Le cri existentiel - José Carcel - E-Book

Le cri existentiel E-Book

José Carcel

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Beschreibung

Professeur de philosophie au lycée Notre Dame de la Paix, Adam souhaite apprendre aux jeunes lycéens à explorer le monde de la pensée philosophique et à se penser eux-mêmes à travers ce qui, selon eux, les « étouffe » dans la relation avec l’autre et avec soi-même. Hélas, aussitôt, il se heurte à l’hostilité d’un directeur intégriste et paranoïaque qui voit dans sa démarche une atteinte aux valeurs religieuses et à sa personne. Avec le concours de Diogène, « le philosophe de la rue », le jeune Adam s’intéresse au rôle fondamental du « cri » dans le processus de la structuration du psychisme…


À PROPOS DE L'AUTEUR 


Psychologue clinicien, José Carcel a exercé dans les hôpitaux et dans les tribunaux en tant qu’expert. Aujourd'hui à la retraite, il est passionné par l’écriture et, avec Le cri existentiel, il partage modestement ses idées, issues de l’expérience clinique et de son vécu.

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Seitenzahl: 114

Veröffentlichungsjahr: 2023

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José Carcel

Le cri existential

Roman

© Lys Bleu Éditions – José Carcel

ISBN : 979-10-377-7282-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

Au pays de l’autre, éditeur indépendant, 2007

L’écho des voix et du silence, éditeur indépendant, 2007

Le procès du Procureur Félon, Spinelle, 2022

Chez Edilivre en 2008

Le clown pleureur,

L’échelle,

La nuit des tambours,

Le chant des sirènes

L’Architecte

Voyage au-delà du miroir

Capucine, passage d’un monde à l’autre

Les plus beaux sentiments

La dernière rive

Le temple invisible

Sur le chemin du souvenir

Sur le chemin des oubliés

Les naufragés de la vie

Félix, le père parfait

Le visage et le regard

La chose

Les retrouvailles

Chez Edilivre en 2009

Quand l’automne arrivera

Le fils du poète

La bête folle

Les mauvais bergers

Le petit chercheur

L’hystérie de conversion

Chez Edilivre en 2010

L’autre pays

Le cirque universel

Le grand rocher

Chez Edilivre en 2016

Mon île

Les quatre mondes de Narcisse

Mon enfant a été tué au nom de Dieu

L’héritière

Le fils de l’autre

Le postier et l’homme de lettres

Émeraude et moi

Chez Edilivre en 2019

Un train peut en cacher un autre

Le poète disparu

De l’univers psychologique à l’univers initiatique

Désirs mis en scène, 5 pièces de théâtre :

- Quand on n’a que l’amour
- Le dimitrisme
- La pierre brute
- L’emprise
- Un heureux évènement

Chez Lulu en 2020

D’un monde à l’autre

Quelque chose plutôt que rien

Chez Le Lys Bleu Éditions en 2022

D’un inconnu à l’autre, théâtre

L’espoir sinon rien !

Le père aliénant

La médiocrité d’esprit,

Je veux… ! Au pays des goélands

La vallée des Loups

Tais-toi sinon

Le sablier de la vie, théâtre

Fraternité où es-tu ?, théâtre

La ruche

Mourir à la française

Vie, mort, morts symboliques

Justice, où es-tu ?

Force de vivre, force d’exister

Les « égarés »

Ainsi parlait Lalimace. La maltraitance psychologique, théâtre

I

La nuit du premier dimanche de mars 2021, sous une pluie battante…

Soudain, j’ai crié dans mon sommeil : « Au secours ! » Paniqué par les images de mon cauchemar, j’ai ouvert les yeux et j’ai émergé lentement de mon sommeil. Alertée par l’appel à l’aide, la gérante de l’hôtel « la Découverte », madame Pénélope, s’est empressée de me porter secours… La gorge serrée, le cœur accéléré, la voix tremblante, je l’ai remerciée chaleureusement.

