J’en avais marre, ça sentait très mauvais dans les ateliers et les bureaux…
— C’est pour ça que tu prenais des douches le soir ?
— Mon grand, tu as tout compris.
— Papa, je suis… un peu pas content…
— Pourquoi mon fils ?
— Maman a oublié de m’acheter des gâteaux…
— Il ne faut pas lui en vouloir, parfois elle a la tête ailleurs.
— Dis papa, quand nous serons riches, tu m’achèteras une moto ?
— Bien sûr !
— Merci, papa, comme ça je pourrai suivre maman au volant de sa voiturette…
— Ça va l’amuser !
— Papa, je trouve que maman est un peu triste.
— Tu sais, parfois la maladie la rend triste.
— Je ne savais pas que le cancer rend triste, je pensais qu’elle était triste à cause de la chute de ses cheveux.
— Ça doit être ça… Tu verras, bientôt ses cheveux repousseront et elle se fera une belle coiffure !
— Comme les stars du cinéma ?
— Plus belle encore !
— Dis papa, c’est quoi le cancer ?
— C’est une maladie qui… je ne sais pas comment l’expliquer, le docteur te l’expliquera bien mieux que moi.
— Papa, mes copains disent à l’école que maman va mourir.
— Il ne faut pas les écouter, ils disent n’importe quoi.
— Moi, quand je serai grand, je serai docteur, comme ça je soignerai maman.
— Et pas moi ?
— Non seulement, maman.
— Pourquoi pas moi ?
— Parce que tu n’as pas un cancer ! Tu sais papa, je suis content que tu ne travailles plus dans le CAKA…
— Pourquoi ?
— J’ai entendu une maman qui disait à ma maîtresse : « le CAKA est responsable du cancer du poumon de mon mari »
— C’est possible… tu sais, on respire tellement de saletés…
— Pourquoi la police ne fait rien contre le CAKA ?
— Tu sais, la police ne peut rien faire.
— Pourquoi ?
— Parce que… c’est très difficile à expliquer. Tu sais, personne ne peut rien, le patron du CAKA peut faire ce qu’il veut, il peut balancer les fumées et les poussières dans l’atmosphère et même, quand ça lui chante, il peut balancer les salariés.
— Tu as été « balancé » ?
— Pourquoi tu me demandes ça ?
— On dit à l’école que tu as été viré parce que tu n’es pas Bac+3… C’est quoi Bac +3 ?
— Je ne sais pas, il paraît que cela représente de longues études que la plupart du temps ne débouchent sur rien.
— Le certificat d’études est plus important ?
— Avant, oui ! Maintenant, ça sert encore moins que le Bac+3.
— Moi, quand je serai grand, je serai Bac+10 ! Tu sais, j’aimerais faire comme toi, j’adore charger et décharger les camions.
— Tu ne veux plus être docteur ?
— Mais oui, je serai docteur et manutentionnaire !
— Pierrot, je crois que maman t’a appelé, dépêche-toi à la rejoindre dans sa chambre.