Agnès - Pierre Léoutre - E-Book

Agnès E-Book

Pierre Léoutre

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Beschreibung

Une Love Story dans la belle ville gersoise de Lectoure.

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Seitenzahl: 28

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Pour toi, Agnès.

À Lectoure.

J’ai le cœur vide et le cerveau plein. Depuis que j’ai appris la nouvelle de ta mort, je continue à avancer à grands pas, le temps continue son œuvre mais le décor s’est figé. Une perte totale de sens et de sensations, une incompréhension absolue et un déni d’une réalité trop douloureuse. L’ami Sénèque me fait la tête et me murmure à l’oreille : « Les douleurs légères s'expriment ; les grandes douleurs sont muettes. » Moi, je ne sais pas où j’en suis : je me déplace dans le cadre de notre amour de jeunesse, un grand amour qui aura marqué toute mon existence alors qu’il m’a été annoncé, il y a plusieurs mois déjà, que tu n’es plus de ce monde. Incroyable nouvelle que je me refuse à accepter. Si c’est vrai, je suis profondément malheureux et complètement perdu ; c’est un véritable effondrement de ce qui constitue le sens de ma vie. Et en même temps, comme je nie avec la plus grande énergie la réalité de ton décès, il m’est impossible, fort logiquement, d’être triste. C’est une situation très difficile et compliquée.

Bien obligé de continuer à contempler les paysages et les rues de Lectoure, la ville gersoise où nous nous sommes connus et aimés quarante ans plus tôt, j’ai ressenti brutalement des impressions étranges, un détachement indolore et absolu, comme si cette ville n’avait plus aucun intérêt à mes yeux. Et c’est vrai. À quoi bon ? J’ai renoncé depuis belle lurette à t’attendre, j’ai compris, certes avec difficulté, que la renaissance de cet amour était impossible ; mais il restait quelque chose de vivant, d’énergique, un espoir plaisant et des souvenirs tendres. Tout ceci a explosé à l’annonce de ta mort.

Je vis maintenant avec le néant. Je ne te cache pas que j’ai eu aussi l’envie de mourir, non pas pour te rejoindre car je ne crois pas au paradis, mais parce que ta place dans ma vie était immense. Vertige de ta disparition, peine profonde de ne plus jamais pouvoir te revoir.

Pendant des mois, je me suis dit qu’il fallait que je t’écrive une dernière lettre. Mais j’en étais incapable. Trop difficile, trop douloureux. Peu après ta disparition, j’ai fait un rêve étrange, nous nous retrouvions dans la salle des pas perdus de la mairie de Lectoure, là où autrefois tu dansais sur la musique de Keith Jarrett, là où je suis véritablement et définitivement tombé amoureux de toi. Ce rêve était incroyable, la situation était très belle, très troublante, tu étais joyeuse et charmante, tu riais, nos retrouvailles étaient particulièrement réussies. Un rêve sensible de bonheur intense, en toute fraîcheur pure et légère, à tel point que le matin, en me réveillant, je décidai que ce rêve serait désormais ma seule réalité.

Cette décision était difficile et n’a pas produit tous les effets escomptés ; par exemple, la nouvelle vacuité du décor lectourois : la petite ville gersoise restait charmante et attachante mais ce n’était plus mon univers. Je pouvais y être ou en partir, cela n’avait plus la moindre importance. Lectoure sans toi, ce n’est rien à mes yeux.