— Madame, c’est la première fois que je me suis réveillé en sursaut, avec la sensation d’étouffer…

Pénélope me fit un large sourire et dit d’une voix amusée :

— Monsieur Adam, vous n’êtes pas le premier ni le dernier, ici, tous les clients se sont réveillés un jour avec la même sensation !

— Je vous assure, c’était terrifiant…

— Monsieur, si ce n’est pas indiscret, de quoi avez-vous rêvé ?

— Vous allez en rire… j’étais au sein d’une pochette chaude avec des parois rougeâtres qui se rétrécissaient et s’élargissent à un rythme de plus en plus accéléré… En même temps, j’entendais des gémissements et des voix venant de l’extérieur… Comme je craignais d’être écrasé, je me débattais pour en sortir… C’est alors que je me suis réveillé en criant « au secours » !

— Je vois… tôt ou tard, tout le monde rêve de la même chose… Bien sûr, les gens n’osent pas en parler de peur qu’on se moque d’eux.

— Il n’y a pas de quoi rire.

— Adam, ce n’est qu’un cauchemar…

— J’ai beau me dire « ce n’est qu’un cauchemar », je n’arrive pas à libérer mon esprit de la « sensation d’étouffer ». C’étaient des images angoissantes…

— La seule façon de s’en libérer c’est de percer le sens des images.

— Vous disiez « tôt ou tard, tout le monde rêve de la même chose… »

— Oui, mon garçon, ma grand-mère vous aurait dit que vous avez fait un « rêve universel ».

— Elle était psy ?

— Non, mais les rêves universels la passionnaient.

— Pourquoi les rêves « universels » ?

— Je ne sais pas. Selon elle, il existe une multitude de rêves personnels qui ont un sens singulier pour soi, et quatre rêves universels qui ont le même sens pour tous.

— C’est intéressant… je ne comprends pas, mais ça donne à penser.

Madame Pénélope est partie en faisant un large sourire. La pluie s’est arrêtée. J’ai jeté un coup d’œil par la fenêtre et j’ai aperçu un homme aux allures d’un clown qui arpentait la rue avec une lampe à la main. Intrigué par sa démarche, je suis allé voir madame Pénélope.

— Madame, qui est-il ?

— Diogène ! Quel « philosophe » ! Il donne des sueurs froides aux intellectuels de la ville.

— Il est clochard ?

— Non, il a choisi de vivre dans la rue.

— Que cherche-t-il dans la rue ?

— Il dit qu’il cherche à oxygéner son esprit et celui des gens qui s’étouffent…

— C’est étonnant.

— Oui, très étonnant. Il place l’esprit de finesse au-dessus de tout… Il est un peu bizarre, mais je l’aime bien.

— J’aimerais le rencontrer.

— Sa quête vous intéresse-t-elle ?

— Oui… depuis que je suis tout petit, je ne songe qu’à la vie de « l’esprit ».

— Vous êtes professeur de philosophie au lycée Notre Dame de la Paix ?

— Oui. Je suis prof de philo depuis trois mois.

— Puis-je vous poser une question ?

— Je vous en prie.

— Vous enseignez la philosophie debout ou assis ?

— Je marche quand je parle.

— Très intéressant ! Pourquoi avez-vous choisi l’enseignement de la philosophie ?

— Je suis très heureux de contribuer à la formation de l’esprit des jeunes hommes avec lesquels j’aime partager mon savoir, mes doutes et mes interrogations.

— Quel beau métier ! Monsieur, j’aimerais vous demander un service…

— Je vous en prie.

— J’ai un tableau à mettre au fond du salon, auriez-vous la gentillesse de le faire à ma place ?

— Bien sûr ! Mais d’abord, il faut que je vous dise que je ne suis pas très doué pour faire des trous avec une perceuse. Je suis si maladroit dans le maniement des outils que personne ne me sollicite pour la construction d’un abri jardin ou changer une ampoule. Pourtant des outils j’en ai à ne pas savoir quoi en faire. En revanche, j’adore parler « philosophiquement » de la fonction de la perceuse, du marteau, de la scie circulaire, de la règle ou du compas… Madame, je veux bien installer le tableau, mais je suis incapable de vous garantir la réussite…

— Je ne vous en voudrais pas, faites-le quand même.

— D’accord, à vos risques et périls.

J’étais fier de moi. Même s’il penchait un peu trop à gauche, je l’avais solidement accroché au mur. Alors que j’avais l’habitude de n’entendre que des critiques de la bouche de mes amis, avec Pénélope j’ai eu droit même aux félicitations !

*

Le lundi à neuf heures du matin, je me suis rendu au lycée. Tous les élèves étaient là. Comme le sujet du jour portait sur la pensée socratique, je me suis dit secrètement que c’était une excellente occasion pour les inviter à parler du « monde » qui, selon eux, les étouffait… Pour faciliter la circulation de la parole, je leur ai proposé de parler chacun à son tour en se présentant d’abord.

Un jeune rouquin leva aussitôt la main et demanda :

— Monsieur, nous pouvons tout dire sur ce qui nous étouffe ? Tout ? Vraiment tout ?

— Vous dites ce que vous voulez. Vous pouvez défendre vos propres idées ou contredire celles de vos camarades. Je vous rappelle que « philosopher » c’est avant tout dialoguer. La parole est à vous.

— Je suis Franck ! Monsieur, les « ringards » nous font chier, ils nous prennent la tête avec leur vérité, leurs valeurs, leurs principes et leurs conneries… Pour qui se prennent-ils ? De quel droit nous imposent-ils leurs désirs, leurs règles de vie ? C’est clair, ils nous emmerdent du matin au soir.

Pierre leva la main à son tour.

— Je suis d’accord avec Franck. Certains « grands hommes » nous parlent des valeurs de la République, de la morale, du code de bonne conduite alors qu’ils se comportent comme des voleurs. Ils feraient mieux de balayer devant leur porte avant de nous donner des leçons.

— Je suis Stéphanie. Dans le monde des adultes, il y a des bons et des mauvais. J’en connais des tas qui respirent la santé, la générosité et le respect d’autrui. Ils représentent un exemple à suivre. Je pense que le mauvais exemple vient de ceux qui s’étouffent avant d’étouffer les autres. On dit bien « qui s’étouffe, étouffe », n’est-ce pas ?

— Je suis Thomas. Je trouve l’idée de Stéphanie très intéressante. Un politique, par exemple, peut s’étouffer à cause de son désir de toute-puissance, s’il arrive à prendre le pouvoir, il aura tendance à étouffer tout le monde.

— Je suis Isabelle. Ce que dit Thomas me fait penser aussi aux parents. Quand un père impose arbitrairement sa propre loi, il étouffe son enfant. Monsieur, j’aimerais que vous nous parliez un jour de la philosophie des pères aliénants.

— Je suis Valérie. Isabelle a raison, je connais des tas de pères qui ont manqué leur propre père. Ceux-là exercent la fonction de père comme de vrais malades, ils sont étouffants.

— Je suis Sigmund. C’est vrai, je suis d’accord avec vous pour dire que nous sommes souvent victimes du dictat et de la mauvaise foi des adultes, mais je pense qu’il serait intéressant de s’interroger aussi sur nous-mêmes. Pourquoi nous nous plaignons toujours d’être étouffés par le monde extérieur ? Peut-être qu’il y a quelque chose dans notre monde intérieur qui nous étouffe autant que l’extérieur. Je me pose la question.

— Je suis Fred. Je pense que Sigmund détourne le débat, nous sommes là pour parler de ceux qui nous font chier, pas de notre monde intérieur…

Sigmund rebondit :

— Fred, je ne nie pas le « monde extérieur », je dis simplement qu’il existe peut-être en nous-mêmes quelque chose qui nous fait chier. As-tu remarqué que nous prétendons avoir toujours raison ? Fred, pourquoi les autres auraient toujours tort à nos yeux ?

— Sigmund, tu es conformiste. Arrête de faire le mouton ! Moi, j’ai mon idéal, je ne vois pas pourquoi mes parents me ravageraient les oreilles avec le leur.

— Fred, c’est peut-être plus complexe que tu ne le penses. Il faudrait savoir d’où vient la sensation d’étouffer…

— Pense ce que tu voudras, moi, ce qui m’intéresse de savoir c’est pourquoi on nous pompe l’air du matin au soir. J’en ai marre d’entendre :« Fais ceci, ne fais pas cela, tiens-toi bien, dis bonjour à la dame, respecte tes professeurs, la signalisation, les normes de la société », etc., etc. Je suis au monde pour faire ce que j’ai envie de faire.

— Ah non ! Nous ne sommes pas au monde pour faire ce qui nous chante, nous sommes au monde pour jouir de nos droits et faire notre devoir.

— Arrête, Sigmund, tu parles comme un curé ! Ça se voit que tu as été élevé dans une famille de droite…

— Je te signale que beaucoup de familles de gauche pensent comme moi.

— Les « cathos » de gauche ?

— Les athées aussi ! Fred, veux-tu que je te dise une chose ?

— Dis toujours.

— Une chose c’est le « moi idéal », une autre « l’idéal du moi ». Ce n’est pas la même chose. Demande-toi lequel des deux est le plus « étouffant » !

— Encore des « bondieuseries » ! Tu parles comme un moine… Il n’y a pas moyen de débattre avec toi.

— Je ne dis pas des « bondieuseries »… Si tu restes sur tes positions, tant pis pour toi.

Soudain, Émilie leva la main, le regard contrarié.

— Le dialogue entre Fred et Sigmund m’étouffe. Au fait, ce n’est pas un dialogue, Fred refuse de dialoguer… J’ai le sentiment qu’il a en lui quelque chose qui l’étouffe.

— Je suis Mathilde. Je partage l’avis de Sigmund. Nous critiquons les adultes pour tout et pour rien, nous ferions mieux de balayer devant notre porte. Je me demande d’où vient la sensation d’oppression que nous ressentons parfois… Qu’en penses-tu, Sigmund ?

— Je pense que cela pourrait s’expliquer par le fait que nous ne sommes pas ce que nous croyons être et que nous sommes encore ce que nous refusons d’être.

Virginie s’écria du fond de la classe :

— S’il te plaît, Sigmund, sois plus précis.

— Je voulais dire que nous croyons être des adultes à part entière alors que nous sommes partiellement des enfants.

— Je suis Jérôme. En clair, selon toi, nous voulons le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière. Mes chers camarades, voilà pourquoi tout nous fait chier !

À la suite de ces bonnes paroles, j’ai proposé d’arrêter le débat et de le poursuivre plus tard.

— Monsieur Adam, je suis Sylvain. Votre cours de philosophie est un bol d’air pour nous. S’il vous plaît, continuons les échanges.

— Sylvain, c’est gentil de ta part. Maintenant, je suis obligé de laisser la salle au professeur de l’enseignement moral et civique.

— Ah ! Non ! Il est nul ! Mon père dit que monsieur Lépine est un abruti sans foi ni loi.

— Sylvain, calme-toi, on ne parle pas comme ça d’un professeur.

— Si vous ne me croyez pas, vous n’avez qu’à demander à ses voisins…

— Je suis Mathias. Moi, j’en ai marre des « moralistes » qui ne font pas ce qu’ils disent. Ils nous prennent pour des cons.

— Je suis Albert. Moi, je ne crois plus en la justice de mon pays, elle ne fait rien contre les pervers et méprise les victimes, surtout les femmes maltraitées…

— Je suis Séverine. Albert a raison, ma sœur a porté plainte plusieurs fois contre son « ex » pour harcèlement… le harceleur court toujours. Ma sœur dit qu’il ne faut plus compter sur les juges.